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Intégration régionale et croissance économique de la zone CEEAC, étude théorique et empirique de 1995 àƒÂ 2018par Jacques SHUSU Université pédagogique nationale - Licence 2020 |
II.1.4. LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES DANS LA CEEACLa libre circulation des personnes est l'une des dimensions de l'intégration régionale. Elle consiste à supprimer les barrières aux frontières pour permettre aux citoyens des pays membres CER de se déplacer librement et de s'établir dans n'importe quel pays de la région intégrée. Les autorités de chaque pays de la communauté sont donc invitées à éliminer toutes les restrictions et toutes les discriminations qui empêchent certaines populations de se déplacer d'un pays à l'autre dans une communauté. L'importance d'une libre circulation des personnes réside dans le fait qu'elle favorise l'échange culturel et la diversité dans une région. L'ensemble de ces facteurs peut renforcer le processus d'intégration amorcé. En effet, les mouvements migratoires peuvent être des facteurs d'intégration. Quels que soient les aléas politiques qui les accompagnent, ils contribuent à des brassages favorables aux processus d'intégration [Abdou Diouf, 2006]. 1. La libre circulation des personnes La lecture des textes nous apprend qu'en Afrique centrale plusieurs protocoles sur la libre circulation des personnes ont été élaborés, dans l'espace CEEAC. Dans l'espace CEEAC, la libre circulation des personnes a toujours été au coeur des préoccupations des dirigeants. En effet, les articles 04 et 40 du Traité d'octobre 1983 instituant la création de la CEEAC faisaient déjà état des principaux protocoles encourageant la libre circulation des citoyens des pays membres de la CEEAC dans tout l'espace intégré. D'après l'article 40 du Traité de la CEEAC, les citoyens des États de la CEEAC sont considérés comme des ressortissants de la Communauté [Christian-Yann, 2015]. Ceci dit, le protocole de libre circulation donne le droit aux citoyens de la région de se déplacer librement, et ce, en tout temps dans tous les pays de la CEEAC. En outre, les citoyens ont aussi le droit de s'établir (droit de résidence) dans l'un des pays de la région et d'y mener des activités professionnelles légales, ainsi que la possibilité de créer et de gérer une entreprise conformément à la charte des investissements du pays hôte. Tableau 13.Les protocoles et les règlements de la libre circulation en Afrique centrale
Source : Commission économique pour l'Afrique (CEA). État de l'intégration régionale en Afrique V: vers une zone de libre-échange continentale africaine. Addis-Abeba, Éthiopie. (Rapport de juin 2012).Récupéré de https://repository.uneca.org/handle/l0855/23351 Dans la CEEAC : pour faciliter l'application de la décision de 199014(*), les chefs d'État ont adopté, à Malabo, le 17 juin 2002, deux grandes décisions : La Décision n° 02, qui prévoit l'obligation d'être en possession d'un carnet et d'une carte de libre circulation comme documents de voyage pour certaines catégories de ressortissants des États membres, à l'intérieur de la CEEAC. Ces documents ne sont pas encore en circulation ; La Décision n°03, qui prévoit la création de couloirs CEEAC dans les aéroports, les ports et les postes frontaliers des États membres. Pour rappel, les couloirs CEEAC dans les aéroports ne sont pas encore créés dans tous les pays et là où ils existent, ils ne sont pas encore opérationnels, et les ressortissants de la communauté ont toujours besoin de visas pour voyager d'un État membre à un autre [Yanic Kenhoung, 2014]. 2. Les indicateurs de libre circulation des personnes · L'analyse des résultats de l'indice d'intégration régionale en Afrique (IIRA) La dimension libre circulation des personnes de l'IIRA nous renseigne sur la fluiditédes mouvements des personnes dans l'espace CEEAC. En d'autrestermes, cet indice nous permet de savoir si la liberté de circulerest un fait accompli. L'IIRA nous informe précisément sur les contraintes des visasdans les régions intégrées et l'évolution du processus de ratification, par les Étatsconcernés, des protocoles régionaux sur la libre circulation des personnes. Par contre,l'IIRA ne nous renseigne pas sur les questions relatives au droit de s'établir de manière permanente, de faire des affaires ou de voter dans le pays d'accueil. Tableau 14.Les scores des États dans le domaine de la libre circulation des personnes
Source : Commission économique pour l'Afrique · Autre indicateur : l'indice d'ouverture relatif aux visas et l'indice relatif au passeport (Passport Index) a. L'indice d'ouverture relatif aux visas en Afrique Cet indice mesure l'ouverture des pays africains en matière de visas15(*) .Il permet de savoir quels sont les pays qui facilitent les voyages des citoyens des autres pays et comment. C'est-à-dire si, pour se rendre dans tel pays, les voyageurs sont dispensés de l'obligation de détenir un quelconque visa ou s'ils peuvent obtenir un visa à leur arrivée dans le pays d'accueil, ou encore s'ils doivent obtenir un visa avant d'effectuer le voyage. Tableau 15.L'indice d'ouverture relatif aux visas (Visa Openness Index)
Source : Visa openness index, Site officiel https://www.visaopenness.org/ D'après les résultats de l'indice d'ouverture relatif aux visas, disponibles dans le tableau ci-après, nous constatons que les pays de la zone CEEAC sont moins ouverts. Dans la liste16(*) des vingt pays africains les plus ouverts relativement aux visas, l'on retrouve seulement un pays membre de la CEEAC (le Rwanda, qui occupe la 9ème place dans la liste des 20 premiers). Jusqu'en 2015, tous les Africains avaient besoin d'un visa pour se rendre à Sao Tomé-et-Principe [BAD et UA, 2017] ; il a fallu attendre 2016 pour que les citoyens de 13 pays africains soient dispensés de l'obligation d'obtenir des visas. Toujours d'après les résultats de 2016 de l'Indice d'ouverture relatif aux visas, la situation est chaotique au Gabon, en Angola et en Guinée équatoriale. En tous les cas, il convient de noter que les retards des pays de la CEEAC dans le processus de libre circulation des personnes sont réels. Tableau 16.Les scores des pays de la CEEAC et leur classement au chapitre de leur ouverture relative aux visas en Afrique en 2016
Source : Banque africaine de développement (BAD) et Union africaine (UA). Report 2017. Op.Cit. Au regard des résultats (scores) de l'Indice d'ouverture relatif aux visas en Afrique, nous constatons qu'en Afrique centrale, à l'exception du Rwanda qui occupe la neuvième place, tous les autres États de la CEEAC enregistrent de faibles scores à cet égard et occupent les dernières places dans le classement. Le nombre de visas requis pour se rendre dans un pays de la CEEAC est élevé. b. L'indice relatif au passeport (Passport Index) Cet indice nous renseigne sur un classement des passeports les plus utiles au monde : c'est-à-dire les passeports qui permettent aux citoyens d'un État de voyager facilement dans plusieurs pays étrangers. Par ailleurs, !'Indice relatif au passeport (Passport Index17(*)) nous informe aussi sur les pays dans lesquels un visa est requis avant de s'y rendre. Cet indice a été créé par la compagnie financière Arton Capital18(*). Le tableau ci-après, nous renseigne sur les différents pays de la CEEAC qui exigent encore des visas pour les citoyens des autres États de la CEEAC. D'après les résultats de Passport Index ou Indice de passeport, l'Angola est le pays le plus fermé de la région à cet égard. En fait, les citoyens de huit pays de la CEEAC ont encore besoin d'un visa avant de se rendre en Angola. Par ailleurs, le Burundi, la RDC et le Sao Tomé-et-Principe exigent encore des visas pour les citoyens de sept pays de la CEEAC. Ainsi, dans toute la région de l'Afrique centrale, d'après les résultats de Passport Index ou Indice de passeport, nous constatons que la libre circulation n'est pas encore une réalité entre les pays de la CEEAC. Tableau 17.La matrice des visas d'un pays de départ (X) vers un pays d'arrivée (Y) dans la zone CEEAC
Source : auteur grâce aux informations de Passport Index 19(*) Les résultats de l'Indice d'ouverture relatif aux visas (Visa Openness Index) en Afrique (2016) et ceux de l'Indice relatif aux passeports (Passport Index) confirment les premières analyses faites grâce à l'IIRA. En fait, en Afrique centrale (CEEAC) les pays sont moins ouverts (région la plus fermée). * 14Décision N°03/CCEG/VI/90, adoptée à Kigali le 26 janvier 1990. * 15Un VISA est un endossement (par le biais d'un certificat ou d'un cachet dans un document de voyage) indiquant qu'un visiteur est autorisé à entrer dans le pays pour une durée spécifique et pour des activités spécifiques. Voir Visa Openness index. Rapport sur l'ouverture des visas pour l'Afrique. Récupéré de https://www.visaopenness.org/ * 16Visa Openness iiidex. Résultats 2016 : 20 pays ayant obtenu le plus de scores. Récupéré le 29 décembre 2020 de https://www.visaopenness.org/our-findings/top-20-scoring-countries/ * 17Passport index. Explorez le monde des passeports par pays. Récupéré le 29 juillet 2018 de https://www.passportindex.ond * 18Site officiel : https://www.artoncapital.com/arton-capital/ * 19Passport index. Explorez le monde des passeports par pays. Récupéré le 29 juillet 2018 de https://www.passportindex.org/ |
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