2.2. Figures de
l'influence de l'Etat dans la gestion et le fonctionnement de Congo
Airways.
L'Etat joue plusieurs rôles qui ont été
souvent confondus dans l'organisation de Congo Airways. L'on observe que la
confusion des fonctions de l'Etat s'est faite le plus souvent au
détriment de la fonction de l'Etat actionnaire reléguée au
second plan. Ignorer donc les fonctions d'actionnaire serait, transformer Congo
Airways en une excroissance de l'administration publique où l'Etat reste
détenteur d'importantes prérogatives. A cet égard, l'Etat
s'est octroyé des privilèges chez Congo Airways au
détriment des textes organisant les sociétés commerciales
et, son incidence oblige de proposition de solution qu'il faille appliquer.
2.2.1.
Privilèges que l'Etat s'octroie chez Congo Airways.
Dès après la zaïrianisation, BOYCKO, et al.
(1996) font remarquer que les entreprises publiques se sont
avérées hautement inefficaces, principalement parce qu'elles
conduisent des stratégies destinées à satisfaire les
objectifs politiques des hommes politiques qui les contrôlent.C'est
pourquoi, COZIAN, et al. (2008), mentionnent, avec une touche d'ironie,
« (...) les institutions sont une chose (...) et la pratique des
hommes politiques en est une autre. Aussi bien, tant que l'État
détiendra des participations, même minoritaires dans des
entreprises, on peut craindre que ces derniers soient tenté de peser sur
le destin de ces entreprises ». A ce sujet, nous pensons
également que l'exercice par l'État de son rôle
d'actionnaire dans une société où il détient une
portion du capital social reste intrinsèquement compliqué par des
privilèges qu'il s'octroie dans la vie de celle-ci.
Contrairement à un gestionnaire d'actifs privé,
dont l'objectif principal, sinon unique, est la valorisation de son patrimoine
en réalisant à l'occasion des bénéfices,
l'État exerce quant en ce qui le concerne, une multiplicité de
rôles, dotés chacun d'une légitimité propre :
l'État actionnaire coexiste avec l'État porteur de politiques
publiques et prescripteur de missions de service public, cela sous-tend la
puissance publique.
Pour DENIZEAU (2004, p. 5) l'idée de puissance publique
représente le pouvoir de commandement unilatéral qui permet
à l'Etat d'imposer ses décisions aux sujets de droit et d'en
obtenir, le cas échéant, l'exécution par la contrainte.
Cette notion est, en réalité, inadaptée dans la
sphère privée des affaires, encore moins à être
utilisée comme attribut d'un actionnaire. Pourtant l'on constate que
l'expression de la puissance publique est perceptible dans le comportement de
l'Etat actionnaire ; d'où l'intérêt de chercher à
identifier l'expression de la puissance publique dans la gestion de Congo
Airways avant de voir qu'elle est incarnée par les tutelles, ce qui rend
difficile la protection de l'intérêt social face à
l'Etat.
2.2.1.1. La nomination des dirigeants sociaux de Congo
Airways.
Tel que décrit ci-dessus, l'on observe que la puissance
publique n'est pas inscrite dans l'AUSCGIE. Mais à observer de
près, l'on retrouve ses traces dans l'article 1er de
l'AUSCGIE qui l'évoque de façon lapidaire, en parlant de «
l'Etat » ou de « la personne morale de droit public ». Alors
même qu'elle n'est pas inscrite dans l'Acte uniforme, il est
indéniable qu'elle est une notion fondamentale et irréductible
qui innerve le comportement de l'Etat dans l'entreprise publique. Elle irrigue
par exemple, l'ensemble des fonctions dévolues aux organes sociaux de la
société notamment lorsqu'il s'agit de nommer les dirigeant
sociaux pendant que le droit communautaire complété par les
statuts de Congo Airways (in speciecasu)est clair là-dessus.
2.2.1.1.1. Selon l'esprit et la volonté du
législateur de l'OHADA
Pour ce qui est des administrateurs, l'article 419 prescrit
que « les premiers administrateurs sont désignés
par les statuts ou, le cas échéant, par l'assemblée
générale constitutive. En cours de vie sociale, les
administrateurs sont désignés par l'assemblée
générale ordinaire. Toutefois, en cas de fusion,
l'assemblée générale extraordinaire peut procéder
à la nomination de nouveaux administrateurs. Toute nomination intervenue
en violation des dispositions du présent article est
nulle ».
Il apert des dispositions de cet article que les
administrateurs sont désignés par les actionnaires réunis
en assemblée générale. Toutefois, l'Acte uniforme autorise
le Conseil d'Administration de coopter les administrateurs lorsque leur nombre
revenait être en dessous seuil statutaire entre les deux
assemblées habilitées à en désigner d'autres. Il
sied de noter que cette compétence du Conseil d'administration pour la
désignation des administrateurs n'est que provisoire parce que sa
décision devra être ratifiée par l'assemblée
générale des actionnaires.
L'institutionnalisation de la fonction du Président du
Conseil d'administration et du Directeur Général constitue la
spécificité de la société anonyme avec conseil
d'administration. Ces deux fonctions sont exercées distinctement par
deux personnes qui ne peuvent être que physiques.
Le Président du conseil d'administration est
désigné conformément à l'article 477 qui dispose en
substance que « le conseil d'administration désigne parmi
ses membres un président qui doit être une personne
physique ».
Dans le cas de Congo Airways où la majorité des
administrateurs sont des personnes morales représentés par des
personnes physiques, nous pouvons déduire que ces derniers ne pourront
postuler au poste du président du conseil d'administration. De la
même manière, les représentants des personnes morales
administrateurs ne pourront non plus être désignés
président comme s'ils avaient un mandant à titre personnel (ils
sont justes représentants et non administrateurs pour leur propre
compte).
Le président du conseil d'administration doit
être administrateur intuitu personae. Il ne peut être
désigné que par ses paires (dans le cadre de Congo Airways, par
les représentants de personnes morales administrateurs) et non par un
autre organe tant interne qu'externe à la société, la
jurisprudence est éloquente à ce sujet (CA Abidjan, Ch, Civ. et
com., 3è ch. B, Arrêt civil n° 152 du 23 févr.
2007 : Ohadata J-08-29).
Quant à la nomination du Directeur
général de la société anonyme avec conseil
d'administration, les dispositions de l'alinéa 1erde
l'article 485 de l'AUSCGIE renseignent qu'elle est faite comme pour le
président du conseil d'administration, par les membres du Conseil
d'Administration. La personne du Directeur général doit
être nommé parmi les membres qui composent le Conseil
d'administration ou elle peut être une personne extérieure
à cet organe. Dans ce sens, le Directeur général dans une
société anonyme avec conseil d'administration peut ne pas
être administrateur, ni même actionnaire.Aussi, dans un sens comme
dans un autre, le directeur général doit être
impérativement une personne physique.
En ce qui concerne le Directeur général adjoint
qui doit aussi être une personne physique, il reçoit par contre le
mandat du conseil d'administration sur proposition du directeur
général conformément à l'article 485 alinéa
2 de l'AUSCGIE. Cette compétence exclusive du conseil d'administration
ne peut être partagé ni par un organe de la société
ni par les actionnaires de la celle-ci, telle est la position de la haute Cour
soutenue dans son arrêt de cassation CCJA n° 092/2012 du 20
décembre 2012.
En considération de ce qui précède,
lorsque l'AUSCGIE parle de la « désignation »
lorsqu'il s'agit des dirigeants sociaux, la procédure employée
dans ces différents organes revêtus de cette compétence
reste l'élection qui passe bien entendu par un vote. Nous l'avons dit
dans cette étude, la société anonyme fonctionne comme une
vraie démocratie en politique publique.
D'un autre revers, la révocation des dirigeants sociaux
suit le principe de parallélisme de forme et de compétence.
Ainsi, le président du conseil d'administration peut être
révoqué à tout moment telle que renseigné à
l'article 484 de l'AUSCGIE par le conseil d'administration. Il en est de
même du directeur général mais en ce qui le concerne si la
révocation est intervenue sans juste motif, elle peut donner lieu
à des dommages et intérêts aux prescrits de l'article 492
de l'AUSCGIE.Le directeur général adjoint est quant à lui
révoqué sur proposition du directeur général par le
conseil d'administration.
C'est vrai qu'à tout moment les dirigeant sociaux sont
révocables, ce qui donne la figure de la révocation ad nutum
or, lorsque le législateur de l'OHADA ajoute que la
révocation décidée sans juste motif peut donner lieu
à des dommages et intérêts, cela signifie que nous sommes
face d'une révocation contrôlée et une telle
décision peut être annulée si l'on démontre qu'elle
est entachée d'irrégularité graves et évidentes qui
la rend assimilable à une voie de fait.
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