20
CHAPITRE II : LES DETERMINANTS GEOGRAPHIQUES DES
PRODUCTIONS
Les échanges entre deux régions sont fonction
des besoins des populations ainsi que des potentialités de ces
régions. Notre secteur d'étude couvre la ville de Cotonou et les
cinq communes de la basse vallée de l'Ouémé à
savoir : Bonou, Adjohoun, Dangbo, Aguégués et Sô-Ava.
2.1. Les déterminants géographiques de
la basse vallée de l'Ouémé
Les déterminants de la basse vallée de
l'Ouémé sont d'abord d'ordre naturel. Située entre
6°25' et 6°80' de latitude nord et entre 2°25' et 2°40' de
longitude est, cette région couvre une superficie de 1236
km2. Les conditions climatiques favorables, la densité du
réseau hydrographique et la fertilité des sols sont des
éléments déterminants qui ont facilité
l'installation des populations. Ces populations ont donc
développé divers types d'activités économiques en
fonction de leurs besoins.
2.1.1. Les déterminants physiques
2.1.1.1. Le climat et l'hydrographie
A l'instar des régions du sud Bénin, la basse
vallée de l'Ouémé bénéficie d'un climat
subéquatorial à quatre saisons dont deux saisons sèches et
deux saisons de pluie.
La température moyenne journalière est assez
homogène sur l'ensemble de la région. Elle est de l'ordre de
23°C et les valeurs extrêmes s'observent au cours des grandes
saisons sèches. Les précipitations sont presque identiques sur
toute la région. Ainsi, les hauteurs moyennes annuelles de pluie sont de
1250 mm aux Aguégués, à Sô-Ava et à Dangbo et
1177 mm pour Adjohoun. Les quantités les plus élevées ont
été obtenues pour le mois de juin et la durée de la saison
des pluies est d'environ 6 à 7 mois pour la région. Les mois les
plus
21
arrosés sont les mois d'avril à juillet, de
septembre et d'octobre. En grande saison des pluies (avril à
mi-juillet), les deux-tiers environ de la pluie précipitent alors que la
seconde saison des pluies (mi-août à octobre) n'en reçoit
qu'un quart ; le reste des pluies enregistrées se répartit sur
les mois de la saison sèche (décembre à mars).
L'atmosphère dans la région est en général
caractérisée par une humidité permanente
élevée qui connaît une légère baisse en
décembre et en janvier à cause de l'harmattan.
D'après ces données, on devrait s'attendre
à obtenir la crue dans le delta de l'Ouémé au mois de juin
où les pluies atteignent leur maximum, mais ce n'est pas le cas. Les
crues dans le delta interviennent aux mois d'août à octobre, avec
un pic en septembre. A ce sujet, il est important de rappeler que le delta est
sous l'influence du climat de la région du centre du pays, zone de
transition avec le nord où l'on observe une saison des pluies
centrée sur août. C'est ce qui explique les crues dans le delta
durant cette période. Cette crue est souvent une période
désagréable pour les activités agricoles.
Cependant, les potentialités de la basse vallée
de l'Ouémé sont liées à son réseau
hydrographique dont le plus important est le fleuve Ouémé. En
effet, l'Ouémé est le plus long fleuve du Bénin aussi bien
par sa longueur (510 km) que par la superficie de son bassin versant (4500 km)
(Pélissier P., 1963). Prenant sa source sur les monts Tanéka, il
reçoit des affluents importants tels que l'Okpara (200 km) sur la rive
gauche et le Zou (150 km) sur la rive droite. C'est un cours d'eau dont le
régime hydrologique est marqué de variations notables au cours de
l'année. L'Ouémé se jette dans l'océan Atlantique
par le lac nokoué qui communique avec la mer par le chenal de Cotonou et
la lagune de Porto-Novo en liaison avec le chenal de Lagos au Nigeria. Cette
liaison fluvio-lacustre constitue un support d'échange entre la basse
vallée et Cotonou.
De ce réseau principal dérivent plusieurs
autres affluents dont :
22
- la rivière Sô prend sa
naissance dans la dépression de la Lama, draine la partie sud du plateau
d'Abomey, se poursuit dans les marais du lac Hlan et coule parallèlement
à l'Ouémé dont elle reçoit les eaux de
débordement.
- la rivière Sissè d'une
longueur de 7,5 km environ, prend sa source à Sissè-kpa,
localité située à 1 km environ du nord
d'Azowlissè.
- la rivière Tovè longue de 5
km environ, elle prend sa source dans le village de Sôro au nord-est de
Goutin.
- le lac Hounhoun est situé à
0,5 km à l'ouest d'Adjohoun en bordure du plateau sur la rive droite de
l'Ouémé.
- le lac Hondjè est situé
près du village d'Aglangbin à 7 km environ à l'ouest
d'Affamè.
- le lac Dazon est un étang
localisé à l'ouest d'Azowlissé.
Ces différents cours et plans d'eau constituent des
moyens de communication et d'échange entre les populations de la basse
vallée puisque le réseau routier est dégradé.
2.1.1.2. La morphologie, les sols et la
végétation
La basse vallée de l'Ouémé
présente deux unités morphologiques très importantes : le
plateau et la basse plaine inondable.
Le plateau : c'est une formation latéritique dure et
compacte appelée terre de barre. (Pélissier P., 1963). Les eaux
d'infiltration réapparaissent en de nombreuses sources au pied du
plateau. Ces résurgences offrent des possibilités de pêche
et donnent naissance à des marécages permanents.
La basse plaine inondable : les crues de
l'Ouémé qui s'étalent chaque année et
déposent leur charge d'alluvions sont responsables du modelé de
la vallée et de la nature des sols qui la recouvrent. En effet, le
fleuve en débordant se débarrasse sur ses berges des alluvions
les plus lourdes et les éléments les plus fins sont
déposés aux limites de la zone d'inondation. De l'amont vers
l'aval, les dépôts sont d'autant plus fins que la pente de la
plaine est plus faible
23
d'est en ouest. Ce mécanisme de dépôt des
charges solides est à l'origine de la formation de bourrelets de berge
de part et d'autre du lit mineur du fleuve.
Les sols de la vallée sont liés à sa
morphologie. Ainsi, on distingue les sols du plateau et ceux de la plaine
inondable.
Les premiers sont des sols ferrallitiques
caractérisés par une dominance des actions physicochimiques et
une altération des minéraux de la roche mère (Le
Barbé et al., 1993). Ce sont des sols assez homogènes et
de couleur rouge. Les plaines inondables abritent des sols hydromorphes issus
d'un engorgement temporaire ou permanent. C'est un paysage de plaine
inachevé en perpétuel remblaiement (Mondjannagni A., 1977). Les
formations végétales sont faites de prairies, de savane herbeuse,
de marécages à raphia et de mangrove à
Rhizophora racemosa et Avicema africana.
Il s'agit donc d'espèces utiles dans la vie des
populations. Ainsi par exemple, le Pterocarpus
santalinoide, le Dalium guineensis
servent à la fabrication des outils de pèche.
2.1.2. Les déterminants humains
Le peuplement du Bas-Ouémé a été
marqué par des vicissitudes qui ont provoqué brassage,
oppositions et migrations d'où sont nés des regroupements
régionaux (Pélissier P., 1963). Ainsi, les populations qui vivent
dans la basse vallée de l'Ouémé sont venues de plusieurs
axes et donc d'aires culturelles variées. Cela justifie la
diversité ethnique que l'on retrouve dans cette région. Les
ethnies rencontrées sont :
-les Fanvinu, les Tosonu, les
Glonu, toutes issues de l'aire culturelle Yoruba. -les
Hunhw°nu, les Xwedanu, les
Hwedo-sadonu, les Jigbenu et les
Wem°nu venues de l'axe Ouest-Est et donc de
l'aire culturelle Adja-Tado. Les véritables Wem°nu sont
venues du plateau d'Abomey. Depuis l'installation de ces groupes, l'effectif
des habitants de la vallée n'a cessé d'augmenter. En effet,
l'analyse des données des Recensements Généraux de la
Population et de l'Habitation montre une tendance à la hausse. De 216077
habitants en 1992, la
population de la vallée est passée à 255
131 habitants en 2002 ; soit une augmentation de 39 054 habitants en une
période de10 ans. Cette population majoritairement jeune assure une
disponibilité de main d'oeuvre pour le développement des
activités économiques. La figure suivante présente la
structure de cette population.
Légende 1-0 à 5 ans
2- 6 à 11 ans
4- 12 à 14 ans
6- 15 à 59 ans
7- 60 ans et plus
24
Figure 2 : Structure des populations de la basse
vallée de l'Ouémé
L'analyse de cette figure montre que 45% de la population de la
basse vallée de l'Ouémé ont un âge compris entre 15
et 59 ans. Il s'agit donc d'une population assez jeune qui pourra apporter une
dynamique aux activités de production d'une part et d'échange
d'autres parts.
Compte tenu des réalités physiques et
socio-économiques du milieu, on distingue plusieurs formes d'habitats.
Il s'agit des habitats sur pilotis avec des essences végétales ou
avec un sous bassement fait en terre de barre ou en argile afin de relever le
niveau du sol. Ce sont des habitats groupés avec une forte
densité humaine. Sur le plateau, les villages sont dispersés.
Par ailleurs, les atouts naturels et la proximité de
grands centres urbains notamment Cotonou permettent aux populations d'exercer
diverses activités économiques.
25
2.1.4.2. Les déterminants
économiques
Ils sont liés aux potentialités du milieu.
Ainsi, les principales activités du milieu sont : l'agriculture, la
pêche, l'élevage, la chasse, la transformation et la vente des
produits.
L'agriculture est la principale activité et on compte
27 020 ménages agricoles sur un total de 52 660 ménages (INSAE,
2002). Elle est dépendante des facteurs climatiques, de la morphologie
et du régime du fleuve Ouémé. L'agriculture se pratique
sur le plateau, sur le bourrelet de berge et sur la plaine inondable. Ainsi,
les atouts de la vallée permettent une activité culturale
continue durant toute l'année et les récoltes varient d'une
période culturale à une autre. On distingue donc la grande saison
culturale qui va de mi-mars à fin juillet, la petite saison culturale
sur le plateau de septembre à mi-novembre et la culture de contre saison
dans la vallée de décembre à début mars.
Les cultures varient en fonction de l'espace mis en valeur.
Ainsi, les principales cultures du plateau sont : le maïs, le haricot, la
patate douce, le manioc, et l'arachide. Par contre, les cultures
maraîchères (piment, tomate, gombo), le niébé, et le
riz sont les produits les plus cultivés dans les zones inondables. Les
techniques culturales sont le semis à plat et la culture sur billons
pour les plantes à racines et tubercules.
Les cours et plans d'eau de la vallée sont
exploités à travers les activités de pêche. Ainsi,
cette activité occupe une place importante dans le mode de vie des
populations. La pêche se pratique en toute saison avec une forte
production en période de crue. Les outils et techniques utilisés
sont : les filets, les nasses, les hameçons, les trous à poisson,
les acadja.
Ces deux activités fournissent la majeure partie des
produits qui alimentent les échanges avec Cotonou. Cependant, la chasse
et l'élevage sont peu développés. Ces deux
dernières activités sont pratiquées par certains paysans
comme activité secondaire. Notons aussi que la transformation des
produits agricoles et halieutiques est faite par les femmes.
26
2.2. Les déterminants géographiques de la
ville de Cotonou
Figure 3 : Carte de situation géographique de la
ville de Cotonou
2.2.1. Les déterminants physiques de la
ville
Située entre 6°20' et 6°23' de latitude nord
et entre 2°22' et 2°28' de longitude est, la ville de Cotonou est
limitée au nord par le lac Nokoué et au sud par l'océan
atlantique. A l'est et à 6 km du chenal, elle est limitée par la
commune de Sèmè-Kpodji et à 10 km à l'ouest par la
commune d'Abomey-Calavi.
D'une superficie d'environ 79 km2, le relief de la
ville est assez homogène et les côtes oxcillent entre +0,4m et
+6,5m (IGN, 2001). Le sol est sableux avec par endroit des composantes
argileuses ou organiques. Ainsi, Cotonou est bâti sur un site sablonneux
qui caractérise le littoral béninois (N'bessa B., 1997).
Du point de vue pluviométrique, Cotonou obéit
aux mêmes lois climatiques que tout le sud du Bénin. Il s'agit
d'un système bimodal comme le montre la figure 4.
Pluviométrie
400 350 300 250 200 150 100
50
0
|
|
|
|
|
Hauteurs de pluie (mm)
|
|
J F M A M J J A SON D
Mois
27
Figure 4 : Moyennes mensuelles des
pluviométries à Cotonou en 2007
Source : Données ASECNA
On distingue en effet deux saisons de pluies et deux saisons
sèches réparties de la manière suivante :
- une grande saison des pluies de mi-mars à mi-juillet,
- une petite saison sèche de mi-juillet à
mi-septembre,
- une petite saison des pluies de mi-septembre à
mi-novembre,
- une grande saison sèche de mi-novembre à
mi-mars.
Les précipitations ont lieu principalement entre mars
et juillet avec un maximum en juin (340 mm).
Les températures moyennes mensuelles varient entre 27
et 31 degrés centigrades. Les écarts entre le mois le plus chaud
et le mois le moins chaud ne dépassent pas 3,2 degrés. Les mois
de Février à Avril sont les mois les plus chauds et les mois de
Juillet à Septembre sont les mois les plus frais. Ainsi,
l'humidité relative est assez importante. La moyenne annuelle est de 75
% pour les minis et de 92 % pour les maxi.
L'hydrographie est constituée du lac Nokoué qui
est relié à l'océan Atlantique par un chenal lagunaire de
4,5 km de longueur et d'environ 250 mètres de largeur. Ce système
lagunaire est alimenté par le fleuve Ouémé et la
28
rivière Sô dont les eaux rehaussent le niveau du
lac pendant les grandes crues. Malgré les contraintes
géomorphologiques de la ville, celle-ci abrite une forte population
exerçant diverses activités économiques.
2.2.2. Les déterminants humains
A l'instar des grandes villes africaines, Cotonou
connaît une croissance démographique très remarquable. En
effet, au cours des années 1970, la série de nationalisation et
la création de sociétés d'Etat ont fait convoyer sur la
ville de Cotonou de nouveaux travailleurs (Mondjannagni A., 1977). Ainsi, la
concentration des investissements économiques et les opportunités
d'emploi qui en résultent ont entraîné une croissance
démographique de la ville. Cette évolution s'est maintenue
jusqu'à ce jour et la population passe de 536 827 habitants en 1992
à 665 100 habitants en 2002 (INSAE, 2002) ; soit une augmentation de 128
273 habitants en une période de 10 ans. Son poids démographique
est de 9,82 % de la population du pays avec une densité de
8419 habitants au km2.
Grand centre urbain, Cotonou abrite une population aux
origines diverses. Les statistiques de l'INSAE montrent que les ethnies les
plus représentatives sont : les Fon (32,9 %), les Goun (15,2 %), les
Mina (5,9 %) et les Yoruba (5,5%).
Du point de vue infrastructures socio-communautaires, la ville
est la plus équipée à cause de son statut de capitale
économique du Bénin. Ces caractéristiques permettent aux
populations de mener plusieurs types d'activités économiques.
2.2.3. Les déterminants
économiques
Dans la ville de Cotonou, on note une prédominance des
activités des secteurs secondaire et tertiaire. Quant au secteur
primaire, il est peu développé et
29
se limite au jardinage, à l'élevage et notamment
à la pêche qu'elle soit maritime ou continentale.
Le secteur secondaire est marqué par une
diversité des industries manufacturières et des activités
artisanales. Cotonou abrite le plus grand nombre d'usines au plan national ; ce
qui constitue un facteur d'échange avec les zones rurales qui sont de
grandes zones de productions de matières premières.
Le secteur tertiaire est dominé par le commerce. Cette
activité est facilitée par l'existence de diverses
infrastructures notamment les marchés, l'aéroport et le port qui
obligent les commerçants nationaux ou étrangers à se
ravitailler en produits manufacturés ou autres produits importés.
Ainsi, les activités commerciales sont orientées aussi bien vers
la consommation intérieure que vers l'importation et l'exportation.
Enfin, les infrastructures hôtelières de Cotonou
constituent des lieux d'ébergement des touristes en partance pour la
vallée.
Dans l'ensemble, la basse vallée de
l'Ouémé et Cotonou ont des traits géographiques communs.
Situées dans le Bas-Bénin, ces deux régions
bénéficient du même climat subéquatorial avec
quelques nuances. Les atouts économiques varient d'une région
à une autre de même que les besoins des populations. Ces facteurs
constituent les bases des échanges et donc de son dynamisme.
30
LES FACTEURS DE LA DYNAMIQUE ET LA TYPOLOGIE
DES ECHANGES ENTRE LA BASSE VALLEE DE L'OUEME ET COTONOU
31
|