CHAPITRE III
FONCTIONNEMENT DU FLUX DES ECHANGES ENTRE LES MARCHES
RURAUX
Ce chapitre après avoir présenté les
types d'acteurs des marchés, étudie la variation du prix des
produits ainsi que les unités de mesure puis analyse le flux des
échanges.
3.1- Types d'acteurs rencontrés dans les
marchés
Les acteurs des marchés ruraux d'Allada sont multiples
et très variés; ils sont représentés par les deux
sexes. Dans tous les marchés, la clientèle féminine est
plus représentée parmi les vendeurs que parmi les acheteurs et
les prestataires de service. L'étude de cette clientèle de par
son origine et le rôle qu'elle joue permet d'apprécier son
influence dans le fonctionnement et le dynamisme des différents
marchés ruraux ainsi que dans le développement
socio-économique de la commune.
3.1.1- Les vendeurs
Ils sont les premiers acteurs des marchés, seule leur
présence permet l'arrivée des autres usagers. Les vendeurs des
marchés ruraux d'Allada vendent divers produits et sont classés
ainsi qu'il suit : les semi- grossistes, les détaillants et les
collecteurs. Entre ces différents acteurs, on note une étroite
relation de complémentarité et d'interdépendance.
De part leurs effectifs, ils permettent de déterminer
l'importance des marchés dans le circuit de commercialisation des
produits. Après le dénombrement des hangars et les informations
obtenues à la Mairie, une estimation des vendeurs par tenue de
marché a été effectuée. Le tableau III
présente le nombre de vendeurs par marchés.
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Tableau III: Nombre de vendeurs par
marché
Marchés Nombre de vendeurs
Allada 293
Avakpa 271
Sékou 235
Lon-Agonmè 38
Dessa 41
Total 878
Source : Mairie Allada et
enquête de terrain, Mars 2011
Ce tableau montre que le nombre de vendeurs est plus important
au marché d'Allada que dans les autres marchés. Après lui,
il y a le marché d'Avakpa, de Sékou, de Dessa, de
Lon-Agonmè. Cet effectif témoigne de l'importance de chaque
marché dans le circuit commercial de la commune.
3.1.2- Les acheteurs
Ils viennent de divers horizons pour acheter les produits
qu'ils désirent. En effet, ce groupe est constitué des
populations des villages qui abritent les marchés, celles des campagnes
environnantes et des populations venant des autres communes (pour les
marchés à caractère régional).
Compte tenu du caractère libre des marchés
ruraux, il est souvent difficile d'évaluer avec exactitude à
chaque tenu de marché le nombre des acheteurs qui les
fréquentent. Mais suite aux enquêtes de terrain et les
informations obtenues à la Mairie, des valeurs approximatives ont
été retenues. Le tableau IV présente le nombre d'acheteurs
par tenue de marché.
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Tableau IV: Nombre d'acheteurs par
marché
Marchés Nombre d'acheteurs
Allada 314
Avakpa 298
Sékou 285
Lon-Agonmè 43
Dessa 56
Total 996
Source Mairie Allada et
enquête de terrain, Mars 2011
L'analyse de ce tableau montre que le marché d'Allada
est le plus fréquenté de la commune. Après lui viennent
les marchés d'Avakpa, de Sékou, de Dessa et de Lon-Agonmè.
Cela s'explique par la situation géographique des marchés,
l'importance de leur superficie ainsi que la diversité des produits
qu'on y trouve. Aussi, certains drainent plus de monde que d'autres.
Les populations viennent acheter pour les uns les produits
d'autoconsommation et pour les autres les produits à revendre. La figure
5 montre les raisons d'achat des produits.
Figure 3: Raison d'achat des produits
Source : Enquête de terrain, Mars
2011
38
Après analyse de cette figure, on constate que la
grande partie des acheteurs rencontrés dans les marchés viennent
s'approvisionner pour l'autoconsommation, tandis que la minorité vient
acheter pour revendre. Ceux qui viennent acheter pour les deux raisons sont en
nombre infime.
Il faut noter que les revendeurs viennent souvent des autres
communes, mais quelques uns viennent également acheter pour revendre
à la maison ou dans les autres marchés ruraux.
Par ailleurs, il existe plusieurs raisons qui font que les
clients préfèrent un marché au détriment de
l'autre. Pour les uns, la proximité des marchés à leur
lieu de résidence est un facteur favorable, alors que pour les autres
c'est l'accessibilité du prix des produits qui motive leur
présence dans le marché. La figure 6 présente les raisons
de fréquentation des marchés.
Figure 4: Raison de fréquentation des
marchés Source : Enquête de terrain,
Mars 2011
L'analyse de cette figure permet de comprendre que la
majorité (57,28%) des acheteurs rencontrés dans les
marchés y sont, à cause de la proximité du lieu
d'échange. Les autres acheteurs viennent s'approvisionner soit parce que
les prix des produits sont accessibles (22,34%), soit pour les deux raisons
(17,47%). D'autres par contre y viennent sans raison majeure (02,91%).
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3.1.3- Les Prestataires de services
Ce sont pour la plupart des hommes et des femmes n'ayant aucun
capital pour mener une activité commerciale mais qui possède les
uns leur force physique, les autres leur savoir-faire qu'ils mettent au service
de ceux qui en ont besoin. Parmi eux, on rencontre les porteurs, les
pousse-pousseurs, les coiffeurs et coiffeuses, les tailleurs, les
écraseurs de condiments, les cordonniers, les transporteurs que sont:
les conducteurs de taxi-moto (zémidjan) et les conducteurs de
véhicule marchand. On note également des cabines
téléphoniques qui sont installées aux abords des
marchés.
3.1.4- Gestion des marchés
La gestion des marchés ruraux de la commune d'Allada
relève des compétences de la Mairie. En effet, elle dispose de
huit agents contractuels chargés de collecter les taxes dans les
marchés de la commune (photo 10). Ces agents sont supervisés par
un contrôleur général qui lui est un fonctionnaire de la
Mairie. Il a le devoir de rendre compte aux autorités municipales.
Ainsi, les jours de marché, les agents de collecte des taxes s'y rendent
et délivrent des tickets aux commerçants ; le prix de ces tickets
varie entre 50 et 100 francs selon la quantité et la valeur du produit
commercialisé.
Photo 10: Percepteur de taxe (homme portant un
sac) dans le marché d'Avakpa
Cliché: Akiyo R.,
février 2011
40
Cette photo montre un percepteur de taxe (tickettier) entrain
d'échanger un ticket contre de l'argent chez une vendeuse.
Cependant, ce ne sont pas dans tous les marchés de la
commune que les taxes sont perçues; elles ne le sont que dans trois
marchés: Sékou, Allada et Avakpa. Les autres marchés
échappent à ces taxes car les autorités estiment qu'ils
sont trop petits et ne drainent pas assez de monde. Instaurer la perception de
taxes peut faire fuir certains commerçants qui ne réalisent pas
de gros bénéfices.
En ce qui concerne l'octroie des places dans les
marchés, ce sont des commissions de gestion qui s'en occupent et ceci
dépend des marchés. Ainsi, une commission de gestion est
composée du ou des chefs de marché, de quelques usagers et de
deux ou trois notables du milieu. Les conditions d'octroie sont diverses et
dépendent du milieu. Après avoir fait la demande et obtenu la
place, le choix revient aux commerçants de construire le type de hangars
voulus selon leurs moyens.
3.2- Variation des prix dans les marchés
ruraux
La variation des prix est une donnée
caractéristique des marchés africains. Elle se situe à
deux niveaux et dépend de l'importance et du type de marché.
D'abord, le jour du marché, le prix de vente des
denrées vivrières change trois fois. Le matin, il est
relativement élevé, dans l'après-midi à partir de
14 heures, on note soit une légère baisse ou hausse du prix selon
la disponibilité du produit et le soir à partir de 17 heures,
lorsque le marché tire à sa fin, les prix baissent
considérablement. Cette variation journalière de prix
observée dans les marchés d'étude concerne surtout les
produits périssables comme le poisson frais, les légumes et
tomates etc.
Cependant, la grande variation des prix est en rapport avec
les changements saisonniers au cours de l'année.
La figure 7 présente la variation de quelques produits
vivriers au marché d'Allada.
41
Figure 5: Variation des prix de quelques
produits vivriers au marché d'Allada Source :
Enquête de terrain, Mars 2011
L'analyse de cette figure montre que le prix des produits
vivriers connaissent des variations au cours d'une année dans le
même marché. Cela s'explique par le fait que suivant les saisons,
le prix d'un produit peut augmenter ou diminuer selon qu'il soit abondant ou
non sur le marché. Mais ce n'est pas seulement au niveau des produits
vivriers qu'il y a variation des prix. La figure 8 illustre la variation des
prix de quelques produits maraîchers.
Figure 6: Variation des prix de quelques
produits maraîchers au marché d'Allada Source :
Enquête de terrain, Mars 2011
42
L'analyse de la figure 8 montre que le prix des produits
maraîchers varie suivant les mois de l'année. Cette variation de
prix dépend des types de produits car lorsque certains sont en hausse,
d'autres sont en baisse (cas de la tomate et de l'oignon). Il convient aussi de
remarquer que les prix des oléagineux connaissent également des
variations suivant les mois de l'année. La figure 9 montre la variation
des prix de quelques oléagineux au marché d'Allada.
Figure 7: Variation des prix de quelques
oléagineux au marché d'Allada Source :
Enquête de terrain, Mars 2011
L'analyse de cette figure montre que la variation du prix des
oléagineux dépend aussi des mois de l'année. Cela
s'explique par le fait que les saisons sont déterminantes dans la
production et la commercialisation des produits dans les marchés.
En ce qui concerne le prix de vente des produits de grande
consommation comme les céréales, les tubercules et les
légumes, il varie d'un marché à un autre et d'une saison
à une autre. Pendant la période de grandes récoltes de la
saison pluvieuse (juillet à novembre), les prix des produits agricoles
subissent fortement l'influence de la loi de l'offre et de la demande. Ainsi,
les prix des produits vivriers sont relativement bas. Après les
récoltes, c'est-à-dire pendant la période allant de
décembre à février, on assiste à une
légère hausse des prix et
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pendant la période de soudure (mars à juin), la
hausse des prix est considérable. La variation des prix de quelques
produits de consommation suivant leurs origines est présentée
dans le tableau V.
Tableau V: Variation moyenne des prix de
quelques produits suivant leurs origines
Produits
|
Prix sur le lieu
d'approvisionnement
|
Prix dans les marchés ruraux
|
Poids en kg
|
Maïs
|
175 F CFA
|
200 F CFA
|
1 kg
|
Haricot
|
300 F CFA
|
350 F CFA
|
1 kg
|
Voandzou
|
500 F CFA
|
575 F CFA
|
1 kg
|
Riz
|
450 F CFA
|
500 F CFA
|
1 kg
|
Mil
|
300 F CFA
|
350 F CFA
|
1 kg
|
Gari
|
100 F CFA
|
125 F CFA
|
1 Kg
|
Tapioca
|
300 F CFA
|
350 F CFA
|
1 kg
|
Source : Enquête de terrain,
Mars 2011
L'analyse du tableau V permet de comprendre qu'il y a
variation des prix entre les points d'approvisionnement et les lieux de vente.
Cette variation est de l'ordre de 25 à 75FCFA par kilogramme. Cela
explique le bénéfice qui revient aux commerçants
après la vente des produits. Mais il faut remarquer que plus la
quantité du produit est grande, plus le bénéfice des
commerçants devient important.
Il est aussi important de souligner la légère
différence de prix allant de 25 francs pour les produits vivriers
à 50 francs pour les produits manufacturés selon que le
marché soit éloigné du centre ville.
La baisse des prix des produits est observée par
moment. Cette baisse est due à l'abondance des produits vivriers sur les
marchés après les récoltes ; alors que la
légère hausse s'explique par la pénurie progressive des
produits agricoles sur les marchés. La hausse considérable des
prix est due à la rareté des produits vivriers sur les
marchés. A cela, il faut ajouter l'éloignement des lieux
d'approvisionnement et l'impraticabilité des voies
d'accès. On retient alors que tous ces facteurs contribuent à la
variation des prix des produits sur les marchés.
3.3- Unité de mesure des produits dans les
marchés ruraux
Dans chaque milieu, les unités de mesures
diffèrent selon les groupes socioculturels. Dans les marchés
ruraux d'Allada, les unités de mesures sont en fonction des habitudes du
milieu et les mesures utilisées se rapportent souvent
au kilogramme. Les mesures les plus utilisées sur ces
marchés sont: le `'Vloka»qui est l'équivalence du demi (1/2)
mesure du kilogramme (kg); le `'Tongolo»qui équivaut à un
kilogramme (1 kg). On utilise aussi le `'Sogho»qui est
l'équivalence de trois kilogramme (3 kg). Ces
unités de mesure ne sont utilisées que pour les produits dont la
vente nécessite la mesure avant de connaître la quantité
(céréales, farine de cossette d'igname...). La photo 11 montre
quelques instruments de mesure utilisés dans les marchés ruraux
d'Allada.
Unité de mesure « Tongolo »
Photo 11: Instruments de mesure
utilisés pour la vente des produits Cliché:
Akiyo R., février 2011
Unité de mesure « Sogho »
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Cette photo montre plusieurs unités de mesure dont les
plus utilisées sont le `'tongolo» et le `'sôghô».
Très souvent, lorsque la quantité du produit est
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élevée, on utilise des bassines adaptées
dont les mesures sont connues par les vendeuses.
3.4- Analyse du flux des échanges
Dans la commune d'Allada, la commercialisation des diverses
marchandises s'organise suivant une variété de circuit.
Le circuit le plus simple est celui des produits
manufacturés d'importation tels que les tissus, les boîtes de
conserve, les boissons alcoolisées, les cigarettes ; etc. Tous ces
articles sont envoyés par voie routière sur les marchés
ruraux d'Allada. Le tableau VI présente les lieux d'approvisionnement
des commerçants et la destination des produits
Tableau VI: Lieu d'approvisionnement et
destinaion des produits
Groupes de produits Lieux d'approvisionnement
des
commerçants
|
Destination
|
Manufacturés Cotonou, Lomé (Togo) Populations de la
commune
Vivriers Bohicon, Abomey, Glazoué, Nord-Bénin,
Populations de la commune et
Champs, Fermes et autres marchés celle des communes
voisines ruraux de la commune d'Allada
Artisanat Abomey, Bohicon, dans la commune
d'Allada
|
Populations de la commune
|
Maraîchers et Fruits Dans les communes de Toffo, de
Zè, et Populations de la commune et
d'Allada celle des communes voisines
Produits d'élevage Dans la commune par élevage
Populations de la commune et
celle des communes voisines
Source : Enquête de terrain,
Mars 2011
L'étude de ce tableau révèle que
l'approvisionnement des produits manufacturés se fait dans les centres
urbains et hors du pays ; tandis que l'approvisionnement des autres produits se
fait dans les autres localités du pays.
Le circuit le plus complexe est celui des produits vivriers.
Après la récolte, le paysan peut livrer les produits directement
à la consommation sur le marché, il peut aussi les conserver dans
les greniers en attendant la période de soudure pour les vendre plus
chers et réaliser de gros bénéfices. La figure 10
présente le flux des échanges entre les marchés ruraux
étudiés.
Figure 8: Flux des échanges des produits
entre les marchés ruraux étudiés Source :
Fond topographique IGN (1992), et enquête de terrain
février 2011
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L'analyse de cette figure montre que les échanges des
produits s'effectuent entre les différents marchés ruraux de la
commune. Aussi, certain marchés ont besoin des produits qui proviennent
des autres marchés pour leur fonctionnement. On comprend donc qu'il
existe une relation d'interdépendance d'une part entre les
marchés ruraux et d'autre part entre ces marchés et ceux
urbains.
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