Chap5 : INTERPRETATION DES RESULTATS,
PERSPECTIVES ET
RECOMMANDATION
?. Interprétation des résultats
I.1.Les facteurs explicatifs de la sous-scolarisation des
filles
L'éducation qui se voulait au début
démocratique se retrouve aujourd'hui entachée des
inégalités de genre. Ainsi les filles continuent par être
marginalisées dans l'accès à l'éducation selon 82%
de nos enquêtées.
Ce phénomène semble avoir plusieurs
causes et les parents ne cessent d'être pointés du doigt comme les
vrais responsables. Ceux-ci guidés par leur culture de base
négligent l'éducation de leurs fillettes et les préparent
involontairement au mariage. Selon la culture locale, le code d'honneur veut
que la femme, future épouse, soit l'ambassadrice permanente de sa
famille auprès de sa belle famille. Chaque erreur que commettra une
femme sera imputable à sa mère. Le « salut »
pour une mère analphabète réside par conséquent
dans les soins qu'elle apportera pour « surveiller » la
conduite de sa fille. Pour cela, il faut qu'elle soit à ses
côtés. L'école est perçue comme produisant l'inverse
en ce sens qu'elle éloigne la fille de la
« surveillance » de sa mère. Alors, toutes sortes de
stratégies sont développées par les familles pour faire
échec à la scolarité des filles. C'est pourquoi
d'après 42% des enquêtées l'ignorance des parents quand aux
avantages dont procure la scolarisation dans la vie d'une femme est une raison
fondamentale pour comprendre la persistance du phénomène. Pour
beaucoup de parents l'instruction des filles paraît encore inutile ou
même nuisible à l'apprentissage des fonctions dévolues
à la femme dans la société. Dès le bas âge
les enfants reçoivent une éducation qui les prépare
à assumer des fonctions sociales futures selon qu'ils soient
garçons ou filles. Pour ce faire, ils doivent non seulement
acquérir des compétences nécessaires à la survie du
groupe social, mais aussi des compétences dans leur rôle
spécifique, ce qui rend différents les contenus et les formes de
l'apprentissage qui leur sont transmis. Autrement dit, dans les ménages
et familles, les garçons et les filles n'assument pas les mêmes
tâches ou rôles donc n'ont pas la même éducation. Les
filles sont très tôt chargées des corvées
ménagères. Même si elles sont élèves on
attend d'elles qu'elles s'acquittent de leurs obligations scolaires sans
négliger les tâches domestiques. Ces multiples occupations
agissent souvent négativement sur les résultats scolaires des
filles qui finissent par raccrocher après moult échecs.
Selon 38% de nos enquêtées, la
sous-scolarisation des filles est en partie inhérente à la
discrimination et au poids de la tradition qui prône fermement la
subordination de la femme à l'homme.
Au niveau familial, lorsque les allocations devant
servir à couvrir les besoins d'éducation de tous les enfants
deviennent maigres, les parents opèrent des choix éducatifs en
donnant la priorité aux garçons.
Aujourd'hui, les retombées de la
gratuité de l'école font que l'accès des filles à
l'école primaire connait un progrès au point où
l'écart entre filles et garçons s'amenuise soit un indice de
parité de 78% pour la région des savanes (tableau de bord, 2007).
Toutefois, il n'y a pas lieu de se réjouir car le taux d'abandon chez
les filles est si élevé que seules 31% de celles qui rentrent au
primaire, arrivent au secondaire et ce nombre diminue sensiblement au fur et
à mesure qu'on avance dans le cursus scolaire. Le poids social agit de
telle manière que les filles abandonnent sans le vouloir.
Pour preuve 23% des femmes continuent par croire que
l'école n'apportera pas grande chose dans la vie d'une fille. Pour
beaucoup de familles, l'école même gratuite constitue une charge
économique tant par les frais annexes occasionnés par la
scolarisation, l'achat de la tenue scolaire et des fournitures, que parce que
les enfants n'assument plus leur part des travaux. Quand cette charge devient
trop lourde l'enseignement secondaire devient un luxe que certaines familles
pauvres ne peuvent s'offrir. Elles orientent très tôt la petite
fille vers les activités rémunératrices (petit commerce,
apprentissage de métier ou placement comme domestique dans les
restaurants).
En effet 14% de nos enquêtées
désignent la pauvreté des parents comme une cause non moins
importante de la sous-scolarisation des filles de la localité. En
définitive il ressort que les facteurs sociaux-économiques sont
les principaux obstacles qui perpétuent la sous-scolarisation des
filles.
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