Actuellement, le PNVI connaît une pression de la
population riveraine car il renferme des terrains dont le développement
est essentiel aux populations. Sa diversité biologique est
menacée par les actions anthropiques diverses: agriculture,
élevage, braconnage, feux de brousse incontrôlés,
exploitation forestière pour le bois-énergie, etc. L'afflux
massif des réfugiés de la région n'a fait qu'exacerber la
situation122. L'Etat ne remédier à ces
difficultés que s'il prend des mesures spécifiques et
appropriées pour satisfaire les besoins des villageois environnant le
PNVI.
B. La concentration humaine autour du PNVI suite aux
déplacements des
populations123
Les conflits interethniques dans la région des Grands
Lacs et les affrontements des groupes armés, les pillages de ressources
naturelles et l'éruption du volcan Nyiragongo ont causé des
déplacements internes massifs, en plus de la présence de
réfugiés au Nord-Kivu. Le déplacement au Nord-Kivu remonte
au début des années 1990, lorsque les conflits entre ethnies
Nyanga, Hunde et Hutu, dans le Masisi se sont étendus à toute la
région et ont provoqué de nombreux déplacements,
particulièrement vers Goma [...]. En 1993 et 1994, les autorités
du Nord-Kivu ont organisé une opération de désarmement des
milices de la région, causant une vague de déplacements
(opérations Kimya en 1993et Mbata en 1994). C'est aussi l'époque
où d'autres milices se constituent, tels que les Mai Mai, Mongol, Nalu,
etc. [...]. Les deux guerres de 1996 et de1998 ont également
causé plusieurs millions des déplacés [...]. Comme l'a
détaillé un rapport d'une commission d'experts de l'ONU sur
l'exploitation des ressources en RD Congo, le pillage de ressources naturelles
par différents groupes armés, pays et sociétés,
aggrave la crise de déplacement dans un pays où guerre et profit
sont
121 Idem, p. 9.
122 RD Congo, Ministères de l'Agriculture et de
l'élevage, du Plan, de l'Education nationale et de l'Environnement,
conservation de la nature, forêts et pêche, Monographie de la
province du Nord-Kivu, PNUD/UNOPS, 1998,p. 123.
123 C. PALUKU MASTAKI, op.cit., p. 14.
36
étroitement liés [...]. En janvier 2002,
l'éruption du volcan Nyiragongo a causé le déplacement
temporaire ou à plus long terme d'au moins de120 000
personnes124.
Les faits démontrent qu'en cas de conflit la
coexistence des personnes déplacées ou réfugiées et
la conservation de la biodiversité forestière devient complexe,
car autant les déplacés ou les réfugiés ont besoin
de survivre, autant ils recourent à l'utilisation des ressources
naturelles qui les entourent «pour des raisons légitimes de leurs
besoins prioritaires»125. Ainsi, les déplacés ou
les réfugiés «coupent souvent la végétation
à des fins agricoles ou pour obtenir du bois à brûler. De
telles pratiques mènent rapidement à la
déforestation126.
C. Les réfugiés et le Parc National des
Virunga
En 1994, plusieurs centaines de milliers de
Réfugiés de la région affluent vers Goma et ses environs
[...]. Des milliers de gens terrorisés, fuyant les massacres du Rwanda,
ouvrent sans le savoir la voie à une autre collision dramatique, cette
fois entre l'homme et son environnement127,
précisément autour et dans le Parc national des Virunga. A
l'arrivée des réfugiés, aucune infrastructure d'accueil
n'était prévue.
Devant les difficultés de s'installer même dans
la ville de Goma, plusieurs foyers de réfugiés
s'installèrent de part et d'autres des routes Goma-Sake et
Goma-Rutshuru. Le nombre des foyers augmentant, ces constructions
précaires s'étendirent et constituèrent des camps [...].
Le camp de Mugunga a été occupé de façon
spontanée, chaque réfugié s'installant à son
gré; celui de Kahindo, par contre, a été
aménagé par le HCR. De surcroît, il faut signaler qu'avant
l'arrivée du HCR, l'exploitation [du bois] et la distribution
étant désorganisées, les réfugiés ont
détruit une bonne partie du parc des Virunga. Il est estimé que
1000 réfugiés rasaient1 ha par semaine, soit 4 ha par
mois128. Entre 1994 et 1996, l'on a remarqué une destruction
de plus de 150 km2 de couverture forestière et la
détérioration de la valeur esthétique du parc suite
à la présence de plus de 700 000 réfugiés aux bords
du parc. Plus de 50% des bambous ont été coupés en secteur
Mikeno. La population d'hippopotames a
124 Norvegian Refugee Council, Atelier de formation sur
les principes directeurs relatifs au déplacement des personnes à
l'intérieur de leur propre pays, Goma, RD Congo, 7-9 avril 2003,
pp. 4-5.
125 Idem, p.5
126 S. JAMES et J. OGLELHORPE, L'herbe foulée:
atténuer l'impact des conflits armés sur l'environnement,
Washington, Biodiversity Support Program, 2001, p. 49.
127 Réfugiés, Environnement, l'heure est
à l'urgence, Genève, HCR, volume 2, n° 127, 2002, p.
9.
128 RD Congo, Ministères de l'Agriculture et de
l'élevage, du Plan, de l'Education nationale, et de l'Environnement,
Conservation de la nature, Forêts et Pêche, op. cit., p.
147.
37
été sensiblement réduite. Le nombre de
pièges détruits est passé de 2501 en1991 à 6873
en1995129.
La forte pression démographique autours du parc, les
différentes hostilités armées à l'Est de la RDC et
les violations intentionnelles des textes légaux organisant la
conservation de la nature et la protection de la nature ont exercé un
impact néfaste sur le PNVI et ses limites130. Des missions de
suivi réactifs en 2006, 2007 et 2010 ont tous confirmé l'ampleur
des menaces pesant sur l'intégrité du bien et ont
recommandé que le site soit maintenu sur la Liste de biens du patrimoine
mondial en péril. Les principales menaces identifiées sont
:131
· Les envahissements illégaux à de nombreux
endroits dans le bien ;
· L'exploitation illégale des ressources,
notamment le braconnage de la faune, la pêche illégale sur le lac
Edouard et la production de charbon de bois ;
· La présence de bandes armées
opérant dans le bien ;
· Le chevauchement de la totalité du parc par 5
permis pétroliers dont deux, accordés à TOTAL (block III)
et SOCO (block V), font l'objet d'activités d'exploration depuis
2011.
130 B. UWIMANA, op.cit., p. 289.