Mythe ou réalité des politiques publiques du régime politique issu des élections de 2006 et le redressement socio-économique de la province du sud - Kivu.( Télécharger le fichier original )par Alain de Georges SHUKURANI MUGENGERE Université Officielle de Bukavu (U.O.B) - Licence en Sciences politiques 2008 |
4. PROBLEMATIQUELes événements malheureux qui affectent les conditions de vie des populations, les crises politiques, institutionnelles ou gouvernementales ainsi que le sous-développement seraient les corollaires de la mauvaise conception du pouvoir en République démocratique du Congo. Les politiques publiques mises en place et l'efficacité gouvernementale dans la manière d'apporter, grâce à elles, des réponses concrètes aux demandes de la population ont toujours, pour la plupart de fois, été en parfaite inadéquation par manque de dirigeants aux profils appropriés ; entre autres, la volonté politique et le leadership compétent voire responsable pouvant se comprendre comme problème relevant du déficit de l'éthique politique démocratique et patriotique en RDC. La République démocratique du Congo n'est pas une création récente. Cet Etat est indépendant depuis quarante-neuf ans. Sa politique depuis son accession à l'indépendance a été marquée par plusieurs fléaux dont les principaux sont, l'improductivité, l'ignorance, le népotisme, la corruption, le clientélisme politique et l'incohérence qui ont gangrené les bases de son développement. Avec les élections de 2006, on aurait pu croire à un génie salvateur qui pourrait venir libéraliser tout l'espace politico-administratif du pays en redonnant l'espoir de relever le défi technico-éthique du développement ; bien que les changements politiques qualitatifs positifs soient le produit d'une longue durée. Le pays a connu, pour notre part, neufs régimes, celui qui le gère aujourd'hui connaît, quant à lui, trois gouvernements. Signalons ainsi que le pays, pendant ces neufs régimes, a connu beaucoup de gouvernements avec le record battu durant la période de transition politique de 1990 à 1997. Ces neuf régimes sont à repérer aux époques suivantes : v De 1960 à 1965 : Régime démocratique sous KASAVUBU ; v De 1965 à 1967 : Régime du Haut commandement militaire dirigé par MOBUTU ; v De 1967 à 1970 : Régime du bipartisme imparfait sous le monopole du Mouvement Populaire de la Révolution de MOBUTU ; v De 1970 à 1990 : Régime autoritaire du Parti - Etat (Mouvement de Populaire de la Révolution) ; v De 1990 à 1996 : Régime de la première transition prodémocratique sous MUBUTU ; v De 1997 à 1998 : Régime de l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo tentant de se libérer du joug rwandais dirigé par Laurent Désiré KABILA et dominé par les Katangais ; v De 2001 à 2003 : Poursuite du régime hérité de l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo par Joseph KABILA ; v De 2003 à 2006 : Régime issu des composantes des ex-mouvements belligérants et assis sur la formule 1+4, c'est-à-dire un exécutif composé du président et de quatre vice-présidents v De 2006 à nos jours : Régime Joseph KABILA légitimé par les élections démocratiques mais à faible assise. Toutefois, il faut reconnaître que depuis 1960 quelques événements se sont succédé sur le sol politique congolais mais ne se sont pas tous ressemblés. Rappelons ainsi que la situation de 1960 - 1965 où l'Etat était encore essentiellement providentiel n'est pas égale à celle de 1965 - 1990 où le pouvoir du feu président MOBUTU a commencé à afficher certaines imperfections et limites du point de vue socio-économique du pays. La période de 1990 - 1996, où les dérives autoritaires du pouvoir mobutisteont empiré, n'est du tout pas comparable à celle de 1996 - 1997 marquée par les guerres dites de libération. Pour sa part, la situation politique de 1997 - 2001 est à distinguer de celle 2001 - 2006. Cette première a été fortement marquée par des violences politiques qui ont su déchirer le pays en morceaux selon que le RCD occupait une partie du territoire national, le MLC également, et le régime Laurent Désiré KABILA en a occupé une autre. La seconde, par contre, a été marquée à partir de 2003 par une gestion des affaires publiques sui generis où le pouvoir a été partagé entre les ex-belligérants par la formule 1 + 4. La période de 2006 à nos jours, toutefois, reste toute particulière car elle a vu les élections pour légitimer les dirigeants. En effet, comme l'affirme ALBERTINI, il ne suffit pas de battre des records en mettant en oeuvre des politiques publiques ambitieuses par les changements des équipes ministérielles, encore faut-il que les ressources y afférentes se trouvent suffisamment distribuées, réparties non seulement entre les différentes composantes sociales de la population du pays en question mais aussi entre les composantes gouvernantes.4(*)Ceci suppose alors qu'il y ait manifestement exercice du pouvoir dont la compétence et l'éthique politique de la part des dirigeants politiques font la règle du jeu. En RDC, on observe ainsi chaque année, un Gouvernement, chacun porteur d'espoir. Cela veut dire qu'il y a des années que le peuple congolais espère. Il y a des années qu'il voit parfois son espoir se transformer en cauchemar. Par conséquent, ce peuple a du mal à présent à croire facilement vu l'allure que prend le Gouvernement pour solutionner des problèmes de l'heure, plus particulièrement dans la province du Sud - Kivu pour autant que le politique lui apprend que la politique est l'art de mentir. La population, au regard des promesses électorales tenues, attendait du régime élu des actions concrètes visant l'amélioration de ses conditions de vie dans un court délai. A plus de deux ans et demi de la législature, la crainte de voir son vécu quotidien s'améliorer est à la fois justifiée et justifiable. Dans cette perspective, force nous a été de constater qu'après les élections les choses ne changeaient pourtant pas au plan réel sur l'ensemble du pays et, plus particulièrement dans la province du Sud - Kivu malgré la mise sur agenda des politiques publiques par le pouvoir actuel qui ont fait renaître l'espoir de l'amélioration des conditions socio - économiques dans le chef de la population. Les cas du manque d'emploi, de l'injustice sociale, de l'analphabétisme, de la pauvreté, du délabrement du réseau routier, de la pénurie en eau et en électricité dans certains coins de la province du Sud - Kivu ne sont - ils pas plus éloquents à nos propos ? Ce constat vient du fait que le régime actuellement en charge fait montre d'une apparente incompétence de certains de ses ministres, du manque de volonté politique et se compromet en même temps dans des phénomènes patrimoniaux qui ne lui permettent pas de jouir d'assez de manoeuvres pour la matérialisation des « cinq chantiers »annoncés. Ainsi, sur la scène politique congolaise, règnent encore la cacophonie, la corruption, le clientélisme politiqueet le sens du primat des intérêts privés au détriment des intérêts de la Nation qui engendrent une léthargie et une fébrilité dans des actions du Gouvernement par rapport à la réalisation des politiques publiques nommées en cinq chantiers qui peinent à démarrer au Sud-Kivu. En effet, après plus de deux ans et demi de la mise en place des institutions, en l'occurrence l'investiture du Gouvernement, ce dernier est en deçà des espoirs placés en lui par la population du Sud - Kivu. Le même scénario - celui de la gestion du pays marquée par la mauvaise gouvernance reléguant au dernier plan les intérêts de la population - est en train de vouloir se répéter pourtant les circonstances ont changé car les élections de 2006 seraient en elles - mêmes le changement et le gage du changement. On comprend alors pourquoi, pour certains analystes et la majorité du peuple, les « cinq chantiers », qui sont la politique générale mise au point par le régime aux affaires pour le redressement de la situation socio - économique du pays, sont un « slogan » pour autant qu'ils sont restés lettre morte dans les territoires de la province du Sud-Kivu et même dans la ville de Bukavu. Ainsi, tout ce qui précède nous a amené à nous poser les questions suivantes qui feront objet de discussion en termes de la problématique de travail: D'abord, pourquoi la matérialisation des « cinq chantiers », politiques publiques annoncées par le régime élu de Joseph KABILA, tarde à s'affirmer dans le pays, en général, et dans la province du Sud - Kivu en particulier? Autrement - dit, qu'est - ce qui explique le fait que ces « cinq chantiers » demeurent, après ces deux ans et demi d'investiture dudit régime, presque lettre morte au Sud - Kivu ? Ensuite, quels sont les obstacles que ces politiques publiques rencontrent pour être efficacement amorcées dans la province du Sud - Kivu ? Y a - t - il vraiment une reprise en mains de la responsabilité gouvernementale pour satisfaire les demandes et attentes de la population ? Qu'en est-il du fonctionnement et de la réalité de la décentralisation politico-administrative dans la réalisation de ces chantiers et d'autres au Sud-Kivu ? Dans les lignes qui suivent, nous tâcherons de donner, en guise d'hypothèses, des réponses comme pour répondre aux questions soulevées par la problématique. * 4. J.M ALBERTINI cité par LWESSO, Laurent. Les formes de l'Etat et leurs incidences socio-économique et politique. Cas de la RDC de 1960 à 2005, mémoire, inédit, FSSPA, SPA, U.O.B, 2004-2005, P.3 |
|