B. LES TYPES DE PAYSANNERIES ET LA MISE EN VALEUR DE
L'ESPACE B-l Los types de paysanneries : reflet, de la mosaïque
ethnique.
Pour se faire recruter à la SODENKAM comme pionnier, il
y a des conditions assez souples et variées à remplir. En plus
d'être camerounais, sans distinction de sexe, d'ethnie ; ou de religion,
il faut jouir do ses droits civiques et moraux. Ceci a canalisé les
populations d'origines diverses vers la zone de l'opération. Toutefois,
nous avons rencontré dans le village N' jingang la case d'un
Nigérien, rapatrié pont cause de vieillesse et un Nigérian
en cours d'installation. Ce n'est donc qu'à juste titre qu'on peut
qualifier la région de véritable mosaïque ethnique.
Cette population d'immigrés pour la plupart est
recrutée de différente façon, les uns des autres. La
composition démographique qui en a suivi confère au paysannat de
la région, une structure particulière, au regard des autres zones
de colonisation agricole récente connue celle de la région de
Galim. Ainsi pour classifier les paysanneries présentes dans la zone de
l'opération, nous avons considéré trois critères
:
· Le mode de, recrutement.
· Le groupe ethnique
· La structure démographique
Le mode de recrutement laisse distinguer 3 types de
paysanneries. Les paysans recrutés par les employés de la
SODENKAM chargés par ce mode de recrutement. Les paysans
recrutés: par ceux déjà .installés; indice de
succès du projet de l'implanta» ion humaine. Les paysans venus
d'eux-mêmes se faire inscrire à la SODENKAM. Ils sont
numériquement faibles. Les différentes paysanneries sont en
proportion variables dans les villages. A Ndock-Samba, la majorité des
paysans est recruté par les employés de la SODENKAM, alors que
les paysans de Dékoulé sont recrutés par N'dock-Samba.
En analysant le groupe ethnique et en s'appuyant sur le
nombre d'émigrants, on distingue:
· Les Bamilékés 78,2%
· Les autochtones et les autres groupes ethniques 10,6%.
· Les Eton 4,7%.
· Les Grassfield 4,6%11.
11 Les grassfield: termes englobant les immigrants de la partie
anglophone des hautes terres de l'ouest et qui correspond à l'actuel
province du Nord-ouest
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Si les Bamilékés sont présents dans tous
les villages pionniers, ils sont en nombre réduit à Ndock-Tiba
où dominent les autochtones. En fonction de la structure
démographique les paysanneries présentent des
caractéristiques variées. Le fait marquant quand on se fonde sur
1'âge est qu'on y rencontre des paysans de moins de 25 ans.
D'après le sexe, il n'est pas rare de trouver dans la zone de
l'opération, de femmes "pionnières", chefs d'exploitation
dès leur installation. Ceci est rendu possible grâce à
l'accès des femmes libres et des jeunes de moins de 25 ans à la
terre. C'est un phénomène original propre à
l'Opération Yabassi-Bafang. C'est ainsi que dans « la colonisation
spontanée, on accède assez tard à la terre, car il faut d'
abord gagner 1' argent nécessaire pour l'achat de la parcelle, en
travaillant plusieurs années dans les plantations des autres »
Dongmo J.L12 p 391.
B-2. La mise en valeur de 1'espace.
Dans la zone clé l'opération presque vide
d'homme, la mise en valeur est quasi inexistante ; Les autochtones ayant une
économie proche de la prédation. En effet, les structures
agraires de la région sont à peine perceptibles et leur impact
sur l'environnement est très faible.
Si la région connaît de profondes mutations
socio-économiques depuis le lancement de l'opération, l'action de
SODENKAM est non négligeable à travers les équipements
installés et son encadrement d'une part et d'autre part l'oeuvre des
paysanneries est marquante à plus d'un titre. Grâce .ni dynamisme
de ces dernières, elles font chaque année reculer la forêt
et elles en ont pour 120 000 Ha à mettre en valeur. C'est ainsi que 3
ans après l'Opération, 500 Ha de forêt sont mis en valeur.
Les cultures vivrières traditionnelles occupent 300 Ha parsemés
d'arbres fruitiers.
Dès lors, les surfaces cultivées ne cessent de
s'accroître, poussant progressivement ! La forêt à
céder la place aux cultures. Le rythme de la mise en valeur n'est pas le
même chez les exploitants mais est tout de même croissant. La
SODENKAM, pour stimuler les paysans, impose une mise en valeur de 0,5 Ha/ an,
faute de quoi l'on est déchu de son titre île pionnier, et
expulsé de la zone pour paresse. Chaque exploitant reçoit un lot
de 1000 m2 dans le village qu'il doit défricher pour se faire
construire une maison et y pratiquer le petit jardinage ou 1 ' élevage.
2 champs de 6 Ha au moins chacun lui sont remis ; la première plantation
doit produire au bout de 3 ans, avant la fin de la prime alimentaire et ce
n'est qu'après avoir terminé la première plantation, que
le paysan exploitant entame la seconde.
12 Dogmo J L op cit
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Techniques et systèmes
d'exploitation.
Le pionnier qui arrive dans la zone de l'Opération est
presque démuni de tout matériel. Soucieuse de la mise en valeur
rapide de la région, la SODENKAM lui offre le petit matériel
agricole pour le début des travaux. Ce matériel et très
insuffisant compte tenu de la tâche qui attend le paysan; raison pour
laquelle le perfectionnement du matériel s'avère une
nécessité. Le paysan acquiert donc, au fil du temps et à
partir des revenus du café et du cacao, un équipement agraire
moderne tel que les tronçonneuses, les atomiseurs, les
désherbants chimiques et mécaniques , une gamme de produits
phytosanitaires et surtout les engrais chimiques. À côté de
cet outillage, le pionnier reçoit les conseils du moniteur agricole
installé dans le village à cet effet.
La production agricole de la zone est centrée sur les
cultures d'exportation (cacao, café) qui connaissent à cet effet
une promotion particulière. Les 2 produits sont pratiqués en
monoculture, afin d'accroître les rendements. Et c'est pour cette raison
que le pionnier se doit de diviser son champ en 3 parties: Les 2/3 sont
consacrés au calé, cacao en portion bien distincte et
équitablement, et le reste est occupé par les cultures
vivrières.
Mode de mise en valeur.
L'exploitation des terres par les pionniers est soumise
à des règlements stricts fixés par la SODENKAM. L'article
4 en annexe III du Cahier des Charges du pionnier, fixe les conditions de
déchéances des droits du pionnier .s'il vend ou cède son
champ à une tierce personne, ou même s'il l'exploite à
titre provisoire. Cette obligation pousse le pionnier à n'utiliser que
la main d'oeuvre familiale, ce qui va conduire au mode de
faire valoir direct qui prévaut dans la zone. Toutefois
un salariat agricole s'installe progressivement et c'est est à ce
propos que ESSECK écrit « La mise valeur de la région de
Mkondjok bénéficie du salariat agricole qui ressemble qui
rassemble à plus d'un titre à ce qui se passe dans les
exploitations agricoles du Mungo voisin. Depuis peu, on assiste à
l'éclosion d'une main d'oeuvre salariée qui vient se greffer sur
celle familiale »13.
L'ÉVALUATION DE L'OPÉRATION
YABASSI-BAFANG
CHAPITRE III
13 Esseck, D op cit
La SODENKAM a pendant 22 ans d'existence dans le
périmètre de mise en valeur Yabassi-Bafang, accompli de
nombreuses tâches, seule ou avec les paysans. Depuis 1988, date de la
dissolution de cette société mère, les succès et
les points d'ombre de l'Opération, sont nettement perceptibles.
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