5.1. Les manifestations de la crise
bancaire en RDC42(*)
Les dépôts bancaires, toutes maturités
confondues, ont connu une période croissante de 1965 à 1975. A
partir de 1980, les signes annonciateurs de la crise bancaire apparaissent :
les dépôts bancaires ont constamment fléchi, et les
crédits offerts par le système bancaire congolais ont connu
approximativement une loi d'évolution semblable.
Parallèlement, le taux d'intermédiation bancaire,
qui exprime le rapport D/L, est passé de 3,54 en 1965 à 1,58 en
1997. Ce taux traduit la capacité du système bancaire à
favoriser les dépôts à partir des crédits et
à entretenir un processus cumulatif de l'intermédiation.
Tableau 1:Evolution du taux d'intermédiation
bancaire
(En milliers de dollars
américains)
|
1965
|
1970
|
1975
|
1980
|
1985
|
1990
|
1994
|
1997
|
Total dépôt (D)
|
67.748
|
239.306
|
651.902
|
559.339
|
216.899
|
625.126
|
216.622
|
90.476
|
Total crédit (L)
|
19.136
|
251.326
|
1.030.378
|
665.000
|
324.000
|
507.000
|
168.000
|
57.237
|
Ratio (D/L)
|
3,54
|
0,95
|
0,63
|
0,84
|
0,67
|
1,23
|
1,92
|
1,58
|
|
Source : F. KOTO EY'OLANGA, op. cit.,p. 85.
Un autre phénomène non moins curieux est
l'apparition de la spéculation sur les dépôts bancaires. En
effet, depuis 1992, la monnaie scripturale est convertie en espèces avec
décote dans les banques congolaises. Ce
phénomène a résulté des paiements effectués
par l'Etat en faveur de ses fournisseurs au moyen des virements non couverts en
comptes bancaires. Ces paiements se faisant par écriture comptable ont
fini par générer un gap important entre les dépôts
bancaires et leur couverture en espèces. Il s'est ainsi
créé au sein du système bancaire une offre
excédentaire de monnaie scripturale dont la persistance a fini par
placer les banques commerciales dans l'incapacité de faire face à
la demande d'espèces formulée par le public. Cette faiblesse a
fait que les demandeurs d'argent reportaient leurs pressions sur un
marché parallèle plus liquide. C'est ce qui explique la
décote ou l'inconvertibilité au pair de la monnaie scripturale en
monnaie fiduciaire.
Concrètement, cela signifie que si la décote se
fait dans une proportion de 1 à 10, le détenteur d'un
dépôt bancaire évalué à 1.000.000 NZ (9,5 USD
au taux de fin décembre 1997) ne peut recevoir que 100.000 NZ (0,95 USD)
comme contrepartie en espèces.
Une conséquence néfaste de la décote du
scriptural par rapport au fiduciaire a été une forte circulation
d'espèces sonnantes hors banque et donc la crise de billets
dans le système bancaire. Des
indicateurs permettent de rendre compte de ce phénomène. Il
s'agit du taux de circulation fiduciaire et du taux de couverture de
dépôts à vue. Le taux de circulation fiduciaire indique la
proportion de billets et pièces en circulation dans la masse
monétaire. Son évolution s'est faite comme suit :
Tableau 2 : Evolution du taux de circulation
fiduciaire
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
Circulation fiduciaire
|
54,4
|
59,3
|
47,3
|
70,7
|
74,0
|
87,3
|
Monnaie scripturale
|
45,6
|
40,7
|
52,7
|
29,3
|
26,0
|
12,7
|
Total
|
1,00
|
1,00
|
1,00
|
1,00
|
1,00
|
1,00
|
|
A la lecture du tableau précédent, on peut
aisément constater qu'entre 1990 et 1995, la tendance
générale du taux de circulation fiduciaire est à la
hausse. De 54,4% de la masse monétaire en 1990, ce taux a atteint 87,3%
en 1995 alors qu'en période normale, sa valeur tourne autour d'une
moyenne de 55%. Pendant que le taux de circulation fiduciaire augmentait, le
taux de couverture des dépôts à vue présentait une
évolution en sens inverse. En période normale, ce taux avoisine
8%. En 1992, année du déclenchement du phénomène de
décote de la monnaie scripturale en monnaie fiduciaire, sa valeur est
tombée à 1,7% alors qu'elle était à 7,2% en
1990.
Tableau 4 : Evolution du taux de couverture des
dépôts à vue
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
a. Encaisses banques commerciales
|
15
|
344
|
6.391
|
581.964
|
5.097.000
|
29.232.000
|
b. Dépôts à vue des banques
|
209
|
5.883
|
379.337
|
4.852.586
|
91.858.000
|
187.020.000
|
c. Taux de couverture (a/b) x100
|
7,2%
|
5,8%
|
1,7%
|
1,2%
|
5,5%
|
1,6%
|
|
Dans une économie rongée par l'hyperinflation et
la dollarisation, les prix des biens et services sont
généralement indexés. L'acquisition de ces biens et
services pour le besoin de fonctionnement des banques
congolaises a provoqué une croissance rapide des charges
d'exploitation. De 21,6 millions de dollars américains en 1970,
elles ont atteint 171,4 millions de dollars en 1994, soit une
multiplication par 7,9 alors que pendant la même période, les
revenus n'ont été multipliés que par 5,8.
Ceci explique donc une chute grave du résultat cumulé des
banques, qui est passé de 4,137 millions de dollars américains en
1970 à -22,722 millions vingt ans après.
* 42 Koto Ey'olanga Firmin,
cité par Kabuya Kalala F., op. cit., page 35.
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