§ 2 ) La mise en place de textes communautaires
Face à l'ensemble de ces textes internationaux à
la portée très large, la Communauté Européenne puis
l'Union Européenne, se devaient elles aussi de proposer des normes afin
de lutter contre la discrimination de manière générale,
englobant alors l'ensemble des cas où il pourrait y avoir
discrimination.
Dès les premières années de la CEE, la
Cour de Justice a fait apparaître une spécificité du droit
communautaire par rapport au droit international. En effet, « les sujets
sont non seulement les États membres, mais également leurs
ressortissants »15. Les traités communautaires ont donc
été perçus comme matériellement constitutionnels
mais, poursuivant un simple but d'intégration économique, ces
traités ne traitaient à aucun moment des droits et des
libertés ainsi que de leur garantie. Une véritable lacune est
alors apparue car les actes de droit communautaire dérivé,
applicables dans la plupart des cas aux ressortissants des États
membres, n'étaient pas soumis au respect des droits fondamentaux.
C'était donc dès 1950, avec la Convention de
sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés
fondamentales16, que le principe fondamental de non-discrimination
se trouvait pour la première fois protégé au niveau de la
Communauté européenne (A). Cependant, cette seule protection
apparut très vite insuffisante . La CJCE 17, vit donc comme
nécessaire le fait de combler la lacune originelle des traités
par le biai de décisions consacrées sous forme de principes
généraux du droit communautaire qui seront par la suite
confirmés conventionnellement (B). Ensuite, la Charte des Droits
fondamentaux de l'Union Européenne verra le jour (C) puis sera suivie de
nombreuses directives (D).
A) La Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des
libertés fondamentales
La Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des
libertés fondamentales, dite aussi Convention européenne des
droits de l'Homme, a été adoptée à Rome le 4
15 ) CJCE, 15 juillet 1963, Van Gend en Loos
16 ) Aussi appelée Convention Européenne des Droits
de l'Homme
17 ) Cour de Justice des Communautés Européennes
novembre 1950 et est entrée en vigueur le 3 septembre
1953. Elle a été depuis complétée par des
protocoles additionnels. Cette remarquable Convention est issue du Conseil de
l'Europe institué par le Traité de Londres du 5 mai 1949. Cette
organisation européenne traite de la promotion de « la
prééminence du droit » et plus précisément des
« droits de l'Homme et des libertés fondamentales 18
».
Elle prévoit donc la garantie de plusieurs droits tels
que le droit à la vie19, à la liberté et
à la sûreté20, le respect de la vie
privée et familiale, du domicile et de la correspondance21,
l'interdiction de la torture22 et surtout l'interdiction de la
discrimination dans la jouissance des droits et libertés garantis par la
Convention. En effet, la Convention dispose dans son article 14 que «
La jouissance des droits et libertés reconnus dans la
présente Convention doit être assurée, sans distinction
aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la
religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine
nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la
fortune, la naissance ou toute autre situation. ». Ici, le texte
prévoit donc des critères qui ne sauraient être entendus
comme limitatifs en raison du mot « notamment » qui laisse une
certaine ouverture à l'établissement d'autres critères
discriminatoires. En effet, la prohibition d'un certain nombre de
critères ne saurait en aucun cas se lire comme une autorisation des
autres critères de différenciation23.
Chaque État ayant ratifié la Convention s'engage
à la respecter et à reconnaître ces droits et ces
libertés aux ressortissants relevant de leur juridiction.
Très prévenante et afin de souligner son
importance majeure, la Convention vient créer une Cour européenne
des Droits de l'Homme qui siège à Strasbourg. Elle a une
compétence concernant l'interprétation et l'application de la
Convention et peut être saisie par « toute personne physique,
toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se
prétend victime d'une violation par l'une des Hautes Parties
contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses protocoles
». Le respect des droits figurant dans ce texte semble donc
assuré de manière efficace par cette saisie
18 ) Art.3 , Traité de Londres, 5 mai 1949
19 ) Art.2 , Convention européenne des Droits de l'Homme,
4 novembre 1950
20 ) Art.5, Convention européenne des Droits de l'Homme, 4
novembre 1950
21 ) Art.8, Convention européenne des Droits de l'Homme, 4
novembre 1950
22 ) Art.3, Convention européenne des Droits de l'Homme, 4
novembre 1950
23 ) AUZERO (G.) , DOCKES (E), Droit du travail, Dalloz
30e éd. , 2016
individuelle et même inter-étatique24.
Les arrêts qu'elle rend ont force obligatoire pour les
Parties contractantes parties au litige. Le Comité des Ministres aura
pour mission d'en surveiller l'exécution.
La Cour peut aussi donner des avis consultatifs sur des
questions juridiques concernant la Convention et ses protocoles.
Tout est mis en place afin d'assurer la bonne
compréhension et la bonne application des règles contenues dans
cette Convention européenne des Droits de l'Homme.
Cependant, cette dernière est vite apparue comme
insuffisante notamment parce que les actes de droit communautaire
dérivé n'étaient pas soumis aux droits fondamentaux
reconnus aux ressortissants. Ces actes sont des actes législatifs pris
par les institutions européennes telles que le Conseil de l'Union
européenne et le Parlement européen dans l'exercice des
compétences prévues par les traités. En effet, les
États membres n'avaient aucune juridiction compétente pour en
contrôler la légalité. Puis, au niveau communautaire, la
Cour de Justice, faute de dispositions conventionnelles qui
reconnaîtraient des droits fondamentaux perçus comme des normes de
référence, ne pouvait en aucun cas agir25.
B ) L'apparition du principe de non-discrimination comme droit
fondamental de l'UE
Ce sont des arrêts nationaux des juridictions
constitutionnelles italienne26 et allemande27 qui ont
souligné la lacune originelle des traités. La Cour de Justice de
la communauté européenne a alors été poussée
à agir. Dès 1969, elle évoque « les droits
fondamentaux de la personne, compris dans les principes généraux
du droit communautaire » dont elle « assure le respect 28 »
puis, en 1970, évoque « le respect des droits fondamentaux »
comme en faisant partie intégrante29.
24 ) Art.33, Convention européenne des Droits de l'Homme,
4 novembre 1950
25 ) ROUX (J) , Droit général de l'Union
européenne, Lexis Nexis, 4ème éd. , 2012
26 ) Arrêt San Michele, 27 décembre 1965
27 ) Arrêt Neumann, 18 octobre 1967
28 ) CJCE, 12 novembre 1969, Stauder
29 ) CJCE, 17 décembre 1970, Internationale
Handelsgseslschaft
Afin de découvrir des droits fondamentaux sous la forme
de principes généraux du droit communautaire, la CJCE a
été puiser dans les « traditions constitutionnelles communes
aux États membres 30 » afin notamment que ne subsistent pas «
des mesures incompatibles avec les droits fondamentaux reconnus et garantis par
les Constitutions de ces États 31». De plus, elle s'est
aussi appuyée sur les normes internationales telles que le Pacte
international sur les Droits civils et politiques de 1966 et la
Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 ou surtout, la
Convention européenne des Droits de l'Homme32.
La Cour de Justice est alors parvenue à dégager
un corpus communautaire des droits fondamentaux définissant alors
l'Europe communautaire comme une « Communauté de droit »
33. Sont alors reconnus comme droits et libertés fondamentaux
des principes formels comme le principe de non-rétroactivité de
la loi pénale34 ou le principe de la présomption
d'innocence35. Sont aussi reconnus des droits substantiels tels que
la liberté religieuse36, la liberté
d'association37, le droit au respect de la vie
privée38 et familiale39 ou la liberté
d'expression40. De plus, le principe de non-discrimination se voit
érigé dans un arrêt de la CJCE en date du 19 octobre
197741, et plus précisément le principe de
non-discrimination entre les sexes42 . Ce principe a donc
été érigé en principe général et ce,
alors que le Traité instituant la Communauté
Européenne43 (TCE) prohibait seulement la discrimination en
raison de la nationalité44.
Donc, l'arrêt Rückdeschel de 1977 vient
présenter ce principe comme étant une « expression
spécifique du principe général d'égalité
» ce qui implique donc l'interdiction de traitements différents en
cas de situations identiques mais aussi, en quelque sorte,
30 ) CJCE, 17 décembre 1970, Internationale
Handelsgseslschaft
31 ) CJCE, 14 mai 1974, Nold C/ Commission
32 ) CJCE, 28 octobre 1975, Rutili
33 ) CJCE, 23 avril 1986, Parti écologiste Les Verts c/
Parlement européen
34 ) CJCE, 10 juillet 1984, Regina c/ Kent Kirk
35 ) CJCE, 8 juillet 1999, Hüls AG c/ Commission, pt 8
36 ) CJCE, 27 octobre 1973, Prais
37 ) CJCE, 15 décembre 1995, Bosman
38 ) CJCE, 26 juin 1980, National Panasonic
39 ) CJCE, 11 juillet 2002 , Carpenter
40 ) CJCE, 18 juin 1991, ERT
41 ) CJCE , 19 octobre 1977, Rückdeschel
42 ) CJCE, 15 juin 1978, Defrenne
43 ) Devenu « Traité sur le fonctionnement de l'Union
» (TFU) depuis le Traité de Lisbonne du 13 décembre 2007,
entré en vigueur le 1er décembre 2009
44 ) Art.12, Traité instituant la Communauté
Européenne , 25 mars 1957
l'obligation de traitements différents en cas de
situations différentes, sauf justification objective 45.
La reconnaissance de ces droits et libertés
fondamentaux va permettre à ces derniers de s'imposer aux institutions
de l'Union Européenne dans l'élaboration d'actes de droit
dérivé mais aussi de s'imposer aux Etats membres lorsqu'ils vont
« mettre en oeuvre la réglementation communautaire
46».
Par une déclaration du 5 avril 1977, le Conseil, la
Commission et le Parlement européen ont reconnu partager la même
préoccupation pour la reconnaissance des droits et libertés. Le
traité de Maastricht a consacré la jurisprudence de la CJCE en
prévoyant que « l'Union respecte les droits fondamentaux tels
qu'ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des
Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, signée à
Rome le 4 novembre 1950, et tels qu'ils résultent des traditions
constitutionnelles communes aux États membres, en tant que principes
généraux du droit communautaire47 ». Les
droits et libertés bénéficient donc ici d'une
véritable reconnaissance, sont plus visibles et disposent d' un
surcroît d'autorité.
De plus, le traité de Lisbonne va venir consolider
cette reconnaissance. En effet, il affirme que « les droits
fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et tels
qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux
États membres, font partie du droit de l'Union en tant que principes
généraux 48». Ici, le traité de
Lisbonne vient donc confirmer la codification de la jurisprudence communautaire
de la CJCE. Ces droits s'imposent désormais aux institutions de l'Union
mais aussi aux États membres car ces droits font « partie du droit
de l'Union » au lieu d'être respectés par l'Union comme le
précisait le traité de Maastricht.
Cependant, ces droits n'étaient pas facilement
accessibles par les citoyens européens et donc par les entreprises en ce
qui concerne le principe de non-discrimination. L'élaboration d'un texte
précis et visible par le plus grand nombre paraissait donc
nécessaire.
45 ) HERNU (V.R), Principe d'égalité et
principe de non discrimination dans la jurisprudence de la Cour de justice des
Communautés européennes, LGDJ, 2003
46 ) CJCE, 13 juillet 1989, Wachauf
47 ) Art. F, §2 du Traité de Maastricht, devenu
art.6, §2 TUE
48 ) Art 6, §3 TUE modifié
C ) La Charte des Droits fondamentaux de l'Union
européenne
L'une des premières chartes européennes
regroupant les droits fondamentaux est la Charte sociale européenne.
Elle a été signée le 18 octobre 1961 à Turin et
révisée le 3 mai 1996 à Turin. Elle a été
établie afin de venir consolider les droits contenus dans la Convention
européenne des Droits de l'Homme de 1950. Elle prévoit le droit
au travail, le droit de négociation collective, le droit à la
sécurité sociale, le droit à l'assistance sociale et
médicale, le droit de la famille à une protection sociale,
juridique et économique. De plus, elle garantit aussi la jouissance de
ces droits sans discrimination.
Par ailleurs, une autre charte plus spécifique a vu le
jour : la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des
travailleurs.
Elle a été adoptée le 9 décembre
1989 lors du Conseil européen de Strasbourg. En parallèle de la
Charte sociale européenne, elle vient mettre en lumière de
façon plus poussée les droits sociaux dans le domaine du travail
en s'inspirant des textes internationaux et européens existants.
Elle prévoit donc l'accès à la formation
sans discrimination mais reste muette en ce qui concerne la discrimination
à l'embauche. Cependant, elle prévoit l'égalité
hommes-femmes en ce qui concerne « l'accès à l'emploi »
ce qui peut constituer une maigre consolation.
Cependant, soucieux de donner une plus grande
visibilité aux droits fondamentaux dégagés notamment par
la CJCE , les États membres se sont penchés sur
l'élaboration d'un texte spécifique accessible au plus grand
nombre.
Les Conseils européens de Cologne et de Tempere de juin
et décembre 1999 ont donc donné mandat à un groupe de
travail afin que soit élaborée une charte regroupant l'ensemble
des droits fondamentaux en vigueur au niveau de l'Union Européenne. Cet
aréopage était composé d'un représentant par
État membre soit 15 représentants car l'UE comptait alors 15
États , 30 représentants des parlements nationaux, 16
représentants du Parlement européen et un représentant de
la Commission . C'est alors sous la présidence de l'ancien
président de la République Fédérale Allemande ,
Roman Hertzog, que la Charte vit le jour et fut proclamée solennellement
le 7 décembre 2000.
De plus, l'article 23 de cette Charte dispose «
L'égalité entre les hommes et les femmes doit
Concernant son contenu, le préambule de la Charte
précise que « l'Union se fonde sur les valeurs indivisibles et
universelles de dignité humaine, de liberté,
d'égalité et de solidarité; elle repose sur le principe de
la démocratie et le principe de l'État de droit. Elle place la
personne au coeur de son action en instituant la citoyenneté de l'Union
et en créant le principe de liberté, de sécurité et
de justice ».
Elle regroupe des principes reconnus au niveau international
par l'ONU et l'OIT, ceux inscrits dans la Convention européenne de
sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales de 1950
ainsi que dans la Charte des Droits sociaux fondamentaux reconnus aux
travailleurs et enfin, les principes reconnus dans la jurisprudence de la CJCE.
De par ce regroupement de principes auparavant dispersés et peu
accessibles, l'Union se dote d'un outil assurant la sécurité
juridique en son sein.
La Charte est composée de cinquante-quatre articles
répartis en sept chapitres dont six portent sur les valeurs constituant
le socle de l'UE : dignité, liberté, égalité,
solidarité, citoyenneté et justice.
Concernant le principe de non-discrimination, il a une
visée générale ici et s'applique dans tous les domaines et
pas seulement dans le cadre de l'embauche. Il est prévu au chapitre III
sur l'égalité. En effet, ce chapitre dispose premièrement
dans son article 2 que « est interdite, toute discrimination
fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines
ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la
langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre
opinion, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la
naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. » puis
, « Dans le domaine d'application du traité instituant la
Communauté européenne et du traité sur l'Union
européenne, et sans préjudice des dispositions
particulières desdits traités, toute discrimination fondée
sur la nationalité est interdite ». Les critères repris
ici sont un véritable rappel de ceux évoqués
précédemment par les textes internationaux. Le but est d'appuyer
fortement sur la prohibition de ces critères. L'adverbe « notamment
» laisse aussi la place à l'ajout d'autres critères dont il
ne serait pas fait mention dans cette liste. Cette dernière est donc non
limitative afin de laisser aux États une marge de manoeuvre suffisante
dans l'élaboration d'autres critères.
être assurée dans tous les domaines, y
compris en matière d'emploi, de travail et de
rémunération. Le principe d'égalité n'empêche
pas le maintien ou l'adoption de mesures prévoyant des avantages
spécifiques en faveur du sexe sous-représenté.
». Cet article est donc consacré à
l'égalité homme-femme soit, à la non-discrimination entre
les sexes. La Charte appuie ici sur ce critère par le biai de son
article 23 en mettant l'accent notamment sur l'emploi et donc sur la phase
d'embauche.
Concernant sa valeur juridique, c'est avec le Traité de
Lisbonne qu'elle va acquérir force contraignante pour 25 États
membres.
Auparavant, elle prenait l'allure d'un accord
inter-institutionnel ou d'un « acte inter-institutionnel
49». Depuis le Traité de Lisbonne, la Charte a la
même valeur que les traités et est juridiquement contraignante
pour l'Union Européenne et ses institutions ainsi que pour les
gouvernements nationaux quand ils « mettent en oeuvre le Droit de
l'Union 50». Ainsi, les États membres, lorsqu'ils
édictent de nouvelles normes, se doivent de respecter les dispositions
de la Charte et de s'aligner sur cette dernière. Bien sûr, ceci
vaut aussi en matière de non-discrimination à l'embauche.
Des directives européennes ont été
créées afin de guider les pays membres lors de
l'élaboration de règles nationales en conformité avec les
textes communautaires. Elles vont venir lier les États destinataires
concernant un objectif à atteindre sans toutefois leur imposer les
moyens pour y parvenir.
D ) Les directives européennes
Les directives européennes ont pour but de faire
appliquer au niveau national des règles édictées au niveau
de l'Union Européenne en exposant la base qui devra être mise en
oeuvre au niveau national avec les lois et les règlements et opposable
aux ressortissants des États et donc, aux entreprises.
49 ) CE, 5 janvier 2005, Deprez et Baillard
50 ) Traité de Lisbonne, 1er décembre 2009
Plusieurs directives sont relatives à la
non-discrimination et applicables au cas de l'embauche. Seront donc
étudiées la directive du 29 juin 2000 (1), puis celle du 27
novembre 2000 (2) et enfin celle du 5 juillet 2006 (3).
1) La directive du 29 juin 2000 mettant en oeuvre le
principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans
distinction de race ou d'origine ethnique
Cette première directive relative au principe de
non-discrimination vise particulièrement le principe concomitant de
l'égalité de traitement. Elle vient établir un cadre
contraignant en interdisant toute discrimination raciale dans le cadre de
l'Union Européenne. Elle fixe les exigences minimales quant à la
protection législative de ce principe au niveau national. Les
États membres restent libres de maintenir ou d'adopter des dispositions
plus favorables.
Cette directive n°2000/43/CE interdit donc toute
discrimination qu'elle soit directe mais aussi indirecte et considère
que le harcèlement peut constituer un fait de discrimination lorsqu'il
est lié à une distinction de race ou d'origine ethnique. La
discrimination est ici comprise dans un sens très large afin d'englober
un maximum de situations et pallier une insécurité juridique par
des différences d'interprétation devant les juridictions
nationales des États membres. De plus, elle trouve à s'appliquer
à toutes les personnes du secteur public mais aussi privé.
Également, la directive s'applique en ce qui concerne :
« a) les conditions d'accès à l'emploi,
aux activités non salariées ou au travail, y compris les
critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle
que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la
hiérarchie professionnelle, y compris en matière de
promotion;
b) l'accès à tous les types et à tous
les niveaux d'orientation professionnelle, de formation professionnelle, de
perfectionnement et de formation de reconversion, y compris l'acquisition d'une
expérience pratique;
c) les conditions d'emploi et de travail, y compris les
conditions de licenciement et de rémunération ;
d ) l'affiliation à et l'engagement dans une
organisation de travailleurs ou d'employeurs ou à toute organisation
dont les membres exercent une profession donnée, y compris les avantages
procurés par ce type d'organisations;
e) la protection sociale, y compris la
sécurité sociale et les soins de santé;
f) les avantages sociaux;
g) l'éducation;
h) l'accès aux biens et services et la fourniture
de biens et services, à la disposition du public, y compris en
matière de logement. 51»
Le champ d'application est volontairement large. En
matière de non-discrimination à l'embauche, le texte est vivement
explicite. La race et l'origine ethnique ne constituent pas un critère
de sélection. Cependant, une dérogation à ce principe peut
être mise en oeuvre lorsque la race et l'origine ethnique constituent une
« exigence professionnelle essentielle et déterminante
». Toutefois, cette dérogation encadrée car l'article 4
rappelle que ceci doit dépendre de la nature de l'activité
professionnelle ou des conditions de son exercice mais aussi, que l'objectif
soit légitime et l'exigence proportionnée. C'est donc à la
lumière de ces trois éléments que l'appréciation de
la dérogation devra être opérée.
Par ailleurs, la directive prévoit aussi les voies de
recours de telle sorte que dès qu'une personne s'estime victime du
non-respect du principe d'égalité elle puisse accéder
à une procédure judiciaire et/ou administrative52.
Elle prévoit notamment que les associations ou autres personnes morales
intéressées peuvent également engager des
procédures judiciaires pour le compte de la supposée victime ou
afin de lui apporter un appui.
Très complète, cette directive n°2000/43/CE
dispose que la charge de la preuve revient à la partie
défenderesse qui devra prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe
de l'égalité de traitement53.
51 ) Art. 3 , Directive n° 2000/43/CE du 29 juin 2000
52 ) Ibid., art. 7
53 ) Ibid., Art.8
54 ) Ibid., Art.11
55 ) Ibid., Art 13
Elle guide les États mais aussi les partenaires sociaux
et les entreprises nationales dans la promotion de l'égalité de
traitement en proposant la surveillance des pratiques sur le lieu de travail,
la rédaction de codes de conduite et la conclusion de conventions
collectives54.
Enfin, elle prévoit que chaque pays de l'UE doit
établir au moins un organisme dédié à la lutte
contre les discriminations, chargé en particulier de l'aide aux victimes
et de la conduire d'études indépendantes55.
Les États membres devaient transposer cette directive au
19 juillet 2003.
Afin d'assurer une protection complète, cette directive
est à allier avec la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre
2000.
2 ) La directive du 27 novembre 2000 portant
création d'un cadre général en faveur de
l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail
La directive n° 2000/78/CE doit se lire en
complément de la directive 2000/43/CE citée
précédemment.
Elle vient compléter cette dernière en
prônant l'égalité de traitement, pendant du principe de
non-discrimination, dans le milieu bien précis de l'emploi et du
travail. La directive vient rappeler l'importance des droits fondamentaux
reconnus par l'Union Européenne dans les chartes.
La directive n°2000/78/CE dispose dans son introduction
que «(...) toute discrimination directe ou indirecte fondée sur
la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation
sexuelle dans les domaines régis par la présente directive doit
être interdite dans la Communauté.». Elle prévoit
plus précisément que « La présente directive a
pour objet d'établir un cadre général pour lutter contre
la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'handicap,
l'âge ou l'orientation sexuelle, en ce qui concerne l'emploi et le
travail, en vue de mettre en oeuvre, dans les États membres, le principe
de l'égalité de
traitement.56 ». Il est
rappelé que l'égalité de traitement est entendue comme
l'absence de toute discrimination directe ou indirecte comme ceci était
déjà prévu par la directive n°2000/43/CE. En
matière de discrimination fondée sur la religion ou les
conviction, un handicap , l'âge ou l'orientation sexuelle , une
dérogation est possible si cette supposée discrimination est
objectivement justifiée par un objectif légitime et que les
moyens de réaliser cet objectif soient appropriés et
nécessaires. L'article 6 de la directive est totalement consacré
à l'âge afin d'appuyer cette dérogation.
De plus, la directive s'applique aussi aux personnes du
secteurs public et privé en ce qui va concerner :
« a )les conditions d'accès à l'emploi,
aux activités non salariées ou au travail, y compris les
critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle
que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la
hiérarchie professionnelle, y compris en matière de
promotion;
b) l'accès à tous les types et à
tous les niveaux d'orientation professionnelle, de formation professionnelle,
de perfectionnement et de formation de reconversion, y compris l'acquisition
d'une expérience pratique;
c) les conditions d'emploi et de travail, y compris les
conditions de licenciement et de rémunération;
d) l'affiliation à, et l'engagement dans, une
organisation de travailleurs ou d'employeurs, ou toute organisation dont les
membres exercent une profession donnée, y compris les avantages
procurés par ce type d'organisations.57 »
De par sa spécificité, cette directive
s'avère être bien plus complète que la
précédente en matière de droit du travail. Elle
protège le principe de non-discrimination à toutes les
étapes de la vie professionnelle : du recrutement, à la formation
en passant par les conditions de licenciement et de rémunération.
De plus, concernant les conditions d'accès à l'emploi, la
directive s'applique à toutes les branches d'activités et
à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle. La
complétude est donc bien effective ici. Aucun détail n'est
laissé de côté.
56 ) Art.1, Directive n°2000/78/CE du 27 novembre 2000
57 ) Ibid., Art.3
58 ) Ibid., Art.5
Par ailleurs, la directive s'attarde sur le cas des personnes
handicapées. Elle prévoit que l'employeur doit prendre les
mesures appropriées, en fonction des besoins dans une situation
concrète, pour permettre à une personne handicapée
d'accéder à un emploi, de l'exercer ou d'y progresser, ou pour
qu'une formation lui soit dispensée, sauf si ces mesures imposent
à l'employeur une charge disproportionnée58. En
d'autres termes, une obligation d'aménagement repose sur l'employeur en
matière d'accès à l'emploi des personnes
handicapées. Une marge de tolérance est tout de même
laissée si les mesures qui s'imposent ont une charge
disproportionnée.
Enfin, concernant les recours ouverts aux victimes de
discrimination, la directive n°2000/78/CE reprend les mêmes
éléments que la directive n°2000/43/CE. Les
éléments sont aussi les mêmes en matière de charge
de la preuve, de mise en place d'outils dans les entreprises et de
création d'un organisme dédié à a lutte contre la
discrimination. Ceci montre très clairement que ces deux directives se
complètent, s'assemblent, s'unissent dans le cadre de la création
ou de l'amélioration du droit national des États.
Les États membres devaient transposer cette directive au
plus tard le 2 décembre 2003.
Cependant, force est de constater que les différences
de traitement en fonction du sexe n'avaient pas été
abordées et mises à jour.
3) La directive du 5 juillet 2006 relative à la mise
en oeuvre du principe de l'égalité des chances et de
l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière
d'emploi et de travail
La directive n°2006/54/CE est relative au principe de
l'égalité des chances et de l'égalité de traitement
entre les hommes et les femmes dans le domaine précis de l'emploi et du
travail.
Elle fait suite à la directive du 23 septembre 2002 qui
modifiait la directive n° 76/207/CEE relative à la mise en oeuvre
du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en
ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et
à la promotion professionnelles, et les
d) l'affiliation à, et l'engagement dans, une
organisation de travailleurs ou d'employeurs, ou toute organisation dont les
membres exercent une profession donnée, y compris les
conditions de travail.
En effet, la directive n°2006/54/CE constitue une refonte
nécessaire face à l'évolution sociale et
l'évolution des moeurs. Elle dispose dans son introduction que
désormais « La Cour de justice a considéré que le
champ d'application du principe d'égalité de traitement entre les
hommes et les femmes ne saurait être réduit aux seules
discriminations fondées sur l'appartenance à l'un ou l'autre
sexe. Eu égard à son objet et à la nature des droits qu'il
tend à sauvegarder, ce principe s'applique également aux
discriminations qui trouvent leur origine dans le changement de sexe d'une
personne. ». Le changement de sexe est donc explicitement visé
alors qu'il n'était pas abordé dans les directives
précédentes. Ceci constitue une avancée majeure dans la
protection de la discrimination à l'embauche.
Par ailleurs, la directive n° 2006/54/CE vient
définir la discrimination fondée sur le sexe de manière
très large car elle va inclure la discrimination directe et indirecte
mais aussi le harcèlement et le harcèlement sexuel «
ainsi que tout traitement moins favorable reposant sur le rejet de tels
comportements par la personne concernée ou sa soumission à
ceux-ci », l'injonction de pratiquer à l'encontre d'une
personne une discrimination fondée sur le sexe et enfin, les traitements
défavorables à l'encontre d'une femme enceinte ou en congé
maternité. Le champ est donc large de manière à ce que
plusieurs situations soient couvertes.
La directive vient s'appliquer aux secteurs public et
privé en ce qui va concerner :
« a) les conditions d'accès à l'emploi,
aux activités non salariées ou au travail, y compris les
critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle
que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la
hiérarchie professionnelle, y compris en matière de
promotion;
b) l'accès à tous les types et à tous
les niveaux d'orientation professionnelle, de formation professionnelle, de
perfectionnement et de formation de reconversion, y compris l'acquisition d'une
expérience pratique du travail;
c )les conditions d'emploi et de travail, y compris les
conditions de licenciement ainsi que la rémunération, comme le
prévoit l'article 141 du traité;
avantages procurés par ce type d'organisation.
59»
L'égalité de traitement entre les sexes ,
pendant du principe de non-discrimination, trouve donc à s'appliquer
tout au long de la vie professionnelle du recrutement jusqu'à à
la formation et au licenciement. Les éléments repris sont les
mêmes que ceux de la directive 27 novembre 2000 portant création
d'un cadre général en faveur de l'égalité de
traitement en matière d'emploi et de travail.
Même si cette directive de 2006 , n'apporte pas de
nouveauté majeure mis à part le changement de sexe, elle se
devait d'être mise en place afin de concorder avec les évolutions
sociales des États membres.
Les Etats membres devaient transposer cette directive au plus
tard le 15 août 2008.
Enfin, elle vient en complément des deux directives
étudiées précédemment, à savoir la directive
n ° 2000/43/CE et la directive n°2000/78/CE qui elles,
prévoyaient le principe de l'égalité de traitement entre
les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique ainsi que
l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail.
Ces deux dernières directives étaient restées muettes sur
la discrimination fondée sur le critère de l'identité
sexuelle en raison de l'existence de la directive de 1976 refondée par
la directive de 2002, devenue quelque peu « arriérée »
au vu des évolutions de la société et donc, revue par la
directive du 5 juillet 2006.
L'ensemble formé par ces trois directives majeures en
matière de lutte contre la discrimination à l'embauche devait
donc être transposé au niveau national par les pays membres
à des dates précises. De ces directives européennes, va
donc découler le droit national. La France a donc dû s'adapter et
adapter ses normes législatives et réglementaires en fonction des
directives européennes imposées afin que le droit national reste
en adéquation avec la norme supérieure européenne.
Les ressortissants des États et donc, les entreprises,
y seront soumis ce qui permettra de promouvoir le principe de
non-discrimination à l'embauche qui passe par le respect et par la
conformité des actes aux normes.
59 ) Art.14, Directive n°2006/54/CE du 5 juillet 2006
L'une des premières lois en matière de
lutte contre les discriminations de manière
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