CONCLUSION GENERALE
L'accélération des réformes
décentralisatrices intervenue au Burkina Faso avec l'avènement de
la communalisation intégrale a suscité bien des espoirs et
d'appréhensions, et déjà quelques difficultés. Les
attentes ont été alimentées par des promesses
d'efficacité accrue dans la fourniture de services appropriés et
adaptés aux besoins locaux, de poursuite des efforts d'ancrage des
valeurs démocratiques au plan local et d'une participation plus active
de la population locale à l'administration de ses affaires. Ensemble,
ces avantages devaient contribuer de façon sensible à une
réduction de la pauvreté. Mais l'atteinte de ces objectifs ne
saurait se faire sans une maîtrise, par les premiers acteurs, des normes
qui gouvernent la décentralisation.
Là se situe tout l'intérêt de notre
réflexion sur « le défi de l'appropriation des textes de
la décentralisation par les élus locaux : cas de la commune
rurale de Kampti ».
Nous avons voulu à travers cette étude apporter
notre contribution à la réflexion pour une meilleure
appropriation du processus de décentralisation par les élus
locaux de la commune de Kampti. C'est dans cette optique que les objectifs
spécifiques ont porté sur le diagnostic du niveau de connaissance
des textes de la décentralisation afin de repérer les lacunes et
les insuffisances rencontrées dans l'accomplissement des missions
assignées aux conseillers. Il s'est agi également de faire des
suggestions d'une part, en vue de permettre à ces derniers de participer
pleinement aux délibérations lors des sessions et d'autre part,
leur faciliter la préparation, la participation et le compte rendu des
délibérations du conseil municipal à la population.
Au vu de ces objectifs, des hypothèses ont
été émises. La démarche adoptée a permis de
les vérifier. Il en résulte ce qui suit :
L'hypothèse principale selon laquelle les élus
locaux de manière générale ne se sont pas approprié
les textes qui régissent la décentralisation est
vérifiée. A l'observation, il ressort d'après les
données et l'analyse des indicateurs de vérification que si la
décentralisation est présentée et perçue comme un
instrument de participation et d'autonomisation des acteurs locaux, son
appropriation par les élus dans le cas de la
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commune de Kampti est loin d'être certaine. Pour preuve,
le niveau de connaissance des textes de la décentralisation de
manière générale et du Code général des
collectivités territoriales plus particulièrement reste
approximatif dans l'ensemble - 16,66 %-.L'animation de la vie publique
notamment à travers la consultation et le compte rendu aux populations
à la base ne semblent pas non plus être une réalité.
En témoigne l'insatisfaction de la population (78 %) quant à
l'implication des élus dans la gestion des affaires locales. Ceci
entraine pour conséquence directe une participation timide de la
population à l'oeuvre décentralisatrice. En effet, si les
citoyens dans leur majorité ont une connaissance des organes communaux
dont le Maire (98 %), le conseil municipal (90 %) les membres du CVD (87 %), il
n'en n'est pas ainsi concernant les commissions permanentes (07 %) et les
adjoints au maire (24 %). Pis, la participation des citoyens aux sessions du
conseil municipal est très faible (03 %).
Quant à la première hypothèse
spécifique qui présume que l'analphabétisme de la
majorité de ces élus locaux constitue une entrave à une
participation productive aux sessions du conseil municipal, elle se
vérifie par le fait que les conseillers analphabètes ne peuvent
pas prendre connaissance des documents écrits afférant à
l'ordre du jour des sessions du conseil et qui devraient être joints aux
convocations pour la tenue desdites sessions. Aussi, cela se ressent-il au
cours des débats du conseil où leur participation n'est pas
particulièrement remarquable. C'est pourquoi, même le jargon
élémentaire relatif aux actions quotidiennes des élus
notamment le budget (33 %) le compte administratif (40 %), le compte de gestion
(30 %) ne sont pas non plus suffisamment appréhendés par ces
premiers acteurs du développement communal. En plus les conseillers sont
également handicapés par leur illettrisme quand il s'agit de
prendre des notes afin de garantir la fidélité du compte rendu
à population d'où la non tenue de ces comptes rendus par la
majorité d'entre eux.
Enfin la dernière hypothèse spécifique
qui, selon laquelle les élus de Kampti rencontrent des
difficultés dans la mise en oeuvre quotidienne de la politique de
décentralisation de façon générale se
vérifie également pour deux raisons. La première est la
lourdeur du conseil municipal, liée à la pléthore du
nombre de conseillers. En effet, la prise en charge des indemnités de
sessions des 234
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conseillers que compte la commune annihile les efforts de
développement. Ce gros effectif de conseillers a également un
impact négatif sur la tenue sereine des sessions. Elle se ressent aussi
au cours des formations données à ces conseillers. La
deuxième cause explicative de ces difficultés est liée
à l'inadéquation et aux lacunes des textes dont le code
électoral et le CGCT.
Pour réussir à relever le défi de
l'appropriation des textes de la décentralisation par les élus
locaux, l'étude a abouti à des suggestions dont la
synthèse est la suivante : Premièrement, à l'adresse des
collectivités locales, les différentes suggestions visent le
changement de comportement notamment de la part des élus mais aussi de
la population. Il y a lieu également pour la mairie de prendre un
certain nombre de mesures relativement à l'organisation pratique des
sessions du conseil municipal, à la politique de communication et
à l'alphabétisation. Dans un second lieu, l'attention des
autorités gouvernementales a été appelée sur les
lacunes du découpage du territoire communal de Kampti. En outre les
partenaires techniques et les partis politiques ont été
invités à réorienter et à renforcer la formation
des élus locaux. Cependant, au-delà de la question des aptitudes
des élus des communes rurales combien nécessaire, la
réussite de la décentralisation dépend aussi et surtout
des moyens financiers et humains mis à la disposition de ces communes
naissantes.
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