Section 2. COUTS DONT L'ISSUE N'EST PAS ENCORE
DETERMINEE
Comme étudié au niveau de la première
partie du présent mémoire, certains coûts de
pré-production sont initialement porté à l'actif dans
l'attente du résultat des activités y relatives. Le traitement
comptable de ces coûts depuis leur engagement jusqu'à leur
évaluation, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'ils conduisent
à la découverte de réserves minérales
commercialisables ou jusqu'à ce qu'ils s'avèrent infructueux, est
différent selon qu'il s'agit de la méthode du coût complet
ou de la méthode des efforts réussis.
157
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
Sous la méthode du coût complet, tous les
coûts de pré-production sont capitalisés comme partie d'un
centre de coûts particulier et sont amortis en fonction de
l'épuisement des réserves contenues dans ce centre de
coûts. Cependant, certains coûts peuvent être exclus de la
base amortissable. Il s'agit des coûts considérés comme non
associés à des réserves minérales identifiables
tels que les coûts d'acquisition des propriétés
minières non évaluées et les coûts d'exploration
dont l'issue n'est pas encore déterminée. De même, dans un
centre de coûts non encore productif, l'ensemble des coûts encourus
est capitalisé jusqu'à découverte de réserves
commerciales ou l'abandon des propriétés minières en
question.
Sous la méthode des efforts réussis, il s'agit
des coûts d'acquisition des propriétés minières non
encore évaluées ainsi que des coûts des forages
d'exploration et des coûts d'évaluation dont le résultat
n'est pas encore connu à la date de clôture.
Dans la mesure où ces coûts sont
différés à l'actif au-delà de la période
comptable durant laquelle ils sont encourus, et sont exclus de la base
amortissable, ils doivent faire l'objet d'une évaluation
séparée pour dégager toute perte de valeur
éventuelle.
Dans son Exposure Draft (ED 6), Exploration for and
Evaluation of Mineral resources, publié en janvier 2004, l'IASB
désigne de tels actifs sous l'appellation "Actifs d'exploration et
d'évaluation". Ce même document fournit les
définitions suivantes90:
actifs d'exploration et
Dépenses d'exploration et d'évaluation
comptabilisées entant
d'évaluation qu'actifs
90 IASB, ED 6, Exploration for and Evaluation of
Mineral resources, Annexe A, p. 17:
exploration and evaluation assets
Exploration and evaluation expenditures recognised as assets.
exploration and
evaluation expenditures
Expenditures incurred by an entity in connection with the
exploration for and evaluation of mineral resources.
exploration for and The search for mineral
resources, including minerals, oil, natural gas and
evaluation of mineral similar non-regenerative
resources, as well as the determination of the
resources technical feasibility and commercial
viability of extracting the mineral
resource before the decision to develop the mineral resource.
158
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
dépenses d'exploration et
d'évaluation
exploration et évaluation de ressources
minérales
|
Dépenses encourues par une entité dans le cadre
de l'exploration et de l'évaluation de ressources minérales
La recherche de ressources minérales, y compris les
minerais, le pétrole, le gaz naturel et autres ressources similaires non
renouvelables, ainsi que la détermination de la faisabilité
technique et de la viabilité commerciale de l'extraction de la ressource
minérale avant la décision de développer la
ressource minérale
|
L'ED 6 susvisé précise que les dépenses
relatives aux activités suivantes peuvent être incluses dans la
prise en compte initiale des actifs d'exploration et
d'évaluation91:
(a) acquisition des droits miniers;
(b) études topographiques, géologiques,
géochimiques et géophysiques;
(c) forages d'exploration;
(d) sectionnement (trenching);
(e) échantillonnage (sampling);
(f) activités en relation avec l'évaluation de
la faisabilité technique et la viabilité commerciale de
l'extraction d'une ressource minérale.
2.1. Indicateurs de
dépréciation
Outres les sources d'information préconisées par
l'IAS 36, discutées au niveau de la section précédente,
l'ED 6 "Exploration for and Evaluation of Mineral Resources" stipule
que les informations suivantes doivent être prises en
considération pour déterminer si certains actifs d'exploration et
d'évaluation ont pu perdre de la valeur:
(a) les droits miniers acquis pour entreprendre des travaux
d'exploration sur une zone spécifique ont expiré durant la
période, ou vont expirer dans un avenir proche, et ne sont pas attendus
à être renouvelés;
91 IASB, ED 6, Exploration for and Evaluation of
Mineral resources, §7, p. 13
159
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
(b) des travaux additionnels d'exploration et
d'évaluation dans la zone spécifique ne sont ni
budgétés ni planifiés pour un avenir proche;
(c) les hypothèses de base (y compris les prix et les
taux de change) ayant servi pour l'établissement des budgets et des
plans relatifs aux travaux additionnels d'exploration et d'évaluation
dans la zone spécifique ont connu des changements significatifs avec un
effet négatif ;
(d) la décision de ne pas développer les
ressources minérales dans la zone spécifique a été
prise;
(e) l'entité a des plans pour se débarrasser de
l'actif à un prix défavorable; et
(f) l'entité ne s'attend pas à ce que les
actifs d'exploration et d'évaluation soient raisonnablement recouvrables
par le développement de la zone spécifique, ou par la vente.
A ce propos, il est à noter que si ces indices
permettent d'identifier un actif qui a pu perdre de la valeur, l'ED 6 n'a pas
fourni de précisions particulières quant à la
détermination de la valeur recouvrable d'un actif d'exploration et
d'évaluation. Actuellement, cette question fait l'objet de plusieurs
controverses.
2.2. Difficulté de détermination de la
valeur recouvrable
Dans son étude sur les industries extractives, l'IASC a
reconnu la difficulté, voire l'impossibilité, de
déterminer la valeur recouvrable des coûts d'acquisition, de
prospection, d'exploration et d'évaluation portés à
l'actif, lorsqu'ils ne sont pas associés à des réserves
commercialement récupérables. Le comité de direction de
l'étude susvisée affirme que l'IAS 36 ne peut pas être
appliquée puisque, dans l'absence de réserves commercialement
récupérables, il est impossible de déterminer une valeur
d'utilité92.
92 IASC, "Extractive Industries Issues
Paper", 2001, Basic Issue 9.5, p.194: "IAS 36 cannot be applied because
that would involve a value-in-use assessment that cannot be done because
commerciality is unknown."
160
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
En effet, à l'exception possible des coûts
d'acquisition, il n'existe pas de marché où de tels actifs
peuvent être vendus. En outre, il est impossible de déterminer des
cash-flows futurs pour l'estimation de la valeur d'utilité de ces
actifs.
L'ED 6, Exploration for and Evaluation of Mineral
Resources, n'a pas apporté de précisions
particulières sur l'évaluation des actifs d'exploration et
d'évaluation à la date de clôture. Il stipule, tout
simplement, qu'après comptabilisation initiale, une entité doit
appliquer soit le modèle de coût soit le
modèle de la réévaluation pour évaluer ses
actifs d'exploration et d'évaluation à la date de clôture.
Ces deux modèles sont expliqués par l'IAS 16 et l'IAS 38.
A ce propos, il est à noter que, faute de pouvoir leur
affecter une valeur d'utilité, certains auteurs pensent que les
dépenses d'exploration et d'évaluation, telles que
définies par l'ED 6, ne peuvent être considérées
comme des actifs au sens du cadre conceptuel de la comptabilité
financière. Ils recommandent, par conséquent, de les passer en
charges au moment où elles sont encourues. D'autres auteurs
préconisent, par contre, de différer à l'actif de telles
dépenses jusqu'à leur évaluation définitive, et ce,
sans évaluation à la date de clôture.
2.3. Groupement de plusieurs actifs
L'IAS 36 impose la comptabilisation d'une perte de valeur
lorsque la valeur comptable d'un actif est supérieure à sa valeur
recouvrable. Lorsqu'il n'est pas possible d'estimer la valeur recouvrable d'un
actif pris individuellement, une entreprise doit déterminer la valeur
recouvrable de l'unité génératrice de trésorerie
à laquelle l'actif appartient. Dans son document "Basis for conclusions
on Exposure Draft ED 6", le conseil de l'IASB a souligné que l'IAS 36
doit être appliquée à tous les actifs, y compris les actifs
d'exploration et d'évaluation, parce qu'autrement certains actifs
pourraient être comptabilisés à une valeur
supérieure à leur valeur recouvrable93.
Toutefois, le conseil de l'IASB a exprimé son
inquiétude concernant l'utilisation de la notion d'unité
génératrice de trésorerie, telle que définie par le
paragraphe 5 de l'IAS 36, pour évaluer les actifs d'exploration et
d'évaluation à la date de clôture. En effet, l'utilisation
de cette
93 IASB, Basis for conclusions on exposure draft ED
6 "Exploration for and Evaluation of Mineral Resources", Janvier 2004, §
BC16. "The Board is of the view that it is important that IAS 36 applies to all
assets, including exploration and evaluation assets, because otherwise assets
might be carried at an amount exceeding recoverable amount."
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Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
définition pourrait être en contradiction avec
certaines dispositions de l'ED 6 et résulter, par conséquent, en
la constatation d'une perte de valeur injustifiée dans certains
cas94.
Le conseil de l'IASB précise que la définition
d'une unité génératrice de trésorerie, telle que
donnée par l'IAS 36, peut créer une incertitude quant à la
cohérence des politiques et pratiques comptables existantes avec les
normes internationales. Ceci est dû au fait que les actifs d'exploration
et d'évaluation ne sont généralement pas attendus:
(a) à faire l'objet de projections futures de
trésorerie dans le cadre d'un projet spécifique de
développement, et ce, à cause de l'incertitude qui règne
sur l'existence de réserves minérales;
(b) à avoir un prix de vente déterminable;
(c) à pouvoir être identifiés avec
d'autre actifs générant des entrées de trésorerie
dans le cadre d'une unité génératrice de trésorerie
spécifique.
Ces dispositions impliquent qu'un actif d'évaluation et
exploration serait souvent jugé ayant perdu de la valeur si la
définition actuelle d'une unité génératrice de
trésorerie était appliquée.
Pour éviter un tel résultat, l'ED 6 propose une
autre définition de l'unité génératrice de
trésorerie pour les actifs d'exploration et d'évaluation.
Lorsqu'une entreprise, ayant des actifs d'exploration et d'évaluation,
applique les normes internationales (IFRS) pour la première fois, elle
peut choisir d'appliquer à ces actifs, soit la définition
d'unité génératrice de trésorerie fournie par le
§5 de l'IAS 36, soit la définition d'une unité
génératrice de trésorerie pour les actifs d'exploration et
d'évaluation.
Telle que définie par l'ED 6, une
unité génératrice de trésorerie pour
les actifs d'exploration et d'évaluation est le plus petit
groupe identifiable d'actifs, y compris les actifs d'exploration et
d'évaluation, dont l'utilisation continue génère des
entrées de trésorerie et pour lequel des
94 IASB, Basis for conclusions on exposure draft ED
6 "Exploration for and Evaluation of Mineral Resources", Janvier 2004, §
BC17. "However, the Board is also concerned that requiring entities to use the
definition of a cash-generating unit in paragraph 5 of IAS 36 when assessing
exploration and evaluation assets for impairment would negate the effects of
the other proposals in this draft IFRS and might result in the inappropriate
recognition of impairment losses in some circumstances."
162
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
tests de dépréciation ont été
appliqués par l'entreprise sous ses politiques comptables
appliquées pour ses états financiers annuels les plus
récent95. Cette définition vise à
"légaliser", en quelque sorte, les pratiques actuelles suivies
par les entreprises pétrolières en matière
d'évaluation d'actifs d'exploration et d'évaluation, et ce,
jusqu'à l'élaboration d'une norme internationale
spécifique aux activités extractives96.
L'ED 6 précise que l'unité
génératrice de trésorerie pour les actifs d'exploration et
d'évaluation ne doit pas être plus large qu'un secteur tel
que défini par l'IAS 14, Information sectorielle. A ce propos,
l'IAS 14 distingue deux types de secteurs, le secteur d'activité et le
secteur géographique. A notre avis, l'ED 6 vise le secteur
géographique qui est défini comme étant (IAS 14,
§9):
"une composante distincte d'une entreprise engagée
dans la fourniture de produits ou de services dans un environnement
économique particulier et exposée à des risques et une
rentabilité différents des risques et de la rentabilité
des autres secteurs d'activité opérant dans d'autres
environnements économiques."
L'ED 6 précise, par ailleurs, que tous les actifs
autres que les actifs d'exploration et d'évaluation inclus dans une
unité génératrice de trésorerie pour les actifs
d'exploration et d'évaluation doivent faire l'objet de tests de
dépréciation séparés conformément aux
dispositions de l'IAS 36. Ces tests doivent être appliqués, en
comptabilisant toute perte de valeur éventuelle, avant de
procéder à l'évaluation des actifs d'exploration et
d'évaluation tel que requis par l'ED 6.
2.4. Détermination forfaitaire de la
dépréciation
Selon l'étude menée par l'IASC97 en
2001, plusieurs auteurs pensent qu'il est pratiquement impossible de
déterminer si une perte de valeur des actifs d'exploration et
d'évaluation a eu lieu et d'estimer le montant de la
dépréciation, le cas échéant. Ces auteurs affirment
qu'une
95 IASB, ED 6, "Exploration for and Evaluation
of Mineral resources", Appendix A, " cash-generating unit for
exploration and evaluation assets: The smallest identifiable group of
assets that, together with exploration and evaluation assets, generates cash
inflows from continuing use on which impairment tests were performed by an
entity under the accounting policies applied in its most recent annual
financial statements."
96 Cf. IASB, Basis for conclusions on exposure
draft ED 6 "Exploration for and Evaluation of Mineral Resources", Janvier 2004,
BC8, BC9 et B0.
97 IASC, "Extractive Industries Issues Paper", 2001,
§9.70, p.194
163
Mise en Application de l'IAS 36 dans le Cadre des
Activités de Recherche et de Développement des
Hydrocarbures
solution plus simple et logique pour le problème de
l'évaluation de ce type de coûts serait de maintenir la dotation
globale pour dépréciation à un pourcentage
prédéterminée de la valeur totale de ce type d'actifs. Les
différents actifs peuvent être classés dans plusieurs
groupes en fonction de certains attributs logiques, tels que le type de
coûts, l'emplacement, l'années d'engagement, et ce, afin de
déterminer des taux de perte de valeur qui soient réalistes et
significatifs.
Ainsi, le solde prédéterminé de la
provision pour dépréciation serait un pourcentage des coûts
différés; le pourcentage peut être déterminé
sur la base du pourcentage des coûts différés à
l'actif et ayant été déterminés sans valeur sur une
période passée, de cinq années, par exemple. Les adeptes
de cette approche dénotent que cette méthode est simple à
appliquer et réduit le risque de porter à l'actif des coûts
n'ayant pas de valeur.
D'autres auteurs pensent que ce type d'amortissement peut
constituer un moyen dangereux de lissage du résultat. Ils
préconisent, par conséquent, de ne pas procéder à
la dépréciation de tels actifs. Ces auteurs avancent comme
argument le fait que, bien que certaines propriétés dans un
groupe particulier peuvent s'avérer sans valeur, la valeur totale des
«bonnes» propriétés peut dépasser de loin la
valeur des "mauvaises" propriétés.
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