I.3.2/ La résistance au changement
Il est difficile de traiter la question de changement sans
évoquer le thème de résistance au changement comme le
montrent les nombreuses contributions théoriques et empiriques, ce qui
justifie qu'elle en est un enjeu important. Ces résistances sont le plus
souvent présentées comme l'apanage des destinataires ou des
victimes du changement (Strebel, 2000)16.
16 Paul Strebel, Pourquoi les salariés
résistent-ils au changement ?, Harward Business Review, Les Editions
d'organisation, 2000.
19
TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion
(2ème promotion), ISIG International
Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et
défis de la transformation d'une organisation à but non
lucratif
Ainsi, Bareil et Savoie (1998) définissent sept phases
de préoccupations et expressions connexes :
Tableau n°4 : Sept phases de
préoccupation selon Bareil et Savoie
Le destinataire se préoccupe de la (du)
:
|
Phase 1. Aucune préoccupation
|
Le destinataire ne se sent pas personnellement concerné
par le changement, il poursuit ses activités habituelles et fait «
comme si de rien n'était ». Il demeure indifférent au
changement organisationnel.
|
Phase 2. Sécurité de son poste
|
Le destinataire est inquiet des incidences du changement sur
lui-même et sur son poste. Il s'interroge sur le maintien de son poste
à la suite de l'implantation du changement et sur les
conséquences de ce dernier sur son rôle, ses
responsabilités, son statut et son pouvoir décisionnel. Il a
l'impression de ne plus maîtriser la situation ou de ne plus savoir ce
qui l'attend, et se questionne sur sa place dans l'organisation.
|
Phase 3. Volonté et sérieux du
changement
|
Le destinataire se questionne sur les impacts et les
conséquences qu'aura le changement sur l'organisation. Il désire
s'assurer que son investissement en temps et en énergie en vaudra la
peine. Il se demande entre autres jusqu'à quel point l'organisation est
sérieuse dans le maintien du changement à plus long terme et si
le changement sera rentable.
|
Phase 4. Nature du changement
|
Le destinataire quitte la zone de confort et commence à
s'interroger sur la nature exacte du changement. Il cherche des réponses
à sa méconnaissance du changement. Il devient attentif et
proactif et souhaite obtenir davantage de précisions sur le changement :
de quoi s'agit-il, quand et comment cela se fera t-il, etc.
|
Phase 5. Soutien disponible
|
Le destinataire est disposé à se conformer au
changement prescrit et à en faire l'essai. Cependant, il éprouve
un sentiment d'incompétence par rapport à ses nouvelles
fonctions, habiletés et attitudes. Il se dit inquiet sur sa
capacité à réussir et c'est pourquoi il s'interroge sur le
temps, les conditions, l'aide et le soutien qui lui sont offerts. Il veut
pouvoir être sûr de réussir son adaptation.
|
Phase 6. Collaboration avec autrui
|
Le destinataire se montre intéressé à
collaborer et à coopérer avec d'autres. Il désire partager
son expérience avec des collègues et s'enquérir de leurs
façons de faire. Il veut s'impliquer dans la mise en oeuvre du
changement.
|
Phase 7. Amélioration continue du
changement
|
Le destinataire recherche de nouveaux défis. Il
désire améliorer ce qui existe déjà, en modifiant
de façon significative son travail ou ses responsabilités, ou en
proposant de nouvelles applications du changement. Il remet en question ses
méthodes de travail et souhaite améliorer ou
généraliser le changement.
|
Source : Bareil et Savoie
(2005)17
Ces étapes explicitées dans le tableau
traduisent assez bien les principales préoccupations du destinataire du
changement. Elles vont d'un état d'indifférence chez le
destinataire à une implication et une appropriation du changement.
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17 Céline Bareil et André Savoie,
Comprendre et mieux gérer les individus en situation de changement
organisationnel, Gestion, vol 24, n°3, automne 1999, p90.
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(2ème promotion), ISIG International
Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et
défis de la transformation d'une organisation à but non
lucratif
Ces préoccupations telles qu'exposées par les
auteurs impliquent que la mise en oeuvre du changement se déroule selon
un processus dont chacune des étapes fait l'objet d'interrogation de la
part du destinataire.
Robins et DeCenzo (2008) définissent trois grandes
raisons qui motivent les résistances au changement : l'incertitude et la
perte des repères, la peur d'une perte au niveau personnel et le
sentiment que l'évolution n'est pas ce qu'il y a de mieux pour
l'organisation.
La question de résistances au changement est
également abordée par Collerette et al. (2008) qui
distinguent également trois (3) sources de résistances comme suit
:
- les résistances liées à la
personnalité ;
- les résistances liées au système social
;
- les résistances liées au mode d'introduction du
changement.
Cette vision nous semble un peu restrictive car elle ignore
tout le reste du processus, notamment la phase de conduite du changement durant
laquelle les actions mises en oeuvre peuvent rebuter les destinataires. Comme
exemple, un changement entamé et accepté par les destinataires
peut engendrer par la suite une restriction de l'effectif ce qui va forcement
implanter un environnement de résistance voire de sabotage.
Pour briser la résistance ou à tout le moins la
limiter, Robins et DeCenzo (2008) préconisent plusieurs
stratégies résumées dans le tableau ci-dessous :
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TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion
(2ème promotion), ISIG International
Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et
défis de la transformation d'une organisation à but non
lucratif
Tableau n°5 : Stratégies pour briser
la résistance selon Robins et DeCenzo
Technique
|
Utilisation
|
Avantage
|
Inconvénient
|
Education et
communication
|
Lorsque la résistance est
due à une désinformation
|
Efface les
malentendus
|
Peu efficace en cas de manque de confiance et de
crédibilité
|
Participation
|
Lorsque les résistants
sont assez compétents
pour apporter leur contribution
|
Accroît l'implication
et l'acceptation
|
Prend beaucoup de
temps et mène
éventuellement à une solution médiocre
|
Aide et soutien
|
Lorsque les résistants
sont victimes de craintes et d'angoisse
|
Peut faciliter
certaines adaptations
|
Coûte cher et ne garantit pas une réussite
|
Négociation et
entente
|
Lorsque la résistance est
l'oeuvre d'un groupe puissant
|
Peut permettre
« d'acheter » des
engagements
|
Peut coûter cher et offre
à d'autres la possibilité d'exercer des
pressions
|
Manipulation et cooptation
|
Lorsque l'appui d'un
groupe puissant est
nécessaire
|
Peu coûteuse,
facilité de s'assurer un soutien
|
Risque d'échec et de
perte de crédibilité de l'agent du changement
|
Coercition
|
Lorsque l'appui d'un
groupe puissant est
nécessaire
|
Peu coûteuse,
facilité de s'assurer un soutien
|
Eventuellement illégale
et peut nuire à la crédibilité de l'agent
du changement
|
Source : Robbins et DeCenzo (2008)
De façon générale, des styles sont
préconisés pour gérer efficacement le changement tout en
réduisant la résistance. Pour Livian (2010), ces styles sont :
l'autorité (changement imposé), la persuasion (changement «
vendu »), la négociation et le changement « participatif
».
L'implication, la négociation et la communication sont
des atouts essentiels pour réussir un changement. Un changement peut
être la cause de stress observé chez certains agents.
Nombre d'expériences de changement ont conduit à
des échecs. Certains auteurs présentent les causes essentielles
d'échec de ces tentatives. Ils préconisent par conséquent
des solutions pour un succès du projet de changement.
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