3.3.2 Un peuplement local
Le projet d'incorporer les fugitifs du Surinam viendrait en
complément de ce dispositif, mais Malouet estime sa mise en oeuvre
délicate car elle nécessite au préalable une concertation
avec les autorités hollandaises. Dans le même ordre d'idée,
si l'on veut s'appuyer sur la main-d'oeuvre indigène, il convient de la
fixer à des endroits voulus afin de l'évangéliser et de la
former au travail que l'on attend d'elle. Pour cela, il faut créer trois
missions le long du Marroni, du Canopi et de l'Oyapock735. Mais
Malouet n'attache aucun crédit au plan de civilisation des Indiens et
doute fort que l'on puisse en faire des colons utiles à la
métropole. Il propose cependant de les exempter de corvée et de
les rémunérer si l'on a recours à leurs
services736. En réalité, Malouet se résout
à suivre le plan de Besner au sujet du peuplement, mais il met en garde
le ministre que l'on devra agir avec
732 Ibid., p. 83.
733 Michèle DUCHET, « Malouet et le problème
de l'esclavage », op. cit., p. 66.
734 Pierre Victor MALOUET, Collection de mémoires,
tome 1, op. cit., p. 89.
735 Ibid., p. 84.
736 Michèle DUCHET, « Malouet et le problème
de l'esclavage », op. cit., p. 65-66.
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prudence afin de ne pas hypothéquer les chances de
succès. Il préconise d'employer des missionnaires
expérimentés pour traiter avec les Indiens et les marrons du
Surinam737.
3.4 Police intérieure et administration
La question de la police intérieure est abordée
par Malouet mais il se borne aux constats généraux et en livre un
condensé. « Il y a beaucoup à faire, précise-t-il.
» Il fait remarquer que les divisions et les tracasseries administratives
entravent le développement des projets car, selon lui, leur
succès dépend d'une volonté commune du gouverneur et de
l'ordonnateur d'oeuvrer dans le même sens. Malouet pointe un
problème récurrent soulevé par l'administration
bicéphale, à savoir celui de l'entente et de la collaboration en
bonne intelligence entre les deux administrateurs, peu enclins « pour
partager entre eux de bonne foi l'honneur, les fautes et les
moyens738. »
Il reprend également un projet qu'il avait
développé en 1775 devant le Comité de législation
pour les colonies, celui « d'autoriser et de créer une
assemblée des représentants de la colonie » dont l'objectif
est de discuter de l'imposition, vérifier les recettes et les
dépenses de la colonie pour en certifier les comptes, faire parvenir au
ministère des rapports sur les dysfonctionnements constatés,
préparer les règlements à établir, etc. C'est
« un des projets majeurs du nouvel ordonnateur, explique Jean Tarrade,
pour lui [...] le meilleur moyen d'imposer ses vues pour la mise en valeur des
terres basses de la colonie à l'instar des voisins hollandais de
Surinam. » Il agit en s'inspirant de la façon de faire à
Saint-Domingue où la répartition de l'impôt est
effectuée par la réunion au Cap français des deux Conseils
supérieurs du Cap et de Port-au Prince, qui tiennent une session
commune739.
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