V.1.4. LES CROYANCES
La croyance peut être définie comme un ensemble
dynamique de choses matérielles ou immatérielles auxquelles il
croit et qui d'une manière ou d'une autre détermine son agir et
sa représentation du monde. Elle fait partie de sa personne et permet de
le définir en tant qu'il est un être spécifique et
différent des autres.
Pour l'Africain traditionnel, la base de sa croyance se
résume dans tout ce que dans le passé a référence
avec ce que les ancêtres ont pris comme modèles, comme
déterminants de leur agir, de leurs pratiques, base de leur foi et de
leur représentation de l'univers et de leur société. C'est
à la base de cette croyance que prend source toutes les autres croyances
sur l'enfant qui est ici l'objet de notre propos.
Ø La croyance aux ancêtres
Pour l'Africain traditionnel, la croyance aux ancêtres
est la base de sa culture. Les ancêtres sont les fondateurs de la tribu,
ils sont de ce fait le sujet des mythes et des légendes les plus
colorés. Ils sont ceux qui ont vécu avant lui, ceux qui ont eu le
temps d'expérimenter ce que c'est que la vie et qui par
conséquent sont l'unique chemin à suivre si l'on veut aussi la
connaître, l'expérimenter et s'accomplir en tant qu'être au
monde. C'est ce qui explique que, chaque fois que l'Africain traditionnel aura
une difficulté existentielle, il ira tout de suite les consulter comme
c'est le cas avec le vieux chef déchu dans le conte Trahoré et
le mauvais chef, qui vont les consulter au travers des sorciers ou
devins comme Gollo dans le conte Kaye et Gollo lorsqu'il, était
confronté à la difficulté de retrouver sa soeur Kaye
mangée par un lion.
La consultation des ancêtres aussi se fait en Afrique
par l'organisation des cérémonies et rites divers où est
consacré un ensemble de cultes divers destinés à faire des
sacrifices pour implorer leur aide ou tout simplement pour les honorer et les
remercier. La croyance aux ancêtres peut aussi se manifester par la
croyance que les rêves sont de véritables dialogues avec eux.
Même si l'on croit que ceux qui viennent en rêve ne sont pas tous
bienfaisants,on tendra l'oreille et élèvera son esprit pour
chercher à comprendre le véritable sens des paroles et des
révélations.
Ø La croyance aux ancêtres et à
leur réincarnation
L'Africain traditionnel ne croit pas seulement aux
ancêtres ou aux dieux qu'il vénère, il croit surtout en
leur réincarnation. A cet effet, il croit que la venue au monde d'un
enfant est le retour d'un ancêtre ou tout simplement la
réincarnation d'un ancêtre ou d'un parent mort. C'est pourquoi
l'enfant est une source de richesse, la condition de toute union en Afrique. En
effet, « Mourir sans une descendance ... c'est là, aux yeux de
l'Africain l'échec absolu, la catastrophe sans appel, qui condamne non
seulement celui qui meurt sans enfants en vie, mais aussi tous les
ancêtres de sa races qui l'ont
précédé en ce monde ... » (J. Jahn
cité par J.M ;Tcheho, 2002 :71). Dans le conte
Trahoré et le mauvais chef, lorsque le vieux chef
déchu alla demander conseil aux ancêtres, ces derniers sachant que
sa femme ne pouvait plus avoir d'enfant, lui donnèrent le pouvoir
d'accoucher lui-même par son ongle. C'est par cette naissance que les
ancêtres se réincarnèrent en la personne de l'enfant
Trahoré pour venir venger le vieux chef. La croyance aux ancêtres
dans l'imagerie de l'Africain traditionnel est tellement importante que
lorsqu'il met au monde un enfant, on lui donne le nom d'un ancêtre ou
d'un parent mort. L'attribution du nom devient le moyen par lequel on
ressuscite les ancêtres, le moyen d'honorer leur mémoire, de leur
demander pardon ou de les remercier.
Ø La croyance à l'héritage du
passé
L'Africain traditionnel croit fermement que tout
héritage provenant du passé et qui est pour l'essentiel
composé d'un ensemble de normes sociales de conduites, des modes et
techniques de vie, de richesses culturelles et magico religieuses sont les
garants de toute stabilité et de tout accomplissement social et
individuel. Cette croyance au passé détermine fortement
l'éducation de l'enfant dans la société africaine
traditionnelle.
Que ce soit dans l'éducation en famille, dans sa classe
d'âge ou dans les divers cadres de l'éducation que sont les
initiations et les cérémonies de tous genres, tout ce qu'on
montre à l'enfant et qu'on lui inculque comme valeur, dépend
fortement du passé. Le conte La jeune fille désobéissante
est un exemple illustrateur: les parents s'efforcent d'éduquer en
stricte conformité avec les principes de la tribu qui sont
eux-mêmes hérités du passé et, les enfants doivent
se conformer sous peines de punition grave.
Rappelons-le, bien que l'éducation de l'enfant dans la
société traditionnelle africaine repose sur un certain nombre de
valeurs propres à son enracinement, son intégration sociale et
même son ouverture au monde, il y a des raisons de penser que la croyance
stricte au passé altère quelque peu sa prise en compte du
présent et la préparation de son avenir.
Tout compte fait, l'éducation de l'enfant, telle
qu'elle se faisait dans la société traditionnelle, le
préparait à une ouverture au monde. Dans le conte La
jeune fille désobéissante, les jeunes filles Ngo yi
et Ngo Maliga vont à une fête dans le village voisin du leur.
Celles-ci arrivent non seulement à ne pas perdre l'essentiel de leur
formation morale et culturelle mais aussi ne nuisent pas à la culture de
l'autre tribu. La société traditionnelle présente comme
anti-modèle Ngo Lipem qui, arrivée à l'autre village perd
ses propres valeurs, en s'aliénant. Par ce conte c'est le message que
porte la tradition à la modernité. Les enfants doivent apprendre
des autres sans s'acculturés, sans perdre leur culture, leur âme.
Autre croyance à laquelle s'attachent nos ancêtres, c'est sans
doute la force vitale.
Ø La force vitale
Comme nous l'avons vu précédemment, les
religions et philosophies africaines ont pour notion clé la Force
vitale, qui constitue l'essence de l'être et est susceptible de diminuer
ou d'augmenter selon certaines pratiques et rapports. Toutes les pratiques de
la vie courante ainsi que les rites religieux doivent être compris
à la lumière de ce concept.
Dans la Philosophie bantoue, le père Placide
Tempels nous dit que l'appel à Dieu, aux esprits et aux ancêtres
pourrait se résumer à l'expression «
Donne-moi de la force », et que ce qui nousapparaît comme
de la magie n'est que la mise en oeuvre de forces naturelles qui sont au
service de l''homme. « Le bonheur suprême et la seule vraie
bénédiction sont, pour les Bantous et les camerounais en
général, de posséder le plus de force vitale possible : la
pire infortune, voire la seule infortune, est la diminution de ce pouvoir.
La source de la force vitale est Dieu, l'être
suprême, l'Esprit créateur ceci est en conformité avec
les croyances africainesactuelles. Cependant, la seule manière pour 1'
homme de renouveler sa force est de se procurer celle des autres
créatures, qu'elles soient minérales, végétales,
animales ou mêmehumaines. Car la force s'écoule et se
dégrade, selon un processus s'apparentant à l'entropie. Le but
premier des traditions et rituels est de maintenir et d'augmenter
l'énergie de ceux qui les pratiquent ou pour qui ils sont
pratiqués, sans compter qu'ils les protègent d'éventuelles
attaques à leur propre force. Ils sont d'ailleurs fondés sur des
symboles ascensionnels, spectaculaires et diairétiques participant,
selon les catégories établies par Gilbert Durand dans Les
structures anthropologiques de1'imaginaire,
durégime diurne de l'image. Dans nos récit
par exemple, l'orphelin dans le récit « the orphan
boy » est le prototype de cette force vitale, ceci grâce
à son courage de braver les obstacles qui sont sur son chemin, de
transcender l'univers, sa manière de gérer les problèmes
donc il fait face. Comme un Dieu, il parvient à pendre contrôle
des différents univers tant chez les vivants que chez les morts.
Ø La prière
La présence d'une langue induit des
phénomènes dont l'existence, du moins en ce qui s'agit de ses
limites, est pratiquement indéfinissable. Il s'ensuit qu'au-delà
du profane que l'on courtoit dans la gestion quotidienne de l'existence et du
vécu du Camerounais traditionnel, il ya une autre
réalité. Il s'agit cette fois de la permanence d'une
sacralisation imposante ; une autre partie de l'existence qui exige une
présence au monde, qui elle-même convoque des attitudes et des
prédispositions.
Ces attitudes et ces prédispositions, résultent
d'une éducation qui émane le plus souvent, comme on le voit chez
bon nombre d'Africains et de Camerounais, de ce qu'on nomme par inspiration ou
encore par révélation.
Dans l'univers de l'Africain, une série
d'impératifs commande l'intervention ou le secours du sacré. Le
sacré ici répond à un appel grave et nécessaire et
devient une véritable catharsis dans la mesure où sa
réalisation dans les termes et les étapes qui constituent ses
conditionnalités mène l'homme en crise aux confins de ses
possibilités et de ses moyens utiles pour lui assurer l'équilibre
et le bonheur.
Au détour des voies tortueuses, l'homme peut avoir
rendez-vous avec le malheur, la malchance qui rompt son équilibre. Ce
faisant, il se trouve incapable de répondre aux exigences de l'instant
qui, assurément, constituent un obstacle à la quête de son
moi profond. Chez l'Africain traditionnel, et le camerounais en particulier,
cela implique plusieurs évidences : il se peut qu'il ait
offensé volontairement ou non quelqu'un.
Dans le récit la Malformation, par exemple,
c'est la rupture ou le non respect d'un interdit qui est la cause de la bosse
qui se plante dangereusement sur le dos du nouveau-né de la femme
moqueuse.
De même, dans le récit « orijin of
Gods », c'est la désobéissance des hommes qui
amène Dieu à quitter la terre et à s'éloigner des
hommes pour aller définitivement s'installer au ciel.
Cependant, chacun sait qu'en Afrique, il existe un
intermédiaire entre la divinité et les hommes : c'est un
devin ou (les totems). C'est lui seul qui est capable de rompre avec le cycle
infernal. Dans le cas de la femme moqueuse, l'offense, la moquerie est
irréparable ; aucun sacrifice ne peut rompre le malheur de voir
s'en aller la bosse sur le dos de son enfant. Si la moquerie elle-même
fut grande, la bosse, l'objet de la moquerie, plantée sur le dos du
nouveau-né, en est une sanction qui loin de s'en aller, reste un
symbole, un signe pour les autres de ce qu'il est interdit de transgresser les
normes et les traditions sous peine d'une punition exemplaire.
Le cas de cette femme représente un exemple palpable
dans l'Afrique traditionnelle. Cependant, les textes oraux en pidgin nous
fournissent encore des évocations puissantes et conséquentes. Ces
évocations, qui s'imposent d'ailleurs dans une
généralisation se moquant presque chaque fois des
particularisations dans l'ensemble des peuples et des hommes de nos lieux
d'enquête semblent être la réalité de l'ensemble des
peuples africains. Elles trouvent leur puissance dans des genres sacrés
que sont nos mythes.
Ces genres, ont de sacré le fait qu'ils ne sont dits
que dans des conditions particulières, des moments bien indiqués
et, sont concernés par chaque événement dans la vie d'un
homme qui en appelle, pour se voir retrouver une certaine normalité, le
concours bienveillant de la divinité.
Dans notre corpus « l'origine des
divinités/totems », les sujets priant, sont les hommes
qui ont eu à transgresser les recommandations, ils demandent ainsi une
protection divine. Ils veulent que l'harmonie et la paix reviennent dans leur
village. Leur prière a essentiellement un but, celui d'apaiser la
colère de Dieu. C'est ainsi que par l'intercession d'autres dieux, ils
pensent apaiser la colère du Dieu suprême.
Par ailleurs, la prière se définit comme
« l'évocation par un individu de l'être
suprême ». Dans nos différents récits, la
prière renvoie à des mots divers qui expliquent les
différentes orientations de la prière. Ces termes sont : le
dialogue et l'échange « au commencement, Dieu et les
hommes vivaient ensemble » ; l'intersection « les
hommes se sentaient abandonnés et cherchaient d'autres moyens pour
plaire à Dieu », « c'est ainsi qu'ils
fabriquaient d'autres dieux » ; la célébration
« d'autres se mirent à prier Dieu le père le regard
levé au ciel, d'autres le priait face contre terre, et d'autres
adoptèrent la station debout » ;la
malédiction « Dieu dit aux hommes « je ne peux
pas tolérer une telle insubordination et pour cela il disparu de la
surface de la terre » . Tous ces mots sont des synonymes de la
prière et démontrent que des textes, des actes religieux ou
spirituels s'y déroulent. Car selon la conception africaine de Dieu,
prier, c'est adresser des demandes à la divinité, c'est converser
avec son Dieu, c'est louer et adorer l'être suprême.
La prière est dite par les hommes de toutes les couches
sociales. Elle est adressée aux totems, aux dieux sculptés et
aux ancêtres.
A regarder de plus prêt, la prière est
perçue comme un dialogue avec les dieux. C'est dire que cet acte
qu'effectue l'homme est d'une grande importance car, il s'entretient avec les
divinités, avec l'invisible.
Pour ce faire, la prière est pour tout homme dans nos
textes un acte d'une valeur spirituel, singulier. Elle est ce par quoi l'homme
accède à un niveau supérieur de la connaissance, laquelle
est la quête pour la justification de la raison d'être de l'homme
sur la terre. Elle procure à ceux qui la pratiquent le bonheur, la paix
et la vie.
Ainsi, les termes tels que : le ciel, prier,
créer le monde, suprême, la résurrection, vie
éternelle, montrent qu'il ya dans ces récits quelque chose
de spirituel que les individus recherchent. Ils sont à la poursuite de
la vérité, de la justice pour connaitre enfin la vie
éternelle.
Cependant, celui à qui s'adressent les prières
dans nos différents récits est un Dieu particulier : il
s'agit des totems, de la déesse des eaux ou du dieu des eaux. Ils sont
ici le symbole de l'Etre Suprême ou de l'invisible.
Puisque la prière s'avère effective dans les
récits, elle se déroule non de façon ordinaire,
c'est-à-dire quotidiennement comme dans le cas de nos
sociétés modernes, mais dans des contextes singuliers. Elle est
dite soit de manière collective, soit individuel selon les
circonstances.
Dans le récit de « Ngoniton»,
la prière est adressée aux divinités mais dans le but de
résoudre un problème précis. La mère de Ngoniton
fait appel au dieu des eaux parce que sa pêche n'est plus fructueuse.
Elle demande à cette dernière de lui donner plus de poisson dans
son panier et en échange de cela, elle lui donnera sa fille unique
Ngoniton. Cette prière, si on peut le dire va aboutir à un
résultat positif puisque la femme effectivement aura un panier plein.
Mais cet échange sera puni par la suite car la femme à travers
son comportement fait montre d'individualisme et d'égoïsme.
C'est ici que l'on voit combien l'individualisme en Afrique
est semblable à une ignominie, à un opprobre et ne saurait donc
être promue au rang de valeur. L'individualisme, s'il conduit à la
ruine de la société entraîne celle de l'espèce
humaine. D'ailleurs, le récit Pourquoi la carapace de la tortue se
retrouve en mille morceaux en est une bonne illustration. Tortue en se
servant des plumes qui lui furent données généreusement
par les oiseaux afin de se rendre à un cocktail organisé au ciel,
arrive à se jouer de ses donateurs en mangeant toute la nourriture et en
buvant toute la boisson apprêtés pourtant pour tous. Il s'ensuit
que tortue eut la carapace cassée en mille morceaux à cause de
son égoïsme et de son individualisme.
Ø la religion
C'est l'ensemble des croyances, des doctrines et des pratiques
culturelles qui constituent les rapports de l'homme avec la divinité ou
le sacré. Dans nos différents récits, elle est toujours
conséquente ou induite par notre analyse lexicologique
précédente. A cet effet, les expressions suivantes :
prière, Dieu, créa le monde, résurrection,
vénéré, loué constituent des signifiés
de la religion. Car dans notre texte, la religion est vécu par la
prière, la résurrection, le culte, le discours sacré que
pratiquent les différents personnages dans nos récits. La
prière est adressée au Père Dieu pour qu'il soulage les
péchés et les lourdes souffrances. Celui qui prie se trouve dans
une telle confusion qu'il n'y a plus d'autres recours que celui de lever les
mains et son coeur dans le cadre d'un récit sacrée et
propitiatoire qui, en racontant son désarroi demande en même temps
son allégement.
Une telle souffrance est indescriptible. Sa solution est
pratiquement impossible à se réaliser au niveau de l'humain et ne
conduit évidemment que vers l'ultime sauveur qu'est Dieu dans sa
grandeur, son omnipotence.
Cette souffrance, pour la soulager par le canal de la
prière, exige la présence d'une foi imposante et certaine. Ceci,
partant du fait que l'on ne peut demander qu'à un être susceptible
d'apporter une solution efficace. Cette certitude ne peut provenir que d'une
ferme assurance qui, elle-même n'a de présence qu'à
l'expérience de certaines certitudes déjà palpées
ou palpables par le sujet priant. Cette prière, lui apparaît donc
comme un impératif, une condition sine qua non aux solutions du
problème.
L'esthétique de la sacralité est celle
fouillant chaque recoin de l'âme humaine pour atteindre la perfection de
la divinité. La beauté se trouve dans la liberté des
paroles et des vers. Il ne faut pas ici chercher les règles de la
versification classique, de la prose libre qui n'a point besoin qu'on soit
intelligent pour pouvoir comprendre ou analyser cette esthétique. Le
plus pauvre des paysans jusqu'à l'homme fouillant les poubelles peut
accéder à cette esthétique.
Le seul voeu de rompre avec une situation jugée
précaire peut impliquer un niveau de foi tel que les chaînes
peuvent se briser, les montagnes se déplacer comme de simples feuilles
de papier emportées par un vent. Les chansons dans ce cas sont
brèves et ne souffrent pas d'une longueur telle que perdre le sujet
priant, lui-même, dans de vaines élucubrations. D'ailleurs, la
prière adressée à une divinité supérieure
n'a pas nécessité à être longue. La
brièveté rimant avec respect, diligence et
déférence.
On n'a pas idée de venir auprès de Dieu et lui
parler pendant de longues minutes. La langue pidgin suffisamment jugée
en marge des langues est reprise par le sujet priant pour montrer et exprimer
son drame et sa consternation. Parce que la langue est pour l'homme,
Mieux que toute autre, qui lui permet d'interroger
le milieu et de le comprendre, d'acquérir rapidement les connaissances
indispensables à son développement harmonieux et à sa
participation effective à la vie de la société (R.
Renard).
Elle lui permet de véhiculer les paroles, les
affections, les sentiments et surtout le degré d'implication dans l'acte
de la prière. Le pidgin devient le canal au moyen et au travers duquel
se module la vie des sujets qui le parlent : il devient un
archétype de leurs réalités, de leurs
représentations et de leur vécu.
Le vécu divers, inclut les hommes dans une
perspective double. Dans la vie ordinaire, le folklore et le profane organisent
et structurent les actes humains. Cependant, à des conditions
particulières, exceptionnelles, la vie demande ou requiert des hommes
une participation du sacré pour le rétablissement des
équilibres et aussi, pour des cas regrettables, une
désorganisation des harmonies.
Ces actes qui organisent à plus d'un titre
la réalité du monde, ne sont en réalité que la vie
de l'Afrique, du camerounais dans sa forme nue. Dans cette vie en effet, le
physique, le réel expliquent ou présupposent le
métaphysique, l'irréel ou l'imaginaire. La présupposition
est dans un certain cas l'harmonie et l'équilibre du monde.
En somme, il était question de montrer dans cette
partie que les textes oraux en pidgin renferment des éléments de
littérature qui pourraient s'adapter à toutes les méthodes
d'analyse textuelle conventionnelle. Cette littérature se manifesterait
aussi bien dans les différents genres sacrés que profanes.
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