La gestion par objectifs en matière budgétaire: L'expérience tunisienne( Télécharger le fichier original )par Siwar Cherif Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales de Tunis - Mastère de recherche en droit public 2012 |
Chapitre premier/- L'amélioration de l'information financière :Selon l'article 14 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789: « Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ». Par conséquent, Les pouvoirs publics est dans l'obligation de produire, pour les citoyens les documents d'information budgétaire qui justifient son usage des deniers publics. Cela implique à la fois une autorisation sur la politique budgétaire ainsi, qu'un contrôle sur l'exécution du budget. Dans ce sens, l'article 15 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que : « la société à le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Actuellement, la transparence gagne du terrain, même si sa progression reste encore récente dans le cadre financier Tunisien. On remarque une volonté politique visant à rompre avec les anciens agissements et aux méthodes corrompus de gestion et à instituer un nouveau modèle de gestion fondé sur l'efficacité et la performance. Prenons l'exemple, du projet relatif au `budget citoyen' qui cherche à présenter le budget de l'Etat en un langage simplifié, il s'agit d'expliquer l'origine, l'exécution et la finalité des ressources publiques et à exposer, les sources de financement de l'Etat dans le but de faciliter l'accès à l'information financière. Selon les déclarations du ministère des finances Elyes Fakhfakh, le `budget citoyen' relatif au budget de l'Etat de l'année 2014 sera publié sur le nouveau portail du ministère des finances et paraîtra dans des publications, au début de l'année prochaine61. La transparence des dispositifs financiers garantit non seulement, la confiance entre le pouvoir et les citoyens mais aussi, elle assure la performance puisque, la présence d'une information financière fiable et lisible constitue une condition d'une pratique démocratique d'évaluation budgétaire et de contrôle effectif. En effet, l'information financière est étroitement liée a l'obligation de rendre compte, celle-ci consiste, à laisser les gestionnaires gérer grâce à une délégation en leur faveur des pouvoirs et des responsabilités. C'est dans cette perspective, que s'est développée au niveau de la gestion moderne, l'obligation de rendre compte, pivot d'un cadre budgétaire et administratif centré sur la performance. En effet, l'obligation de rendre compte sert à informer, prouver, et justifier l'administration des biens autrement dit, l'utilisation des deniers publics, l'exercice de cette obligation 61 www.directinfo.webmanagercenter.com , (Page consultée le 04/10/2013). 39 s'effectue à travers un dialogue de gestion impliquant les gestionnaires (section 1) et un contrôle de gestion propice à une gestion axée sur les résultats (section 2). Section1. Un dialogue de gestion impliquant les gestionnaires :Le dialogue de gestion (voir annexe n°2) peut être définit comme un « processus d'échange existant entre un niveau administratif et les niveaux qui lui sont subordonnés, relatifs aux volumes de moyens mis à disposition des entités subordonnées, aux objectifs qui leur sont assignés, et plus généralement à la notion de performance de l'action publique dans le domaine considéré »62. L'enjeu du dialogue consiste à l'optimisation de la gestion publique ainsi que, les modes d'action de l'administration à travers, l'insertion d'une nouvelle chaîne des responsabilités. Une étude comparative doit être menée entre les outils déployés et les objectifs assignés à travers un tableau de bord, celle-ci consiste en « un ensemble d'informations cohérents dont, l'une des qualités essentiels est de faire gagner du temps, en conséquence, il doit être simplet, complet, synthétique, comporte une partie prévisionnelle et une partie réalité (écarts) »63. Le dialogue de gestion permet de réformer la structure administrative tout en insérant l'interactivité et la participation de tous les services à l'action administrative. En outre, un dialogue de gestion sert à concrétiser les nouveaux modes de management, des nouvelles techniques visant à alléger la gestion publique. Mais aussi un flux d'information fiable et continu entres les différents niveaux des services administratives ; les services centraux et de déconcentrés telles sont les conditions de réussite du dialogue de gestion. Pour mener à bien, un dialogue de gestion au sein de l'administration publique, il semble nécessaire d'aligner la gestion publique sur une logique managériale (§1er) afin d'élargir les responsabilités engageant les gestionnaires (§2ème). Premier Paragraphe/- L'alignement de la gestion publique à une logique managériale : Actuellement, l'empreinte managériale marque plusieurs pays qui ont lancées des réformes budgétaires afin d'améliorer la performance et l'efficacité de l'action publique, cette nouvelle logique de gestion publique marque une sorte de « privatisation des deniers publics » Ainsi, « après la privatisation des services ou entreprises, verra-t-on celle de la gestion publique »64. Il convient de distinguer tout d'abord, entre ces concepts à savoir « la gestion » et le « management » ; 62 Guide méthodologique de l'Union Européenne-Tunisie `suivi de la performance et choix des indicateurs », décembre 2009. P.25 63 Lochard (J), La gestion budgétaire : outil de pilotage des managers, édition d'organisation Collection. Schémacolor. France.1999. P.146. 64 Hertzog (R), « finances publiques, finances privés : nouvelles frontières, nouvelles similitudes », RFFP, N°100-2007.P.111. 40 La `gestion' recourt à des méthodologies indépendantes de la nature des activités et de la forme juridique des institutions qui les développent, le `management' implique l'emploi des méthodologies à caractère universel de la gestion. Il dépend des contraintes de l'environnement juridique dans lequel évolue l'entreprise : la manière d'utiliser les outils de gestion seraient différents selon qu'il s'agit d'organisme de droit public ou droit privé65. Prendre en considération ces spécificités liées à la gestion publique, ceux-ci vont entraîner un management adapté à ce type de gestion qui s'intitule désormais, « management public ». »66. Le `management public' peut être définit selon Pierre. Legendre comme « un vaste ensemble regroupant, dans un cadre démarqué des systèmes de planification et de contrôle des grandes entreprises un ensemble des méthodes d'aide à la décision, pour partie adaptées à la sphère publique : analyse de systèmes, méthodes coût-avantages et coûts-efficacité, méthodes multicritères ; et de méthodes de gestion directement transposées du secteur privé comptabilité analytique, contrôle de gestion, direction par objectifs Le management est une méthode rationnelle de gestion des finances, on distingue souvent entre la « rationalité managériale » et la « la rationalité juridique » ; La rationalité managériale se base sur trois piliers fondamentaux à savoir : l'efficacité, l'efficience et la pertinence. Ces critères s'inscrivent dans un triangle appelé « le triangle managérial»67 et qui peut être représenté comme suit : Efficacité Pertinence Efficience Schéma : Triangle Managérial L'efficacité, l'efficience et la pertinence constituent les paramètres du jugement de l'action administrative. Par ailleurs, « la rationalité managériale introduite dans l'organisation va déterminer non seulement, les méthodes mais aussi les rôles assignés à chaque service de cette organisation 65 Chevalier (J) et Loschak (D), « Rationalité juridique et rationalité managériale dans l'administration francaise », RFAP, N°24-1982. P.85. 66 Nioche (J-P), « science administrative ; management public et analyse des politiques publiques », RFAP, N°24-1982. P.639. 67 Ould Ahmed Ely (M), Management des finances publiques, édition IHET, Tunisie 1996. P.40. en vue d'atteindre le but qu'elle a défini, elle agira donc, sur les moyens humains en redéfinissant les rapports au sein de l'organisation »68. Ce modèle managérial est l'expression du « dialogue » qui s'instaure à l'interface de l'organisme public69 puisque, cette approche garantit un bon contact entre les différents éléments de l'organisation administrative. En ce qui concerne la rationalité juridique, celle-ci place la régularité du droit au dessus de toute l'action financière et administrative. Ce qui compte est d'être en conformité vis-vis des dispositions juridiques. Cette conception de la rationalité juridique peut être contradictoire à celle de la rationalité managériale et nous rappelle le fondement de l'administration bureaucratique d'où, les règles juridiques forment la source et la raison d'être de toute action engagée. Dans ce sens, la régularité est désormais « gage de légitimité, donc, devient une valeur en soi, légitime parce que, légal ; légal donc rationnel, légitime puisque, rationnel-telle est la structure triangulaire...contient la notion wébérienne de légitimité légale-rationnelle »70. La question qui se pose à cet égard est de savoir : est ce que la régularité clé de voûte de la rationalité juridique garantit-elle l'efficacité de l'action administrative ? La régularité ne garantit pas l'efficacité, puisque, elle le conçoit comme un élément secondaire et tributaire de la régularité. Cependant, l'efficacité trouve toute son importance au sein de l'approche managériale qui vise à assurer une gestion publique performante. Le management entend promouvoir de nouveaux modes d'action, mais aussi une nouvelle culture administrative qui s'inscrit en rupture radicale par rapport aux présupposés qui fondent le modèle traditionnel d'administration qui s'intéresse à la régularité et non pas à l'efficacité. Dans ce cadre, nous pouvons nous référer au programme « Copernic » crée en 1990 par le Collège Des Ingénieurs (CDI), qui est un véritable partenariat public-privé entre pouvoirs public, grandes écoles et entreprises pour ingénieurs, économistes et juristes consistent à donner une formation au management et a lever les obstacles culturels afin de permettre une intégration professionnelle réussie au sein des entreprises.71 La justification de l'action administrative ne réside plus dans les prescriptions législatives, en amont, mais dans la réussite, en aval des opérations qu'elle engage : on la jugera sur les 68 Ould Ahmed Ely (M), Op, cit. P.41. 69 Ely (M), « Eléments pour une approche managériale des finances publiques dans les pays du Maghreb», in Les mutations de l'action publique au Maghreb, journées d'études organisés à la Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, Tunisie, les 15 et 16 mars 2007. P.87. 70 Chevalier (J) et Loschak (D), « Rationalité juridique et rationalité managériale dans l'administration française » RFAP, N°24-1982. P.60. 41 71 www.cdi.fr . (Page consultée le 04/10/2013). 42 résultats qu'elle est capable d'atteindre, sur son aptitude à gérer rationnellement les moyens dont, elle dispose en vue d'obtenir le meilleur rapport coût-objectifs72 Dans ce sens, le management public est conçu selon le professeur Ely Mustapha comme « un ensemble de techniques de planification, de programmation et de contrôle mais aussi, de méthodes d'impulsion et d'organisation qui appliquées au processus de la gestion publique, vise à déterminer rigoureusement et atteindre efficacement les objectifs de la collectivité publique sous contrainte de son environnement »73. Ce modèle managérial répond aux exigences de la nouvelle gestion publique, le management public a en effet, l'avantage contrairement au contrôle traditionnel de régularité (contrôle par référence à la règle plus qu'au résultat de gestion) d'introduire, dans la gestion publique, un véritable contrôle de gestion qui se base sur les éléments objectifs de cette gestion (efficacité -performance)74. Cette conception est au coeur de la modernisation et la revalorisation de gestion publique qui exige une culture de résultat au sein de l'administration publique. La réforme de la gestion publique n'est pas l'oeuvre d'une action administrative impersonnelle, institutionnalisés et réglementées mais surtout celle de l'être humain notamment, des gestionnaires publics ayant une responsabilité accrue qui les place au coeur de la nouvelle gestion publique. |
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