L'efficience des patrimoines d'affectation en droit privé( Télécharger le fichier original )par Romain Coquet Université de Bretagne occidentale - Master 2 Droit privé fondamental 2012 |
b) Un acte de disposition parfois interditLa fiducie représente également un acte interdit dans certaines situations. En premier lieu, l'article 509 du Code civil nous indique que « le tuteur ne peut, même avec une autorisation transférer dans un patrimoine fiduciaire les biens ou droits d'un majeur protégé ». Cette règle est applicable à la tutelle des mineurs au regard de l'article 408-1 du Code civil. « Les biens ou droits d'un mineur ne peuvent être transférés dans un patrimoine fiduciaire ». Dès lors, le contrat de fiducie est un acte interdit en matière de tutelle alors qu'il est valable avec l'assistance du protecteur, sous la curatelle. Il aurait sans doute été plus judicieux d'autoriser la fiducie en matière de tutelle, en vue de préserver les intérêts du constituant. L'interdiction de la fiducie après l'ouverture de la tutelle est critiquable car le tuteur est autorisé à conclure un contrat pour la gestion des valeurs mobilières et instruments financiers de la personne protégée262(*). De plus, la prohibition de la fiducie sous la tutelle doit être appréhendée à l'aune du mandat de protection future. L'article 490 alinéa 1er du Code civil prône l'interdiction de la fiducie et restreint la mission du mandataire aux « actes patrimoniaux que le tuteur a le pouvoir d'accomplir seul ou avec une autorisation ». Il y a contradiction dès lors que le mandataire peut accomplir un acte de disposition à titre gratuit avec l'autorisation du juge des tutelles. Faut-il alors en conclure à la prohibition de la fiducie dans le mandat de protection future ? S'agissant des actes patrimoniaux, une exception est prévue pour les actes de disposition à titre gratuit que le mandataire ne peut accomplir que sur autorisation du juge des tutelles.Cette disposition vise à éviter des donations abusives ou sous influence, notamment au profit du mandataire »263(*). Par ailleurs, le législateur est resté muet sur la sanction de l'interdiction de la fiducie. Les initiatives solitaires du protecteur sont toutefois sanctionnées par la nullité de plein droit sans qu'il soit nécessaire d'établir un préjudice264(*). La sanction des actes autorisés est en revanche plus délicate car le tuteur ou le curateur a pour mission de protéger la personne vulnérable et doit dans certains cas accomplir un acte a priori illicite. De même, il convient de se demander si un contrat de fiducie conclu avant le prononcé d'une tutelle est toujours valable après l'ouverture de cette mesure de protection. Selon François Sauvage, « la fiducie résiste alors non seulement aux mesures de protection non incapacitantes (sauvegarde de justice, mandat de protection future) mais aussi à la « deminutiocapitis » frappant le constituant lorsque la mesure est à l'origine de son incapacité (curatelle, tutelle) »265(*). Ainsi, l'ouverture d'une mesure de curatelle ou de tutelle ne mettent pas fin au contrat de fiducie en l'absence de dispositions légales prises en ce sens, dès lors que la loi du 4 août 2008 se contente d'empêcher un conflit d'intérêts entre le fiduciaire et la personne en charge de la protection du majeur. La fiducie peut tout de même être remise en cause, et l'article 2028 alinéa1er du Code civil nous informe que « le contrat de fiducie peut être révoqué par le constituant tant qu'il n'a pas été accepté par le bénéficiaire ». En outre, elle s'expose à la réduction pour inaptitude ou à l'annulation en raison d'un préjudice subi par la personne protégée, quand elle est effectuée au cours de la période suspecte précédent l'ouverture de la mesure266(*). * 262 Article 500 alinéa 3 du Code civil ; Décr.n° 2008-1484 du 22 décembre 2008, annexe 2, colonne 2, I, 2°. * 263 Rapport du Sénat par Henri de Richemont, Doc. Sénat, n° 212, 2006-2007 p.195. * 264 Article 465, 4° du C. civ : « Si le tuteur ou le curateur a accompli seul un acte qui aurait dû être fait par la personne protégée soit seule, soit avec son assistance ou qui ne pouvait être accompli qu'avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, l'acte est nul de plein droit sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un préjudice ». * 265 F. SAUVAGE, « Réflexions sur les opportunités offertes par la fiducie aux fins de gestion du patrimoine de la personne vulnérable », RJPF, 2009, p.5. * 266 Article 464 alinéas 1 et 2 du Code civil. |
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