CHAPITRE III :
PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS
Chapitre 3 : Présentation et analyse des
résultats
3.1. Présentation et analyse des
résultats
Cette enquête a été un exercice
participatif où les acteurs locaux membres des ADV rencontrés ont
eux-mêmes mis en exergue de façon consensuelle les
difficultés qu'ils rencontrent dans la gouvernance des actions de
développement villageois. Cette participation caractérisée
par un empressement à nous répondre dénote de la
volonté des communautés villageoises à lever les goulots
d'étranglement liés au développement de leur terroir.
De façon générale, la dynamique en
matière de développement villageois observée dans les
terroirs sillonnés est le reflet d'une volonté de se prendre en
charge à travers l'adoption de la démarche DCC
développée par le PNDCC.
Les résultats obtenus permettent d'apprécier les
difficultés que rencontrent les ADV dans la mise en oeuvre de l'approche
DCC. Aussi mettent - ils en évidence, les forces et faiblesses ainsi que
les atouts et opportunités qui s'offrent aux communautés dans la
mise en oeuvre de cette approche dans le cadre de la gouvernance et de la
pérennisation des actions de développement villageois.
Ces résultats sont présentés et
analysés en deux parties. La première concerne
l'appréciation de la gouvernance par les acteurs endogènes et la
seconde porte sur le regard jeté par les acteurs exogènes sur le
développement villageois.
3.1.1. Les acteurs endogènes face au
développement
3.1.1.1. Résultats relatifs aux facteurs ou axes de
développement
· Domaine de la participation
La mise en oeuvre de l'approche participative dans les actions
de développement par les communautés villageoises ciblées
par notre étude s'avère satisfaisante. La moyenne obtenue est de
2,57 ; le score 3 étant celui affecté au niveau le plus
élevé (tableau 8).
La meilleure performance dans ce domaine est
réalisée par le village de Bocovi - Tchaka. Quant au village
d'Aglogbè, il présente des insuffisances en matière de
responsabilisation des villageois.
Tableau 8 - Niveau de participation par
village
Domaine : Participation villageoise
|
Aglogbè
|
Hahamè
|
Do - Hongla
|
Bocovi - Tchaka
|
2,16
|
2,66
|
2,66
|
2,83
|
Moyenne : 2,57
|
Figure 4 - Niveau de participation par
village
De façon générale, les ADV objets de
notre étude dans la commune d'Adjarra font l'effort de mettre en
pratique les principes de l'approche participative pour offrir des prestations
de qualités aux communautés. La moyenne est élevée
et tous les villages présentent de bonnes performances (tableau 8).
Certes, la participation ne s'exprime pas de la même façon dans
les villages ; elle varie surtout selon les capacités des membres
du bureau de l'ADV à en appliquer les principes. Le manque de
responsabilisation des villageois fragilise les ADV dans leur bon
fonctionnement et notamment dans les difficultés qui surviennent.
Cette étude a révélée que la
responsabilisation des villageois reste faible dans les villages (tableau 9) du
fait du manque de l'appropriation du processus de développement en cours
et du non engagement de ces communautés à prendre en charge
l'organisation de l'action de développement.
Les ADV devront renforcer leurs capacités notamment en
matière d'application des principes de l'approche participative afin de
faire efficacement face aux nouvelles tâches de développement
villageois selon l'approche DCC (la planification et la mise en oeuvre des
actions de développement villageois, la maîtrise d'ouvrage
déléguée dans différents domaines,
l'élaboration des outils d'aide à la décision des membres
des ADV, etc).
Tableau 9 - Score obtenu par facteur de
participation dans chaque village
Domaine de la participation villageoise
|
Villages
|
Axe 1
|
Axe 2
|
Axe 3
|
Axe 4
|
Axe 5
|
Axe 6
|
Responsabilisation des villageois
|
Respect de la diversité du village
|
Encourage-ment de la participation de tous
|
Conciliation des divers intérêts
|
Ecoute des villageois
|
Démarche centrée sur les besoins humains
|
Aglogbè
|
1
|
2
|
2
|
3
|
2
|
3
|
Hahamè
|
2
|
3
|
3
|
3
|
3
|
3
|
Do - Hongla
|
3
|
2
|
3
|
3
|
3
|
3
|
Bocovi - Tchaka
|
2
|
3
|
3
|
2
|
3
|
3
|
Moyenne
|
2
|
2,5
|
2,75
|
2,75
|
2,75
|
3
|
· Domaine du développement durable au niveau
village
Le domaine du développement durable a enregistré
la plus faible moyenne de cette étude (2,34 sur un total de 3). Les
insuffisances se relèvent notamment dans trois villages (Aglogbè,
Bocovi-Tchaka et Do-Hongla) contre celui de Hahamè qui a obtenu un score
égal à 3 (tableau 11). Le village de Hahamè se distingue
par la réussite de l'axe : processus dirigé par les
villageois où ces derniers à travers l'ADV ont conduit
directement le processus de construction d'un module de trois classes ; ce en
mobilisant les ressources et compétences internes et en gérant
directement les fonds mis à leur disposition par le PNDCC. A cela
s'ajoute l'attachement au processus de suivi-évalation
(élément primordial dans la réussite d'une action de
développement) et d'une ambition à long terme largement
partagée.
Outre le piétinement de la volonté de construire
sur l'existant, les autres facteurs du développement durable sont
satisfaisants. Il s'agit entre autres du processus dirigé par les
villageois, l'ambition à long terme largement partagée et le
suivi-évaluation.
Globalement, l'étude a révélé que
les villages objets de notre étude peinent encore à s'inscrire
dans un processus de développement durable et à en appliquer les
principes.
Tableau 10 - Perception du développement
durable par village
Domaine du développement durable
|
Aglogbè
|
Bocovi-Tchaka
|
Do-Hongla
|
Hahamè
|
2
|
2,15
|
2,75
|
3
|
Moyenne du domaine : 2,34
|
Figure 5 - Niveau de perception du
développement durable
Sur l'ensemble des villages évalués, c'est au
niveau des axes : processus dirigé par les villageois et
volonté de construire sur l'existant que les performances faibles ont
été enregistrées. Les moyennes de ces axes sont
respectivement 2,25 et 2 (tableau 11). En effet, la volonté des
villageois de construire sur l'existant doit partir d'une prise en, main du
processus de développement villageois. De plus, l'engagement à un
processus de développement dirigé par les communautés
elles-mêmes est tributaire d'une ambition à long terme et
largement partagée.
Tableau 11 - Score obtenu par facteur de
développement durable
Domaine du développement durable
|
Villages
|
Axe 1
|
Axe 2
|
Axe 3
|
Axe 4
|
Ambition à long terme et largement partagée
|
Suivi - Evaluation
|
Processus dirigé par les villageois
|
Volonté de construire sur l'existant
|
Agloggè
|
3
|
3
|
1
|
1
|
Bocovi - Tchaka
|
1
|
3
|
2
|
1
|
Hahamè
|
3
|
3
|
3
|
3
|
Do - Hongla
|
3
|
2
|
3
|
3
|
Moyenne
|
2,5
|
2,75
|
2,25
|
2
|
· Domaine de la gouvernance villageoise
La gouvernance villageoise est le fondement de cette
étude. Globalement pour ce domaine, les plus fortes performances sont
enregistrées dans l'équité dont le score est 3 et de 2,75
en matière d'efficacité et de traitement de l'information et
l'obligation reditionnelle. (Tableau 13 et figure 6).
Cependant, ce domaine reste fragile en matière de
développement villageois car la participation d'individus
organisés ou non aux actions de développement villageois est
très faible. La transparence ou le partage de l'information reste par
endroit un goulot d'étranglement notamment à Aglogbè et
à Hahamè. L'équité est un acquis pour l'ensemble
des ADV qui sont constituées d'au moins 50% de femmes ; c'est
d'ailleurs la condition sine qua non pour être appuyé par le
PNDCC. D'ailleurs à l'unanimité, les hommes de ces ADV
reconnaissent que les femmes s'adonnent plus aux activités, surtout
lorsqu'elles en comprennent le sens et l'importance. Il faut tout de même
souligner que le partage de l'information, lorsqu'il est efficace met en
confiance les membres des ADV et la communauté ; ou il
discrédite carrément ces derniers lorsqu'il est inefficace et que
des difficultés surviennent dans la réalisation des actions de
développement communautaire. C'est le cas du village d'Aglogbè
qui fait le score 1 dans ce domaine. La transparence dans l'information affecte
également les groupes d'individus qu'ils soient organisés
ou non ; lesquels groupes devraient être des relais pour les ADV
dans la réalisation de leur mission. Les ADV devraient renforcer les
stratégies utilisées et en développer de nouvelles pour
informer les populations (plan de communication, tableaux d'affichages des
prestations et leurs coûts, utilisation des canaux des leaders et des
chefs religieux, etc).
En général, il y a une faible implication des
communautés dans la gestion des actions de développement
villageois. La moyenne est de 2,4 sur 3 (tableau 13).
Tableau 12 - Etat de la gouvernance villageoise
par village
Domaine de la gouvernance villageoise
|
Aglogbè
|
Bocovi - Tchaka
|
Hahamè
|
Do - Hongla
|
2
|
2,6
|
2,8
|
2,2
|
Moyenne : 2,4
|
Figure 6 - Etat de la gouvernance par
village
Les membres des ADV sont conscients que l'approche
participative et la mobilisation sociale sont indispensables pour la
réussite des actions de développement à la base. Par
conséquent, ils décentralisent certaines de leurs
responsabilités à des personnes chargées de les aider dans
la communauté. C'est le cas du village de Bocovi - Tchaka où est
initiée une commission pour la collecte de fonds (dans le cadre de la
réalisation d'une action communautaire). Les membres de cette
commission, au nombre de cinq, sont issus de chaque hameau du village ; ce
qui augure de la participation de ces hameaux aux actions de
développement, la transparence dans la gestion des fonds
entraînant du coup la crédibilité et l'efficacité du
gouvernement villageois. Outre cette particularité à encourager,
le partage de l'information se fait en audience publique où les membres
des ADV rendent compte d'une activité.
Les bureaux des ADV devront donc promouvoir d'autres cadres de
communication avec la communauté (organe de concertation, d'arbitrage et
d'information sur l'état de mise en oeuvre des actions de
développement) où toutes les couches socioprofessionnelles
mettront en commun leurs idées et leurs forces au profit du
développement villageois. Les agents communautaires de communication et
d'animation (ACCA) devront voir leurs capacités d'intervention sociale
renforcées.
Tableau 13 - Score obtenu par facteur de
gouvernance villageoise
Domaine de la gouvernance villageoise
|
Villages
|
Axe 1
|
Axe 2
|
Axe 3
|
Axe 4
|
Axe 5
|
Participation d'individus organisés ou non
|
Transparence ou partage de l'information
|
Efficacité du gouvernement villageois
|
Equité
|
Obligation reditionnelle
|
Aglogbè
|
0
|
1
|
3
|
3
|
3
|
Bocovi- Tchaka
|
2
|
3
|
2
|
3
|
3
|
Hahamè
|
2
|
3
|
3
|
3
|
3
|
Do- Hongla
|
1
|
2
|
3
|
3
|
2
|
Moyenne
|
1,25
|
2,25
|
2,75
|
3
|
2,75
|
3.1.1.2. Résultats relatifs aux
difficultés
Les difficultés rencontrées par les
communautés villageoises dans la gouvernance des actions de
développement communautaire sont diverses et s'observent sur divers
plans. Aussi bien les communautés que les structures d'appui au
développement villageois se rejoignent sur ces contraintes :
3.1.1.2.1. Le bénévolat
Les membres des bureaux des ADV travaillent sans
rémunération ; leurs fonctions étant
déclarées gratuites par le PNDCC. Ils n'ont pas de salaires et
n'éprouvent aucune gêne à en exprimer le besoin. Ils
doivent souvent abandonner leurs activités génératrices de
revenus pour se consacrer aux actions de développement liées
à leurs responsabilités dans l'ADV. Ceci est préjudiciable
pour la bonne marche des activités car un manque de motivation
s'installe, entraînant du coup un désintéressement aux
actions de développement dont les conséquences sont
fâcheuses tant pour la cohésion du groupe que pour la dynamique du
développement villageois.
3.1.1.2.2. Mobilisation de la contrepartie
financière
Les communautés villageoises doivent apporter une
contribution financière sous forme de contrepartie (en complément
au financement du PNDCC) dans la réalisation des sous -projets
communautaires. C'est l'une des grandes difficultés auxquelles les
communautés notamment les ADV sont confrontées. Le manque de
volonté des communautés couplé au faible pouvoir d'achat
et l'insuffisance de sources de revenus en sont les causes principales. Les
communautés n'étant pas toujours disposées à
apporter une contribution sous forme financière, elles sont cependant
disposées à apporter une contribution en force de travail ou en
matérielle (ce qui ne cadre pas avec la logique du PNDCC où la
réalisation des actions de développement est confiée
à des entreprises. Cette situation oblige les membres des bureaux des
ADV a s'investir personnellement dans le but d'atteindre les objectifs à
eux assignés par la communauté.
3.1.1.2.3. Conflits d'attribution avec les chefs
villages
Le bureau de l'ADV est constitué d'hommes et de femmes
choisis parmi les membres de la communauté à l'issue d'une
Assemblée Générale Villageoise. Ces bureaux qui agissent
pour le compte de l'ADV, donc exercent la démocratie au niveau village
dans la mise en oeuvre du plan de développement villageois, sont souvent
confrontés à des ''querelles'' avec les chefs de villages. Ces
derniers jouissant d'une reconnaissance institutionnelle surtout dans le
contexte actuel de décentralisation, il urge de définir
clairement et de sensibiliser les acteurs sur leurs rôles afin
d'éviter des situations qui n'assurent pas l'harmonie du terroir.
3.1.1.2.4. Non maîtrise des modules de
formation
Les formations données aux bureaux des ADV sont
reçues à l'extérieur du village par certains membres du
bureau qui ont pour responsabilité d'en revenir faire la restitution
à l'ADV. La formation généralement dispensée en
français est reçue par des personnes pour la plupart
analphabètes (pour qui la prise de note est quasi difficile), il s'en
suit automatiquement une perte de charge entre l'idée de la formation et
l'information transmise aux communautés. C'est à juste titre que
les membres des ADV évoquent une non maîtrise des modules de
formations reçues et sollicitent d'ailleurs des recyclages.
3.1.1.3. Résultats relatifs à la
capacité d'auto prise en charge
Tableau 14 - Capacité villageoise d'auto
prise en charge
Villages
|
Capable de se prendre en charge sans l'aide préalable
d'un animateur
|
|
OUI
|
NON
|
Aglogbè
|
|
X
|
Bocovi - Tchaka
|
|
X
|
Hahamè
|
|
X
|
Do - Hongla
|
|
X
|
Total
|
0
|
4
|
Ce tableau illustré par la figure 7 ci-dessous montre
clairement que sur l'ensemble des quatre villages étudiés, tous
ont estimé ne pas être en mesure de se prendre en charge au
préalable pour faire face aux questions de développement s'ils
n'avaient pas reçu l'aide d'un animateur du PNDCC.
Figure 7 - Capacité d'auto prise en charge des
villages
Ces résultats traduisent ainsi l'attentisme dans
laquelle se placent ces populations vis-à-vis de leur situation de
développement. La participation de l'animateur de développement
communautaire ayant été comme un tire-bouchon dans la
réalisation d'une vision de développement.
3.1.1.4. Résultats relatifs au domaine de renforcement
de capacités
Tableau15 - Domaine de renforcement de
capacité
Villages
|
Domaine de formation souhaitée
|
Planification
|
Financement
|
Management
|
Aglogbè
|
|
|
X
|
Bocovi - tchaka
|
|
|
X
|
Hahamè
|
|
X
|
|
Do - hongla
|
|
|
X
|
Total
|
0
|
1
|
3
|
Ce tableau montre que trois villages sur quatre souhaitent un
renforcement de capacités en management. Cela suppose que beaucoup reste
à faire sur le plan de la définition des responsabilités,
du partage des tâches, de l'organisation de la concertation, etc, pour
parvenir à un management efficace des actions de développement
villageois. C'est un préalable à l'aboutissement d'un
développement villageois harmonieux et durable.
Figure 8 - Domaine de renforcement de capacités
des acteurs villageois
Sur l'ensemble des villages, on remarque une dominance
à se faire former dans le domaine du management. Trois villages sur
quatre ont exprimé le besoin de voir leurs capacités
renforcées dans ce domaine ; il s'agit de Aglogbè, Bocovi-
Tchaka et Do-Hongla. Par contre, la recherche de financement est le centre
d'intérêt de la communauté de Hahamè. Le besoin de
recyclage en planification est resté le parent pauvre aux
côtés des deux autres domaines. Or il devrait être tout
aussi préoccupant, sinon le premier centre d'intérêt. Mais
ce choix des communautés est compréhensible parce que les ADV
n'ont pas fini de régler des questions d'organisation collective.
|