Le contrôle juridictionnel des comptes des collectivités locales( Télécharger le fichier original )par Ousmane SOW Université Gaston Berger Sénégal - Maitrise 2008 |
Paragraphe 2 : Une nécessaire extension des pouvoirs du juge financier et de ses conditions de travailLe contrôle des comptes peut être considéré comme inutile dans la mesure où les mises en débet aboutissent le plus souvent à la décharge du comptable. En effet, les pouvoirs exorbitants du ministre des finances altère en quelque sorte le contrôle, puisque « le juge des comptes se décourage à faire, le jour, ce que le ministre défait, la nuit »37(*). Dés lors se demande-t-on à quoi ce contrôle sert-il même efficace ? Parallèlement au ministre, le juge financier devrait aussi bénéficier d'un pouvoir important pour assurer un contrôle efficace. On devrait lui permettre d'apprécier une mesure de décharge de responsabilité et de remise gracieuse de débet et, le cas échéant, pouvoir s'opposer à la décision du ministre en cas d'irrégularité. En fait, c'est la mission qui lui est dévolue qui nécessite l'octroi de ces pouvoirs. Il convient de rappeler que la configuration de la Cour n'est pas conforme à une juridiction de la nature d'une Institution Supérieure de Contrôle. (ISC). L'aménagement de locaux pour la création de salles d'audience et la construction d'une salle des archives sont un début de solution, mais l'idéal serait d'avoir un local permettant d'accueillir tout le personnel dont a besoin la Cour, sans que ce personnel ne soit à l'étroit (à l'image de ce qui se passe actuellement : parfois deux magistrats dans un bureau exigu). Les magistrats devraient en outre être véhiculés pour pouvoir effectuer des déplacements que nécessitent leurs missions de contrôle, notamment celles prévues par l'article 30 de la loi 90- 70 sur la Cour des comptes : « (...) Les magistrats et les rapporteurs ont, dans l'exercice de leurs fonctions et dans la limite de leurs attributions, un droit d'accès permanent dans tous les bureaux, locaux ou dépendances des organismes soumis au contrôle de la Cour ». En outre, le fait qu'il soit seulement un juge de régularité peut aussi entraver l'exercice normal de son contrôle et de ce fait entraver son efficacité. Dés lors, ne serait-il pas nécessaire de lui octroyer des pouvoirs lui permettant de juger l'opportunité ? En effet, rappelons-le, le juge financier « juge le compte du comptable public » et non le comptable lui-même. Cette mesure est nécessaire car elle permettrait d'empêcher les ordonnateurs de procéder à la réalisation de dépenses non nécessaires, par crainte d'être punis. Plus précisément, les pouvoirs conférés au juge devraient être revus dans le sens d'une meilleure adéquation à la réalité qui prévaut dans la gestion financière au sein des collectivités locales. Dans ce cas, élargir le contrôle qu'il exerce dans ce domaine, lui permettrait d'atteindre des résultats plus performants. En ce qui concerne les délais de dépôt des comptes de gestion, on note beaucoup de retards et les sanctions prévues en ce sens s'appliquent rarement. Néanmoins, il faut relativiser ce fait car les comptables ont pris conscience et ont commencé à envoyer leurs comptes. C'est en ce sens que cent comptes de gestion ont été reçus pour l'année 1997 à la fin de l'année 200238(*). Au chapitre des perspectives, la juridiction financière de l'UEMOA pourrait aussi jouer un rôle non négligeable. En effet, dans son interview, JEAN ALOTOUNOU39(*) soulignait cet aspect en ces termes : « Dans notre agenda, il est prévu que la cour communautaire puisse apporter son concours, son appui aux cours nationales des comptes. C'est, du reste, la préoccupation des pères fondateurs de l'Uemoa parce que l'intégration suppose la convergence dans tous les domaines. Il est nécessaire que les comptes soient tenus, élaborés, contrôlés selon les normes financières, budgétaires et comptables édictées par l'Uemoa. Il est donc utile d'avoir des données financières et comptables fiables et comparables dans l'espace Uemoa ». * 37 RFDA, mars-avril 2004, p.405 * 38 Rapport n° 26 332 de la BM précité * 39 Conseiller à la Cour des comptes de l'UEMOA |
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