Chapitre 2 : FONDEMENTS DE LA MICROFINANCE
La notion de microfinance recouvre une grande
diversité de réalité, aucune définition n'a permis
jusqu'ici de donner une représentation de cette réalité
complexe. En effet, pour le cerner il est nécessaire de voir le concept
de la microfinance en tant que offre de services financiers aux pauvres,
ensuite montrer son origine pour le comprendre et enfin expliquer ses relations
avec les PME.
2.1. Le Concept de Microfinance
La microfinance fait référence à l'offre
de services financiers aux populations pauvres et à faibles revenus, qui
ont peu ou n'ont pas accès aux services financiers bancaires, dans le
but de satisfaire les besoins de leur ménage ou de leurs
activités économiques et professionnelles. Les services
financiers dont il s'agit ici sont principalement de deux types, épargne
et crédit, auxquels s'ajoutent maintenant les assurances et les services
de transfert.
Une institution de microfinance est une entreprise
financière qui doit, à terme, couvrir ses dépenses et
dégager une marge sans appui extérieur pour être viable et
continuer à offrir ses services.
Par ailleurs, les clients des institutions de microfinance
ont besoin des services financiers pour, entre autre, sécuriser leurs
disponibilités et mener principalement des activités
économiques.
Cependant, au-delà de leur fonction
d'intermédiation financière, de nombreuses institutions de
microfinance (IMF) jouent un rôle d'intermédiation sociale
à travers notamment les modalités suivantes : groupes de
solidarité, formation des clients, renforcement de la confiance en soi,
participation à la gestion.
Les études d'impact et les expériences
accumulées ont fait évoluer le concept et confirmer un certain
nombre de principes et d'acquis parmi lesquels8 :
· la microfinance constitue un puissant instrument dans la
lutte pour la réduction de la pauvreté ;
· l'accès, de manière durable, d'un grand
nombre de pauvres à des produits et services financiers, requiert
l'atteinte par les IMF de l'autosuffisance financière ;
· l'intégration de la microfinance dans le secteur
financier global est une condition de développement de sa portée
;
· les pauvres ont besoin, non seulement de
crédit, mais aussi d'une variété d'autres services
financiers tels que l'épargne, les services de paiement,
l'assurance& ;
· le crédit n'est pas toujours approprié
pour toutes les situations: des catégories de personnes qui ne disposent
d'aucun revenu, ni de moyens de
remboursement de prêts, ont certainement besoin d'autres
formes d'appui avant d'être élligibles au crédit;
· le renforcement des capacités (institutionnelles
et humaines) constitue un défi majeur du secteur de la microfinance ;
· les systèmes d'information de gestion constituent
des impératifs pour tous les acteurs dans l'optique de la
viabilté et de la maîtrise des risques ;
· le rôle des gouvernements est important dans la
création d'un environnement favorable au développement du
secteur.
Bien que l'on ait assisté, ces dernières
années, à une forte croissance des institutions de microfinance
(IMF) de par le monde, la demande de services de microfinance reste largement
insatisfaite.
En effet, sur une demande globale estimée à 500
millions de familles, seules 30 millions seraient touchées en 2002. Sur
les continents, la couverture est très inégale. En Asie : 9,3%
des familles les plus pauvres seraient touchées contre seulement 6% en
Amérique Latine et en Afrique.
Dans la région de l'UEMOA, Les pratiques
d'épargne et de crédit (tontines, clubs d'épargne, caisses
de solidarité, fonds rotatifs, coopératives d'épargne et
de crédit) ont des origines lointaines.
Cependant, la microfinance, en tant que secteur
organisé, et sa contribution au développement économique
ne sont reconnues qu'il y a une quinzaine d'années.
Les organisations qui opèrent dans le secteur peuvent
être classées en trois catégories:
· les institutions d'épargne et de crédit;
· les expériences de crédit direct;
· les Projets à volet crédit et les ONG qui
ne font pas du crédit leur activité principale.
D'après les données de la Direction des
Systèmes Financiers décentralisés de la Banque Centrale
des Etats de l'Afrique de l'Ouest (DSFD/BCEAO), le secteur a
évolué comme suit au cours de la période 1993 -- 2003 :
· le nombre d'institutions a été
multiplié par 6 atteignant 620 au 31
décembre 2003 ;
· le nombre de points de services (caisses de base, agences
et
bureaux&) est passé de 1136 à 2597 ;
· le nombre de clients/membres servis par ces institutions
qui était
de moins de 313 000 en 1993 a atteint 4 millions en
décembre 2003 ;
· les dépôts collectés passent de 12,8
milliards FCFA en 1994 à
204,7 milliards FCFA à fin 2003 ;
· les prêts octroyés par ces institutions
ont été multipliés par 10 au cours de la période
considérée passant de 19,4 milliards à 200 milliards FCFA
;
· des crédits en souffrance atteignent 8% de
l'encours au 31 décembre 2003.
Les Institutions de Microfinance (IMF) de la région
UEMOA sont majoritairement des coopératives d'épargne et de
crédit (COOPEC). Ensemble, ces COOPEC concentrent 87% des 4 millions de
clients touchés en 2003, gèrent 95% des dépôts et
80% des encours de crédit. Dix (10) IMF sur les 620 recensées en
2003 disposent de 80% des dépôts collectés et des
opérations de crédit dans la région. Dans chaque pays de
l'union, une ou deux institutions représentent plus de 50% des
activités du secteur.
Dans la zone UEMOA, le secteur de la microfinance est
régi par une loi sur les structures mutualistes d'épargne et de
crédit, adoptée au niveau de chaque pays sur la base du cadre
général de la législation dite loi "PARMEC", et ses
décrets d'application9.
9 Par ce nom générique usuel, il
faut entendre l'ensemble des lois nationales et décrets d'application
élaborés par chaque pays sur la base du document adopté
sur la législation des mutuelles d'épargne et de crédit
dans le cadre de l'exécution du Programme d'Appui à la
Réglementation sur les Mutuelles d'Epargne et de Crédit
(PARMEC).
Dans le cadre de cette réglementation, les structures
mutualistes peuvent être agréées et leurs institutions de
base reconnues par les ministères des finances, sur la base de demandes
examinées par les cellules de suivi des SFD desdits ministères
avec la collaboration de la BCEAO.
Concernant la microfinance et les Objectifs du
Millénaire pour le Développement (OMD), même si l'impact de
la microfinance reste globalement limité, des études et
recherches montrent qu'elle représente un outil important de lutte
contre la pauvreté et doit être considérée comme une
des stratégies en vue d'atteindre les OMD notamment la réduction
de moitié de la pauvreté d'ici à 2015. Le Groupe
Consultatif d'Assistance aux Pauvres (CGAP) a tout récemment
montré que la microfinance, par le biais des services financiers
durables qu'elle fournit aux pauvres, contribue à l'atteinte de ces
objectifs.
En effet, l'accès aux services financiers constitue
une base à partir de laquelle d'autres besoins peuvent être
satisfaits : santé, éducation, conseils de nutrition,
autonomisation des femmes.
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