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Impact de la microfinance dans le financement des PME au Sénégal

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par Tafsir Amadou DIAGNE
Institut des hautes études à  Tunis - Master 2 management des affaires 2012
  

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1.2 Méthodes classiques d'analyse et d'évaluation

de l'impact de la microfinance

Comment mesure-t-on les impacts de la microfinance, dans un contexte socio-économique marqué par beaucoup d'autres facteurs ? La réponse à cette question implique l'identification des effets exclusivement produits par la microfinance sur les populations bénéficiaires.

La question à traiter, selon Armendáriz et Morduch 20072, devient alors celle-ci : Que serait-il arrivé aux clients si le programme n'avait pas existé ? Pour bien définir la méthodologie d'étude, il importe avant tout de savoir comment la microfinance affecte la vie de ses bénéficiaires. L'effet économique est le premier qui vient à la pensée.

Si la microfinance se limitait au microcrédit3, il aurait suffit de mesurer cet effet pour prouver l'impact de la microfinance. De plus il faudrait que l'activité financée soit parfaitement identifiée, et que le crédit n'ait qu'un effet économique sur la vie de l'emprunteur. Alors qu'en réalité, la microfinance affecte la vie sociale et économique des membres à travers d'autres aspects, tels que l'éducation, la santé, les loisirs, etc.

2 Armendáriz B., Morduch J., The Economics of Microfinance, The MIT Press, 2007

3 Il faut entendre par microfinance l'ensemble des services financiers proposés par les IMF, comprenant le

microcrédit bien sûr, mais aussi l'épargne, l'assurance, etc.

Ces effets ne sauraient être ignorés dans les évaluations au risque d'avoir des résultats erronés.

Trois générations sont identifiables dans les études consacrées à l'estimation des effets de la microfinance, chacune orientée méthodologiquement par les questions pertinentes de l'époque.

Ø Première génération :

Il s'agit des premières études apparues vers le milieu des années 1990, alors que la pérennité des IMF était au cSur du débat.

Avec l'échec de nombreux programmes et l'évidence de la dépendance accrue des plus performants aux subventions, il s'agissait de comprendre les problèmes de fonctionnement des IMF à travers leur performance économique.

Les financements étant de plus en plus difficiles à trouver, seules les institutions les plus performantes bénéficiaient des subventions et des rares fonds privés destinés à cet effet. Les études étaient principalement menées par des organismes comme l'USAID4 ou encore la Banque Mondiale, et non par les IMF elles-mêmes. L'accent était mis sur la capacité des institutions à fonctionner de façon à couvrir leurs coûts opérationnels et financiers, tout en permettant à leurs clients de bénéficier économiquement des services offerts. Ces études s'intéressaient plus au fonctionnement des IMF, qu'aux impacts sur les clients, qui n'étaient appréhendés que sous l'aspect purement économique. L'effet revenu était alors le seul effet considéré, l'étude de Coleman citée par Armendáriz et Morduch 2007 en est un bon exemple. A cette époque, les rendements économiques prenaient effectivement le pas sur les aspects sociaux du mouvement.

4 Agence des États-Unis pour le développement international (United States Agency for International Development) est l'agence indépendante du gouvernement des États-Unis chargée de développement économique et de

l'assistance humanitaire dans le monde

Ø Deuxième génération :

Les travaux correspondant à cette génération sont plus nombreux.

A la fin des années 1990, les expériences des premières études montraient une évidence : d'une part les impacts de la microfinance devaient être recherchés du côté des populations, d'autre part l'aspect social méritait plus de considération. La question de l'impact social dirigeait ces études.

Schreiner 2002 donne un cadre d'analyse des effets de la microfinance basé sur cette philosophie et essentiellement orienté vers les clients. Il y définit six aspects permettant de mesurer l'impact socio-économique d'un programme: le niveau de richesse des membres clients (« wealth »), le coût (à la charge des clients), la portée sociale (l'importance sociale du bénéfice d'un membre, « depth »), la taille de la clientèle («breadth »), la durée de la mission (« length »), et l'éventail de services offerts (« scope »). Les aspects économiques et sociaux sont ainsi pris en compte dans cette analyse.

Cependant l'auteur démontre que les résultats d'une telle évaluation dépendent de l'approche choisie. Ce choix impliquait un arbitrage entre performance sociale et performance économique.

Si l'on estimait que la performance sociale primait sur l'efficacité économique, on adoptait l'approche dite de "la pauvreté" qui considère que l'impact social d'une IMF est plus accentué lorsqu'elle sert un nombre limité de clients parmi les plus pauvres, dans une durée limitée et seulement avec le crédit. De l'autre côté, on trouvait les partisans de l'approche de "la souténabilité", accordant le plus d'importance à la performance économique des IMF, et avançant l'idée qu'il vaut mieux aider les moins pauvres en masse pendant longtemps, avec différents services (notamment l'épargne). La différence entre les deux approches se situe également dans les sources de financement des activités des IMF. Pour la première, la portée sociale d'une institution justifiait sa dépendance aux subventions durant toute la durée de son existence.

Alors que les partisans de la souténabilité financière estiment qu'une institution performante doit être capable de dégager assez de profits pour couvrir ses coûts opérationnels, par conséquent les subventions ne sont nécessaires qu'au début de ses activités.

Les IMF se sont sensibilisées davantage aux mesures d'impacts à cette époque, notamment pour attirer les nouveaux investisseurs socialement responsables, plus intéressés par les effets sociaux qu'économiques.

C'est aussi à cette époque qu'on voit apparaître les premières sociétés de notation des IMF sur critères sociaux comme Planet Rating.

Ø Troisième génération:

Cette période s'étend du début des années 2000 à nos jours. Les travaux actuels prônent une approche globale (Morduch et al. 2007), une méthodologie combinant les aspects économiques et sociaux dans l'évaluation des impacts. La pérennité des institutions (performance économique) n'est pas considérée comme incompatible avec l'impact social sur les clients. Aussi, les deux aspects sont considérés dans la mesure de la performance des IMF. Cette période est marquée notamment par des améliorations méthodologiques, des modèles de plus en plus rigoureux sont élaborés avec les nouvelles techniques statistiques et économétriques.

L'implication de plus en plus grande des IMF dans ces études s'explique par leur volonté d'améliorer les services aux clients.

Dans une logique de pérennisation, la compréhension des besoins des clients préoccupe de plus en plus les acteurs. Il est également à noter que ces études sont marquées par une controverse concernant les effets de la microfinance. Une juxtaposition des effets positifs et négatifs est visible dans de nombreuses études. C'est le cas de Rahman 1999 sur la Banque Grameen dans les villages de Bengladesh ; il montre comment la contrainte du remboursement des crédits peut augmenter la pression sociale

sur les catégories les plus en marge, celle des femmes en l'occurrence.

Les études d'impacts sont aujourd'hui confrontées à un défi: proposer un modèle référentiel d'évaluation pouvant s'appliquer dans différentes situations. Pour y arriver, les chercheurs et praticiens doivent trouver des moyens d'amélioration des études actuelles, en trouvant des techniques d'estimation mieux appropriées.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld