La Convention internationale sur la diversité
biologique offre au Sénégal un cadre formel qui lui permet
d'appuyer, de formaliser et d'harmoniser des traditions largement
répandues et une politique gouvernementale active de conservation et de
gestion des ressources naturelles au Sénégal.
Toutefois, le gouvernement dispose d'un système de
planification qui renforce la rigueur dans la gestion des ressources naturelles
et de la biodiversité.
C'est ainsi que la politique de décentralisation
engagée en 1996 a reconnu aux collectivités locales, un pouvoir
de création d'aires protégées. Ainsi, la région
peut créer, par arrêté du conseil régional, une aire
protégée « d'intérêt régional »
dans les terroirs de son ressort55. Le conseil rural, organe
exécutif de la communauté peut, par l'adoption d'une
délibération, porter la création d'une aire
protégée « dans les zones et sites naturels
présentant un intérêt socio écologique
rural56.» La commune, quant à elle, « peut prendre
toute mesure nécessaire pour protéger les espèces
menacées ou en voie d'extinction (...) »57 Alors,
l'initiative de création n'est plus du monopole de l'Etat. Il demeure
garant du contrôle de la légalité des
délibérations ou arrêtés locaux.
55 Article 20 du décret n° 96-1134 du
27/12/1996 portant application de la loi portant transfert des
compétences aux régions, aux communes et aux communautés
rurales en matière d'environnement et de gestion des ressources
naturelles.
56 Article 44 du décret n° 96-1134 du
27/12/1996 portant application de la loi portant transfert des
compétences aux régions, aux communes et aux communautés
rurales en matière d'environnement et de gestion des ressources
naturelles
57 Article 38 alinéa 3 du décret
n° 96-1134 du 27/12/1996 portant application de la loi portant transfert
des compétences aux régions, aux communes et aux
communautés rurales en matière d'environnement et de gestion des
ressources naturelles.
Toutefois, la lettre de politique sectorielle de
l'Environnement (LPSE) constitue la base de la politique environnementale qui
cherche surtout à développer le réflexe de la prise en
compte de l'environnement dans toutes les activités
génératrices de biens et services58.
Les axes de la LPSE sont entre autres :
· L'amélioration de la base de connaissance des
ressources naturelles en vue de mieux mesurer leurs capacités de charge
;
· La mise en place d'un dispositif institutionnel et
réglementaire efficace pour la protection de l'environnement et des
ressources naturelles afin d'atténuer leur dégradation ;
· La promotion des activités
génératrices de revenus et d'infrastructures collectives
combinant lutte contre la pauvreté et dégradation de
l'environnement ;
· La promotion des modes de production et de consommation
durables.
Dans cette optique, le Cadre de Dépenses Sectoriel
à Moyen Terme (CDS-MT) adopté en 2005 et qui a comme objectif une
gestion axée sur les résultats, constitue l'outil de mise en
oeuvre de la politique environnementale.
Le processus de décentralisation dans lequel est
engagé le Sénégal a comme objectif ultime d'assurer un
développement à la base. Les réformes entreprises dans ce
cadre ont pris en compte la dimension environnementale.
C'est ainsi que la lettre de politique du développement
rural décentralisé a énoncé la
nécessité d'appuyer les collectivités locales dans la
gestion de leur environnement notamment par la mise en place « d'un
programme de restauration de la fertilité des sols, basé sur la
rationalisation de l'utilisation de l'espace rural permettant de limiter les
pratiques extensives consommatrices de ressources naturelles et la
responsabilisation des acteurs agraires dans la gestion des ressource
».
Le document de stratégie de stratégie de
réduction de la pauvreté (DRSP)59, dans le domaine de
la gestion des ressources naturelles et de l'environnement, a les objectifs
prioritaires suivants sont retenus :
· la valorisation des ressources forestières
(exploitation rationnelle et durable, diversification des combustibles,
réduction des pertes à la consommation) ;
· la sauvegarde de l'environnement et la lutte contre la
désertification ;
· la sauvegarde de la faune et de la flore ;
· la sauvegarde de l'environnement marin côtier ;
· la recherche d'un point d'équilibre entre la
satisfaction des besoins des populations et le maintien de la
biodiversité ;
· la valorisation des ressources sauvages ;
58 CEPS, 2009. LETTRE DE POLITIQUE DU
SECTEUR DE L'ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES (LPSERN) 2009- 2015. 16
pages.
59 Initié par les autorités en 2000,
le DRSP est basé sur une croissance redistribuée et la
satisfaction des besoins de base des populations pauvres. Il vise à
promouvoir la richesse, à organiser l'égalité de chances
et à assurer la protection des groupes vulnérables.
· l'amélioration du cadre de vie en milieu
urbain et rural ;
· le renforcement des capacités en gestion des
ressources naturelles et de l'environnement par la formation,
l'éducation, la sensibilisation, l'alphabétisation...;
· l'accroissement de l'accès des populations pauvres
aux énergies de substitution ;
· la gestion communautaire des aires
protégées ;
· l'optimisation des interventions de l'Etat,
conformément au Code de l'Environnement.
En 2000, le Gouvernement du Sénégal a
organisé de larges concertations nationales sur la pêche et
l'aquaculture pour revisiter la stratégie de développement du
secteur de la péche appliquée au cours des deux dernières
décennies et procéder aux ajustements nécessaires afin de
mieux répondre aux enjeux et défis nouveaux posés au
secteur60.
Depuis l'adoption de la stratégie de
développement durable en 2001, le secteur de la péche a
étéconfronté à des évolutions
notables, résultant à la fois des dynamiques sectorielles
internes, des
progrès accomplis dans la mise en oeuvre de la
stratégie, mais également des nouvelles missions assignées
au secteur dans le cadre des politiques publiques nationales (DSRP, SCA).
Cela a abouti à la formulation d'une Lettre de Politique
Sectorielle des Péches et de l'Aquaculture dont l'objectif 1 porte sur
la gestion durable et restauration des ressources halieutiques et de leurs
habitats :
Cela passe aussi par des mesures salutaires :
· L'instauration de plans d'aménagement des
pécheries : L'instauration progressive de plans d'aménagement des
pécheries, commençant par les stocks les plus menacés, est
seule à même d'assurer la durabilité de la ressource et de
l'activité de pêche (durabilité biologique,
économique, et environnementale). Ces plans constitueront la clef de
voûte de l'ajustement des capacités de péche et des mesures
de contrôle de l'accès ;
· La promotion d'une politique de conservation de
l'habitat marin et de la ressource dans le cadre d'une gestion
intégrée des zones côtières : Elle demeure une
préoccupation constante, compte tenu de l'état de
dégradation progressif des écosystèmes marins. Le
Gouvernement mettra en oeuvre en relation avec les partenaires au
développement, les institutions professionnelles et la
société civile, un aménagement rationnel,
intégré et durable des environnements marins et côtiers.
Un autre document stratégique pour la conservation de la
biodiversité par son aspect intersectoriel est la lettre de politique de
gestion intégrée des ressources marines et
côtières.
Une Revue des dépenses publiques de la
biodiversité a été financée par la Banque Mondiale
en appui au Projet de Gestion Intégrée des Ressources Marines et
Côtières (GIRMAC) qui a ressenti le besoin d'une orientation
stratégique d'ensemble du secteur et d'une réflexion sur les
options à prendre pour mener à bien sa mission.
60 Ministère de l'Economie maritime, des Transports
maritimes, de la Pêche et de la Pisciculture, 2007. Lettre de Politique
Sectorielle des Pêches et de l'Aquaculture. 44 pages.
http://www.ecomaritime.gouv.sn/IMG/pdf/lettre_de_politique_sectorielle.pdf
Cette étude du secteur de la biodiversité
s'inscrit par ailleurs dans une trilogie de revues des dépenses
publiques qui aborde les trois secteurs représentatifs de la
biodiversité du pays et des ressources qu'elles génèrent
:
· une revue des dépenses publiques du secteur
forestier qui a été réalisée en 2004 dont le
rapport est disponible ;
· une revue des dépenses publiques du secteur de la
conservation de la biodiversité a été
préparée en 2007 ;
· une revue des dépenses publiques de la pêche
a été préparée en 2008. B/ Les
progrès accomplis dans les mécanismes de mise en oeuvre de
cogestion
Le Gouvernement a déjà posé des actes
décisifs dans la mise en oeuvre de ces réformes illustrés
par quelques actions phares : définition de nouvelles conditions
d'accès avec l'introduction du permis de pêche artisanale ;
ouverture de chantiers d'envergure dans le domaine de la maîtrise des
capacités de capture (élaboration du Programme d'ajustement des
capacités de pêche maritime, du programme national
d'immatriculation des pirogues, de l'audit de la flotte démersale
côtière ); l'amélioration de la gouvernance du secteur par
l'introduction de la cogestion et la mise en place des Conseils Locaux de
pêche; le renforcement notable des moyens opérationnels de la
surveillance des pêches ; la mise en oeuvre de politiques de conservation
de la ressource et de l'environnement marin (instauration du repos biologique,
création de récifs artificiels, gestion intégrée
des ressources marines et côtières, création d'aires
marines protégées) ; la création d'une cellule de
restructuration industrielle et Elaboration d'un plan de restructuration
industriel.
La Lettre de politique sectorielle vise à
accélérer ces réformes, à accroître leur
efficacité en renforçant notablement la cohérence des
interventions, des projets et programmes publics sur la base d'objectifs
clairement définis, priorisés et hiérarchisés. Elle
vise en même temps à fédérer toutes les initiatives
de l'Etat et des partenaires au développement (bailleurs de fonds, ONG)
autour d'un document de référence consensuel.
La mise en place d'un système de concessions de droits
d'accès aux ressources halieutiques permettant de réguler
l'accès par zones et groupes d'espèces. En péche
artisanale, les récipiendaires des droits d'usage concédés
seront les nouvelles institutions locales crées en vue de
responsabiliser, d'appuyer et de faire participer les communautés de
pêcheurs à la gestion des pêches (conseils locaux des
pêches, conseil national consultatif des pêches, structures de
cogestion, autres initiatives à la base, etc.).
Un cadre contractuel devant régir les conditions dans
lesquelles les communautés de pêcheurs bénéficieront
des droits d'usage concédés sera élaboré par
l'administration des péches en concertation avec les
représentants des usagers.
Le Gouvernement du Sénégal a
élaboré une stratégie en conformité avec les
dispositions du code de la pêche de 1998, en vertu du lequel les
communautés ont la possibilité de se constituer en associations
légalement reconnues, connues sous le nom de Comités Locaux de
Pêche (CLP : Comite Local de Pêche)61.
Ces CLPs négocient des accords juridiques directement
avec le Ministère de l'Économie Maritime afin de
développer et de mettre en oeuvre des initiatives de Cogestion pour des
pêcheries ciblées. Le Ministre entérine ces initiatives
(par exemple les mesures de contrôle telle que la taille minimale des
mailles des filets de pêche, les périodes de fermeture, les
réserves intégralement protégées, Etc.), par un
Arrêté ministériel.
A l`échelle communautaire et des CLPs, le
Ministère a mis en place des Conseils Locaux de Pêche Artisanale
(CLPA: Conseil Local de la Pêche Artisanale) pour développer des
plans de gestion de zones côtières de pêche plus larges,
harmoniser et rassembler les initiatives de Cogestion prises par le CLPs.
Toutefois, le CLPA, ne couvre pas de zones vastes à l'échelle des
stocks halieutiques unitaires, ce qui est, du point vue biologique,
déterminant pour la gestion des stocks halieutiques.
Le GIRMaC) met en oeuvre des initiatives pilotes de cogestion
dans quatre sites pilotes. Un manuel de cogestion a été
élaboré pour guider les interventions62. Il a
été conçu pour les facilitateurs du GIRMaC et le personnel
évoluant dans le secteur des pêches du Sénégal, pour
leur permettre de mieux comprendre la cogestion des pêcheries.
Il contient des éléments théoriques sur
la cogestion des pêcheries et des informations sur les expériences
en cours dans le pays et au-delà de ses frontières.
Dans un souci d'implication des populations
résidentes, beaucoup de Communautés rurales, en concertation avec
les Conservateurs des Aires protégées (AP), ont instauré
des comités de gestion63. Ces organes sont composés,
pour chaque AP, du Conservateur et des différentes parties prenantes,
membres des communautés concernées et ONG impliquées. Leur
président élu est choisi parmi les membres des parties
prenantes.
Le conservateur ne peut être président. Cet
organe ne possède pas de statut juridique officiel. Encore une fois,
l'existence de ces comités de gestion dans la politique du parc
relève d'un constat empirique.
Au Sénégal, il existe des corps
d'écogardes64. Ces derniers sont issus des populations
locales et se portent volontaires pour participer à la surveillance et
aux mesures de conservation et de restauration du site. Ces personnes ne sont
donc pas rémunérées pour leurs activités
volontaires mais bénéficient en retour de plusieurs
opportunités notamment celle d' écoguidage ou de transport sur
les lieux.
61 USAID et Coastal resource center, 2011.
Gestion concertée pour une Pêche durable Future Au
Sénégal (USAID/COMFISH). Plan de Travail Année I (14
février - 30 septembre 2011). 43 pages.
62 GIRMaC, 2007. Manuel de cogestion des
pêcheries. DES THEORIES ET DES ETUDES DE CAS AU JAPON, AUX PHILIPPINES ET
AU SENEGAL. 33 pages.
63 Dans les arrêtés portant
règlement intérieur des parcs et réserves, le comite de
gestion est désigné comme l'organe de mise en oeuvre du plan de
gestion.
64 Dans certaines aires protégées on
les appelle aussi éco guides ou volontaires