CHAPITRE 2
L'ABSENCE DE FAUTE DANS LES OPERATIONS COMMERCIALES
AU DEBUT DE L'EXPEDITION MARITIME.
L'absence de faute du transporteur au début de
l'expédition maritime implique l'accomplissement de toutes ses
obligations à partir de l'empotage jusqu'à la prise en charge de
la marchandise (Section 1) ainsi que pendant les opérations de mise
à bord de la cargaison (Section 2).
· Section 1 :L'absence de faute à partir de
l'empotage jusqu'à la prise en charge de la marchandise.
Pendant cette phase, nous étudierons les
problèmes de fourniture et d'empotage des conteneurs par le transporteur
(§1) avant de nous intéresser au problème du
préacheminement de la marchandise (§2). Par la suite nous
envisagerons la prise en charge de le marchandise (§3)
§1: Les problèmes de fourniture et d'empotage
des conteneurs par le transporteur
Le plus souvent, les conteneurs sont loués par le
transporteur et mis à la disposition du chargeur. Dans ces cas le
transporteur est tenu de fournir un conteneur en bon état et
adapté à la nature de la marchandise à transporter car il
sera responsable des dommages aux marchandises résultant d'une
défectuosité du conteneur fourni par ses soins.
La question qui se pose alors, c'est de savoir à quel
corps de règles sera soumis cette opération de location de
conteneur. Pour la CA d'Aix-en-Provence, << La location de conteneur est
un engagement spécifique et accessoire du transport, (elle) n'est pas
soumis aux règles du transport maritime »1.
Dans les hypothèses où la Cour de cassation
retient la faute du transporteur pour avoir remis au chargeur un conteneur
<< inadapté au transport et à la bonne conservation de la
cargaison » et ainsi contribué à la réalisation du
dommage, celle-là n'indique pas si elle s'est fondée sur le droit
de la location ou sur le droit du transport maritime2.
L'élément déterminant est ici tiré de la faute de
la compagnie maritime.
1 CA Aix-en-Provence 19 fév. 87
2 Com 17 sept. 2002, Revue Scapel 2003. 22, cité au DMF
Hors série n°8 n°89.
Pour sa part, la CA Versailles écarta le droit maritime
dans une affaire concernant des avaries survenues en raison d'un conteneur
frigorifique défectueux loué par l'armement. La cour y a vu un
contrat de location de meubles sans rapport d'indivisibilité ni
même d'interdépendance juridique avec le contrat de
transport1.
Mais la Cour de cassation a censuré cette
décision en soulignant le principe selon lequel « l'action en
responsabilité contre le transporteur à raison des pertes ou
dommages subis par la marchandise depuis la prise en charge jusqu'à la
livraison ne peut être exercée que dans les conditions
prévues par (... ) la loi du 18 juin 1966 »2. Cet
arrêt a été critiqué par le professeur
Bonassies3 car le dommage était dû au conteneur fourni,
plutôt qu'au transport maritime.
Le transporteur répond ainsi des dommages
résultants des vices cachés du conteneur qu'il a
fourni4. Commet une faute le transporteur qui a empoté la
marchandise dans un conteneur vétuste et insuffisamment
étanche5.
La jurisprudence dominante rattache l'opération
d'empotage à l'exécution du contrat de transport, au même
titre qu'une prestation LCL/LCL, car elle ne préfère pas y voir
un contrat d'entreprise de droit commun.
Pour ce qui concerne l'empotage du conteneur par le
transporteur, il convient de préciser que la prise en charge et, par
conséquent, le transfert des risques s'effectue à partir du
moment où le chargeur remet la marchandise destinée à
être empotée au transporteur.
Lorsque c'est le transporteur qui procède à
l'empotage, il doit être très vigilant car il sera responsable de
toutes les avaries ou dommages résultant des carences lors de ces
opérations d'empotage. Il doit, pour prétendre à une
absence de faute sa part, procéder correctement à l'emballage, le
conditionnement et le marquage des marchandises.
Vu les violents efforts qui s'exercent longitudinalement et
transversalement lors de la traversée et verticalement lors des
manutentions, la marchandise empotée dans le conteneur doit être
suffisamment calée et correctement agencée par le transporteur
afin d'en équilibrer la charge. Pour cela, le transporteur devra «
répartir le poids d'une manière uniforme sur la plus grande
surface possible ; le centre de gravité des marchandises devant
être aussi proche que possible du centre de volume et le plus bas
possible dans le sens vertical. De plus, en dehors du plancher qui supporte le
poids du chargement, tous les efforts doivent s'exercer sur les
éléments de structure et le moins possible sur les parois et sur
les portes du conteneur»6.
1 CA Versailles, 14 janv. 1999, BTL 99, p. 550.
2 Com 5 mars 2002 BTL 2003, p. 203.
3 DMF 2003 Hs n°7, p.67.
4 CA Aix 21 sept. 2000, « un conteneur ne saurait être
assimilé à un élément du navire ».
5 CA Versailles 20 avril 2000, BTL 2000, p. 425, confirmé
par Com. 27 sept. 2002, BTL 2002, p. 623.
6 Lamy Transport 2004, t.III , n°1497.
Il doit aussi, pour certaines marchandises, veiller à
ce que le conteneur soit suffisamment ventilé afin d'éviter des
dommages dus à la condensation. Pour ce faire, il doit se garder de
procéder à un empotage trop compact de la marchandise. Concernant
les conteneurs frigorifiques, il doit veiller à ce qu'il y ait une
circulation suffisamment correcte d'air froid à l'intérieur de
ceux-ci.
Toujours dans le souci d'être dans une situation
d'absence de faute, le transporteur devra tout faire pour conditionner au mieux
la marchandise afin de la permettre d'effectuer le voyage dans des conditions
que les usages admettent comme suffisamment correctes. C'est ainsi qu'il devra
veiller à une bonne composition ainsi qu'à une bonne
répartition des différents lots de marchandises. Il devra
également signaler, aux moyens d'étiquettes apposées sur
le conteneur, le caractère dangereux de certaines marchandises dont il a
procédé à l'empotage
Il faut également rappeler que la clause << said
to contain >> est démunie d'effet lorsque c'est le
transporteur qui a procédé à l'empotage du conteneur.
Notons cependant que les résultats d'une
vérification des déclarations du chargeur effectuée en
cours de route ne sont pas opposables au chargeur lorsque c'est le transporteur
qui a lui-même procédé à l'empotage du
conteneur1.
Il convient, d'ès à présent, de
s'intéresser à la phase du pré-acheminement de la
marchandise.
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