5.2- La microfinance au Bénin et dans le
monde
Les connaissances scientifiques sur la microfinance dont il
s'agit ici ont été tirées de la littérature des
études récentes sur la microfinance tant au Bénin, en
Afrique que dans le monde.
En effet, au Bénin, une équipe de chercheurs
commis par le Programme des Nations Unies pour le Développement
(PNUD-Bénin 2007) a réalisés une
étude sur le diagnostic approfondi du secteur de la
microfinance au Benin. L'objectif général de
l'étude est d'analyser les performances globales du secteur de la
microfinance au Bénin avec un accent particulier sur la demande et
l'offre des produits et services de microfinance. De façon
spécifique il a été question de l'analyse des aspects de
l'offre et de la demande de services financiers de même que les
contraintes, opportunités et mesures visant à desserrer les
contraintes identifiées.
L'analyse de la situation de l'offre s'est
intéressé à la typologie des IMF, la couverture
géographique, les conditions d'intervention et des performances, les
dynamiques de concurrence, les contraintes géographiques et
socio-économiques, les stratégies d'interventions, l'application
des pratiques optimales, la gouvernance, les systèmes d'information de
gestion (SIG), la sécurité physique et financière
(assurances et centrales de risques),les potentialités du secteur et
conditions de viabilité / pérennité des IMF, les
perspectives de développement, d'évolution du secteur et
d'intervention des différents acteurs (plans de développement et
d'affaires des IMF, programmes du gouvernement et des bailleurs de fonds,
modalités de financement...).
L'analyse de la demande s'est orientée vers la demande
satisfaite de services et produits d'épargne, de crédit, de
micro-assurance et de transfert d'argent et la demande potentielle pour ces
produits notamment le type et la nature des besoins exprimés, la
répartition de la clientèle par catégories
socio-économiques.
Pour ce qui est des défis et des contraintes de la
viabilité des IMF opérant dans les zones rurales, l'étude
a permis d'identifier les contraintes comme l'enclavement,
l'analphabétisme de la population, la faible capacité de
mobilisation des ressources, la faiblesse de la production agricole et son
caractère aléatoire, les aléas climatiques et
calamités naturelles, la faible disponibilité de l'énergie
électrique, les problèmes de sécurité, les
difficultés d'approvisionnement en carburant et le manque
d'infrastructures.
A l'université d'Abomey-Calavi Ingrid Sonya M.
ADJOVI (2009) par le biais de son mémoire de maitrise en
sociologie, a étudié les interactions entre l'Etat, les
organisations de la société civile, les institutions de
microfinance et les groupements féminins dans l'économie
informelle à Cotonou. Elle a tenté de comprendre la participation
de ces divers acteurs sociaux dans l'économie informelle à
travers la pratique des activités génératrices de revenus,
leur financement et la réglementation. Dans une approche de
l'individualisme méthodologique et de l'interactionnisme, les
résultats de cette étude ont montré dans leurs
globalité que l'économie informelle trouve son explication dans
certains facteurs sociaux (la pauvreté, l'analphabétisme et la
logique de prédétermination professionnelle), culturels
(croyances relatives à l'argent et à la richesse, les croyances
liées aux stratégies de vente des produits et la force du verbe)
et économiques (faible niveau de revenu et d'épargne), sans
isoler la forme de régulation exercée par l'Etat sur les divers
acteurs collectifs en présence.
Par ailleurs, Yaya Koloma (2007)
décrit les faits marquants du secteur de la microfinance au Mali, son
contexte, ses caractéristiques, et son articulation avec les politiques
publiques de réduction de la pauvreté et des
inégalités, notamment de genre. Les nouvelles orientations du
financement du développement ont conduit le Mali à
considérer la microfinance comme l'un des outils majeurs des politiques
publiques de
lutte contre la pauvreté, en instaurant un cadre
réglementaire et une politique nationale de microfinance. Elle
toucherait 6,5% de la population totale estimée à 11,6 millions
en 2005. Ce taux aurait connu un accroissement de 27,7% entre 2003 et 2005. Sur
1,9 millions de familles maliennes en 2005, la proportion de familles
touchées par les services microfinanciers s'élèverait
à 38,8%. Les femmes représenteraient 40,3% de la clientèle
des institutions de microfinance. Les controverses théoriques et
empiriques ont conduit à revoir l'espoir tant suscité de
l'efficacité des services de la microfinance en termes de lutte contre
la pauvreté et les inégalités de genre. L'étude du
cas du Mali, à travers les quelques rares évaluations d'impact
qui ont été réalisées, permet de constater que,
même si une amélioration certaine des conditions de vie de
certains clients ou clientes bénéficiaires des services n'est pas
à écarter, une réduction certaine de la pauvreté
peut paraître difficile.
D'un autre côté, Isabelle Guérin
et Jane Palier (2007) mettent en cause le lien automatique
fait entre microfinance et autonomisation des femmes et montrent que cette
approche un peu simpliste ne reflète pas la réalité ; car
elle n'examine pas les limites de l'outil de développement qu'est la
microfinance. Or, Linda Mayoux (2007) se demande si
les tendances actuelles à la commercialisation ou au ciblage de la
pauvreté affichées dans `Ways Forward for Microfinance' (voies
possibles pour la microfinance) lors du récent Sommet de
microcrédit sont susceptibles d'améliorer l'impact sur les
questions de genre. Mayoux présente des façons d'intégrer
l'autonomisation des femmes dans ces deux tendances actuelles mais en
précisant qu'il faudra que la microfinance prenne un engagement beaucoup
plus clair en faveur de l'égalité des genres.
Par contre, Ranjula Bali Swain (2007) de
l'université d'Uppsala aborde les différentes définitions
et utilisations du concept d'autonomisation. Forte de sa recherche sur les
groupes d'entraide en Inde, elle montre que la formation joue un rôle
prépondérant dans
l'autonomisation des femmes. Selon les conclusions de ses
travaux, les femmes ne constituent pas un groupe homogène. Elles ont des
besoins financiers différents qui varient selon le contexte
socioculturel et leur expérience. Elles ne forment pas un groupe
marginalisé puisqu'elles ont des relations et des échanges
d'expériences avec les hommes à des niveaux divers. C'est
plutôt Susan Johnson (2007), de l'Université de
Bath qui explique pourquoi il est essentiel que les institutions de
microfinance en particulier et le secteur en général, comprennent
cet aspect de la question et voient comment l'intégrer aux études
d'impact. Susan montre qu'il faut ouvrir la `boîte
noire' de l'économie des ménages, comprendre les relations
hommes/femmes et les décisions relatives à l'attribution des
ressources pour concevoir des services microfinanciers qui permettront aux
femmes d'atteindre leurs objectifs.
Tamara Underwood (2007) du Réseau
Européen de la Microfinance (REM) quant à elle, a eu le
mérite de rendre publics les résultats de son travail de
recherche sur les femmes et le microcrédit en Europe occidentale. Elle a
examiné les raisons pour lesquelles dans cette région la
clientèle de la microfinance est constituée à 39% de
femmes. Ces raisons sont, selon Tamara, le manque
d'éducation, la formation commerciale insuffisante, le manque
d'expérience commerciale, le faible accès à l'information,
l'insuffisance de confiance en soi, le revenu bas et l'absence de garantie ou
de biens nantis. Par contre Maria Darbringer de
l'Université de Vienne (2007) a résumé une étude
socio-anthropologique d'un projet de microcrédit en Equateur. Ses
travaux ont permis de mieux saisir le comportement des femmes qui tentent de
jongler avec leurs nombreuses responsabilités. Elle s'attarde sur la
nécessité de ne pas se confiner aux aspects économiques
lors de l'évaluation de l'impact des programmes de microfinance pour
étudier aussi les relations sociales.
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