CHAPITRE IV : HISTORIQUE DE LA MICROFINANCE ET DES
POLITIQUES DE
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE
4.1- Historique de la microfinance en Afrique
La microfinance, stratégie de financement des
activités économiques des pauvres, est parvenue en Afrique au
début des années 80 sous sa forme moderne. Ces premières
expérimentations remontent au début des années
1970 au Bangladesh, son pays d'origine, a l'issu des
expérimentations de l'économiste Mohammad YUNUS.
Par rapport à la situation antérieure qui se caractérisait
par l'octroi de crédits subventionnés et effectués le plus
souvent par des non spécialistes, la différence tient à
l'importance accordée au remboursement, à la fixation d'un taux
d'intérêt couvrant le coût de la prestation du crédit
et au ciblage de groupes de clients n'ayant le plus souvent pour seule autre
source de crédit que le secteur informel.
Mais en réalité, les pratiques de la
microfinance en Afrique sont encore plus anciennes, surtout celles qui
relèvent de la collecte de la petite épargne. Dans des pays comme
le Burkina Faso, le Togo ou le Cameroun par exemple, les premières
coopératives d'épargne et de crédit ont vu le jour au
cours des années 60[14]. Mieux, selon les travaux du Professeur
Hans Dieter Seibel[15] de l'Institut de Sociologie et Centre de
Recherche en Développement, de l'Université de Cologne en
Allemagne, l'association rotative d'épargne est une institution ancienne
qui remonte au moins au XVIe siècle. C'est à cette époque
qu'elle est arrivée aux Caraïbes avec les esclaves Yoruba. Le terme
« esusu » et la pratique qu'il décrit existent encore
aujourd'hui. On parle ainsi de l' « esu » aux Bahamas, du « susu
» à Tobago ou encore du « sou » à Trinidad. Chez
les Yoruba du Nigeria, aujourd'hui, il est difficile de trouver un adulte qui
ne soit pas membre d'au moins un « esusu ».
[14]Ouedraogo A. & Gentil D. (2010), La
microfinance en Afrique de l'Ouest : Histoires et innovations ; Editions
CiF, editions Karthala
[15]Hans Dieter Seibel, 2006 , De la
microfinance informelle au linkage banking : interactions entre théorie
et pratique , DE Luxembourg
L'institution existe dans toute l'Afrique de l'Ouest, ainsi
que dans de nombreuses autres régions du monde où elle fait
partie intégrante des micro-économies locales. Elle s'appelle
« arisan » en Indonésie, « paluwagan »
aux Philippines, « gameya » en Egypte, « ekub
» en Ethiopie, « cuchubal » au Guatemala, etc.
Cependant, aujourd'hui, et en termes d'évolution des
pratiques, la microfinance ne se confond plus au terme de microcrédit.
Elle désigne les dispositifs permettant d'offrir des
crédits de faible montant (microcrédits) à des familles
pauvres pour les aider à conduire des activités productives ou
génératrices de revenus leur permettant ainsi de
développer leurs très petites entreprises.
Avec le temps et le développement de ce secteur
particulier de la finance partout dans le monde, y compris dans les pays
développés de nos jours, la microfinance s'est élargie
pour inclure désormais une gamme de services plus large (crédit,
épargne, assurance, transfert d'argent etc.) et une clientèle
plus étendue également. Dans ce sens, la microfinance ne se
limite plus à l'octroi de microcrédits aux pauvres mais bien
à la fourniture d'un ensemble de produits financiers à
tous ceux qui sont exclus du système financier classique ou
formel.
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