2.3 Présentation des micro-organismes
pathogènes
Les micro-organismes pathogènes sont des êtres
vivants dont le parasitisme est la caractéristique commune et qui sont
capables de proliférer dans un organisme supérieur (en
particulier humain) en provocant, chez ce dernier, des troubles de santé
plus ou moins grave: l'eau n'est pour eux qu'un moyen de transport et un
vecteur de contamination. Présents dans tous les milieux sous des formes
très variées, les micro-organismes pathogènes sont plus
répandus sous nos climats
36 EDS2, 2001,
chauds parce que la majorité d'entre eux sont
mésophiles c'est-à-dire qu'ils préfèrent une
température moyenne comprise entre 20 et 40°C. Leur survie est
limitée dans l'eau mais avec une durée variable suivant les
organismes: les formes sporulées ou enkystées sont les plus
résistantes; certains virus ou bactéries peuvent être
hébergés par des réservoirs à parasites; certains
vers présentent des formes larvaires qui se développent dans un
ou plusieurs hôtes intermédiaires vivant en milieu aquatique
(mollusque, crustacé ou poisson). Ils entrent dans l'organisme par le
biais d'une eau souillée par des déchets (liquides ou solides)
d'origine animale ou végétale. Ils jouent un rôle important
dans le recyclage de la matière organique, dans l'équilibre des
plantes et des animaux et dans certaines productions alimentaires et
industrielles.
Les micro-organismes pathogènes rencontrés dans
les eaux à potabiliser peuvent être de nature très
différente. Leur identification et leur élimination font appel
à des techniques variées. Leur classification permet d'identifier
les souches pathogènes des souches non pathogènes. Les
critères de classification les plus importants sont:
- le type de paroi;
- la forme de la bactérie;
- le type de métabolisme énergétique;
- le comportement en relation avec l'oxygène;
- la possibilité de produire des spores.
Le risque d'infection des populations par ces bactéries
et autres germes pathogènes dépend de la virulence des germes et
de l'immunité des hôtes. Les personnes sensibles sont surtout les
personnes âgées, les enfants, les immunodéprimés; or
la population de Porto-Novo est très jeune (les moins de 15 ans
représentent 46,8 %)37, donc une population assez
réceptive.
2.3.1- Les bactéries pathogènes
Le caractère pathogène est propre à certains
types de bactéries; toutefois, il existe des germes, habituellement
dénués de virulence, qui peuvent manifester une
37 INSAE, 2002
certaine pathogénicité quand les conditions du
milieu leur sont favorables ou qu'ils pénètrent, par accident,
dans une voie inhabituelle (cas par exemple de colibacilles dans le sang). La
majorité de ces bactéries sont pathogènes facultatives et
peuvent se développer dans la nature sur les dépotoirs d'ordure
ou chez des sujets malades. Certaines sont dites pathogènes obligatoires
dès lors qu'elles sont incapables de se multiplier hors d'un foyer
infectieux et leur présence signale la maladie. Parmi les principales
bactéries pathogènes émises vers le milieu
récepteur par les porteurs sains ou malades et pouvant être
transmises par voie hydrique à des individus on immunisés, on
trouve:
Tableau n°6: Les bactéries
pathogènes
Agent pathogène
|
Maladies transmises
|
Importance sanitaire
|
Dose infectante
realtive en ucf
|
Voie
principale de
transmission
|
Salmonella typhi
|
Fièvre typhoïde
|
Grande
|
Modérée: 103
|
Orale
|
Salmonella spp
|
Gastro-entérite
|
Grande
|
Elevée:105 à 107
|
Orale
|
Campylobacter coli et C. jejuni
|
Gastro-entérite
|
Grande
|
Modérée: moins
de 500
|
Orale
|
Shigella spp
|
Gastro-entérite, Dysenterie bacillaire
|
Grande
|
Modérée: 102
|
Orale
|
Escherichia coli
O157 H7
|
Gastro-entérite
|
Grande
|
Faible: 100
|
Orale
|
Vibrio cholerae
|
choléra
|
Grande
|
Elevée:106
|
Orale
|
Vibrio spp
|
Gastro-entérite
|
Grande
|
Elevée: plus de
106
|
Orale
|
Yersinia enterocolitica
|
Diarrhée sanguinolente
|
Grande
|
Elevée: 106
|
Orale
|
Aeromonas spp
|
|
Modérée
|
Elevée: 108
|
Orale Contact
cutané
|
Legionella spp
|
|
Modérée
|
Grande
|
Inhalation
|
Mycobacterium atypique
|
|
Population à
risques
|
Population à
risques
|
Contact cutané Inhalation
|
Pseudomonas aeruginosa
|
Septicémie Gastro-entérite
|
Modérée
|
Elevée
|
Ingestion contact cutané
|
ucf =1 bactérie
Source: VERMEYLEN (A), 2007
- Salmonella thyphi et Salmonella
spp
Les salmonella possèdent les caractères de
définition des entérobactéries :
bacilles droits à Gram négatif, souvent mobile et
à ciliature péritriche, se développent sur milieux
ordinaires, aéro-anaérobies, fermentant le glucose en produisant
souvent du gaz, réduisant les nitrates en nitrites, et donnant un test
des
oxydases négatifs. La plupart des Salmonella sont
prototrophes (n'ont aucune exigence en facteur de croissance) à
l'exception de sérotypes très adaptés à un
hôte particulier (Typhi, Paratyphi, etc.) et qui sont auxotrophes pour un
ou plusieurs facteurs de croissance.
Les salmonella sont des bactéries en forme de
bâtonnet qui ne produisent pas de spores. Elles sont nuisibles pour
l'humain et pour certains animaux, dont les rongeurs, les oiseaux et les
animaux domestiques38.
- Campylobacter coli et Campylobacter
jejuni
Campylobacter (C, jejuni, C. coli) qui, après avoir
surtout été considéré en pathogène animale,
représente de nos jours une cause d'entérité humaine aussi
importante que les salmonelles ou E, coli O157: H7. Le genre Campylobacter
appartient à la famille des Campylobacteraceae. Cette famille comprend
des bactéries incurvées, spiralées ou en forme de S de
taille 0,2-0,9 um d'épaisseur et 0,5 à 5 um de long, Gram
négatif qui peuvent donner des formes coccoïdes dans les cultures
anciennes. Elles sont mobiles par un flagelle polaire unique et non
engainé. Elles sont micro-aérophiles, chimio-organotrophes,
utilisant les acides aminés et les acides organiques comme source de
carbone mais jamais le sucre.
- Helicobacter pylori: Il est
responsable des gastro-entérites graves aboutissant aux ulcères
et aux cancers du tube digestif. Il est de la famille des
spirillacées39.
- Shigella spp
Le genre Shigella appartient à la famille des
Enterobacteriaceae, responsables des affections gastro-intestinales. Ces
bactéries furent décrites pour la première fois par
Chantemesse et Widal en 1888 qui les isolèrent à partir des
selles d'un malade atteint de dysenterie bacillaire40. Ce sont des
bacilles Gram négatif, aéro-anaérobies facultatifs,
fermentant le glucose, réduisant les nitrates en nitrites. Les Shigella
sont des bactéries non mobiles qui ne forment pas de spores. Il en
38 VERMEYLEN (A), 2007
39 Degrémont, 2005
40 AVRIL, 1988
existe quatre sous-groupes ou espèces : S. dysenteriae, S.
flexneri, S. boydii et S. sonnei41.
- Escherichia coli 0157: H7
L'espèce Escherichia coli, du genre
Escherichia appartient à la famille des
Enterobacteriaceae. Les Escherichia coli sont pour la plupart
du temps inoffensives. Même si ce groupe de bactéries joue un
rôle utile dans l'organisme en diminuant les bactéries nuisibles
et en synthétisant des vitamines, certaines souches sont
pathogènes. Par ailleurs, on a Escherichia coli
entérohémorragique (O157: H7) en forme de bâtonnet,
mobile qui est très sensible à la chaleur.
- Vibrio cholerae et Vibrio spp
Le vibrion cholérique (Vibrio cholerae ou V.
comma), découvert par Koch, appartient à la famille des
Vibrionaceae42. Il se présente sous la forme de
petits bâtonnets arqués flagellés et mobiles et constitue
un groupe bactérien composé de bacilles à Gram
négatif non sporulés, droits ou incurvés, de 0,5 à
0,8 um de diamètre et de 1,4 à 2,6 um de longueur. Toutes les
espèces du genre Vibrio sont mobiles au moyen d'une ciliature
polaire (en milieu liquide) ou mixte, polairepéritriche (sur milieux
solides) ; des formes immobiles peuvent cependant être
observées43. Ce sont pour la plupart des
aéro-anaérobies facultatifs, utilisant les glucides par voie
fermentative. Les épidémies de choléra sont encore
relativement fréquentes et une désinfection insuffisante de l'eau
potable en est l'une des principales causes dans les pays du tiers-monde.
- Yersinia enterocolitica
A côté des pathogènes notoires dont les
effets cliniques ont été bien étudiés, le Yersinia
enterocolitica est l'un des germes opportunistes qui peuvent présenter
une virulence notamment vis-à-vis d'organismes
immunodéprimés (Degrémont, 2005). Le genre
Yersinia appartient à la famille des
Enterobacteriaceae et représente un taxon très
homogène44. Yersinia enterocolitica est un bacille
à Gram négatif. La croissance de ces bactéries sur les
milieux de culture incubés à 36°C est
41 AUBR, 2005
42 Degrémont, 2005
43 HANSEN et coll., 1979
44 BERCOVIER et coll., 1984
généralement faible. Elles sont biochimiquement
plus actives à 25°C ou 30°C qu'à 37°C, ce qui rend
leur identification souvent difficile au laboratoire puisque la plupart des
incubations sont réalisées à 35-37°C. Aussi, ces
germes, contrairement aux pathogènes cités
précédemment, présentent l'inconvénient
d'être adaptés au milieu hydrique. Ils sont capables de se
multiplier à des températures voisines de 0°C et en
présence d'un substrat organique dilué, par conséquent
dans des conditions proches de celles que l'on rencontre dans un réseau
de distribution45.
- Aeromonas spp
Comme le germe précédemment cité
Aeromonas spp est également un germe opportuniste46. Le genre
Aeromonas était inclus dans la famille des
Vibrionaceae. C'était un des trois genres (avec Vibrio
et Plesiomonas) de ce groupe connu comme pathogène pour
l'homme. Ces trois genres sont catalases et oxydases positifs,
anaérobies facultatifs, utilisent le D-glucose comme seule source de
carbone et d'énergie, et sont mobiles grâce à un flagelle
polaire. Des études taxonomiques récentes suggèrent qu'un
reclassement d'Aeromonas au sein d'une nouvelle famille pourrait
être proposé. Une première étude des
séquences de l'ARN 5S a montré que la profondeur
phylogénétique de ce genre est suffisante pour le
transférer dans une nouvelle famille, les
Aeromonadaceae47. Cette étude a été
confortée par celle des séquences de l'ARN 16S, montrant que le
genre Aeromonas diffère suffisamment des autres membres de la
sous-classe pour justifier son transfert des Vibrionaceae dans une
nouvelle famille impliquée dans les infections humaines : les
Aeromonadaceae48. Ce germe présente
l'inconvénient d'être adapté au milieu hydrique. Il est
également capable de se multiplier à des températures
voisines de 0°C et en présence d'un substrat organique
dilué, par conséquent dans des conditions proches de celles
pouvant être réunies dans un réseau de
distribution49.
45 Degrémont, 2005
46 Degrémont, 2005
47 COLWELL et coll., 1986
48 MARTINEZ-MURCIA et coll., 1992
49 Degrémont, 2005
- Legionella spp
La principale espèce est Legionella pneumphila.
Les légionelles ont
étérévélées en tant que
pathogènes humains en 1976, suite à une épidémie
dans un
hôtel en Amérique lors d'un
congrès50. Elles appartiennent à la famille des
legionellaceae. Ce sont des bacilles à Gram négatif,
aérobies, non sporulés, non acido-résistants, non
capsulés, de 0,3 à 0,9 um de large sur 2 à 20 um de long.
Ils sont généralement mobiles au moyen d'un, de deux ou de
plusieurs flagelles polaires ou sub-polaires, droits ou incurvés. Ils
sont des oxydases négatifs ou faiblement positifs, nitrates
réductases et uréases négatifs. La plupart des
espèces liquéfient la gélatine. Ils sont
chimio-organotrophes et utilisent les aminoacides comme source d'énergie
et de carbone51. Ces germes sont susceptibles de se multiplier dans
les eaux chaudes (installations de climatisation, installations d'eau chaudes
sanitaires) et leur contamination se fait généralement dans les
salles climatisées, au cours des bains, les douches, etc).
- Pseudomonas aeruginosa ou bacile
pyocyanique
Ce germe est fréquent dans les eaux d'égouts et
les milieux humides insalubres, de même que Pseudomonas
fluorescens, il provoque des diarrhées52. Le genre
Pseudomonas regroupe des bacilles à Gram négatif,
aérobies stricts, généralement mobiles grâce
à des flagelles en position polaire. Il est le genre type de la famille
des Pseudomonadaceae.
Pseudomonas aeruginosa est une tige à gram
négatif mesurant 0,5 à 0,8 um sur 1,5 à 3 um.
La bactérie est omniprésente dans le sol et
l'eau, et sur des surfaces en contact avec le sol ou l'eau. Son
métabolisme n'est que respiratoire et jamais fermentatif, mais il se
développera en l'absence de O2 si le NO3 est disponible comme accepteur
respiratoire d'électrons.
50 Degrémont, 2005
51 VERMEYLEN (A), 2007
52 Degrémont, 2005
En nature, il pourrait être trouvé dans un biofilm,
attaché à une certaine surface ou substrat, ou sous une forme
planctonique, comme organisme unicellulaire, nageant activement au moyen de son
flagellum53.
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