1.1.2 Caractéristiques des bactéries
viables non cultivables (VNC).
Le premier article décrivant et démontrant
l'existence de formes viable non cultivable sur les germes Escherichia
coli et Vibrio cholerae date de 1982 (Xu et al., 1982 [44]).
Depuis, la liste des microorganismes étudiés et décrits
à l'état viable non cultivable s'est allongée (Tableau
1).
Tableau 1 : Liste des bactéries décrites comme
pouvant entrée en état VNC. (Oliver, J.D., 2004 [30])
Une bactérie à l'état viable non
cultivable a perdu sa capacité à se multiplier sur milieu de
culture conventionnel mais possède une activité
métabolique. Cette activité métabolique peut être
mise en évidence par la présence de mRNA dont la durée de
vie est de moins d'une minute (Yaron S., Matthews K.R., 2002 [45]). Ces
bactéries peuvent retrouver leur « cultivabilité »,
phénomène appelé par abus de langage «
ressuscitation» (Oliver J.D. , 2005, [29]).
Le passage à l'état VNC d'une bactérie
est une stratégie qui permet aux cellules de survivre dans des
conditions non favorables, il s'agit d'un état réversible
à l'image de la sporulation des bacilles à GRAM positif tels que
Bacillus ou Clostridium. Ces formes VNC possèdent des
caractéristiques particulières et souvent différentes
d'une espèce à l'autre. Plusieurs études décrivent
les caractéristiques de germes à l'état VNC.
Une étude réalisée chez Campylobacter
jejuni a montrée qu'une cellule viable non cultivable conserve un
taux d'ATP comparable à une cellule cultivable (Beumer et al., 1992
[3]). Cependant, certains changements physiologiques ont été
démontrés chez Campylobacter jejuni : baisse du pH
intracellulaire, chute de la concentration en ions potassium (K+)
(Tholozan et al., 1999, [40]).
Outre les caractéristiques métaboliques et
physiologiques, les bactéries viables non cultivables présentent
des différences morphologiques et structurelles par rapport aux formes
cultivables. Il a été montré, chez Enterococcus
faecalis, une augmentation significative de la résistance
mécanique de la paroi bactérienne (Signoretto et al., 2000 [36]).
Ceci pouvant s'expliquer par des changements dans la structure de la paroi :
notamment par la présence de polymères muropeptidiques de
degré supérieur à deux (trimères,
tétramère, pentamères et plus).
Chez Vibrio vulnificus, des changements de
composition de la membrane plasmique ont été décrits. La
composition en acide gras de cette dernière varie entre l'état
cultivable et non cultivable. A l'état cultivable les acides gras
présents en majorité sont les C16 :0, C16 :1 et C18 :0,
après une courte période à 5°C les acides gras
majoritaires sont C15 :0, C16 :1, C16 :0, C17 :0 et C18 :0. (Day A.P. et Oliver
J.D., 2004 [10]) (CXX :Y, dans la nomenclature des acides gras, XX correspond
au nombre de carbone de la chaine aliphatique, Y correspond aux nombre
d'insaturations de la chaine). Ce constat a été
réalisé dans des conditions de stress hypothermique,
l'hypothèse émise est que ces changements de composition de la
membrane permettent de conserver sa fluidité. Sans ces modifications
membranaires, le passage à l'état VNC est impossible pour
Vibrio vulnificus, les cellules ne peuvent alors survivre au stress
provoqué par le traitement thermique.
Il est important de souligner que les caractéristiques
décrites précédemment sont valables
pour l'espèce et les conditions étudiées. Les
caractéristiques de l'état VNC peuvent difficilement
être généralisées. Par exemple, chez
Campylobacter jejuni le volume cellulaire augmente à
l'état VNC
(Tholozan et al., 1999 [40]) alors qu'il n'apparaît pas de
différences significative de volume chez Enterococcus faecalis
(Signoretto et al., 2000 [36]).
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