WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le féminisme islamique: l'islam "au féminin"-dessous sociologiques et historiques d'un mouvement féministe pour une nouvelle lecture du Coran.

( Télécharger le fichier original )
par Nejwa El Kettab
Université de Picardie Jules Verne - Master 1 recherche sociologie 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

DES POSTURES DIFFERENTES ADOPTEES PAR CES FEMMES

Quelle est l'attitude légitime à adopter?

Ces postures sont différentes mais communes à la fois dans la mesure où elles se situent sur un terrain de revendication tirant une légitimé des textes religieux. On constate que ce statut a une implication sociale considérable faisant de ces femmes les ambassadrices d'un mode de pensée naissant en contradiction avec les valeurs communes, à savoir des valeurs démocratiques se greffant à la spiritualité.

La dichotomie Orient / Occident participe à l'étiquetage de ces femmes comme étant « occidentalisées » ou trahissant les valeurs des sociétés musulmanes. Cette mise à l'écart des féministes musulmanes se traduit par les critiques et les controverses qu'elles suscitent dans leurs postures et leur discours révolutionnaires. La particularité de leurs discours se trouve dans sa portée révolutionnaire car ces femmes revendiquent une réforme totale et globale du fonctionnement politico-juridique islamique.

C'est une remise en cause profonde de l'institution islamique aujourd'hui au travers d'une réinterprétation des textes religieux. C'est une réforme visant à bouleverser le champ social et culturel de ces sociétés par le biais de ce qui régissait cet ordre social : la religion musulmane. Une autre instrumentalisation de la religion mais cette fois-ci au service de l'égalité et de la justice. Utiliser la source de leur oppression pour leur libération met à mal leur posture de militante, d'où leur difficulté à se faire entendre. De plus il s'agit d'une lutte englobant toutes les sphères de la vie en collectivité ce qui nous amène à dire que le féminisme islamique peut constituer un phénomène révolutionnaire à part entière.

Ces différentes façon de militer (écrire, fonder des associations, diriger une prière, participer à une révolution politique,...) sont autant de manières visant à prouver à l'opinion publique, au reste de la société que le pouvoir féminin peut servir la cause civique, politique et intellectuelle. Les prix décernés à ces femmes et leur médiatisation symbolisent le début d'une acceptation de leur revendication dans un contexte où l'Islam est une religion de plus en plus politisée.

Si on se penche sur le discours et les écrits de ces féministes on comprend qu'elles se distinguent des féministes laïques dans leur manière d'aborder l'émancipation féminine. En effet, les féministes musulmanes réfléchissent en terme de complémentarité: Les genres sont différents, complémentaires et se complètent soumis ainsi à une logique divine où « l'âme » est jugée de façon égale mais dont « l'enveloppe » sur terre peut revêtir la forme du genre masculin ou féminin; deux genres ayant des droits et des devoirs différents tendant à une justice sociale. S'agissant des féministes laïques, il est question d'une égalité niant les différences de manière à créer un équilibre parfait entre les sexes.


· Être féministe et musulmane: La question du regard et de l'opinion publique sur cette

posture intellectuelle:

Pour comprendre l'importance et l'impact de la notion du regard s'agissant de notre objet d'étude il semblerait judicieux de se pencher sur l'image et la manière dont est perçue la femme musulmane en général et dans le contexte moderne. Ceci nous permettra de comprendre un des aspects expliquant la place qu'occupent les féministes musulmanes au sein de l'opinion publique.

Dans la tradition judéo-chrétienne (et dans une certaine mesure la tradition islamique et préislamique dans les sociétés patriarcales arabes), le corps de la femme a souvent été associé au péché de chaire, à la tentation et donc à tout ce qui attrait au diable, au mal. Le corps de la femme alimentait les fantasmes les plus refoulées d'où l'oppression que subissaient les femmes avant la Révolution. C'est ainsi que petit à petit en réponse à cela les femmes ont libéré leur corps du joug patriarcale et misogyne, une libération qui est passée par le développement d'un mode vestimentaire propre à elles. Ces femmes ont ainsi contré les anciennes règles rigides qui encadraient la façon de s'habiller, se tenir et de se montrer en public. On comprend que cette révolution qui s'est mise en place en parallèle n'est pas seulement le résultat d'une longue lutte mais reflète un fort symbole d'affranchissement: Être libre de se montrer tel qu'on le souhaite est un droit valable aussi bien pour les hommes que pour les femmes.

Ne plus être perçu a travers un oeil réprobateur mais comme une citoyenne jouissant des pleins droits accordés par les valeurs républicaines. La lutte pour l'égalité n'est pas seulement d'ordre politique mais on comprend ici qu'il s'agit également d'une modification (plus ou moins inconsciente) de la perception qu'on a des femmes. C'est ce changement du paysage politique et historique qui transforme également notre regard.

« Regarder » n'est pas seulement une activité physique propre à chacun, et au delà des sensibilités individuelles, il y a le contexte socioculturel de chaque société à un moment donné de l'Histoire qui façonne notre perception. Le regard porté sur une femme aujourd'hui dans l'espace publique n'est pas le même que celui datant d'il y a environ deux cents ans... On ne peut détacher l'étude de la place du regard dans nos sociétés sans prendre en compte le contexte.

Les femmes ont toujours été au coeur des débats impliquant le regard posé sur elle: s'agissant de motivations politiques ou religieuses, femmes objets ou femmes opprimées, la question du regard est la principale source de ces controverses.

Saba Mahmood souligne dans son ouvrage57 que la caractéristique principale de la femme musulmane dans sa manière « de se présenter au monde et à la société » est la modestie. La modestie devient un critère de la femme musulmane et ceci doit s'exprimer à travers plusieurs paramètres: l'aspect vestimentaire, l'attitude, les paroles, etc...L'auteure insiste sur cet aspect (la modestie) pour définir la femme musulmane, de plus la « modestie58 » est prônée par les féministes (les dayate59) égyptiennes issues de la classe moyenne (population étudiée par l'auteure dans cet ouvrage). Ce sont ces femmes prenant la parole dans les mosquées et les conférences islamiques qui rappellent l'importance de la pudeur et de la modestie s'agissant des femmes.

On remarque bien que la vision de la femme telle qu'elle doit être varie selon ces femmes engagées: Certaines comme nous l'avons vu au préalable revendiquent une présence affirmée et forte de la femme dans l'espace public alors que d'autres (comme les féministes égyptiennes du Caire étudiées par Saba Mahmood) prônent plutôt la modestie et la discrétion qui selon elles valorise ( et caractérise) la femme.

57 Politique de la Piété, Le féminisme à l'épreuve du renouveau islamique - La Découverte 2009

58 Porter le voile islamique, servir son foyer: mise en valeur de la sphere privée comme au coeur de la vie sociale.

59 Savante musulmane prêchant la parole divine.

S'agissant d'une valeur comme celle de la modestie (s'illustrant principalement par le port du voile et l'occupation de la sphère privée) on peut s'interroger sur la place de l'action publique de ces femmes: Être engagée mais « modeste » à la fois semble relever de l'ordre de l'impossible; comment peut on se mobiliser, vouloir changer et améliorer l'ordre social établie en adoptant une posture effacée et discrète? C'est cette attitude pourtant que défendent un grand nombre de féministes musulmanes en Egypte et en Arabie Saoudite.

Servir le privé pour améliorer le publique est une manière de garder les femmes au sein de la sphère domestique, c'est une position discutable. Pourquoi ce courant d'idées établie un lien direct entre la « modestie » féminine et la stabilité sociale (une stabilité qui tend vers une justice sociale); un lien quelque peu paradoxal mais qui entre dans le schéma normatif dans la mesure où les femmes sont maintenue dans un champs d'action réduit ( sphère privée).

Cette volonté de ne pas sortir du cadre normatif illustre cet état d'esprit répandu dans certains pays musulmans à savoir la discrétion des femmes dans le paysage de l'espace publique (incluant également le paysage médiatique). C'est cette tendance contre laquelle luttent les féministes dont nous avons analysé les parcours. Cette nouvelle vague de féministes musulmanes qui revendiquent une totale implication dans le champ politique et social s'oppose à la tradition qui enferme les femmes dans l'espace domestique; ceci s'explique notamment par l'engagement nationaliste de ces groupes féministes60.

Ceci dit on pourrait si nous nous plaçons d'un autre point de vue, on retrouve une autre interprétation de la notion de modestie qu'implique le voile :

« Les filles voilées parlent » ouvrage co-écrit par Ismahane Clauder, Malika Lateche et Pierre Tevanion. Ce livre donne la parole aux femmes musulmanes voilées, ce sont des entretiens qui se succèdent à travers lesquels on peut comprendre la manière dont elles perçoivent et ressentent le regard des « autres » sur elles.

Il est aisé de constaté que pour la plupart de ces femmes le voile est une source de protection et fait partie entière de leur identité individuelle.

L'islam est pour ces femmes plus une source de protection et non d'oppression. Elles disent que la notion de liberté en Islam ne se limite pas à l'aspect vestimentaire de l'individu, ce n'est pas en se voilant qu'elles restreignent leur liberté.

60 Féministes Iranienne (ayant participer à la révolution politique), palestiniennes( lutte pour la libération des terres occupées) ,marocaines et algériennes ( ayant participer à la décolonisation).

S'agissant de la manière dont elles sont perçues, elles évoquent toutes le fait d'être lassées par un regard de « compassion » les catégorisant comme étant opprimées ou soumises. C'est ce regard qui les opprime diront certaines. Leur principale revendication c'est d'être perçues, vues comme les autres femmes, elles revendiquent un regard « neutre » sans aprioris.

Un regard différent porté sur elles pourrait-il changer le cours des événements? Donnerait-il un autre sens à la posture à adopter par les femmes musulmanes et par les féministes musulmanes?

Nous sommes tentés ici de répondre « oui »... En tout cas, toutes proportions gardées car d'autres variables peuvent venir expliquer ce phénomène. Ceci étant nous pouvons entrevoir l'impact du regard sur le destin social d'un groupe donné. Un regard ici qui reflète clairement une divergence idéologique entre ceux qui « regardent » et ceux qui sont « vues ».

La question du voile, du non port du voile (vu comme une trahison des valeurs islamiques par certains), de la Burqa etc. témoigne de l'importance de la place du regard concernant les femmes musulmanes et le monde moderne dans lesquels elles vivent aujourd'hui. Ceci nous rend compte de de l'impact d'une notion telle que celle de la perception dans les rapports entre les genres mais aussi dans la logique de l'espace publique.

Cette réflexion et ces controverses aujourd'hui autour de ces thématiques nous permettent d'affirmer que le regard sur la femme est toujours imprégné des valeurs et des normes de la société concernée à un moment donné de l'Histoire lui assignant ainsi une place ou une catégorie souvent difficile pour elle de s'en défaire.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille