6. Quelques orientations pour sortir de l'impasse
6.1 La diversité de l'information au coeur de la
compréhension du territoire
- De l'information endogène
Le développement de visions partielles et
focalisées sur la biodiversité d'un territoire est bien souvent
à l'origine d'analyses incohérentes avec la réalité
locale. Une telle situation d'incompréhension entre les acteurs aboutit
rapidement à des conflits importants (Joerin et al, 2001).
Il semble nécessaire de développer une approche
élargie des connaissances visant à rendre compte de la
complexité des dimensions spatiales et temporelles des territoires. La
compréhension des usages et des logiques opérantes au niveau
local apparaît comme un point de départ obligé. Tous ces
éléments de diagnostic permettent aux intervenants de mieux
cerner le cadre de leur intervention. Ils constituent surtout une base pour
ancrer le projet dans le territoire. Pour cela il semble nécessaire de
travailler sur les perceptions locales de l'environnement et de formaliser les
représentations mentales qui y sont attachées. La description et
l'appréhension de l'espace doivent être abordées selon des
critères locaux (Clouet, 1995).
Ces nouvelles considérations s'inscrivent dans une
réévaluation des savoirs opérante au travers de
l'implication des acteurs locaux dans la production de l'information. Il est
important de rappeler que cette étape décisive et
préalable à toutes analyses est trop souvent accaparée par
les intervenants extérieurs et les experts techniques. De nouvelles
méthodes de production et de formalisation de l'information
correspondantes aux besoins locaux doivent être développées
dans cette optique.
- Pour une aide à la décision
intégrée
La diversification et l'augmentation de la quantité
d'informations disponibles génèrent des enjeux importants
concernant leur traitement et leur gestion. L'information sur le territoire se
situe au centre des instruments de gouvernance (Prélaz-Droux, 2001),
cette dernière doit être disponible et accessible à tous
les acteurs. Les besoins en termes de support et de mise en forme sont donc
importants pour pouvoir répondre à toutes les attentes. La mise
en relation, la confrontation ainsi que la modélisation des
données sont indispensables à une production
supplémentaire de connaissance. Cette dernière si elle
intègre la diversité des données et met en relation les
différentes perceptions peut être à la base d'une
représentation commune du territoire nécessaire à une
prise de conscience concertée de la situation et de ses enjeux (Jost,
2001). Dans cette optique, les instruments de l'information tels que les
Systèmes d'Information Géographiques, les systèmes d'aide
à la décision ou les outils d'analyses multicritères
présentent des potentiels importants. Leur remarquable capacité
associée à de nombreuses fonctionnalités facilite tout
à la fois la gestion, la manipulation et l'actualisation de
l'information que la production et la diffusion de supports adaptés
à la réflexion et à la décision (Joerin et al,
2001). Afin d'éviter de renforcer le pouvoir des rares techniciens
capables de les maitriser, la priorité doit être donnée
à des outils simples et accessibles.
6.2 Une nouvelle approche du développement et de
l'intervention technique
La participation ne semble guère en mesure d'assurer
l'efficacité des actions territoriales entreprises ni même
l'émergence d'un processus local de décision responsable (Seck,
2001). Des problèmes conceptuels restent liés au fait que dans
ces démarches, on fait adhérer les acteurs locaux à un
projet qui leur est toujours autant étranger. Ces derniers ne
s'impliqueront réellement que lorsqu'ils seront en capacité et
reconnus à ce titre (D'Aquino, 2004). Le développement des
capacités locales de gestion apparaît indispensable, il a
déjà été formalisé au travers du concept
d'accompagnement à la décentralisation (D'Aquino, 2002). Le
pouvoir et la décision doivent être redonnés aux acteurs
locaux pour permettre l'émergence de réelle dynamique locale
capable d'actions concrètes et pérennes. Au travers de la force
du lien spatial qui assure la diversité sociale et la volonté
d'agir, l'approche territoriale est revalorisée comme gage de
démocratie (D'Aquino, 2002).
Ces évolutions conceptuelles impliquent un
repositionnement de l'intervention technique. Elle doit tout d'abord
désinvestir la phase d'intelligence des projets en arrêtant de
contribuer à l'analyse de la situation et à la définition
des problèmes. Il est aussi préférable que cette
intervention se dégage de toutes entrées thématiques ou
méthodologiques pour se concentrer sur la reconnaissance et la
capacitation des acteurs : conditions nécessaires à l'amorce
d'une réflexion territoriale locale (D'Aquino, 2002).
La mise en oeuvre concrète de cette approche subtile
nécessite du temps et de la diplomatie. Les relations entre intervenants
et acteurs locaux vont passer de l'assistanat forcé à un
réel partenariat. Tout cela passe par la reconnaissance du local
(savoirs, perceptions, logiques, rythmes, légitimités) et un
cadrage négocié de l'intervention extérieure.
L'accompagnement technique répondant aux sollicitations des acteurs
locaux remplace donc les solutions imposées. Les intervenants ont pour
objectif de favoriser l'action locale en lui fournissant des outils
adaptés aux besoins exprimés en termes de gestion territoriale.
Les premiers résultats d'opérations pilotes reposant sur cette
démarche qualifiée d'accompagnement des dynamiques
endogènes sont probants. A titre d'exemple, on signalera la mise en
oeuvre d'un système d'information territoriale de conceptualisation
entièrement locale ayant bénéficié d'une
intervention extérieure indispensable concernant sa réalisation
technique (D'aquino, 2002). Ces expériences ont
révélé une grande richesse concernant les échanges
entre toutes les parties prenantes au projet.
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