4. Analyse du projet
4.1 Une prédominance de l'approche
conversationniste et des critères internationaux
L'étude du cadre conceptuel du projet permet de mieux
en saisir les enjeux ainsi que les motivations à l'origine de l'action.
L'AMP d'Ambodivahibe a pour objectif principal la protection de la Nature.
L'approche développée est bien illustrée par le discours
officiel de CI : « protégeons pour et avec les populations locales
». La conservation de l'environnement et des richesses naturelles de la
baie profiterait donc aux communautés. Elle passerait également
par leur implication dans le projet. Le projet va donc s'articuler autour du
couple développement/environnement dans une relation à double
sens. La gestion de l'environnement selon des critères occidentaux
contribuerait au développement tandis que le développement
limiterait les pressions sur l'environnement.
Le constat de départ est le suivant : d'après
les objectifs établis au niveau international la gestion actuelle de
l'environnement sur le territoire n'est pas satisfaisante. Il faut donc
intervenir pour réorienter cette gestion. Cette intervention repose en
premier lieu sur une réorganisation de l'espace au travers de
l'établissement d'une AP. Le choix de cet instrument
d'aménagement est fortement conditionné par des engagements et
des orientations pris au niveau national. La stratégie du projet se
répartit donc différemment au sein de l'espace concerné.
D'un coté elle s'appuie sur la mise en place de réglementations
et de structures de gestion visant à limiter et cadrer l'exploitation
des ressources naturelles. De l'autre, elle propose ou impose des mesures de
compensation directe (écoles, puits) et indirecte (développement
d'activités alternatives le plus souvent orientées vers une
exploitation dite « durable » de l'environnement :
écotourisme, artisanat, agriculture).
Figure 20 : Le cercle « vertueux » de la
conservation (Conservation Internationale, 2008)
Cette stratégie s'accompagne également d'actions
de sensibilisation et de valorisation de la biodiversité. La
nécessité d'intervenir et de rallier les communautés
à la cause environnementale reste un point central pour le promoteur.
Tout cela repose sur une conception très occidentale d'un environnement
scientifique et rationnelle où les critères d'évaluation
sont exclusivement écologiques (ROSSI.G. 2000).
4.2 La dynamique générale du projet, une
preuve du caractère exogène de l'AMP
Figure 21 : Les grandes étapes du projet
jusqu'à sa confrontation avec l'échelle locale
Le schéma ci-dessus est le produit d'un regard critique
porté sur l'émergence et le déroulement chronologique du
projet. Quelles sont les grandes étapes et leur enchaînement ?
Qu'es ce que cela traduit ? La phase d'intelligence d'un projet consiste
à établir un diagnostic et élaborer des solutions. Pour
l'AMP d'Ambodivahibe, elle a été monopolisée par des
acteurs internationaux et nationaux selon des approches qui leur sont propres.
Par conséquent l'intégration de ce dernier au niveau local
rencontre de nombreuses difficultés. Elle met en confrontation directe
le projet venu de l'extérieur avec le contexte territorial local. Le
respect des objectifs, des engagements et des calendriers propres aux acteurs
exogènes au territoire est une contrainte forte. Les logiques de ces
acteurs fortement impliqués dans le projet rentrent en interaction avec
ce dernier rendant le processus complexe et conflictuel. Véritable
intrusion internationale dans le territoire, la démarche de projet est
alors de plus en plus problématique avec le temps. Les acteurs locaux
réagissent alors par le biais d'une déstabilisation et d'une
instrumentalisation croissante du projet. Les conséquences en sont
tellement importantes que comme le montre l'ampleur de l'opposition et des
manipulations, elles se manifestent jusqu'à l'échelle
régionale. L'objectif devient en fait le blocage du projet ou alors son
détournement à d'autres fins plus personnelles.
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