L'institutionnalisation du pouvoir et l'émergence de l'état en République Démocratique du Congo : 1960-2006( Télécharger le fichier original )par Corneille YAMBU -A- NGOYI Université de Kinshasa - DES 2005 |
B. La réunification du territoire national et le regroupement des populations.Dès le déclenchement des hostilités le 02 août 1998, la République Démocratique du Congo qui ne su ni contenir immédiatement ni repousser à l'instant l'agression perdit des larges portions du territoire tombées à l'Est sous l'occupation rwandaise, ougandaise et burundaise alliés du Rassemblement Congolais pour la Démocratie et du MLC. Aussi les provinces de l'Equateur, du Nord et du Sud Kivu, de Maniema et des deux Kasaï, sans oublier la province orientale échappèrent soit complètement soit partiellement au pouvoir de Kinshasa478(*). Cette situation perdura jusqu'à l'installation de la constitution qui consacra l'effectivité de l'Accord pour le cessez le feu de Lusaka du 10 juillet 1999 et des plans de désengagement de Kampala et d'autres Accords de paix. En effet, il était plus difficile pour un ressortissant ou domicilié d'une province de franchir la limite de l'autre province ou l'autre zone sans se faire sévèrement châtier ou la plupart des cas trouver la mort. Les populations congolaises ne constituaient plus une communauté unique régie par un pouvoir unique. Aussitôt après la promulgation de la constitution du 04 avril 2003, la levée des barrières militaires consécutive au désengagement des toutes les parties sur tous les fronts intérieurs permit une réunification des population par la circulation des biens et des personnes. C. La reconquête de la souveraineté et de l'intégrité territoriale.La guerre du 02 août 1998 a placé, à ses débuts, le pays dans une incapacité de disposer d'une puissance suprême ou d'un pouvoir suprême sur son organisation politique, sur ses citoyens et sur son territoire. Au début la thèse de l'agression étrangère n'était pas acceptée. Pour ne pas nous engager dans une querelle autour d'une notion encore controversée faute de définition claire même en droit international public, nous disons que plusieurs armées étrangères ont franchi les frontières et se sont installées au Congo-Kinshasa dans l'intention de renverser le pouvoir en place, lequel a fait aussi appel à un certain nombre de pays dont les forces armées sont aussi devenues opérationnelles au Congo479(*). Nous pensons que le Congo s'étant ainsi trouvé sans armée nationale et occupée a pendant un temps perdu sa souveraineté sur le plan interne où son gouvernement était incapable d'obtenir l'obéissance civile et d'assurer une administration classique de l'ensemble de la cité et, sur le plan international où, il devait se plier aux ordres de ses protecteurs, l'Angola, le Zimbabwe et la Namibie d'une part et la communauté internationale. Il est symptomatique que presque dans toutes ses résolutions relatives à la situation au Congo, le Conseil de sécurité insiste sur la réaffirmation de l'indépendance politique du Congo » et se déclare fermement résolu à la préserver480(*). Il serait facile au gouvernement de Kinshasa de parler de coopération avec les pays précités, dans le cadre de la SADC, et aux mouvements rebelles de parler d'alliance avec les trois pays de l'Est précités. Nous pensons que cela n'est valable que pour les apparences mais pour le fond le pays s'est trouvé dans une situation presque similaire à une colonisation pour ce qui est de la partie Est et à une vassalisation pour la partie du territoire restée au gouvernement. Notre argumentation sur ce point se fonde sur la raison que la coopération ou l'alliance placent les parties à un niveau d'acceptation volontaire, laissant à chacune d'elle une égale autonomie de volonté. Or dans le cas des mouvements politico-militaires de l'Est et même du gouvernement de Kinshasa, nous l'avons dit, le manque des forces militaires propres les placait dans une telle situation d'impuissance qu'ils n'avaient aucun moyen de résister aux institutions des puissances étrangères lesquelles pour des raisons géostratégiques ou sécuritaires fondées ou non, pouvaient se permettre de franchir les frontières congolaises sans solliciter l'autorisation ni des mouvements rebelles ni du gouvernement de Kinshasa. S'ajoutant à cela, le fait que certaines de ses forces étrangères pouvaient se livrer aux actes d'exploitation illégale des ressources naturelles et humaines contre la volonté du Congo481(*), nous nous réconforterons dans la thèse d'une perte momentanée de la souveraineté. Progressivement le Conseil de sécurité a pris plusieurs résolutions dans lesquelles, il est réaffirmé à maintes reprises la souveraineté et l'intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo482(*). Sur ce point, il y a lieu de retenir que la promulgation de la constitution de la transition du 04 avril 2003 et la volonté constatée de la part des animateurs de la transition à s'y conformer, ont contribué largement à la reconstruction progressive de l'édifice fissuré de l'Etat congolais. Nous pensons qu'en créant un environnement favorable à la reconstitution des conditions d'existence de l'Etat la constitution de la transition à déblayer le terrain pour la réfondation de l'Etat au Congo détruit depuis la première crise politique ainsi que le premier coup de Mobutu en 1961, du fait que depuis cette époque, le Congo n'a plus connu de pouvoir institutionnalisé condition indispensable à la naissance et à la survie de l'Etat. Sans préjudice des autres facteurs liés à l'homme comme la culture politique démocratique, la constitution de la République Démocratique du Congo promulguée le 18 février 2006, grâce au balisage de la constitution de transition peut valablement servir de fondement à l'édification de l'Etat au sens précis du terme par une institutionnalisation effective du pouvoir politique. * 478 Les provinces du Nord et du Sud Kivu ainsi que la province orientale furent complètement soustraite de l'autorité de Kinshasa. * 479 L'occupation militaire du territoire congolais par les armées rwandaises, burundaises et ougandaises est passée de la spéculation à l'évidence dès lors qu'elle est confirmée pour le Rwanda par son plan de désengagement en date du 28 août 2000 conformément au plan de Désengagement et Redéploiement (D.R) signé à Kampala le 8 avril 2000 et, pour l'Ouganda dès lors que la Cour internationale de justice saisie de l'affaire des activités armées sur le territoire du Congo RDC c/Ouganda sous n° R 112, le 23 juin 1999 a donné gain de cause à la partie congolaise. * 480 Résolution 1234 (1999) du 09 avril 1999. * 481 L'exploitation illégale des ressources naturelles du Congo est reconnu par le Conseil de sécurité. Voir Résolution 1341 (2001) du 22 février 2001. * 482 - Résolution 1341, idem ;
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