II. Echec d'institutionnalisation
du pouvoir sous la constitutions du 1er août 1964.
Sans un rappel aussi bref que possible de ce que nous avons
dit sur institutionnalisation du pouvoir, quelques incompréhensions
peuvent persister. L'important ici est de mesurer l'impact de la constitution
du 1er août 1964 sur le processus d'institutionnalisation du
pouvoir politique. Pour bien nous situer, il est utile de préciser que
nous parlons du pouvoir suprême dans l'Etat. Ce pouvoir défini
comme la capacité de commander et de se faire obéir. A son niveau
le plus élevé, nous avons vu qu'un telle capacité est
l'apanage de l'Etat. L'Etat étant, invisible, l'exercice de son pouvoir
s'exprime par des gouvernants organes ou personnes physiques, investis du
pouvoir d'action.
Deux formes du pouvoir nous ont permis d'explorer la notion
d'institutionnalisation, à savoir la forme personnifiée ou
individualisée du pouvoir et la forme institutionnalisée.
Dans la première nous avons dit, le pouvoir est
perçu comme la propriété de son détenteur qui
l'exerce selon tous les attributs de son droit. Ici Le détenteur est
dispensé du souci de conformisme à une quelconque règle
dans l'exercice du pouvoir. Une telle forme de pouvoir est incompatible avec
l'idée même de l'Etat car, après Burdeau G. et
Prélot M. nous avons dit que l'Etat est un pouvoir de droit, un
« Pouvoir institutionnalisé », Sachant que
l'institutionnalisation implique que le pouvoir étatique soit un pouvoir
s'exerçant selon les règles », l'épisode
congolaise de 1965 suscite certaines questions. Quelle forme faut-il attribuer
au pouvoir politique exercé et manifesté au sommet sous le mandat
du Président de la République fédérale de Joseph
Kasa-Vubu. L'institutionnalisation du pouvoir a-t-il été rendue
possible. Nous devons situer la repose de cette double préoccupation
à deux niveaux, à savoir de l'analyse juridique,
constitutionnelle et de la pratique constitutionnelle et politique.
1°. Du point de vue constitutionnel.
Il est aisé de considérer que la constitution du
1er août 1964 a consacré l'institutionnalisation du
pouvoir dans ce sens que le pouvoir d'Etat devrait se conquérir,
s'exercer et se transmettre conformément aux règles
préétablies. Le mode de désignation du Président de
la République était déterminé aux articles 55 et 56
qui déterminaient également son mandat, ses compétences
furent également son mandat, ses compétences furent
également clarifiées notamment aux termes des articles 58 et 63.
Donc sur le plan strictement juridique, la constitution du
1er août 1964 se posait en socle suffisant pour la disparition
du pouvoir individualisé ou personnalisé. Nous croyons que notre
point de vue se trouve renforcé par les dispositions des articles 2 et
71 de la constitution du 1re août 1964.
En effet, l'article 2 dispose que « tout pouvoir
émane du peuple qui l'exerce par ses représentants ou par la voie
du référendum ; aucune section du peuple ni aucun individu
ne peut s'en attribuer l'exercice ».
Par ailleurs, l'article 71 érige en infraction de haute
trahison à charge du Président de la République et des
membres du gouvernement, tout acte contraire à la constitution nationale
par lequel l'un ou l'autre se substituerait ou tenterait de se substituer
à une institution, ou empêcherait à une autre institution
de fonctionner. Ces dispositions font une démarcation remarquable entre
l'institution Etat source du pouvoir et ses détenteurs précaires
ou agents que devraient être le Président de la République
et les membres du gouvernement. Cela suffirait à conclure à
l'institutionnalisation du pouvoir. Cependant nous croyons qu'il serait
naïf de se limiter à la façade constitutionnelle sans
pénétrer la profondeur de la pratique et jauger le niveau de
culture politique du moment.
2°. Du point de vue de la pratique politique.
Le régime de la constitution du 1re
août 1964, avec au centre, les mêmes acteurs du régime de la
loi fondamentale excepté Patrice LUMUMBA disparu, n'a pas
généré une forme de pouvoir institutionnalisé. Au
paragraphe suivant nous verrons qu'elle n'a pas eu grande incidence sur le
pouvoir.
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