L'institutionnalisation du pouvoir et l'émergence de l'état en République Démocratique du Congo : 1960-2006( Télécharger le fichier original )par Corneille YAMBU -A- NGOYI Université de Kinshasa - DES 2005 |
III. HYPOTHESE DE TRAVAIL.La réponse aux questions constitutives de notre problématique impose l'analyse de certaines thèses formulées à ce même propos en vue de préciser notre bloc d'hypothèses. Pour le dictionnaire de Robert Méthodique, l'hypothèse désigne une « proposition relative à l'explication de phénomènes naturels et qui doit être vérifiée par les faits41(*). Selon R. Rezsahary, « l'hypothèse cherche à établir une vision provisoire du problème soulevé en évoquant la relation supposée entre les faits sociaux dont le rapport constitue le problème et en indiquant la nature de ce rapport »42(*). Gordon Mace est encore plus précis : l'hypothèse, peut être envisagée comme une réponse anticipée que le chercheur formule à sa question spécifique de recherche. Le même auteur cite Monhein et Rich qui la décrivent comme un énoncé déclaratif précisant une relation anticipée plausible entre les phénomènes observés ou imaginés43(*). L'Etat en Afrique ou ce qu'il convient ainsi d'appeler, pose un problème dramatique de misère de pauvreté, , du délabrement des tissus sociaux et économiques, exacerbés par des violences cycliques. La République Démocratique du Congo, tel que nous l'avons vu, est parmi les cas les plus spectaculaires. A son sujet nous avons rappelé les conclusions des africanistes sociologues et historiens mettant en doute son existence en tant qu'Etat sans ignorer que les politologues et les juristes ont aussi écrit à ce même sujet. Dans une étude récente, intitulée le « constitutionnalisme africain entre la gestion des héritages et l'invention du futur , l'exemple congolais » de Djoli Eseng'Ekeli, on peut lire « Etat de lieux : le Congo, un territoire à la recherche d'un Etat »44(*). Ce sous titre est assez révélateur, on peut déduire que l'espace territorial congolais abrite une population n'ayant pas encore eu le privilège de goûter aux fonctions bénéfiques d'un Etat. Reprenant les propos de Sall Babacar, il écrit : « en effet, le Congo, ce territoire de 2.345.000 Km2 , doté d'une population estimée à plus de 50 millions d'habitants, situé au coeur de l'Afrique, est devenu le « ventre mou » de ce continent. Ce sous-continent, équivalent à l'ensemble de l'Union européenne, a progressivement implosé et se présente aujourd'hui comme un « tissu mite », atomisé, fragmenté en principautés militaires. Son territoire est le théâtre permanent de rebellions où règnent des satrapies et autres seigneurs de guerre : c'est une zone de chaos, avec des espaces, qui dans les territoires nationaux, échappent au contrôle de l'Etat45(*). Dans le même sens Braud, soutient que la situation congolaise est plus ou moins semblable à celle de nombreux autres pays africains, et la République Démocratique du Congo est tout simplement le paradigme le plus achevé des « dynamismes », de ces Etats à la fragmentation . En effet, « de nombreux Etats africains sont minés par des maux multiformes et sont devenus comme le Congo, presque des Etats fantômes46(*).
L'hypothèse de travail majeure autour de laquelle notre recherche s'articule est : l'institutionnalisation du pouvoir politique est le facteur fondamental dans l'émergence et la consolidation de l'Etat. Tel qu'il en fut en occident, il peut en être pareil en Afrique et au Congo. Ce facteur déterminant a manqué au Congo depuis la création du Congo par Léopold II. De cette hypothèse principal, dérivent d'autres ci-après :
Dans ce travail, nous voulons par analyses successives et comparatives dans l'espace et dans le temps, démontrer que La République Démocratique du Congo est bel et bien un Etat menacé non au sens où on souhaite souvent de l'entendre, c'est-à-dire par une belligérance du voisin ou de l'impérialisme, ce qui laisse supposer une note militariste, mais nous parlons d'une menace de disparition en tant qu'Etat, par l'absence à ses destinées, du moins jusqu'à Joseph KABILA, d'un homme déterminé à privilégier la règle constitutionnelle même à son détriment pour créer un cadre favorable à une véritable culture démocratique. Cela étant, il est impérieux de pénétrer le sens de l'Etat, de la constitution et du pouvoir d'une part et d'examiner les différentes constitutions connues au Congo en vue d'une confrontation entre les concepts et le réel. * 41 Montréal, Canada, 1998, cité par SHOMBA Kinyamba S., Méthodologie de la Recherche scientifique parcours et moyens d'y parvenir, Kinshasa, Edition M.E.S, 1995, p. 51. * 42 Rezsahazy, (R.), théorie et critique des faits sociaux, la Renaissance du livre, Bruxelles, 1971, p.24. * 43 Gordon Mace, Guide d'élaboration d'un projet de recherche, Paris, Editions universitaires,.....p. * 44 Djoli Eseng'Ekeli, J., le constitutionnalisme africain entre la gestion des héritages et l'invention du futur, l'exemple congolais, thèse de Doctorat d'Etat, Université Paris I, Panteon - Sorbonne, 2002, inédit, p.p. 4-10. * 45 Sall Babacar, « Anétatisme et modes sociaux de recours », p. 247 in GEMDEV (coll.), les Avatars de l'Etat en Afrique, Paris Karthala, 1997, cité par Djoli, E.E. idem. * 46 Braud (Ph.), La science Politique, II, l'Etat, Paris, Seuil, 1997, p. 229. |
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