c)La beuverie de fin de semaine: un phénomène
collectif codifié
Comme tout phénomène social , la consommation
d'alcool abusive contient des pratiques bien spécifiques, pour cela les
entretiens passés nous donnent des éléments de
réponses.
Dans un premier temps, nous pouvons affirmer que ce
phénomène existe seulement en communauté, il y a un effet
de groupe derrière, il s'agit avant tout d'un phénomène
collectif. D'ailleurs les entretiens le montre bien, tous sont unamines pour
dire que boire de cette façon a lieu uniquement en compagnie d'amis. De
plus, nous remarquons aussi que cette pratique se déroule
généralement la vielle ou durant le weekend mais très
rarement en semaine.En effet, d'après le Baromètre santé
2005, le samedi est le jour où les quantités consommées
sont les plus importantes : 3,7 verres en moyenne pour les 15-19 ans, 4,5 pour
les 20-25 ans.Comme l'explique Cindy " Je ne bois jamais la semaine , je
n'en ressents pas le besoin, cependant arrivé le jeudi ou vendredi ,je
suis excitée d'étre le soir pour pouvoir me la mettre
sévère avec mes potes et sans retenues..." . Cela ressort
majoritairement dans mes entretiens, les jeunes se justifient en me disant
qu'ils ne sont aucunement dépendant de l'alcool puisque la semaine ils
en ressentent pas le manque mais dès le weekend arrivé, il n'y a
plus de limites et que la consommation d'alcool excessivement est un passage
obligatoire pour passer une bonne soirée.Comme le dit Alexandre il
attend le fameux VSD " le vendredi, samedi, dimanche, c'est
défonce obligatoire, généralement dans les boites de nuit
ou dans une soirée entre potes, c'est ça le VDS".
De plus, comme le révèle les différents
entretiens passés , nous constatons une règle d'or commune
à ce type de soirée.En effet, lors de ces binge drinking, chaque
individu à l'obligation de ramener une bouteille d'alcool. Cependant
cette obligation est suggestive car il ne fait pas de réclamer mais pour
contribuer à la soirée , les jeunes se doivent de ramener de
l'alcool .Comme le souligne Gaelle " celui qui ramène rien en
soirée est plutot mal vu; il est considéré comme un radin
,c'est pour ça que je fais attention de ramener toujours quelques choses
à chaque soirée même ci je n'ai pas forcement assez
d'argent et ainsi éviter les remarques en soirée comme " vu comme
tu bois, t'aurais pu ramener une bouteille"".
Comme nous pouvons le voire, l'alcool est très
recommandé mais jamais réclamé, il existe une certaine
hypocrisie dessus, le fait de demander à une personne de ramener de
l'alcool reste encore assez tabou comme le souligne Gaelle " lorsque je
fais une soirée chez moi, je demande jamais aux gens de ramener de
l'alcool, cependant j'espère toujours que les gens ramènent de
l'alcool pour étre sur de tenir jusque la fin de soirée,pour
moi, ramener de l'alcool en soirée est une chose évidente et
naturelle" .
Nous remarquons au fil des entretiens que finalement la
soirée entre amis est un prétexte pour boire, et le but
rechercher durant ces soirées n'est pas forcement de passer un bon
moment entre amis mais plutot de se "la mettre bien", en effet , lorque je
demande en général ce qu'ils retiennent de la soirée Paul
me répond " la cuite que je me suis mise" et non les moments
entre amis, pareil pour Constance " je me souviens des culs secs de tequila
que j'ai bu ...". Cela révèle bien un changement, en effet,
c'est pas le fait de passer des moments entre amis qui permet de passer une
bonne soirée mais finalement de boire à être ivre qui
permet de passer une bonne soirée.Mais cela n'est jamais dit durant les
entretiens, la soirée entre amis est une sorte de pretexte, pour en
quelque sorte se déculpabiliser.
Aujourd'hui lors des soirées, l'individu passe au second
plan , le moteur de la soirée reste l'alcool, d'ailleurs lors d'une
discussion avec une personne adulte nous remarquons cette différence,
à leur époque lorsqu'ils invitaient, les gens ramenaient plus un
cadeau pour faire plasir comme un gateau ou une bouteille de vin pour
déguster ,alors que durant ces soirées les gens ramènent
une bouteille pour leur prope plaisir et leur prope consommation.Il y avait
plus l'envie, le désir de faire plaisir aux autres, de passer un moment
de convivialité , alors que le « brige drinking »
retire toute cette dimension sociabilisatrice.Cela peut sembler assez
paradoxal puisque lorsqu'on écoute ces jeunes, le but de ces
soirées seraient de s'intégrer plus facilement mais finalement
lorsqu'on analyse les entretiens, on remarque qu'il y a une différence
entre le discours des jeunes ( boire pour s'intégrer) et la
réalité.En effet, après analyse de mes entretiens,
l'objectif de ce genre de consommation serait de boire pour boire, avec un
coté très indivudualiste .Comme le dit David "tant que je
finis arraché,c'est le principal, ça veut dire que j'ai
passé une bonne soirée". Cette remarque est
intéressante, elle montre bien que les jeunes cherchent avant tout leur
prope plaisir égoistement, la recherche d'évasion à
travers l'alcool et non comme ils le prétendent le coté
intégrateur, convivial. Hypocritement ou inconsciemment , ces jeunes
aiment ce genre de consommation d'alcool non pas pour le coté
fédérateur mais plus pour trouver son prope bonheur, plaisir
à travers l'abus excessif d'alcool et les sensations que cela
provoque.
De plus, nous pouvons remarquer des grands axes similaires sur le
déroulement des soirées.En effet, on retrouve des points communs,
avec les mêmes pratiques , le même mode consommation lors des
« bitures express ». On peut même appeller cela comme
un rite. Ces soirées sont divisées en plusieurs étapes.
Dans un premier temps, les jeunes prennent "l'apéro" .Cette
étape est la plus sociabilisatrice , elle commence
généralement après manger, cette étape dure en
moyenne une à deux heures. Elle commence lorsque tout le monde est
arrivé. C'est une étape fondamentale puisqu'elle permet comme le
souligne Stephane " de se mettre dans le bain , tranquillement et de
raconter notre semaine et les dernieres potins autour d'un verre ". Cette
étape est la plus conviviale, elle permet de se détendre en
buvant doucement et pas excessivement.Lorsque l'alcool commence à faire
ces premiers effets, arrive la seconde étape.Cette étape permet
d'atteindre l'ivresse rapidement.Durant cette étape, les jeunes changent
d'alcools, comme le dit Stéphane " c'est à ce moment
là , que la soirée commence vraiment, les filles comme les
garçons sont plus détendus et plus cools, on commence
à boire de l'alcool plus forts, généralement du wisky ou
de la vodka".De lors, durant ce moment, il n'y a pu de limites, les culs
secs s'enchainent, les paris stupides aussi et nombreux sont les jeux
d'alcools. Cette étape permet aux jeunes de se souler rapidement en
buvant beaucoup d'alcool.Comme me confie Stephane, c'est le moment
préféré des gens, c'est à ce moment là que
la soirée bat son plein grâce notammament à des jeux qui
permettent de boire beaucoup " durant cette période, je ne compte
pas mes verres, ils peuvent s'enchainer très vite, ainsi que les culs
secs, cela peut aller d'une dizaine de verres en 30 minutes voir plus , tout
dépend du contexte". Après cette étape cruciale qui
peut durer en moyenne plus de une heure, une fois les jeunes très
alcoolisés, arrive la troisième étape qui est les trajets
pour les sorties en boite ou dans les bars. Là aussi, cette étape
est très codifiée, en effet, les jeunes préparent des
"biberons" c'est à dire des bouteilles d'alcools
entières et mélangées avec de nombreux alcools
différents. Le biberon permet d'accompagner les jeunes durant le trajet
et de boire le maximun d'alcool avant de rentrer en boite. Comme me
précise Benoit " les biberons sont importants, ils vont nous
permettent de tenir toute la nuit,les prix des verres d'alcools en boite sont
tellement élévés que je peux à peine me payer un
verre, du coup, j'essaye de boire le plus avant , pour être sur
d'être bourré le plus longtemps possible sans me ruiner en
boite".
Une fois arrivé en boite, arrive la dernière
étape d'une soirée de « Biture express », une
fois les individus très alcoolisés, arrive le défoulement,
l'amusement. C'est généralement durant cette étape
qu'arrive les premiers vomissements pour les plus vulnérables. En boite,
les jeunes ivres se défoulent sur la piste. Une fois que l'alcool
commence à descendre , les gens se cotisent pour acheter une bouteille
d'alcool.En effet, comme le souligne Benoit " arrivé vers deux
à trois heures du mat', la fatigue et les premiers
désagrément liés à l'alcool arrivent, du coup le
meilleur moyen est de soigner le mal par le mal, du coup avec mes potes ont se
cotisent pour acheter une teil de wisky pour nous remotiver et tenir jusqu'a la
sortie de la boite quitte à être totalement
arrachés".
Cependant pour les plus courageux, l'after est le moment pour se
finir, en effet, l'after se déroule généralement
après la sortie en boite, vers six heures du matin et peut durer
jusqu'à midi . Durant ce moment , les jeunes finissent le reste
d'alcools de la soirée ou vont même jusqu'à aller en
acheter dans une épicerie.Toutefois les afters restent encore assez
marginaux, comme le dit Gaelle " Des fois lorsqu'on est motivés et
encore en forme , pour bien se finir, on peut taper after chez un pote, pour
finir l'alcool, mais ça reste assez rare.."
A cela, on s'ajoute un autre phénomène nouveaux,
qui est la consommation de plusieurs alcool durant la même soirée,
on peut parler de poly-consommation.En effet, durant ces soirées, chacun
ramène son alcool, de ce fait, sur la table se trouve une multitude
d'alcool plus ou moins fort.Il y en a pour tout les goûts.Ces jeunes une
fois alcoolisés pratiquent des mélanges dit "explosifs"
qui est la conséquence des divers jeux pratiqués. Il est pas rare
de faire des mélanges juste pour être ivre, même si le
goût reste à désirer.Comme le souligne Cindy " les
mélanges font parti intégrante pour le bon déroulement
d'une soirée, arrivé à un certain moment, on essaye de
trouver des mélanges explosifs avec les alcools qui restent afin de
tester nos limites, plus le goût est fort, plus les gens aiment en
général". Il y a un certain coté convivial lors de la
fabrication des mélanges, le but est de trouver le mélange
d'alcool idéal qui permettra de donner un second soufle à la
soirée.
Suite aux entretiens, nous pouvons affirmer que le Binge Drinking
est un phénomène social très codifié avec ces
propes règles, ces propes normes et ces rites. L'organisation est
réfléchie. Nous pouvons voire que ce genre de soirée se
déroule souvent en groupe d'amis proches où la règle d'or
est de boire sans aucune limite voire jusqu'a vomir. D'ailleurs ici le fait de
vomir est souvent signe de réussite. En effet, l'individu suppose avoir
passé une bonne soirée seulement si il a vomi, comme l'explique
Constance: Même ci je me souviens de rien de la soirée,lorque
je vomis ,cela veut dire que c'était une bonne soirée" .Cela
peut parraitre paradoxal,car le fait de vomir est une chose très
désagréable en soi,ça ne provoque aucun plaisir.Mais ici,
il ya une sorte d'éloge du vomissement ,symbole d'avoir passé une
bonne soirée. D'ailleurs, durant ce genre de soirée, lorsqu'une
personne vomit, les autres prennent du plaisir à le voir , rigolent , se
moquent, prennent des photos. Il y a une sur-enchère sur la consommation
d'alcool, c'est comme un jeu, le dernier debout est le gagnant.Il ya une
pression qui s'imposent dans le groupe.
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