I.2 : La question de la Garantie
La question de la garantie bancaire demeure un problème
fondamental suscitant de vifs débats entre les acteurs du financement.
Si pour les uns elle est perçue comme une source de démotivation
de l'entreprise, les autres la considèrent comme l'élément
clé faisant le crédit. Mais la garantie fut-elle de
qualité, suffit- elle pour octroyer un crédit ?
La garantie est ce avec quoi la banque pourra se faire
rembourser en cas de défaillance ou de non exécution de
l'entreprise. Elle a un caractère accessoire et même si elle est
indispensable dans le processus de financement, elle ne suffit pas à
assurer le financement.
L'impact de la garantie sur l'obtention du financement
bancaire est bien documenté dans plusieurs études dont celles
d'Inderest et Mueller (2007), de RAM(2005) et de Bukvic et Barlett(2003) pour
qui « offrir ses biens en garantie est considéré comme
une condition indispensable mais non obligatoire dans plusieurs banques
». Ces garanties permettent aux banques de réduire
significativement leur risque de pertes monétaires en exerçant
leur droit de liquidation de ces actifs matériels en cas de
défaut de paiement de la part de l'emprunteur.
La garantie préserve donc au banquier une certaine
marge de sécurité pour parer aux éventuels risques
(risques de crédit essentiellement).
Elle peut être analysée comme une fonction
inverse du problème de financement en ce sens que plus la garantie
proposée est élevée, moins il se pose un problème
de financement.
De même, une garantie faible posera toujours un
problème de financement; la préoccupation principale de la banque
étant de se rassurer que les remboursements seront effectués.
C'est pourquoi en général, 37%( résultats
analyses) des problèmes de financement sont dûs au manque ou
à l'insuffisance de garantie proposée. Ce facteur est d'autant
plus important pour les crédits d'investissement et de fonctionnement
selon cet extrait de tableau.
Influence de la garantie dans les cas spécifiques
de problèmes de financement.
Types de crédits rejetés
|
Influence de la Garantie
|
Crédits d'investissement
|
50%
|
Crédits de fonctionnement
|
38%
|
Crédits par signature
|
12%
|
Totaux
|
100%
|
Source : Extrait tableau 3, colonne 3
Ainsi, 50% des crédits d'investissements rejetés
aux PME sont dûs essentiellement a l'absence de garantie, une garantie
influente à 38% dans le cas des crédits de fonctionnement et 12%
pour les crédits par signature. D'oü ce graphique illustratif.
Graphique 2 : Représentation graphique de
l'influence de la garantie
Source : Construit par l'auteur, 2010
La garantie est donc la variable la plus déterminante
dans l'octroie des crédits
d'investissement ou de long terme.
Cela est d'autant vrai car pour ces types de crédits,
la banque à besoin de se rassurer que l'entreprise s'exécutera a
échéance. Une échéance généralement
longue (supérieure à 2 ans) et marquée d'incertitudes
telles que les risques concurrentiels, les risques de marchés, et les
risques liés à l'environnement des affaires. C'est pourquoi, la
banque exige a cet effet des garanties conséquentes pour couvrir ces
multiples risques. De même, pour les crédits de fonctionnement,
les entreprises pouvant désaffecter le financement obtenu a d'autres
fins, la banque s'entoure a cet effet d'un maximum de précautions pour
minimiser le risque auquel elle fait face. Cependant, la garantie influence peu
pour les crédits par signature.
En général, le problème de financement se
pose aux entreprises lorsque la garantie est indisponible ou insuffisante pour
couvrir le risque. Ainsi, si la probabilité d'obtenir du financement est
une fonction croissante de la garantie apportée (probabilité
d'obtenir du financement = f (garantie), toute chose étant égale
par ailleurs, alors la probabilité de ne pas obtenir du financement est
une fonction décroissante de la garantie(g). D'oü nous proposons le
modèle suivant qui établi le problème de financement en
fonction de la garantie :
(1) pf= f (g)
Si la garantie apportée augmente, toute chose étant
égale par ailleurs, alors le problème de financement diminue
proportionnellement. Avec donc dérivée première f `
inferieur à 0.
( f '<0) et une fonction f décroissante.
Si notre fonction f est décroissante alors toute
augmentation de la garantie apportée, réduit le problème
de financement.
Ayant posé au préalable que :
(1) pf = f (rc),
Et étant donné que le problème de
financement est aussi fonction de la garantie, alors de (1) + (2) nous
proposons le modèle simplifié suivant : pf = f (rc ;
g)
Le problème de financement est fonction non seulement
du risque mais aussi de la garantie apportée. C'est d'ailleurs ce qui
ressort de notre analyse selon laquelle 46% des crédits rejetés
sont dûs au fait que le risque est élevé et 37% pour
insuffisance de la garantie.
Ces deux variables sont donc déterminantes à 83%,
(soit 46%+37%) dans le problème de financement. C'est donc dire qu'il
dépend essentiellement de ces variables.
Dans une approche économétrique, nous pouvons
établir que pf =â0 +â1rc + â2g +?
avec â0 une constante autonome, ? le terme d'erreur( regroupant les
autres variables non prise en compte dans le modèle tels que la
gouvernance, le coût du crédit et l'environnement des affaires),
â1, â2 les coefficients respectifs du risque de crédit et de
la garantie, avec l'hypothèse que â1>0 et â2<0;
étant démontré en (1) que le
problème de financement est une fonction croissante du risque de
crédit et en (2), une fonction décroissante de
la garantie.
La relation existante entre le risque de crédit et la
garantie est une relation conflictuelle, de sorte que si le risque domine la
garantie, il existe un problème de financement. Par contre, lorsque la
garantie proposée est plus forte que le risque, il n'existera pas de
problème de financement. En effet, la garantie est
matérialisée pour atténuer ou réduire le risque de
crédit. Elle vient donc en diminution de celui-ci. De ce constat, nous
pouvons dire qu'il existe un problème de financement lorsque la garantie
est inferieure au risque ou que la différence entre le risque de
crédit et la garantie est supérieure à 0(soit rcg>0)
Par contre, si le risque est élevé et que
l'entreprise dispose d'une garantie conséquente pour le couvrir, il ne
se posera pas de problème de financement car la garantie aura
atténuée le risque et (rc -g) sera inferieur à 0.
Ainsi, considérons les différents niveaux de
risque (rc) et de garantie(g) suivants, en fonction du montant de financement
sollicité (valeurs en %).
Tableau 4 : Les problèmes de financement pour les
différents niveaux de risque et de
garantie considérés
Rc
|
20
|
50
|
60
|
70
|
10
|
20
|
30
|
60
|
g
|
8
|
15
|
22
|
38
|
15
|
57
|
70
|
75
|
(Rc-g)
|
12
|
35
|
38
|
32
|
-5
|
-37
|
-40
|
-15
|
Points
|
A
|
B
|
C
|
D
|
E
|
F
|
G
|
H
|
Source : Construit par l'auteur, 2010
Nous constatons donc que lorsque la garantie proposée
est inferieur au risque de crédit, rc-g est supérieur à
0 et il existe dans ce cas un problème de financement. Par contre, si la
garantie est plus importante que le risque encouru, on remarque que rc-g est
inferieur à 0. Dans ce cas,
il n'existe donc pas de problème de financement.
Ainsi, pour chaque niveau de risque et de garantie, nous
faisons correspondre un point. Ces points représentatifs des
différents problèmes de financement peuvent être
représentés dans ce graphique.
Graphique 3 : Représentation graphique du conflit
Risque- Garantie
Risque r (en %) Courbe X (pour rc-g>0)
![](Problematique-du-financement-des-PME-par-les-etablissements-bancaire--cas-de-Coris-bank-7.png)
70 - D · Courbe Y (pour rc-g<0)
· H
60 - ? ? ? ? C · 50 - B ·
40 - ?
30 - ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? · G
20 - A · ? · F ?
10 - · E ? ?
0 ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? Garantie g (en %)
. 10 20 30 40 50 60 70 80 90
Source : Représentation faite par l'auteur a partir des
données du tableau 4.
Légende : - Axe des abscisses :
axe de garantie pour les niveaux de garantie en % avec 1cm = 10%.
- Axe des ordonnées : Axe du risque de crédit pour
les niveaux de risque en % avec 1cm=10%.
Deux courbes sont a distinguer: l'une, la courbe X pour les
niveaux de (rc-g) >0, représentative des points A, B, C et D. Cette
courbe est caractérisée par le fait que le risque encouru par la
banque est plus grand ou augmente plus vite que la garantie proposée.
Toute entreprise qui présentera donc les
caractéristiques de cette courbe, connaitra toujours un problème
de financement.
A cet effet, en considérant le point C, on constate un
niveau de risque s'établissant a 60% de la valeur du crédit et
une garantie proposée d'environ 22% de cette même valeur.
Il se pose un problème de financement parce que le risque
encouru est très élevé et la garantie proposée
s'avère insuffisante pour réduire significativement ce risque.
A l'autre extrême, nous avons la courbe Y pour des
niveaux de (rc-g) < 0, et représentative des points E, F, G, et H.
Une courbe caractérisée par le fait que la garantie
proposée par le promoteur est proportionnelle au risque encouru par la
banque ou même plus grande que celui ci.
Toute entreprise qui présentera les
caractéristiques de cette courbe ne connaitra pas de problème
majeur de financement. Cette situation se rencontre généralement
chez les grandes entreprises qui disposent d'un fort potentiel, ce qui explique
leur facilité a obtenir le crédit bancaire par rapport aux PME. A
cet effet, si l'on considère par exemple le point E, on constate un
niveau de risque de 10% du montant du crédit et une garantie
proposée de 15% du même montant. A un tel niveau, il n'existe pas
de problème de financement, car la garantie apportée a largement
couvert le risque encouru par la banque; toute chose qui joue à la
faveur de l'entreprise.
Il ressort donc après analyse que le problème de
financement est surtout un problème de risque et de garantie car, le
conflit existant entre ces deux variables détermine la
problématique du financement. Si la garantie atténue le risque,
il n'en demeure pas moins qu'elle se doit d'être consistante et au mieux
être toujours supérieur au niveau de risque pour parer au
problème de financement bancaire.
Toutefois, même si la garantie est un facteur important
pour assurer le financement, la confiance suscitée par les dirigeants
des PME à travers leur système de gouvernance en est un autre.
I.3 : La gouvernance des entreprises
La qualité du fonctionnement organisationnel est
éminemment reconnue aujourd'hui comme un élément essentiel
à la réussite des entreprises et des organisations.
Le problème de gouvernance est dû au faible
niveau d'alphabétisation des promoteurs. Bon nombre de Petites et
Moyennes Entreprises au Burkina Faso sont marqués par une
déficience de leur politique gouvernementale. Pourtant, de
l'incapacité du manager à gérer une équipe traduit
son incapacité à gérer à bon escient un financement
obtenu.
Le problème de gouvernance se perçoit notamment
à travers le non distinction par le promoteur de ses ressources
personnelle à celles de l'entreprise.
Pour peu, les recettes journalières se transforment en
« pots de vins ». Ce constat largement partagé par le banquier
pose un problème de financement a l'encontre de telles entreprises.
C'est pourquoi, environ 7%( tableau 2), des crédits
rejetés au PME sont dûs à la déficience du
système de gouvernance appliqué. Cela parce que les dirigeants de
telles entreprises sont inexpérimentés dans les domaines de
gestion, dans l'activité exercée ou que leurs
antécédents avec les banques sont défavorables. D'une
manière spécifique, l'influence de la gouvernance dans le
problème de financement peut être perçue à travers
cet extrait de tableau.
Influence de la gouvernance dans les cas
spécifiques de problèmes de financement
Types de crédits rejetés
|
Influence de la Gouvernance
|
Crédits d'investissement
|
40%
|
Crédits de fonctionnement
|
40%
|
Crédits par signature
|
20%
|
Totaux
|
100%
|
Source : Extrait tableau 3, colonne 3
Soit le graphique illustratif suivant :
Graphique 4 : Représentation graphique de
l'influence de la gouvernance
influence de la gouvernance
![](Problematique-du-financement-des-PME-par-les-etablissements-bancaire--cas-de-Coris-bank-8.png)
40%
20%
40%
![](Problematique-du-financement-des-PME-par-les-etablissements-bancaire--cas-de-Coris-bank-9.png)
crédits d'investissement crédits de fonctionnement
crédits par signature
Source : Construit par l'auteur, 2010
Le problème de gouvernance se rencontre donc beaucoup
plus dans l'octroie des crédits d'investissement et de fonctionnement.
En effet, ces deux catégories de crédits font l'objet de
décaissements d'argent de la banque. Si le dirigeant ne s'y connait pas
en management, ou s'il est de mauvaise foi, celui-ci peut utiliser les
décaissements obtenus a d'autres fins.
C'est donc pour éviter un tel comportement que la
gouvernance revêt d'une telle importance. Cependant, les crédits
par signature ne font pas l'objet de décaissements de la banque et
l'entreprise ne peut encaisser le montant du financement obtenu.
Toutefois, si la banque est réticente à financer
les PME, c'est aussi indépendamment de sa volonté. C'est en cela
que des facteurs tels que le cadre réglementaire et l'inadaptation des
ressources de la banque limite ses possibilités de financement.
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