WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Mortalité maternelle: cause et facteurs favorisants déterminés par l'autopsie verbale dans le département de Bakel.

( Télécharger le fichier original )
par Boubacar BARRY
Université cheikh Anta Diop de Daklar - Master de recherche 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3.4.4-Autres facteurs

L'analyse des résultats des guides, nous a permis d'identifier d'autres facteurs par les différents répondants tels que l'accouchement à domicile (le facteur le plus déploré), la forte fécondité « J'ai vu une femme de 24 ans qui a déjà fait 9 grossesses »(ICP de Dougué), la non prise des médicaments préventifs (fer, vitamine...), le très faible taux d'utilisation de la contraception, la sexualité précoce, les grossesses non désirées camouflées, les tabous alimentaires ( les femmes enceintes ne mangent pas d'oeufs, de bananes, de viande, de farine, d'arachide, de riz par contre elles mangent de la terre, des cendres, la bouse de vache...).

En résumer pour les facteurs qui favorisent la mortalité maternelle, l'étude a démontré, malgré la taille réduite de l'échantillon, que la mortalité maternelle dépend d'une variété de facteurs aussi bien économiques, politiques et sanitaires que sociaux, culturels et environnementaux. Pendant longtemps les études sur la mortalité maternelle ont ignoré ces facteurs et causes non médicales au profit des causes biomédicales et cliniques.

Les facteurs socioculturels tels que l'ignorance, l'analphabétisme, les croyances religieuses et coutumières, le faible pouvoir décisionnel des femmes, la pauvreté sont principalement responsables du premier retard à savoir la prise de décision de recourir aux soins de santé. Selon nos résultats ce retard est le premier impliqué dans près de 25 % des cas de décès. Il est donc particulièrement important que les prestataires et les décideurs aient conscience de ces facteurs qui sont en amont. Il ne faut surtout pas sous-estimer l'influence des chefs religieux, des guérisseurs ou des accoucheuses traditionnelles sur l'attitude des ou de la communauté. Des femmes peuvent être amenées à choisir d'accoucher dans des conditions dangereuses pour des raisons culturelles et cultuelles telles que le refus d'être vu par un homme ou la plus grande confiance aux tradipraticiens, aux marabouts et autres...

Selon une étude au Maroc, en 1991, 15% des malades issus de la campagne ont eu recours aux guérisseurs contre presque 6% dans le milieu urbain. Par ailleurs, au cours de la période 1997-98, presque une femme malade sur 4, soit 24%, n'a pas réalisé une consultation médicale en raison du recours à la médecine traditionnelle. Cette proportion est 22% dans le milieu urbain contre 27% dans le milieu rural [11]. Le statut très bas des femmes est aussi un facteur favorisant. Les femmes sont totalement dépourvues de pouvoir décisionnel au profit du mari ou de la belle-mère. Selon une étude au Sénégal, les hommes prennent plus de 50% des décisions sur l'accès aux soins de santé des femmes [52]. Ce qui fait dire à Laura Katzive, conseillère juridique au centre pour les droits reproductifs que « le rejet quotidien des droits des femmes à l'autonomisation et à la non-discrimination en matière de reproduction est un facteur contribuant à la perte inutile de vies humaines » [34].

Dans le même ordre d'idée l'UNFPA considère la mortalité maternelle comme un indicateur de la différence et de l'inégalité entre les hommes et les femmes et son importance un révélateur de la place des femmes dans la société et de leur accès aux services sociaux, sanitaires, nutritionnels tout comme à la vie économique [62]. Il est donc nécessaire, pour NOUIJAI de prendre en compte les caractéristiques sociales et économiques ainsi que les spécificités culturelles de la population. Des actions dans le sens de minimiser les effets de ces facteurs sur la santé de la reproduction sont nécessaires par l'éducation et l'alphabétisation des femmes en général et des femmes du milieu rural en particulier [42].

Les facteurs physiques et géographiques sont à l'origine du deuxième retard qui empêche les femmes d'accéder aux structures sanitaires adéquates. Souvent il se pose soit un problème de transport (la charrette est le premier moyen de transport pour les urgences dans notre série), soit un manque de moyens pour payer le transport. Parfois ce sont les routes et les voies de communications qui sont complètement bloquées. Cette situation était responsable de plusieurs décès maternels à domicile ou en cours d'évacuation ou de référence à Bakel.

Au Zimbabwe, plus de 50% de la mortalité maternelle due à l'hémorragie peut être attribuée à l'absence de transport d'urgence selon Fawcus [23]. La distance est parfois la raison pour laquelle les femmes choisissent d'accoucher à domicile plutôt que dans une structure de santé.

Dans cette étude ce retard est impliqué dans 12 des 20 cas de décès ce qui fait dire à l'OMS que c'est au premier niveau de recours que de nombreux décès maternels ont lieu, soit parce que les femmes viennent de trop loin et arrivent trop tard, soit parce que les soins obstétricaux essentiels dont elles ont un besoin immédiat ne peuvent être assurés [44]. Alors pour lutter efficacement contre ce retard, Il faut donc mettre en place un bon système d'orientation-recours reposant sur la rapidité des communications de la prise des décisions et du transfert des informations sur les patientes entre les services concernés, un système de partage des coûts et un système de transport adéquat entre les villages et les centres de santé et améliorer l'état des routes. En plus de ces facteurs qui minent la route aux SOU et aux SOUC se trouvent ceux liés au système de santé tels le manque de personnel compétent, le retard dans l'intervention, l'insuffisance de la qualité des soins. Vu l'importance des cas de décès par septicémie et le délai élevé entre les moments de délivrance et le décès dans notre étude, il se pose un problème de prise en charge efficace des complications dans les structures sanitaires de Bakel. Selon la littérature, toutes les grossesses sont à risque car la plupart des complications obstétricales ne peuvent être ni prévisibles, ni évitables mais peuvent être traitées. L'accent doit être mis sur le moment de l'accouchement, au coeur de la continuité des soins.

Une étude en Gambie sur des interventions pour la réduction de la mortalité maternelle en 1987 a conclu que « ...les facteurs de risques n'étaient pas utiles pour identifier les femmes présentant le plus grand risque de décès » [28].

Les retards de décision pour consulter, à atteindre les formations sanitaires et à recevoir les soins, rapportés par les familles contribuent fortement au fléau de la mortalité maternelle qui frappe lourdement nos pays en développement. L'ignorance des signes, le problème de transport, le recours aux guérisseurs et accoucheuses traditionnelles, le retard de référence, la pauvreté, le mauvais état des routes, le manque de moyens de communication et de transport au niveau des formations sanitaires et l'incapacité de réaliser une transfusion sanguine au niveau de l'hôpital du district peuvent justifier ces retards.

Il apparaît ainsi que les facteurs qui contribuent aux décès maternels ne sont plus seulement biomédicaux mais surtout socioculturels, économiques et environnementaux. Ce qui veut dire que la lutte contre la mortalité maternelle ne doit plus être basée sur l'accumulation de données épidémiologiques à savoir les indicateurs d'impact tels que le ratio de Mortalité Maternelle, mais plutôt sur les facteurs socioculturels et économiques en relation avec la communauté et aussi sur les indicateurs dits de processus tels que le taux de césariennes qui à un niveau national permet de connaître les besoins obstétricaux couverts et par déduction à partir de ces derniers les besoins obstétricaux non couverts. Tabutin D., ne disait-il pas en 1992, qu' «Une chose est certaine: la relation simple et le facteur unicausal ne sont plus de mise ; l'interdépendance entre l'économique, le social, le sanitaire et le culturel s'impose dans les faits et dans la réflexion, l'approche systémique devient une nécessité» [61]. Vision corroborée par le Pr. O. FAYE qui affirmait que « Le modèle social de la santé doit remplacer la stratégie de l'aval, coûteuse, inégalitaire, et imposée par le tout-puissant modèle biomédical, par une stratégie dite de l'amont, efficiente et plus humaine » [54].

Bien que conscient des limites d'une étude rétrospective qualitative basée sur l'exploitation de données communautaires et hospitalières en plus du biais de sélection, nous pensons que ces résultats reflètent en grande partie les problèmes réels de santé de la mère dans le département de Bakel.

Enfin, nous espérons fournir aux décideurs locaux et régionaux un certain nombre d'éléments utiles à l'élaboration d'une stratégie d'action en vue d'aboutir à l'amélioration de la santé maternelle.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault