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Mortalité maternelle: cause et facteurs favorisants déterminés par l'autopsie verbale dans le département de Bakel.

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par Boubacar BARRY
Université cheikh Anta Diop de Daklar - Master de recherche 2008
  

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3.5.1.2 Traitement traditionnel 

Les croyances aux maladies provoquées par des forces surnaturelles ou personnes maléfiques déterminaient souvent les itinéraires thérapeutiques qui privilégiaient le traitement traditionnel. Ainsi les femmes dans leur majorité (70%) ont consulté des guérisseurs, des marabouts et autres tradipraticiens. Les familles de manière spontanée s'adressaient d'abord à la médecine traditionnelle avant d'aller aux centres de santé modernes car elles croyaient que la maladie n'était pas naturelle mais surnaturelle due à un génie, un mauvais oeil, un sort jeté par une personne mal vaillante, un sorcier, ... « Nous pensions que ce n'était pas une maladie pour les docteurs puisqu'elle s'évanouissait puis se réveillait, avant de l'évanouir à nouveau. C'est alors que j'ai appelé un marabout » (belle-mère d'une femme décédée). Attitude confirmée par le Pr Oumar Faye directeur de la santé « dans la culture sénégalaise, la mortalité maternelle n'a pas souvent d'existence en soi dans la mesure où son origine est surnaturelle. Ce caractère composite de l'étiologie explique pourquoi elle n'est pas à priori justiciable d'un seul traitement. La médecine moderne s'intéresse au `comment' et reste muet sur l'angoissante question du `pourquoi', qu'elle laisse à la philosophie ou à la religion. Or, c'est là que se joue le drame de la maladie pour un Sénégalais : connaître non pas le comment de son affection (la femme est décédée par hémorragie utérine lors de l'accouchement) mais le pourquoi de ce décès (victime d'un mauvais sort, transgression d'un tabou, mécontentement des ancêtres, etc. Selon Lévi Strauss, `c'est le tradipraticien qui sait utiliser un langage adéquat dans lequel peuvent s'exprimer des états informulés et autrement informulables') » [54].

De plus les pratiquants de la médecine traditionnelle ont une influence très importante sur la population et retardaient ou empêchaient parfois le recours aux structures de santé : « le marabout nous a dit que ce n'était pas la peine de l'emmener au dispensaire car avec ses médicaments elle allait guérir  rapidement » (mari d'une femme dans un village de Bakel).

Les accoucheuses traditionnelles jouaient aussi un rôle très important dans les sociétés où elles se trouvent puisqu'elles assuraient à la fois la fonction d'accoucheuse, de pédiatre, de conseillère, de psychologue, d'assistante sociale. Elles étaient le premier recours des femmes en cas de besoin loin devant les sages-femmes et les matrones comme le confirme cette accoucheuse à Moudéry « C'était en 1986 (20 ans) que j'ai commencé à faire les accouchements c'est à dire que je connais très bien ce métier. Tout le village nous connaît et c'est vers nous que les femmes s'adressaient en premier jusqu'aujourd'hui avant d'aller par force dans le poste de santé ». De plus les difficultés relationnelles entre les accoucheuses et les prestataires de santé aggravent la situation, comme en témoignait la même accoucheuse :

« Tout le monde a confiance en nous mais nous ne pouvons plus exercer ce travail tant que la sage femme est sur place. La sage-femme est contre nous alors que nous travaillons toutes pour la bonne santé des femmes et que nous pouvons travailler ensemble sans problème ».

Il est donc indispensable d'établir un espace de dialogue ou de concertation entre les prestataires et les accoucheuses traditionnelles. De plus certaines accoucheuses gardaient les patientes jusqu'au dernier moment ; c'est après avoir perdu tout espoir de réussir qu'elles référaient les femmes. Car elles pensaient qu'en envoyant les femmes vers les hôpitaux, cela touchait à leur réputation même si elles n'ont pas les capacités techniques ni les moyens matériels pour faire face aux complications qui pouvaient survenir sans signes annonciateurs. C'est pourquoi elles essayaient toujours avec la dernière énergie de faire l'accouchement jusqu'au moment où elles sont dépassées par les évènements. Comme en témoignait cet hom- me : « C'était l'accoucheuse F.G que nous avions appelée lorsque ma belle fille allait accoucher. Le premier jour elle avait tout fait sans réussir et au deuxième jour elle a appelé la deuxième accoucheuse au secours. Malgré leurs efforts conjugués l'accouchement n'a pas pu avoir lieu et c'était au troisième jour que nous l'avions amené à Bakel alors qu'il était trop tard. Elle est décédée avant son opération » (Beau-père d'une femme décédée à Golmy). L'accouchement à domicile est considéré par les agents de santé du département comme le principal facteur de mortalité et de morbidité maternelle. Pour eux, le contexte où se déroulaient les accouchements à domicile est caractérisé par l'analphabétisme qui ne permettait pas aux accoucheuses d'évaluer les risques encourus.

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