Chapitre 3 : Revue de littérature et
Méthodologie
1-Situation dans les pays développés : cas
de la France
L'insertion des jeunes dans la vie active constitue depuis un
certain nombre d'années un problème de société
récurrent, souvent vécu difficilement par les jeunes et leurs
familles. Malgré les moyens croissants mobilisés par les pouvoirs
publics dans bon nombre de pays, la proportion de jeunes au chômage
demeure importante et inquiétante.
Des études3 réalisées sur
l'insertion des jeunes et particulièrement ceux issus de l'enseignement
supérieur en France révèlent l'ampleur de la situation du
chômage qui sévit au sein de cette catégorie de la
population active. Le taux de chômage des jeunes les moins
qualifiés se situait à 39% en 2004 avec un taux de 18% pour les
sortants du supérieur sans diplôme. La réflexion sur
l'insertion des diplômés du supérieur s'est
avérée nécessaire. Pour ce qui est des statistiques, elles
révèlent que ces derniers sont confrontés à des
problèmes d'insertion professionnelle liés entre autre à
l'âge, au diplôme, à la filière de formation mais
aussi à l'environnement social ou familial. Entre 1998 et 2001, les
diplômés de 2ème et 3ème cycle ou des
grandes écoles ont connu une relative augmentation de leur taux de
chômage de l'ordre de deux et cinq points.
La dégradation de l'insertion des jeunes
diplômés depuis trois ou quatre ans est réelle. Les
analyses produites par le CEREQ à partir de l'étude du devenir de
plusieurs cohortes de jeunes pendant les années qui suivent la fin des
études le montrent clairement. Premièrement, cette étude
indique que près d'un jeune sur deux quitte le système
éducatif après un passage dans l'enseignement supérieur et
que parmi ceux-ci 77% obtiennent soit un diplôme universitaire soit un
BTS avant de rechercher un emploi. L'enquête réalisée
auprès de la génération des jeunes ayant quitté le
système éducatif en 2001 indique un taux de chômage des
diplômés, trois ans après leur sortie, sensiblement
égal à 9% contre seulement un taux compris entre 4 et 7% pour la
génération 98 (selon le niveau de diplôme).
Deuxièmement, cette même étude révèle que
seulement les diplômés des écoles d'ingénieurs ou de
quelques filières de troisième cycle obtiennent majoritairement
un emploi stable. En outre, les diplômés de filières moins
sélectives et moins professionnalisées connaissent de
véritables difficultés quant à leur insertion.
Les « déclassements » au moment de l'embauche
sont fréquents : de nombreux jeunes diplômés de
l'enseignement supérieur n'ont pas, trois ans après la fin de
leurs études, un emploi du niveau auquel leur diplôme les a
théoriquement préparés. Par exemple, 30 %
3 Etudes réalisées par le CEREQ au
printemps 2004
seulement des étudiants issus de deuxième cycle
ont un emploi de cadre et 54 % exercent une profession intermédiaire.
Le taux de chômage des jeunes sortis de l'enseignement
supérieur s'est considérablement accru entre 2001 et 2004. Celui
de 2004 se situant à 11% est presque le double du taux de 2001 (6%) des
jeunes sortis de l'enseignement supérieur en 1998. Ce taux reste
inférieur à celui de l'ensemble de la génération
qui était de 16% en 2004 et indique une situation plus favorable que
celle des sortants de l'enseignement secondaire.
Globalement, 71% des jeunes issus de l'enseignement
supérieur exercent sous un contrat à durée
indéterminée (CDI) ou sont fonctionnaires trois ans après
leur sortie de l'enseignement supérieur et 74% occupent des emplois de
cadre ou de profession intermédiaire. Cependant, l'accès au
statut de cadre est minoritaire pour les formations en dessous de bac+5 :
seulement 36% des diplômés de maîtrise, 26% des
diplômés de licence ou 13% des détenteurs de DUT ont obtenu
un emploi de cadre en mars 2004. En revanche, pour les diplômés de
DEA ou de DESS, ce taux s'élève à 68%. Il est de 88% pour
les docteurs et dépasse 90% pour les diplômés
d'école d'ingénieurs.
Le taux de chômage le plus faible (2%) est celui des
diplômés des écoles de la santé et du social de
niveau bac+2(les écoles d'infirmières, celles d'assistantes
sociales...).
Parmi les jeunes sortis diplômés de
l'université en 2001, c'est l'obtention d'un diplôme de bac+5 qui
assure une qualité d'insertion bien meilleure que pour les
diplômes de niveau inférieur. En termes de
rémunération, les jeunes quittant l'université avec un
diplôme bac+5 ont un salaire médian supérieur de 21%
à celui des maîtrises et de 33% à celui des licences. Ils
sont moins fréquemment dans des emplois du secteur public (un quart
d'entre eux) que les autres diplômés de l'université.
Au delà de l'effet du niveau de diplôme, la
spécialité de formation initiale a également un impact sur
l'insertion. Les diplômés de l'université en Lettres et
sciences humaines présentent les taux de chômage les plus
élevés en mars 2004, de l'ordre de 16%, alors que 11% des
sortants de Droit, Economie ou Administration économique et sociale sont
à la recherche d'un emploi trois ans après leur sortie. Les
premiers sont aussi ceux qui sont le moins souvent en emploi stable : la part
des emplois en CDI ou de fonctionnaire est inférieure de 15 points
à celle des sortants de sciences exactes et naturelles ou de Droit et
d'Economie.
La relative faiblesse des taux de chômage des
détenteurs de BTS ou DUT est un constat récurrent. En mars 2004,
ce taux est de 6% pour les DUT, identique à celui des
diplômés d'écoles d'ingénieurs. De 9% pour les BTS,
il reste nettement inférieur au chômage observé pour les
jeunes en possession d'un DESS ou d'un DEA.
Pour ce qui est du statut de l'emploi, les bac+2
professionnels se trouvent déclassés (sont employés ou
ouvriers) dans 30% des cas chez les DUT et dans 44% des cas pour les BTS trois
ans après la fin des études. Leur salaire est inférieur au
salaire médian de l'ensemble des jeunes issus de l'enseignement
supérieur.
Traditionnellement, l'insertion est de meilleure
qualité à l'issue de BTS ou de DUT industriels plutôt que
tertiaires. Le taux de chômage en mars 2004 est de 7% pour les
filières industrielles et de 10% pour les spécialités
tertiaires. Sept jeunes sur dix issus de spécialités
industrielles occupent un emploi de cadre ou une profession
intermédiaire contre un diplômé sur deux de
spécialités tertiaires.
En définitive, on constate que le chômage frappe
aussi bien les personnes dotées d'un diplôme supérieur que
les sans diplômes en France avec des avantages dans l'insertion
liés à certaines caractéristiques des individus ou des
diplômes. Pour mieux apprécier la question du chômage en
Cote d'Ivoire, nous examinerons la situation dans un pays en voie de
développement : la Tunisie.
2-Situation dans les pays en voie de développement
: cas de la Tunisie
L'étude portant sur l'insertion professionnelle des
diplômés du supérieur, réalisée entre la fin
de l'année 2005 et le début de l'année 2006 par le
ministère tunisien de l'emploi et de l'insertion professionnelle, a
permis d'apprécier l'ampleur et les caractéristiques du
chômage au sein des sortants du système éducatif
supérieur.
Le chômage est un problème important parmi les
nouveaux diplômés universitaires. En effet, 46% des jeunes actifs
n'avaient pas un emploi 18 mois après l'obtention de leur diplôme.
Le phénomène est plus aigu chez les femmes; le taux de
chômage les concernant se situe à plus de 51% contre seulement 38%
pour les hommes.
Le chômage n'épargne aucune catégorie de
diplômés mais il affecte d'une façon plus
particulière les techniciens supérieurs et les maîtrisards
dont les taux de chômage avoisinent les 50%. Les diplômés
des filières courtes sont les plus exposés au chômage. Le
taux de chômage le plus élevé (71%) est observé chez
les techniciens dans le domaine de l'agriculture et de l'industrie
agro-alimentaire. Le taux de chômage le moins élevé (40%)
correspond aux techniciens dans le domaine de la santé et des services
sociaux. Cependant, le chômage se pose avec plus d'acuité pour les
techniciens supérieurs en gestion et administration. Parmi ceux-ci, 60%
se trouvaient au chômage à la date de l'enquête. Les
techniciens en informatique et informatique de gestion, et les techniciens en
mécanique et
électricité, sont également
exposés à un chômage élevé avec des taux
respectivement de 45,4% et 42,1%.
Tous niveaux de diplôme confondus, les taux de
chômage sont les plus élevés chez les diplômés
appartenant aux filières du tertiaire (gestion, finances, droit)
atteignant plus de 68% pour les maîtrisards des spécialités
juridiques. Cette situation favorise la reprise des études ou
l'inscription dans d'autres cursus universitaires pour les
diplômés appartenant aux groupes de spécialités les
plus exposées au chômage, dans le but de contourner le
chômage.
Les résultats de l'enquête montrent aussi que les
problèmes de déclassement et d'adéquation existent. Par
niveaux éducatifs, le taux de déclassement est le plus fort chez
les maîtrisards. Ainsi, 43% de ceux-ci étaient occupés dans
des emplois sous qualifiés par rapport à leur niveau de
compétence. Ce taux se situe à 35% pour les techniciens
supérieurs et à 10% pour les ingénieurs et concerne
essentiellement les agronomes. Le déclassement varie de 10 à 80%
selon le groupe de spécialité et semble concerner en premier lieu
les filières les plus exposées au chômage.
L'emploi salarié représente encore le
débouché principal pour les diplômés du
supérieur. C'est le cas de plus de 71% des jeunes. Le secteur public
employeur traditionnel des diplômés du supérieur dans le
passé reste encore avec 52% des emplois salariés le principal
débouché. Le rôle du secteur privé reste
significatif générant 48% des emplois.
La difficulté liée à l'obtention d'un
emploi incite les jeunes diplômés à se tourner vers les
entreprises de petite taille qui elles n'emploient qu'au plus 50 personnes.
L'emploi dans le secteur privé est mal perçu car plus de 48% des
jeunes salariés s'étaient déclarés au moment de
l'enquête à la recherche d'un meilleur emploi. Dans ce secteur, le
mode d'emploi privilégié est le contrat à durée
déterminée (CDD).
Une analyse de la typologie de parcours sur le marché
du travail permet d'appréhender des trajectoires types suivies par les
sortants de l'enseignement supérieur. La première est une
trajectoire de stabilisation professionnelle rapide sur le marché du
travail et regroupe plus de 12,7% des jeunes diplômés. La
majorité d'entre eux a mis moins de deux mois pour accéder
à un emploi salarié. La seconde trajectoire qui représente
7,5% de la cohorte, se caractérise par un accès plus tardif
à l'emploi salarié. La phase de recherche d'emploi est nettement
plus longue pour ces jeunes. Ainsi, la moitié d'entre eux ont connu plus
de huit mois de chômage. Dans ces deux trajectoires-types, les
diplômés d'écoles d'ingénieurs et d'architecture
sont surreprésentés alors que les maîtrisards ont beaucoup
moins de chances de se trouver dans ces trajectoires. La trajectoire de
chômage persistant regroupe 38% des diplômés. Les
techniciens sont largement surreprésentés alors que les
ingénieurs et les architectes y sont moins
nombreux. Les maîtrisards sont
surreprésentés dans les transitions chômages-formation
tandis que les techniciens et, dans une moindre mesure, les ingénieurs
sont surreprésentés dans les transitions chômage-SIVP
(Stage d'Initiation à la Vie Professionnelle). En plus de ces
trajectoires, on note également deux autres types qui se
caractérisent par un retrait ou par une absence d'entrée sur le
marché du travail. Le premier type rassemble 15% des
diplômés. Ceux-ci poursuivent les études après deux
ou trois mois de chômage ou d'inactivité correspondant
généralement à une période de vacances scolaire. Le
second type est une trajectoire d'inactivité et il regroupe 4% des
jeunes diplômés. Les ingénieurs et les maîtrisards
sont les plus nombreux à avoir des trajectoires de poursuite
d'études contrairement aux jeunes techniciens qui semblent
préférer une entrée directe dans la vie active. Un dernier
type de trajectoire se caractérise par un décrochage de l'emploi
après avoir accédé rapidement à celui-ci et
regroupe environ 6% des jeunes diplômés. La moitié d'entre
eux a mis moins de trois mois à accéder à l'emploi,
généralement salarié, mais ils l'ont tous perdu dans
l'année qui a suivi pour se retrouver majoritairement au chômage.
Les diplômés qui suivent cette trajectoire, et qui donc ont
été plus employables mais également plus
vulnérables que les autres, sont un peu plus fréquemment des
diplômés d'architecture et de médecine.
L'appartenance à ces différentes trajectoires
est liée à des facteurs. Les résultats de l'analyse,
effectuée à l'aide d'un modèle logit multinomial,
confirment le poids très déterminant du diplôme sur les
parcours d'insertion des jeunes diplômés.
Les probabilités d'appartenir à un parcours de
stabilisation sont respectivement de 26%, 19% et 9% supérieures pour les
diplômés d'écoles d'ingénieurs, les architectes et
les techniciens supérieurs comparés aux maîtrisards. En
même temps, les diplômés d'architecture et d'écoles
d'ingénieurs ont une probabilité de 30% plus faible de se trouver
dans une trajectoire de chômage. En revanche, les techniciens
supérieurs ont une probabilité plus élevée que les
maîtrisards (d'environ 3%) de se trouver dans les trajectoires de
chômage.
Les diplômés d'architecture se
caractérisent à la fois par une plus grande stabilité dans
l'emploi et une probabilité plus forte de perdre leur emploi. L'analyse
par genre montre que ceci est également le cas pour les
diplômés hommes, qui ont une probabilité plus
élevée de se stabiliser (+4%), d'éviter des trajectoires
de chômage (-4%) et de retrait d'inactivité (-3%), mais une
probabilité plus forte de se trouver dans des trajectoires de perte
d'emploi (+2%).
L'examen du taux instantané de sortie vers l'emploi
(salarié, non salarié, SIVP) montre que la probabilité
d'accéder à l'emploi est globalement décroissante avec le
temps passé sur le marché du travail. On remarque
également une forte différentiation dans l'évolution de
la
probabilité de non accès à l'emploi en
fonction du diplôme et du genre. Ainsi, pour les maîtrisards, leurs
chances de sortie du chômage sont globalement inférieures à
celles des autres diplômés. La situation relative aux techniciens
est plus complexe. Au cours des premiers mois, leurs chances d'accès
à l'emploi sont proches de celles des ingénieurs et des
médecins. Cependant, après sept ou huit mois de recherche
d'emploi, leur situation est beaucoup plus défavorable. Les
diplômés d'architecture connaissent également en
début de période une situation très favorable avec le
recrutement de plus de la moitié d'entre eux dans les premiers mois. Les
résultats de l'analyse montrent aussi des différences en fonction
du genre. Les jeunes femmes voient augmenter leurs difficultés relatives
d'accès à l'emploi lorsque la durée de recherche d'emploi
s'allonge.
L'analyse économétrique confirme l'importance du
diplôme et du genre dans l'insertion professionnelle et montre que le
facteur géographique et le niveau d'études du per capita social
sont moins significatifs. Par exemple, les architectes ont chaque mois
près de quatre fois plus de chances d'accéder à l'emploi
qu'un maîtrisard et les médecins plus de deux fois plus de
chances. De même, avoir un diplôme d'ingénieur, de
licenciés des beaux arts ou de techniciens supérieurs augmente
les chances d'accès à un premier emploi, relativement aux
maîtrisards, respectivement de 77%, 38% et 55%. Les différences
entre les deux sexes sont également significatives : les
diplômés hommes ont une chance d'accès à l'emploi de
33% supérieure à celle des diplômées femmes.
3-Situation de l'emploi des diplômés en
Côte d'Ivoire en 2007
La situation de l'emploi occupe une place importante dans les
stratégies de développement de la Côte d'Ivoire. Tout au
long de son histoire, l'emploi des jeunes en général et en
particulier celui des jeunes diplômés de l'enseignement
supérieur a toujours été une préoccupation des
gouvernements ivoiriens. Pour s'en convaincre, il suffit d'analyser les
différents plans quinquennaux de développement (1971-1975) et
(1976-1980), d'examiner la politique de retour à la terre
développée après 1980, le programme des fonds sociaux, le
plan national de l'emploi (1995-2000) et le plan de relance de l'emploi.
Des actions ont été entreprises par l'Etat
ivoirien en vue de faire face à la dégradation de la situation de
l'emploi des jeunes à travers différents ministères et
plusieurs programmes élaborés pour améliorer
l'employabilité des jeunes et permettre à ceux-ci de s'auto
employer. Cependant nous constatons avec force que la situation de l'emploi
pour l'ensemble de la population active n'est toujours pas reluisante. En
effet, la situation de l'emploi en 2002 permet de constater la
dégradation des indicateurs de l'emploi. Par exemple, au niveau du
chômage, au plan national, le taux de chômage est
passé de 8,9% en 1998 à 13,1% en 2002. Pour la ville d'Abidjan,
le taux de chômage en 2002 est de 31,8%. Sur l'ensemble des villes
ivoiriennes, ce taux est de 19,6%. La part de la population occupée en
situation de sous emploi lié à la durée du travail est de
23,8%. Celle des actifs occupés percevant un revenu inférieur au
salaire minimum interprofessionnel garanti est de 57,1%.
Selon la même source, la situation de l'emploi des
jeunes est très inquiétante. Ces statistiques montrent que le
taux de chômage des jeunes en Côte d'Ivoire est de 19,3% et
à Abidjan, il est de 40,1%. La situation de chômage reste
préoccupante pour tous les diplômés de l'enseignement
supérieur. En effet, les titulaires du Brevet de Technicien
Supérieur (BTS), de la Licence et de la Maîtrise, toutes
spécialités confondues, ont respectivement des taux de
chômage de 42,3%, 17,9%, et 25,2%. Après cinq ans, la situation de
l'emploi s'est davantage dégradée en tenant compte des effets de
la crise politico-militaire.
La coopération Française a bien voulu
s'enquérir sur l'état de l'insertion des diplômés du
supérieur en s'intéressant particulièrement aux
diplômés du BTS, de la licence et de la maîtrise. Ainsi une
étude a été confiée à l'Agence d'Etudes et
de Promotion de l'Emploi (AGEPE). Cette étude avait pour objectifs de
fournir des informations sur les difficultés d'insertion des jeunes
diplômés tant à leur niveau qu'au niveau des employeurs en
vue de leur insertion professionnelle. Elle a été
réalisée au moyen de deux enquêtes, l'une auprès des
diplômés de l'enseignement supérieur demandeurs d'emploi et
l'autre auprès des entreprises du secteur moderne.
Au terme de cette étude, il convient de noter les
résultats suivants :
Au niveau des caractéristiques
sociodémographiques des diplômés demandeurs d'emploi, Les
diplômés du BTS constituent la population la plus importante des
personnes enquêtées avec un effectif de 6458 soit 59%. Les
titulaires de la maîtrise sont au nombre de 2998 et représentent
28% de la population totale enquêtée. Ceux de la licence avec un
effectif de 1052 représentent 10% des enquêtés. Les
titulaires d'autres diplômes au nombre 351 représentent 3% de la
population des enquêtés.
Les différentes spécialités de BTS les
plus significatives qui ont participé à l'enquête sont :
<< l'informatique» ; << le commerce et la gestion »,
<< la finance-comptabilité » ; << la mécanique
» et << l'électricité » ; <<
l'électronique et l'électromécanique ».
Les femmes sont dominantes dans la spécialité
<< secrétariat >> et dans les autres
spécialités telles que << le commerce et la gestion
>> ; << la communication, marketing et management >>, et
<< le tourisme et l'hôtellerie >>, elles représentent
plus du tiers de la population totale enquêtée.
L'échantillon de diplômés sans emploi
recensés est composé en majorité d'hommes soit 80%.
L'analyse par diplômes indique que les femmes sont un peu plus
représentées au niveau des titulaires du BTS. Elles ont un
pourcentage de 27% parmi les diplômés du BTS. Chez les
diplômés de la licence et de la maîtrise, les proportions
sont respectivement de 22% et 20%.
L'âge moyen de ces diplômés est d'environ
29 ans. Les diplômés âgés entre 28 et 30 ans ont un
pourcentage de 25% et sont plus présents dans l'effectif des titulaires
de la maîtrise (31%), les plus de 32 ans représentent 24% environ
de l'effectif total des diplômés. On les retrouve plus chez les
titulaires des autres diplômes (25%) de la maîtrise (26%) et de la
licence (25%).
Quelle que soit la spécialité, les titulaires du
BTS sont classés dans le chômage de longue durée (36%). En
Côte d'Ivoire est considéré comme chômage de longue
durée, tout chômage dont la durée excède trois ans.
Ce sont principalement des diplômés de BTS des deux
spécialités suivantes : << banque et assurance >> et
<< tourisme et hôtellerie >>. Les spécialités
dont les diplômés sans emploi ont un chômage de courte
durée sont par ordre d'importance : << finance comptabilité
>>, << maintenance informatique >> et << agriculture
>>.
Concernant les titulaires d'un diplôme d'enseignement
général (licence et maîtrise), chômeurs, quelle que
soit la spécialité, (25,1%) sont considérés comme
des chômeurs de longue durée. En effet, on remarque que plus du
quart de ces diplômés demandeurs ont une durée de
chômage qui excède trois ans. Les spécialités dont
les diplômés sont les plus touchées sont <<
Criminologie >> ; << Sciences de la nature >> et <<
Biosciences >>.
Nombre de diplômés de l'enseignement
supérieur en quête d'emploi, surtout ceux issus de l'enseignement
général, ne font pas de stage pendant et après leur
formation, ce qui signifie qu'en général, ils n'ont aucun contact
avec le monde du travail. D'ailleurs, ceux qui font le plus de stages (BTS,
autres diplômes) estiment généralement qu'ils ne sont pas
utiles pour obtenir un emploi. Par ailleurs, ils ont invoqué au titre
des difficultés rencontrées dans la recherche d'emploi, le manque
d'expérience professionnelle.
Les diplômés de l'enseignement supérieur en
quête d'emploi n'ont pu bénéficier de formations
complémentaires dans leur ensemble. Par ailleurs, même s'ils
estiment généralement que leur formation initiale est
suffisante pour obtenir un emploi, il en demeure
qui notent au nombre des difficultés rencontrées
pour leur insertion que leur formation initiale est inadaptée aux
réalités du marché du travail.
L'enquête auprès des entreprises a
révélé que le manque d'expérience professionnelle
constitue une difficulté pour l'embauche des diplômés de
l'enseignement supérieur. L'exigence en année d'expérience
professionnelle formulée par les entreprises est de plus d'un an.
Elle fait ressortir également que le niveau de
compétence insuffisant est l'une des difficultés de recrutement
des diplômés et les compétences interviennent naturellement
dans les exigences de recrutement des diplômés de l'enseignement
supérieur.
Les deux enquêtes révèlent que la
capacité d'absorption du secteur moderne est trop faible pour absorber
le nombre important de diplômés de l'enseignement supérieur
en quête d'emploi. En effet, les diplômés ayant
répondu à notre enquête et dont nous avons pu exploiter les
réponses sont au nombre de 10 859, soit 26% des diplômés au
chômage de la licence, de la maîtrise et du BTS selon
l'enquête niveau de vie des ménages de 2002. L'on sait qu'à
ce jour il existe un nombre plus important de titulaires de ces diplômes
en situation de chômage compte tenu, d'une part, de la situation de crise
traversée par le pays depuis lors et d'autre part du nombre de
diplômés formés depuis 2002. Les intentions d'embauche se
chiffrent au mieux à 7 840 personnes, ce qui est loin de pouvoir
absorber le nombre de diplômés de l'enseignement supérieur
en quête d'emploi. Le secteur moderne représente moins de 10% de
l'emploi total selon la situation de l'emploi rédigée à
partir de l'enquête niveau de vie des ménages 2002. En outre, avec
un recrutement d'environ 6000 fonctionnaires par an, le secteur public ne peut
absorber le surplus de demandeurs d'emploi diplômés de
l'enseignement supérieur qui n'auront pas pu obtenir des emplois dans
les entreprises privées.
La majorité des diplômés n'a pas pu
obtenir de formation complémentaire après leur formation encore
moins de stages. Environ 68% des diplômés n'ont pas obtenu de
formations complémentaires. Dans la strate des diplômés de
BTS en quête d'emploi, 69% de ceux-ci n`ont pas obtenu de formation
complémentaire et les spécialités les plus
concernées sont << banque et assurance », <<
maintenance informatique» et << agriculture ». Pour les
diplômés de l'enseignement supérieur général,
67% n'ont pas obtenu de formation complémentaire. Dans cette strate de
diplômés d'enseignement général chômeurs, les
spécialités dont les titulaires n'ont pas
bénéficié de formation complémentaire sont par
ordre d'importance :
<< Langues, littératures et civilisation
>>, << Sciences économiques et gestion >> et <<
sciences juridiques, administratives et politiques >>.
Les diplômés de l'enseignement technique (BTS,
autres diplômes) en quête d'emploi obtiennent plus facilement des
stages que ceux de l'enseignement supérieur général. Les
diplômés de BTS en quête d'emploi dans leur grande
majorité, quelle que soit la spécialité de BTS, ont fait
un stage en entreprise pendant leurs études à l'exception des
diplômés de la spécialité << banques et
assurances >>. Les étudiants de la spécialité
<< Mine, Géologie, Pétrole et Océanographie
>>, ont des difficultés réelles pour trouver un stage.
Contrairement aux titulaires de BTS, les diplômés
de l'enseignement général ont de sérieuses
difficultés pour décrocher un stage en entreprise. En effet, 72%
des titulaires de la licence ou de la maîtrise n'ont pu obtenir de stage
après leur formation. Les spécialités dont les
diplômés ont plus de difficultés à trouver un stage
en entreprise après les études sont : << langues,
littératures et civilisations >>, << Criminologie >> ;
<< Sciences juridiques, administratives et politiques >> et
<< Sciences économiques et gestion >>.
Pour accepter de travailler, les diplômés de BTS
demandeurs d'emploi, quelle que soit la spécialité, estiment en
moyenne nécessaire d'avoir une rémunération de 250.000
Francs CFA par mois à l'exception de ceux de la spécialité
<< banque et assurance >> qui préfèrent un salaire
moyen de réserve de 150.000 Francs CFA parce qu'ils sont les plus
touchés par le chômage de longue durée.
Le même niveau de salaire de réserve est
désiré par les diplômés de l'enseignement
supérieur général en quête d'emploi. La
désagrégation du salaire de réserve par
spécialité révèle que les diplômés
chômeurs des spécialités << Langues,
littérature et civilisations >> et << Sciences juridiques,
administratives et politiques >> préfèrent un salaire de
réserve nettement supérieur à la moyenne, il est de
350.000 Francs CFA.
Comparativement aux diplômés du BTS, les
titulaires de la licence et de la maîtrise accèdent plus
difficilement à l'emploi. Dans la population, le pourcentage de
diplômés demandeurs d'emploi ayant déjà
travaillé est de 11% environ pour les individus titulaires d'une licence
et de 13% environ pour les titulaires d'une maîtrise. Ces chiffres sont
inférieurs au pourcentage global qui est de 16%. L'analyse de la
durée de chômage avant l'obtention du premier emploi
révèle que les titulaires d'un diplôme de l'enseignement
général mettent plus de temps pour obtenir leur premier
emploi.
En conclusion, nous pouvons, au regard de l'enquête de
terrain portant sur les demandeurs diplômés de l'enseignement
supérieur, déduire la typologie du diplômé de
l'enseignement supérieur. En ce qui concerne le profil type du
diplômé de l'enseignement supérieur, l'on peut retenir les
caractéristiques suivantes :un chômeur de longue durée,
n'ayant fait aucun stage au cours de la formation ni après l'obtention
du diplôme, désire un emploi salarié dans le secteur public
ou privé, trouve sa formation suffisante pour travailler, désire
une formation sur les techniques de recherche d'emploi de l'informatique et des
NTIC, voudrait un salaire mensuel entre 200.000 à 300.000 francs CFA
s'il obtient un emploi.
4-Méthodologie, présentation des
données et limites
Les différentes études réalisées
nous permettent de mieux aborder la question de l'insertion professionnelle des
diplômés du supérieur en Côte d'Ivoire. Le
problème de l'adéquation entre la formation et l'emploi qui se
pose dans ces pays ( France et Tunisie) ne se pose pas pour la Côte
d'Ivoire car le système de formation et le marché de l'emploi
ivoirien ne sont pas suffisamment organisés. Dès lors, aborder
par exemple le chômage des jeunes diplômés sous l'aspect de
l'adéquation entre la formation et l'emploi fournirait certainement des
résultats loin de la réalité
Les données dont nous disposons sont issues
d'enquêtes réalisées en moyenne tous les trois ans et ne
portent nécessairement pas sur les mêmes individus. Cette
situation rend impossible une analyse de la typologie des parcours suivis par
les diplômés entre la formation et le premier emploi. Une telle
analyse nécessitant des données temporelles sur le parcours des
individus.
La question de l'insertion des diplômés du
supérieur en Côte d'Ivoire sera plutôt analysée
à travers les caractéristiques des diplômés en
emploi ou au chômage et les probabilités d'insertion liées
à ces caractéristiques.
4.1. Présentation de la base
Les données de notre étude sont issues de
l'enquête emploi auprès des ménages à ABIDJAN
2007-2008 réalisée par l'AGEPE. Nous avons observé
des variables socioéconomiques et démographiques sur un
échantillon de 2700 ménages reparties dans 135 grappes. Cet
échantillon comprenait 709 diplômés de l'enseignement
supérieur.
Pour cette étude, nous nous intéressons
exclusivement aux diplômés du supérieur qui sont actifs
c'est-à-dire les chômeurs et les occupés.
Thème : l'insertion professionnelle des
diplômés du supérieur a ABIDJAN Brève
présentation de la population des diplômés
Le niveau d'instruction de la population abidjanaise est
relativement élevé. Les effectifs des diplômés ayant
au moins le CEPE s'élèvent 1449236, soit 41% de la population
totale. Les diplômés de l'enseignement supérieur sont au
nombre de 216317 soit 6,1% de la population totale. Ils représentent
environ 15% de la population des diplômés. Ce sont les mieux
représentés après les diplômés du CEPE
(45,4%) et ceux du premier cycle de l'enseignement secondaire (27,4%).
La population des diplômés du supérieur
est dominée par les hommes. Plus de sept diplômés du
supérieur sur dix sont des hommes. La qualité du niveau
d'instruction est relativement bonne. Les titulaires d'un diplôme
supérieur au bac+2 sont les plus nombreux au sein de la population des
diplômés du supérieur. Ils ont une part de 53,8% dans la
population des diplômés du supérieur. Plus de neuf
diplômés sur dix sont actifs. Les inactifs ne représentent
que 7,7% des diplômés du supérieur. Les
diplômés de l'enseignement supérieur représentent
18,3% de la population active occupée
4.2 Méthodologie
Les objectifs de cette étude nous amènent à
adopter une progression en trois étapes.
La première, qui utilise essentiellement la statistique
descriptive élémentaire, présente la situation de l'emploi
des diplômés du supérieur c'est-à-dire leur niveau
d'occupation et leur niveau de chômage. Pour cette première
approche, nous utilisons la base issue de l'enquête emploi auprès
des ménages à ABIDJAN 2007-2008. Les effectifs sont
pondérés par une variable de poids déterminée
à l'aide du plan d'échantillonnage.
Dans la deuxième étape, nous procédons
à un regroupement des diplômés du supérieur suivant
certaines caractéristiques. L'analyse des correspondances multiples et
la classification ascendante hiérarchique seront utilisées pour
la mise en oeuvre de ce regroupement. Le choix de cette méthode parmi
tant d'autres se justifie par sa relative robustesse pour les
échantillons de petite taille c'est-à-dire de taille
inférieure à 10000. (Prise en main de SPAD)
Dans la dernière étape, nous procéderons
à une analyse économétrique pour appréhender les
facteurs intervenants dans la qualité des emplois obtenus par les
diplômés du supérieur. La mise en oeuvre se fera
essentiellement à l'aide d'un modèle logit sous le logiciel
STATA.
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