I.1- Les obstacles à l'amélioration du cadre
de vie dans le quartier
Plusieurs obstacles s'opposent à l'amélioration
des conditions de vie liées aux services dans ce quartier. Nous
développerons ici deux principaux éléments qui sont : le
statut des occupants et l'avènement de la décentralisation avec
le transfert des compétences vers les collectivités locales qui
en à découlé.
I.1.1- Le statut des occupants encore mal défini sur
le plan juridique
L'ère des déguerpissements des habitants des
quartiers précaires est révolue depuis plus d'une vingtaine
d'années puisque « ce recours radical conduit à une
réinstallation aussi illégale dans un autre endroit et
entraîne des coûts16 ». La ville de Sikasso
n'a pas fait exception à cette règle de déguerpissement
vers les années 1980. Des quartiers spontanés à l'exemple
de Bangôni situé au sud de la ville ont été
démolis (cf. carte n°3) comme ce fut le cas de ce
quartier. Mais les autorités se sont rendues compte que les
opérations systématiques de « casse » ou «
d'opération bulldozer » ne réglaient en rien cette histoire
d'autant plus que celles-ci contribuent à accroître la
pauvreté d'une population déjà marginalisée dans
ses conditions de vie. C'est ainsi que les politiques de restructuration
urbaine et de réhabilitation urbaine de l'habitat spontané ont vu
le jour. Ces deux termes sont définis dans les textes de l'urbanisme au
Mali : la première comme « une opération qui consiste
à donner à un espace, urbain déjà occupé par
des populations, mais de structure parcellaire irrégulière sur le
plan physique et juridique, une nouvelle structure parcellaire sans apport
d'équipement et/ ou d'infrastructure de service
»17. Quant au second, il est défini comme une
« opération urbaine qui consiste à donner à une
zone, un espace urbain dégradé, insalubre et / ou d'occupation
irrégulière sur le plan juridique et / ou physique, une nouvelle
structure en améliorant le cadre de vie »18.
Kapélékourou a fait l'objet d'une réhabilitation. Ce
qui donne une certaine garantie aux occupants dudit quartier, le but
étant de les mettre dans leur droit en leur attribuant un permis
d'occuper des terrains qu'ils ont mis en valeur moyennant le paiement d'un prix
fixé entre les représentants de l'Etat et du quartier. La
fixation de ce prix pause encore des problèmes aujourd'hui du fait qu'il
n' y a pas eu de commun accord entre les deux parties
16 Décentralisation et gestion des services
dans les quartiers précaires d'Abidjan.
17 Article 51 du Décret N°
05-115/ PRM du 09 mars 2005 fixant les modalités des différents
types d'opération d'urbanisme.
18 Article 73 du même décret.
au cours de la fixation des prix du m2 des
terrains. Statué à 650 Fcfa le m2 (soit un euros
environ), les représentants du quartier informèrent les habitants
au cours d'une réunion et décidèrent de ne rien payer. Car
le prix fixé au m2 était très
élevé. Si on se réfère à la moyenne du
nombre de m2 dont disposent les propriétaires
(400m2 environ), chaque propriétaire devrait payer un montant
de 260 000 Fcfa (396 euros). Ceci correspond à 4 mois de salaire pour un
chef de ménage qui gagne 60 000 Fcfa par mois. Les parcelles qui ont
été « viabilisées » pendant la même
période dans la ville coûtaient 175 000 Fcfa (266 euros) pour une
superficie de 300m2. Ce qui donne un montant de 583Fcfa soit 0,90
Euros le m2 de la parcelle « viabilisée ». Les
propriétaires de Kapélékourou allaient payer 85 000 Fcfa
(129 euros) de plus que les bénéficiaires des parcelles «
viabilisées » dans la ville légale. On peut se poser la
question de l'existence d'une réelle politique d'insertion ou
d'intégration pour les habitants de ces quartiers précaires que
les communes maliennes seront amenées à mettre en oeuvre dans un
avenir proche. Ce cas montre une carence en la matière dans la mesure
où les autorités n'ont pas tenu compte du contexte social et
économique des habitants pour fixer le prix du m2 des
terrains. A cause de ce blocage au niveau du montant à régler,
l'obtention du permis d'occuper qui constitue une assise juridique pour les
habitants n'est toujours pas acquise. Au cours de notre enquête sur le
terrain de janvier à mars 2005, aucun propriétaire ne disposait
d'un permis d'occuper ou d'autres titres pouvant servir de garantie de son
statut d'occupation sur le plan juridique. N'ayant pas d'assise juridique, les
propriétaires de Kapélékourou craignent de faire des
investissements pour l'amélioration de leur cadre de vie
(amélioration du bâti principalement). De plus, à cause du
manque de justificatif juridique de leur statut d'occupation, les familles ne
peuvent pas bénéficier de robinet dans leur concession alors que
le quartier est connecté au réseau d'eau dont la ville a
bénéficié dans les années 1990 avec le projet Dan
Group (projet d'adduction d'eau de la ville de Sikasso). La condition sine qua
non pour être connecté au réseau d'eau étant la
présentation d'un justificatif de sa concession (permis d'occuper) que
les propriétaires ne possèdent pas encore. Le projet Dan Group a
fait des campagnes qui permettaient aux concessions de bénéficier
de la connexion au réseau d'eau de la ville moyennant le paiement d'une
somme de 30 000 Fcfa (50 €) payable en trois mensualités avec les
factures d'eau. Cette campagne est maintenant finie. Le projet d'adduction
d'eau est passé sous la gestion du service EDM (Energie du Mali), un
secteur sous la responsabilité de l'Etat. Pour être
connecté au réseau d'eau de la ville, il faut payer aujourd'hui
plus de 100 000 Fcfa (150€). C'est là que le rôle
des collectivités apparaît pour engager des
négociations avec l'Etat pour faire d'autres campagnes de promotion afin
que les populations puissent bénéficier des services.
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