1.2. Les limites des systèmes de protection
sociale
Pendant les Trente Glorieuses, le niveau de la protection
sociale ne va pas cesser de s'améliorer, y compris aux États-Unis
où, en dépit des traditions individualistes très fortes,
les présidents J.F.Kennedy et L.B.Johnson mettent en place des
politiques de lutte contre la pauvreté et de couverture du risque
maladie. Dans tous les pays, les revenus de transferts occupent une place
croissante dans le revenu disponible des ménages et en France le budget
social de la nation (qui recense l'ensemble des dépenses de protection
sociale et d'aide sociale) devient supérieur au budget de l'État.
Le ralentissement du rythme de croissance des pays
industrialisés à partir de 1974 marque la fin de l'âge d'or
des politiques sociales. Les limites des systèmes de protection sociale
relèvent des critiques libérales et des transformations de
l'environnement socioéconomique et politique.
1.2.1. Les critiques libérales
La légitimité de la protection sociale est
aujourd'hui contestée par certains auteurs libéraux qui mettent
en avant les effets économiques négatifs de la redistribution.
· Pour ces auteurs, le développement des
politiques sociales produit des effets pervers : loin de réduire la
pauvreté elle l'institutionnalise. Il faut donc réduire la
protection sociale obligatoire, faire appel à la responsabilité
des individus qui peuvent s'assurer contre les risques de l'existence dans un
cadre concurrentiel. Il faut par ailleurs laisser toute leur place aux
activités caritatives volontaires des individus altruistes.
· Plus récemment, certains économistes ont
mis en avant l'accroissement de l'aléa moral, phénomène
bien connu en économie de l'assurance. Plus la protection contre les
risques est complète et étendue, moins les individus sont
incités à éviter les risques auxquels ils sont
exposés. Il s'agit d'une version à peine
dépoussiérée de la condamnation de l'aide aux pauvres.
· Les prestations sociales et plus
particulièrement les minima sociaux sont accusés de créer
des trappes à la pauvreté : le versement des prestations
sociales incite ceux qui les perçoivent à ne pas faire d'effort
pour améliorer leur situation.
· La protection sociale génère d'autres
effets économiques négatifs. En effet, les
prélèvements sociaux freinent :
- la croissance (courbe de Laffer) ;
- l'emploi et la compétitivité des
entreprises ;
- l'épargne, comme le dénonçait dans les
années 1970 M.Felstein, expert des problèmes de santé et
de retraite et conseiller économique de R.Reagan. Pour lui, le
financement des retraites par répartition était une des causes de
l'insuffisance chronique de l'épargne des ménages aux
États-Unis.
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