La spéculation se définit comme le fait d'acheter
soi-même ou faire acheter par quelques correspondants, soit pour son
propre compte, soit en participation, certaines marchandises, dans le temps
qu'elles sont au-dessous de leur prix ordinaire, pour les revendre ensuite,
soit dans le même endroit où l'achat est fait, soit en les faisant
passer en d'autres endroits18 . Cette définition nous permet
au mieux de comprendre que la spéculation constitue une cause de la
crise financière.
En effet, les crédits hypothécaires aux USA ne
constituent pas la seule cause de cette crise. Car au coeur même de ces
crédits, il y a la spéculation, c'est-à-dire faire des
prêts, en tablant, dans un futur proche ou lointain sur d'énormes
profits. La notion d'intérêts, même si elle est interdite
dans système bancaire islamique, puisqu'il constitue la base des
échanges dans le système conventionnel n'est pas en soi
répréhensible, dès lors qu'il obéit à des
règles précises et qu'il est encadré. Mais lorsque
celui-ci est la base d'injustice et de situation pouvant conduire au
chaos19 alors on comprend mieux l'interdiction20 du riba
(intérêt) par l'islam comme préalable à tout
échange de quelque nature que ce que soit. Ce qui constitue certainement
un des atouts majeurs de la banque islamique.
Si l'on a eu peur que cette crise financière ne devienne
économique c'est bien parce qu'il existe une interdépendance
entre économie et finance, de même qu'il en existe une entre les
banques et la finance, et entre la banque et les bourses etc.
Ces différentes connexions, qui font craindre le
pire21 ont tout de même eu des effets non moins dommageables
dans chacune des sphères prises individuellement. C'est ainsi que les
subprimes, et les risques qui s'y rapportent et la spéculation
exagérée faites sur ces actifs, ont entrainé une crise
bancaire.
18 P. GIRAUDEAU, la Banque rendue facile, p.
Y.
19 Il faut dire qu'avec cette crise financière
mondiale, tous les secteurs de la vie active ont été
touchés on pour certains analystes on a frôlé de peu le
chaos
20 Cf. interdiction du riba partie I
21 La notion de pire est relativisée car pour
certains analystes, le fond a été atteint lors de cette crise.
SECTION 2 : la crise des banques ou l'effet domino
Paragraphe I Manifestation de la crise
Et la crise bancaire apparut !
Cette expression parait journalistique mais elle traduit la
surprise du monde entier de voir combien le système bancaire
américain (puisque c'est de là-bas qu'est partie la crise)
était aussi lézardé. De nombreuses thèses
évoquent la pusillanimité de la FED qui a mal
géré la venue de la crise. Cette grande banque centrale continua
à agir à contretemps après le déclenchement de la
crise. Les critiques considèrent qu'elle aurait dû alimenter
massivement les banques en monnaie-banque centrale au lieu de maintenir la
ligne de conduite orthodoxe qui proposait moins de laxisme plutôt qu'une
inondation de crédits.
« Too big to fail », c'est cet adage anglo-saxon qui a
amené les banques centrales22 à soutenir les
établissements bancaires au bord de l'effondrement en mettant à
leur disposition plus de 400 milliards d'euros23. C'est
particulièrement vrai en Europe où l'engagement des banques
allemandes dans les crédits américains à risque
menaçait d'effondrement le système bancaire allemand d'abord,
européen, ensuite.
Les banques centrales ont joué leur rôle de «
prêteur en dernier ressort » afin d'éviter une crise
systémique, un effet domino généralisé. La BCE a
accordé 300 milliards d'euros de crédit aux banques. La FED a non
seulement mis plus de cent milliards de dollars de liquidités à
la disposition des banques, mais elle a baissé son taux de
réescompte, leur permettant ainsi un refinancement permanent à un
taux inférieur de 0,5 point. Elle a même été
jusqu'à accepter en garantie, en contrepartie des liquidités
prêtées aux banques, une large gamme de produits financiers, y
compris des prêts hypothécaires et des actifs qui y sont
liés. C'est-à-dire qu'elle a encouragé les banques
à se débarrasser d'une partie des crédits
hypothécaires à risque. Dès lors les banques ne se sont
plus gênées ; elles ont continué à prendre les
mêmes risques puisqu'elles savaient que leurs pertes seraient, de toute
façon, limitées par l'intervention des banques centrales.
Paragraphe II La spéculation
bancaire
Un autre point à souligner dans cette crise c'est que la
spéculation ne s'est pas produite à la Bourse mais dans les
banques. Et là, la spéculation fut extrêmement dangereuse
en raison de la faiblesse de leurs capitaux propres (exigences en fonds propres
que Bâle II va dans une certaine mesure exigée24).
C'est la raison pour laquelle presque toutes les grandes crises
financières des 200 dernières années sont des crises
bancaires25. Cette instabilité du modèle bancaire est
facile à
22 Établissement qui, dans un État, est
chargé en général de l'émission des billets de
banque et du contrôle du volume de la monnaie et du
crédit. En France, c'est la Banque de France qui assume ce
rôle sous le contrôle de la Banque Centrale
Européenne.
23 Jean-Jacques Chavigné, extrait de son
article paru sur
http://www.democratie-socialisme.org,
en date du samedi 25 Aout 2007
24 Voir plus loin Pilier 1 de Bâle II
25 Les Échos, hebdomadaire français en
date du 15 Avril 2009. Article d'Harald Hau, professeur associé de
finance à l'Insead
comprendre : une banque fait de gros investissements avec peu
de capitaux propres et énormément d'argent emprunté. Cela
est loin d'être normal et fausse ainsi les règles du jeu de la
finance.
En cela l'on peut voir aussi le manque de déontologie
financière, car si celle-ci se définit comme l'ensemble des
règles de conduites individuelles ou collectives qui visent à
garantir le respect de certains principes dans le comportement quotidien des
entreprises et de leurs collaborateurs26, l'on peut affirmer qu'il a
beaucoup manqué aux sociétés bancaires.