Paragraphe IV Riba et thésaurisation
54 Dictionnaire historique de l'Islam, Op.cit. P774
55 Argument sujet à polémique mais
parfois admis comme en droit constitutionnel, où les constitutions
coutumières
sont formées par la pratique et essentiellement
composées de règles non-écrites (coutumes, usages,
conventions), comme c'est le cas en Angleterre
56 Dictionnaire historique de l'Islam Op.cit. P595
57 « Vous avez un excellent exemple dans votre
prophète » (XXXIII, 21)
58 Dictionnaire encyclopédique de l'Islam ,
Op.cit. de C. GLASSE
L'Islam combat très vigoureusement le Riba. Du point de
vue étymologique, le mot ribâ (nom arabe masculin) vient du verbe
rabâ & arbâ qui signifie augmenter et faire accroître une
chose à partir d'elle-même. A partir même de cette
définition de la racine arabe on perçoit immédiatement
l'idée d'interdiction d'une augmentation et d'une croissance
illégale de tout ou partie du patrimoine. L'Islam a annoncé
à celui qui pratique le riba, la guerre de la part d'Allah et de son
messager et lui promet de se tenir le jour du jugement dernier comme celui que
le toucher de Satan a bouleversé59. Au début de
l'Islam déjà, le problème de l'intérêt
était soulevé car il était lié à certaines
activités d'échanges simples.
Illustration: dans le passé, la coutume
de troquer des dattes pas encore mures encore sur l'arbre contre des dattes
faisait était courante. Elle se fondait sur la spéculation du
prix futur des dattes non mures. À cette pratique, les juristes
répondirent que c'était de l'usure.
Cependant Malik ibn Anas60 fit une exception arguant
que cela représentait à une nécessité sociale et
une pratique établie.
A l'opposé de la pensée musulmane dans laquelle il
n'existe aucune distinction entre ces deux termes, il existe traditionnellement
une distinction entre "usure" et "prêt à intérêt".
L'usure étant un prêt à un intérêt très
fort. Même si de tout temps il y eût des penseurs, philosophes et
économistes pour défendre l'utilité de la pratique de
l'intérêt, il convient de rappeler que cette pratique fût
également critiquée tout au long de l'histoire.
En voici quelques exemples.
Qualifiée de détestable par Aristote (384, m.322
av. Jésus-Christ) la pratique du prêt à
intérêt consiste à créer de la monnaie à
partir d'elle-même61. Ce procédé selon lui est
haïssable dans la mesure la monnaie fut créée pour
l'échange et non pour se servir elle-même. Aristote accepte le
commerce lorsqu'il sert à échanger les biens, mais il
considère que cette activité est condamnable dès lors
qu'elle vise exclusivement l'enrichissement. L'on se demande bien comment
serait compris Aristote dans le monde d'aujourd'hui, quand on sait que tout ,
absolument tout est fait en vue d'enrichissement et d'intérêts
?
Les traditions monothéistes aussi ont un point de vue
convergent sur la notion d'intérêt, notamment la tradition juive
qui condamne également et clairement la pratique. le Tabrit (un mot
hébreux désignant la pratique de l'usure) était interdit
entre juifs mais pas entre juifs et non juifs ». L'ancien testament
permet, en effet, aux créanciers juifs de pratiquer un taux usuraire
lorsqu'il s'agit d'un prêt accordé aux étrangers de la
communauté juive62.
L'église catholique quant à elle fut dans un
premier temps opposé à la pratique de l'intérêt en
fondant sa position sur des sources bibliques. Cependant Sous l'impulsion de
Calvin (au XVIe siècle) l'autorisation fût
donnée aux protestants, et par la suite la pratique se répandit
à l'ensemble de la communauté chrétienne, cependant qu'il
fallait respecter une limite morale et ne pas pratiquer un taux
d'intérêt trop fort(?).
59 « Ceux qui mangent [pratiquent] de l'intérêt
usuraire ne se tiennent (au jour du Jugement dernier) que comme se tient celui
que le toucher de Satan a bouleversé.
Cela, parce qu'ils disent: "Le commerce est tout à fait
comme l'intérêt" Alors qu'Allah a rendu licite le commerce, et
illicite l'intérêt ». Coran, Sourate Al-BAQARAH (LA VACHE),
verset 275.
60 716-796 fondateurs de l'école juridique
malikite. Son approche du droit canon repose essentiellement sur les usages
coutumiers de Médine en utilisant le consensus et l'opinion.
61 Alternatives économiques No 276 de janvier
2009, p.75
62 « Tu n'exigeras de ton frère aucun
intérêt, ni pour l'argent, ni pour vivre, ni pour aucune chose qui
se prête à intérêt, pour l'étranger tu
pratiqueras l'usure ; mais envers ton frère, pas d'usure, pour que Dieu
ton Élohim, te bénisse de tout envoi de tes mains sur la terre,
là où tu viens, pour en hériter). (Deutéronome,
XXIII : 19-21).
Si ton frère devient pauvre et que sa main s'affaiblit
prés de toi, tu le soutiendras, afin qu'il vive prés de toi, ne
tire de lui aucun intérêt, ni profit, crains ton dieu et que ton
frère vive avec toi. Tu ne lui prêteras point ton argent à
intérêt et tu ne lui donneras pas tes vivres pour en tirer profit.
Lévitique, XXV 35-37, cité dans le dictionnaire de
théologie, Paris 1947, colonne 2325.
En islam, le point de vue est tout autre et la position est
constante : la richesse loin de constituer un élément de
puissance économique, doit permettre de servir les autres et leur
permettre également de gagner63.
De nombreux intellectuels ont de leur côté
fustigé l'usure, en argumentant que celui-ci dissuade l'investissement
en ce qu'il n'est pas directement et certainement rentable, même si cet
investissement a une importance sociale (développement des
infrastructures, éducation, etc.). L'économiste et philosophe
Adam Smith (1723,-1790 après. Jésus-Christ.) estima pour sa part
que par l'usure "le capital est au risque de l'emprunteur qui est comme
l'assureur de celui qui prête".
On voit clairement que l'usure et le prêt à
intérêt recouvrent une même notion, celle d'une monnaie qui
se sert elle-même. C'est pourquoi l'Islam ne fait aucune distinction
sémantique entre ces deux notions et condamne très vigoureusement
la pratique.
À travers toutes ces interdictions l'Islam met l'accent
sur le travail de l'homme comme source de réalisation et de richesse. Il
doit travailler et engager pleinement son intelligence et son énergie
« l'homme ne possédera que ce qu'il acquiert par ses
efforts »64.
Si le système bancaire islamique a des sources
différentes des banques conventionnelles65, elle ne se
comporte pas moins comme une institution financière. Il a un mode de
fonctionnement qui diffère de système bancaire conventionnel,
d'où l'étude caractérielle et systémique de la
banque islamique.
Banque islamique et logique commerciale
Si les termes de banques et finances islamique sont nouveau
pour certains, il le sont moins pour une bonne partie de l'opinion à
cause de la crise de Dubaï qui fit les grands titres de nombreux
quotidiens et hebdomadaires dès la deuxième quinzaine du mois
novembre 2009.Encore qu'il faille lever un amalgame , Dubaï n'est pas
représentatif de toute la finance islamique encore moins de
son système bancaire. Cela dit les problèmes
suivants se posent : qu'est ce qui caractérise la banque islamique
(section 1), quels sont ses principes (section 2) et quels sont les produits
qu'elle propose (section 3) ?
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