Les bananes constituent comme on l'a déjà
souligné, une marchandise particulière.
A ce propos, les assureurs ont recours à des conditions
spécifiques pour garantir un risque tout aussi spécifique.
Après l'étude des conditions spéciales,
on verra le rôle que tient l'assureur dans ce transport. Il faut dire que
le transport entre la Côte d'Ivoire et la France est régi par les
chartes-parties qui désignent l'application du Droit français,
par conséquent les assurances sont elles aussi régi par ce
Droit.
§1 La particularité de la police
d'assurance
En général, les dommages subi par les marchandises
trouvent leur cause dans le mauvais fonctionnement de la
réfrigération sont exclus de la police d'assurance tout
risque.
Il faut que l'assuré souscrive une assurance
particulière (cas du réceptionnaire, car la vente est CAF ou
FOB). E n effet, l'article L 174 - 4 du code des assurances
énonce que "l'assurance sur faculté garantit les pertes et les
dommages matériels causés aux marchandises par tous accidents de
navigation ou événements de force majeure sauf exclusions
formelles et limitées prévue au contrat d'assurance".
Comme l'explique clairement Mr Rémery dans son
rapport (
cass. com.27/06/95)32
pour compléter cette réglementation, les diverses compagnies
d'assurances qui interviennent sur le marché français de
l'assurance maritime, ont mis au point des conditions générales
imprimées que tout le monde utilise désormais, ainsi que les
clauses additionnelles types pour résoudre les cas les plus courants.
Elles sont simplement insérées aux conditions
particulières par mention de leur numéro de
référence. Plus précisément, il existe deux types
de polices de base il s'agit de la police "tous risques" et de la police "FAP
sauf".
32 DMF 1995, p 727.
Il précise également que la clause
particulière attachée au transport des denrées
périssables dans la police tous risques est la clause de type
additionnelle n°48 intitulée "facultés transportées
sous température dirigée (garantie étendue)".
L'exclusion de garantie de la police tous risques qui nous
intéresse dans le transport des bananes est celle excluant l'influence
de la température atmosphérique. Cette température doit
être distinguée de la température qui règne dans les
cales des navires réfrigérés. Cette température
sera régie par la clause n°48.
Cette clause garantit les dommages et les pertes
matériels subis par les facultés voyageant sous
température dirigée lorsqu'elles sont la conséquence des
variations de température. Mais sont exclus la garantie les dommages et
pertes matériels résultant d'une mauvaise préparation des
facultés.
On peut citer comme exemple des cartons non adaptés au
transport (sans trous d'aération) ou des cartons trop remplis comme cela
est parfois le cas pour fausser les quotas d'importation européens, les
bananes sont alors écrasées.
Il faut que la partie intéressée aux
marchandises soit attentive lors de la conclusion de la police d'assurance
qu'elle souscrit et doit bien spécifier le type de marchandise qu'elle
va faire transporter.
La portée de la clause n°48 a donné lieu
à des discussions sur son interprétation : Est-ce une extension
de la garantie, ou modifie-t-elle la portée de l'exclusion de garantie
du contrat de base?
Pour la jurisprudence, la seconde interprétation est
à retenir; c'est à l'assureur de prouver que le dommage n'est pas
consécutif à une variation de la température, pour se
prévaloir de l'exclusion de la garantie.33
33 Obs de Monsieur REMERY dans son rapport sur
l'arrêt de la Cour de Cass. Du 27/06/95. DMF, p. 734 - 735.
Le transporteur peut lui aussi souscrire une assurance pour
se protéger contre le risque de défaillance de la
réfrigération du navire. Cette assurance spécifique ne
pose pas de grandes difficultés quant à son
interprétation.
L'assureur du transporteur va jouer en règle
générale un rôle de conseiller et celui des marchandises va
prendre en charge la gestion du litige lorsque l'assuré n'est pas un
professionnel. Pour le cas des bananes ivoiriennes, les réceptionnaires
sont des professionnels. Ils vont travailler conjointement avec leurs
assureurs.
§2 L'action de l'assureur
Une fois que l'assuré prouve à l'assureur
l'existence du litige, objet du contrat, c'est à l'assureur de
dédommager la victime et de prendre en charge le litige. S'il
évoque une exclusion de la garantie, ce sera à lui de prouver
l'existence de cette exclusion.
Outre la représentation de son assuré devant
les tribunaux ou devant les chambres arbitrales, l'assureur agit souvent
à un stade préliminaire lors de la découverte du dommage
et même avant. Qu'il soit assureur de la marchandise ou assureur du
transporteur, il donne toujours des recommandations précises sur la
façon d'éviter les litiges; les assurés peuvent lui
demander conseil. Il est débiteur d'une obligation de conseil et
d'information envers son client.
Lors de la découverte d'avaries et plus
particulièrement lorsqu'il s'agit de dommages conséquents,
l'assuré doit avertir son assureur pour préserver ses droits et
pour que l'assureur puisse prendre toutes mesures nécessaires le plus
rapidement possible.
L'assureur peut envoyer un expert sur place afin d'engager
une procédure de saisie conservatoire ou encore pour former une plainte
contre le responsable potentiel (généralement le
transporteur/armateur du navire est le premier visé, parce que le plus
facilement identifiable et c'est la partie la plus solvable). Cela lui permet
de déceler s'il y a une faute de la part de son assuré, ou si une
exclusion prévue dans la police s'applique en espèce.
Il aide son client dans certaines démarches
procédurales, ou il les effectue lui-même par l'effet de la
subrogation des droits de l'assuré en sa faveur après le paiement
de l'indemnité d'assurance. En effet, la mise en oeuvre de la
responsabilité obéit à des règles
spécifiques au droit maritime que des professionnels se doivent de
maîtriser afin d'exercer correctement leur travail.
CHAPITRE III :
LA MISE EN OEUVRE DE LA
RESPONSABILITE
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il faut d'abord
déterminer le tribunal compétent, pour ensuite se pencher sur la
preuve du dommage et sur les modalités de prescription de l'action.