On déterminera de quel type d'affrètement il est
question, ensuite on verra les clauses relatives au transport de la banane.
§1 : Les types
d'affrètement
Les navires partant de la Côte d'Ivoire en direction de
l'Europe, sont sujet à une cascade d'affrètement au voyage.
Dans le contrat d'affrètement, l'armateur
(fréteur dans ce cas) met à la disposition d'un opérateur
économique (marchand) ou d'un autre armateur (affréteur) un
navire pour accomplir un voyage dans les conditions fixées par la
charte-partie, ou pour un temps déterminé (affrètement
à temps). Le contrat d'affrètement est appelé
charte-partie. C'est donc un contrat de louage des choses entre le
fréteur (le propriétaire) et l'affréteur (le locataire).
L'affréteur paie un fret (rémunération) au
fréteur.
On distingue l'affrètement au voyage ( le
fréteur met à disposition de l'affréteur tout ou partie du
navire en vue d'accomplir un ou plusieurs voyages déterminés),
l'affrètement à temps ( le fréteur met à la
disposition de l'affréteur un navire armé pour un temps
déterminé) et l'affrètement coque-nue ( le fréteur
met à la disposition de l'affréteur un navire sans armement ni
équipage pour un temps déterminé).
En l'espèce, les armateurs de navires donnent ceux-ci en
affrètement au voyage à Great White Great pour le compte de
Chiquita et à Dole Express Line pour le compte de Dole. Ceux-ci vont
donner ces navires en affrètement aux planteurs. En fait, ce
schéma s'explique car les planteurs n'ont pas en général,
de connaissances professionnelles dans le secteur maritime, de la
nécessité du groupage des marchandises notamment des bananes
issues des différentes plantations.
Il en résulte plusieurs charte-parties pour le
même voyage. Cependant, il faut préciser que depuis trois ans
environ, l'affrètement à temps est aussi utilisé dans la
première relation entre l'armateur et l'affréteur principal, mais
on n'en parlera pas car cette situation est assez récente pour avoir les
illustrations juridiques appropriées. Cela ne change rien aux choses,
les recours étant effectués par les chargeurs contre l'armateur
sur la base du connaissement ou contre l'affréteur principal sur la base
de la charte partie au voyage qui les lie.
L'armateur et l'affréteur principal vont devoir
collaborer pour tenter de résoudre le litige. Les charte-parties
utilisées sont des contrats types. Elles sont élaborées
par un organisme appelé BIMCO (Baltic International Maritime
Conference), pour les affrètements au voyage. Ce document à
été annexé pour son adoption au transport des bananes.
Propriétaire du navire ou amateur
Connaissements
Doc 29 - Schéma de la chaîne de
contrats
DOLE
SOUTHEAST
(V/C) ou (COA)
DEL MONTE
SCB
Le premier affrètement au voyage est conclu entre le
propriétaire disposant du cargo et les deux affréteurs Great
White Fleet et Dole Express Line travaillant respectivement pour le compte de
Chiquita et de Dole. Les sous-affréteurs sont la SCB et la CDBCI.
Le second affrètement peut se faire sous le couvert
d'une charte-partie au voyage, mais également sur la base d'un simple
contrat d'affrètement (COA) qui est un document plus simple. Il est
utilisé lors de relations commerciales fréquentes.
§2 Clauses spécifiques au transport
des bananes ivoiriennes
De part sa fragilité et sa spécificité,
la banane doit faire l'objet d'une attention particulière, au cours de
son transport. En plus de la conjoncture économique, il a fallu
organiser la rotation des navires pour remplir les quotas annuels
autorisés sans toutefois les dépasser.
On retrouvera dans ces chartes-parties des clauses
spécifiques pour le transport technique des bananes et des clauses
relatives à la programmation des navires. Il faut également
évoquer les clauses qui règlent les modalités concernant
le fret.
On prendra pour exemple la première charte-partie
conclue entre l'armateur et l'affréteur principal. On mettra l'accent
sur les voyages effectués vers la Méditerranée, la
quantité transportée étant plus importante que vers le
Nord.
1- Clauses relatives à la technique de
transport des bananes
Ces différentes clauses spécifient le type de
navire et désignent la température à respecter au cours du
transport.
a- Exigences relatives au
navire
Le navire peut être de trois tailles différentes :
Taille A, B, ou C.
Cela peut aller du navire de 300.000 CFT (cubic feet)
à un navire d'environ 400.000 CFT. Le choix est fait en fonction de la
qualité de marchandises à charger.
Le navire désigné ne doit pas avoir plus de dix
ans et doit être un navire bananier de première classe. Cependant,
le navire peut être plus vieux si l'affréteur donne son
agrément. L'affréteur ne doit pas refuser le navire sans motif
valable, même si le navire à plus de dix ans mais satisfait aux
critères de qualités requis.
Il doit y avoir au minimum 80 changements d'air (à ne
pas confondre avec le renouvellement total d'air qui doit avoir lieu deux
à quatre fois par heure quand les cales sont vides). Le navire doit
être équipé d'un système de contrôle de
température automatique dans chaque compartiment. Il doit être
certifié et classé par la Lloyds ou une société
équivalente. La classe du navire doit être la meilleure et les
installations frigorifiques au plus haut niveau (RMC).
Tous les ponts doivent être équipés de
caillebotis et le navire doit pouvoir transporter un chargement complet de
palettes ou de cartons. Les ponts doivent avoir au minimum 2.2m de hauteur et
le navire doit pouvoir atteindre la vitesse de 18 noeuds pour effectuer le
voyage en 10 jours.
Toutes ces particularités techniques auront
véritablement leur importance en cas de litige et évidemment en
cas de problème pendant le transport (défaillance du
système de réfrigération et autres).
b- Exigences relatives aux
fruits
En première page de la charte-partie, une case est
réservée à la description de la marchandise à
transporter. Il est expressément spécifié qu'il s'agit de
bananes palettisées ou en cartons.
Les cales du navire doivent être nettoyées et
sans odeurs. Elles doivent être réfrigérées à
+7.8° C, 48 heures avant le début du chargement. Les documents
récapitulatifs de la température des cales et de la pulpe doivent
être envoyés régulièrement à
l'affréteur pendant la traversée ainsi que la vitesse du navire
et de son ETA* au prochain port.
Il est prévu que les marchandises soient
transportées en palettisées, en cartons, ou en conteneurs
chargés en ponté. Les clauses prévoient que le chargeur ou
l'affréteur donne par
écrit les instructions relatives à la
température avant tout chargement, mais également toutes
précautions ou tous conseils concernant la nature de la marchandise et
des équipements adaptés au transport en question.
2- Clauses relatives à la programmation des
navires
Comme on l'a précédemment expliqué, les
marchandises sont regroupées dans le port et les chargeurs s'accordent
pour expédier les bananes avec le même navire, afin de baisser les
coût du transport ; par conséquent il a fallu programmer la
rotation des navires afin d'avoir constamment un navire par semaine au moins au
port de chargement.
En Côte d'Ivoire des efforts d'investissements ont
été entrepris par l'Etat, par les producteurs et par l'UE de 1993
à nos jours, ce qui a permis une augmentation de la production des
bananes, la création du nouveau terminal fruitier et autres. Alors le
trafic maritime s'est intensifié dans le domaine : on est passé
d'un à deux départ par semaine vers l'Europe, soit 120 rotations
de navires bananiers par an.
Tous les lundis, l'armateur du navire adresse la position de
celui-ci. Les huit navires prévus sont programmés de façon
à effectuer une rotation continue.
S'agissant d'un affrètement au voyage, le contrat doit
prévoir le nombre de voyage. La charte-partie est conclue pour un an. Il
faut que 52 voyages soient effectués au minimum.
Le contrat prend effet la première semaine de
l'année. En l'espèce, il est prévu deux voyages par
semaine. Chaque voyage commence le mardi matin au premier "shift",
c'est à dire dès la reprise du travail par la première
équipe du matin.
L'affréteur doit informer 28 jours à l'avance du
choix de la taille de son navire. Ce choix est fait en fonction de la
quantité de marchandises prévue par les différents
chargeurs. L'ETA est donné 48 heures avant le début du chargement
et la coupe des bananes est organisée en fonction de celui-ci. Le
chargement commence le mardi à 7H00 environ, si la NOR (Notice of
Readiness), ce qui signifie le moment où le navire est prêt
à charger est donnée aux chargeurs un jour avant, pendant les
heures de bureau. Le chargement dure
généralement jusqu'à la nuit du jeudi et
le navire quitte le port d'Abidjan le lendemain au matin. Le rituel est le
même pour le second navire.
Il est prévu dans le contrat d'affrètement que le
navire peut transporter lors de son retour d'Europe, du matériel
nécessaire à la culture ou au transport de la banane.
3- Clauses relatives au fret
Le fret, son paiement et son calcul sont réglés
par la charte-partie mais aussi par le connaissement qui concerne le voyage. Le
montant du fret y est expressément prévu.
Il varie selon la taille du navire, la quantité de la
marchandise et le port de déchargement.
On ne pourra en dire plus, ces informations devant rester
confidentielles en raison de la concurrence.
Pour ce qui est du moment, des modalités de paiement,
la charte-partie une fois encore le précise. Le transporteur
désigne une banque auprès de laquelle l'affréteur effectue
le paiement. Cette désignation doit être faite avant la
répartition de la marchandise au premier port de déchargement
(before breaking bulk at lst discharge port).
La créance du fret nait de la signature des
connaissements. Elle est immuable et non remboursable et elle est due
même si la marchandise est perdue lors du voyage (freight to be
deamed earned on signing B/L discountless and non-returnable ship and /or cargo
lost or not lost).
La charte-partie fait aussi référence au
paiement des coûts de chargements et déchargements. Dans ces
contrats, on retrouve un terme fréquemment utilisé par les
transporteurs maritimes; il s'agit de la clause FIOS (Free In and Out
Stowed)' ce qui signifie que la prise en charge des
marchandises par le transporteur maritime débute au moment où les
marchandises sont à bord et se termine lors du déchargement.
Il faut retenir que cette fameuse clause est
interprétée différemment selon que l'on se place sur le
plan du Droit français ou du Droit anglais. En effet, pour le juriste
anglais, cette clause détermine la cessation des risques et de la
responsabilité du transporteur; pour les
anglo-saxons, la responsabilité s'arrête
dès l'ouverture des panneaux de cales, c'est à dire bien avant le
déchargement. Alors l'arrimage ne sera plus sous la
responsabilité du transporteur. Cependant dans la législation
française, la jurisprudence dissocie la cessation des risques, de la
prise en charge financière du chargement et du déchargement.
Dans la charte-partie habituellement utilisée en
Côte d'Ivoire, la clause FIOS est suivie des termes
"dunnaged' lashed and secured" , ce qui veut dire que le
transporteur ne supporte la prise en charge financière des marchandises
qu'après qu'elles soient arrimées correctement et
définitivement pour le voyage. Son rôle au chargement et au
déchargement est donc réduit à son minimum. Mais celui-ci,
est responsable jusqu'à la livraison des marchandises.
Les connaissements émis vont aussi porter sur les
caractéristiques propres au transport de la banane entre la Côte
d'Ivoire et l'Europe.