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Le transport international de fruits sous temperature dirigée: Cas du transport par voie maritime de la banane de Côte d'Ivoire vers l'Europe

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par Stéphane DIE KOUADIO
ESC Lille - Mastère Spécialisé 2005
  

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Section 2 : Préparation au transport des bananes

La seconde phase du transport des bananes se déroulera à l'intérieur du navire. Il faut dans un premier temps préparer ces cales avant le chargement de la marchandise (§1), se qui requiert des techniques spécifiques (§2) et une maîtrise de la température ambiante (§3).

§1 Préparation des cales du navire avant le chargement des bananes

Le transport est une "finalité" qui englobe une multitude d'opérations, toutes aussi importantes les unes que les autres.

La préparation des cales se fait en plusieurs phases :

· Il faut d'abord nettoyer les cales et les caillebotis pour ensuite pré-réfrigérer. Le nettoyage consiste en un dépoussiérage efficace, car la poussière qui s'humidifie durant le transport se transforme en moisissure, ce qui est un facteur de contamination du chargement. Les cales sont ensuite lavées à l'aide de puissants appareils d'eau sous pression.

· L'étape suivante est la désinfection et l'élimination des odeurs dans les cales. En effet, les bananes absorbent facilement les odeurs persistantes restant dans les cales. Le sol des navires bananiers en général est recouvert d'un plancher en bois parsemé de petits trous; cela pour mieux répartir la ventilation. Ce système est appelé caillebotis (grating deck). Le nettoyage est encore plus minutieux dans les navires avec des caillebotis en aluminium.

Il faut pré-réfrigérer les cales lorsqu'elles sont sèches. Cela pour s'assurer du bon fonctionnement des installations frigorifiques et surtout pour accueillir les fruits à la bonne température.

Généralement, les instructions données par le chargeur prévoient la période pré réfrigérée; au cas où elles ne prévoient rien, certains armateurs conseillent de tester les installations avant tout chargement au moins 24 heures à l'avance. Il faut vérifier que la température dans la cale avant le chargement ne soit pas inférieure à +8°c, sinon le fruit pourrait être endommagé par le phénomène de "chilling", qui est le givrage ou le gel de la pulpe du fruit, ce qui rend certainement les fruits impropres à la commercialisation. Il faut aussi que la température de pré-réfrigération soit inférieure à celle qui sera de rigueur lors du transport, car lors de l'ouverture des cales à Abidjan, la température extérieure reste très élevée.


· La troisième phase consiste au chargement des fruits dans les cales du navire.

Il est important de se pencher sur le problème du conditionnement des bananes. Plusieurs techniques sont actuellement utilisées avec chacune leurs avantages et leurs inconvénients. La technique d'arrimage du chargement est déterminante du bon état général de ce dernier à l'arrivée au port de débarquement.

§2 Le chargement et l'arrimage des bananes

De prime abord, il est nécessaire d'effectuer un contrôle minutieux de la cargaison à quai, afin d'éliminer tout régime de bananes ayant une maturation trop avancée, car celui-ci pourrait contaminer toute la marchandise au cours du voyage.

Les bananes en général peuvent être transportées de trois façons différentes :

En effet, elles peuvent être transportées soit en vrac avec néanmoins leurs emballages cartons, elles peuvent être palettisées (la palette est un accessoire destiné à rationaliser la manutention' le stockage et le transport des marchandises. Sa forme permet d'utiliser un chariot transpalette lors des manipulations) ou conteneurisées (sachant que le conteneur ou container en anglais est une caisse métallique en forme de parallélépipède' conçue pour le transport de marchandises).

En ce qui concerne la Côte d'Ivoire, depuis peu, les bananes sont palettisées.

Les palettes ont les dimensions aux normes européennes. Elles sont initialement construites en bois, mais aujourd'hui on en trouve en matières plastiques ou avec des matériaux de récupération (copeaux de bois compressé...).

Le type de palette utilisé dans le transport de la banane ivoirienne est la "palette Europe ou EUR PAL", c'est par ailleurs le type de palette le plus utilisé dans les échanges commerciaux avec l'Europe. Celles-ci peuvent contenir 48 cartons de bananes qui pèsent environ 18.5 kg net.

La manutention est plus aisée avec ce type de conditionnement, cela évite le maniement intempestif des cartons. Lorsque les bananes étaient transportées en vrac, celles-ci étaient directement exposées aux "coups", ce qui occasionnait évidemment des pertes considérables.

Les palettes sont améliorées, et actuellement des renforts latéraux facilitent l'empilement des cartons.

Doc 24 - Palettes de fruits en cales d'un navire polytherme (1) et un exemple de palette (2)

Les opérations de chargement et d'arrimage à quai incombent au transporteur qui doit les exécuter de façon "appropriée et soignée"(art 38 Décret du 31décembre 1966). L'obligation est impérative et les opérations sont effectuées sous sa responsabilité exclusive.

Le capitaine du navire doit veiller à l'état de navigabilité de son bâtiment, au chargement, au bon arrimage et à la préservation de la marchandise. Il élabore le plan de chargement et s'assure de sa bonne réalisation.

Le chargement est l'opération qui consiste à mettre la marchandise à bord du navire.

La mauvaise conception du chargement constitue alors une faute commerciale de l'armateur ou de son représentant qui est le capitaine.

L'arrimage est l'opération de répartition des marchandises à bord du navire en fonction de leurs poids, de leurs destinations; cet acte fait partie des obligations du transporteur.

Le transporteur doit porter une attention particulière aux marchandises, doit apporter des soins ordinaires conformément à la convention des parties. Pour le transport conteneurisé des bananes, le transporteur doit s'assurer que la température, le renouvellement d'air dans le conteneur sont conformes aux instructions données par le chargeur.

D'autre par, si le transporteur ne s'estime pas à même de remplir ses obligations, il doit refuser le transport. Par exemple, il commet une faute s'il s'abstient de mettre en bon état de marche les cales frigorifiques de son navire (Cour Appel d'Aix-en-Provence, 31 oct. 1978, Fabre/Cie des Bananes).

Il appartient au transporteur et non à l'expéditeur, de fournir des câbles électriques afin d'assurer le branchement sur le circuit électrique, des conteneurs frigorifiques montés à bord du navire.

En transport maritime et comme dans tous les autres modes de transport, l'emballage et le conditionnement incombent à l'expéditeur (chargeur).

La défectuosité de l'emballage et du conditionnement constitue au regard de la loi française et de la Convention de Bruxelles une faute du chargeur susceptible d'exonérer le transporteur de sa responsabilité. Le problème est qu'il n'existe pas, sauf pour le transport de marchandises dangereuses, de réglementation particulière précisant les caractéristiques des emballages maritimes et du conditionnement intérieur.

Pour le transport des bananes, les cartons et palettes doivent être suffisamment robustes afin de supporter l'effet d'écrasement lors des manutentions portuaires et des mouvements du navire, etc...

"Les usages commerciaux constituent un critère essentiel pour l'appréciation de l'adéquation de l'emballage. Par conséquent, le transporteur ne peut invoquer une insuffisance d'emballage lorsqu'il est établi que celui-ci est conforme aux usages du commerce", selon le Lamy Transport (édit. 2006), c'est dire que le transporteur peut invoquer l'insuffisance d'emballage, mais doit prouver que les avaries par exemple sont liées au défaut d'emballage, par conséquent il y a une relation de cause à effet.

1- La présentation et la prise en charge de la marchandise

Les marchandises doivent être correctement emballées, marquées, arrimées, avant d'être remises par le chargeur, en temps et lieux fixés par les parties. (ex: à quai, le long du navire X, un jour avant le début des opérations de chargement).

En cas de non-respect de cette obligation, le chargeur devra payer une indemnité correspondant au montant du fret convenu. Cependant, il faut veiller à ne pas confondre contrat de transport et prise en charge de la marchandise. (Rodière R. Affrètement et transport, tome II, n°504). Le contrat de transport, de nature consensuelle, se forme dès que les parties sont d'accord sur les modalités de l'opération. Mais le transporteur n'est pas responsable des marchandises puisqu'elles ne sont pas encore en sa possession. La prise en charge est l'acte par lequel le transporteur devient responsable de la marchandise, aussi bien sur le plan physique que juridique.

En pratique, le transporteur retarde au maximum le moment de la prise en charge des marchandises. C'est là qu'interviennent les "liner terms" qui définissent le moment de la prise en charge. Le plus fréquemment utilisé est le "sous palan", qui a comme conséquence que toute la phase "ante palan" est exclue du contrat de transport, à savoir, les dommages subis par la marchandise pendant leur séjour à terre.

La prise en charge des marchandises est attestée par un document qui est écrit, c'est le "mate's receipt" ou le "board receipt" qui fait office de reçu de celles-ci.

2- Les opérations de chargement de la marchandise

Après avoir choisi le mode de conditionnement le plus approprié au navire utilisé, il faut charger la cargaison de façon à ce que la réfrigération soit optimale ; c'est à dire qu'il faut favoriser la circulation de l'air insufflé dans les cales. Il faut alors éviter les espaces superflus entre les palettes afin que l'air se propage de façon équitable dans toute la cale et ventile tous les cartons.

L'utilisation de sacs gonflables appelés "air-bag" permet de combler ces passages et en même temps évite à la marchandise d'être endommagée durant le transport en la maintenant en place.

Aux termes de l'article 38 du décret de 1966, les différentes opérations de chargement et de d'arrimage à bord du navire incombent au transporteur, qui doit les exécuter de façon "appropriée et soignée". L'obligation est impérative et les opérations de manutention sont effectuées sous sa responsabilité exclusive.

Les bananes sont de plus en plus stockées dans des conteneurs réfrigérés pour le voyage vers l'Europe. Le conteneur présente l'avantage de protéger efficacement la marchandise.

Cependant, lors de l'empotage, les marchandises doivent être correctement arrimées et le conteneur bien équilibré, afin d'éviter tout mouvement de la marchandise pendant les différents efforts subis par le conteneur, lors de la manutention ou même du transport

principal. Les soins apportés lors de l'empotage du conteneur tant au niveau du calage que de la disposition interne des marchandises sont d'une grande importance. Le défaut d'arrimage constitue une faute du chargeur, dans le cas où cette opération lui incombe. Le transporteur peut être responsable des dommages à la marchandise, s'ils sont liés à la défectuosité du conteneur, lui-même fourni par ses soins.

En outre, il faut noter que le transporteur maritime doit apporter lors du déchargement des marchandises au port d'arrivée, les mêmes soins dispensés pendant son chargement.

Il répond également des dommages occasionnés pendant le déchargement.

Une fois l'arrimage terminé, le navire est fin prêt pour le départ. Cependant, il faut que la température ambiante au niveau des cales soit maîtrisée pendant le voyage.

Doc 25 -- Chargement de navires au port d'Abidjan

§3 Maîtrise de la température

Le plus difficile durant le trajet, est de ne pas laisser mûrir le fruit avant son arrivée au port de destination. Une fois déchargées, les bananes sont transportées dans des mûrisseries spécialisées (ex: la mûrisserie Cavaillon pour les bananes déchargées à Port Vendres).

Des instructions sont données par le chargeur ou par le producteur au transporteur comme on l'a déjà expliqué. Chaque chargeur donne les instructions qui lui sont propres au transporteur, par conséquent, les techniques de ventilation peuvent varier selon les expériences de chacun. Néanmoins toutes les instructions des différents chargeurs en Côte d'Ivoire sont pratiquement identiques, car la plupart des plantations produisent la même variété de bananes.

Ces diverses instructions sont appelées "instruction of carriage" en anglais.

Les instructions de la SCB22 et de la CDBCI en Côte d'Ivoire, prévoient un refroidissement préalable des cales à environ +8°c, et une température de transport de +13.3°c. Elles précisent qu'après le chargement de chaque cale la ventilation doit être poussée à son maximum pour atteindre la température de transport souhaitée le plus rapidement possible (24 à 36 heures).

Il faut que les ouvertures d'air frais restent fermées pendant les 24 premières heures après le chargement, ensuite que celles-ci soient grandement ouvertes tout en prenant garde que cela n'affecte pas la température établie dans les cales. Cette manipulation est effectuée pour faire baisser la température élevée des fruits, du fait de la chaleur du milieu tropical qui oscille en général, entre 28 et 32°c. Cette température est appelée le "fieldheat".

Au cas où un mûrissement précoce est remarqué dans le carton ou à un endroit précis du chargement, il faut immédiatement retirer les fruits en question de la cale si cela est possible, car à ce niveau les bananes ne sont pas toujours accessibles.

Les fruits mûrissant produisent de l'éthylène*qui va contaminer le reste de la marchandise, l'on risque alors la perte totale de la cargaison à l'arrivée. Techniquement, il ne faut pas que la concentration d'éthylène dépasse 0.8 parts par million (concentration normale : 0.5 ppm).

La mesure de ce gaz pose en pratique de nombreuses difficultés car aucun moyen de contrôle efficace n'est disponible aujourd'hui.

Le dioxyde de carbone CO2 est aussi un gaz présent lors du transport des bananes. Il est dû à la "transpiration des fruits". Il produit les mêmes effets sur les fruits que l'éthylène. Pour contrôler sa concentration, on augmente la quantité d'air frais dans les cales en élevant la vitesse de ventilation.

22 Société de Culture Bananière (filiale de la Cie Fruitière, dont la multinationale DOLE possède des parts).

Lorsque la température est mal maîtrisée et baisse de façon excessive, il peut y avoir le phénomène de givrage. Il faut donc une attention particulière parce que dès les +12.8°c, ce processus peut intervenir. On remarque que lorsque la banane est gelée, sa peau se teinte d'un voile gris qui ne disparaît plus malgré un réajustement de la température (under peel decoloration). Aussi cette avarie peut provenir de l'arrosage trop abondant lors de la culture de la banane. Il y a de ce fait des preuves qui peuvent être établies lorsque la responsabilité du transporteur est engagée, sauf en cas de pluies abondantes pendant la période de mûrissement du fruit sur le bananier. Dans le cas d'espèce, une enquête doit être diligentée.

Les prises de températures sont à effectuer régulièrement pendant le transport (environ toutes les 4 heures). Il faut vérifier la température de l'air à la source (air delivery) et à la sortie (return air). Pour se faire des thermomètres sondeurs sont installés dans les cales à plusieurs endroits stratégiques. Ceux-ci sont fixés sur les fruits pour prendre la température de la pulpe, ce qui facilite et précise les contrôles. Malheureusement tous les navires ne disposent pas d'une telle technologie.

Doc 26 -- Machine principale d'un système de réfrigération d'un navire "bananier"

RUBRIQUES

2001

2002

2003

Var%

PORT DE
COMMERCE

5 424

5 954

5 489

-7,8

Nbre d'entrées

2 707

2 947

2 746

- 6,8

Nbre de sorties

2 717

3 007

2 743

- 8,8

PORT DE
PECHE

1 327

1 243

1 247

+ 0,3

Nbre d'entrées

680

628

633

+ 0,6

Nbre de sorties

647

614

614

0

TOTAL
TRAFIC PAA

6 751

7 197

6 736

- 6,4

Nbre d'entrées

3 387

3 576

3 379

- 5,5

Nbre de sorties

3 364

3 621

3 357

- 7,3

 

Doc 27 -- Trafic des navires du Port d'Abidjan (en nombre) (Source PAA)

En somme, on dira que le transporteur doit avoir à sa disposition les moyens nécessaires et appropriés pour un transport de qualité des bananes ; cela veut dire que ce dernier doit avoir un navire bien équipé et construit dans le but de transporter des bananes uniquement (navire bananier polytherme), c'est un navire frigorifique qui est aussi appelé "reefer", contraction de l'anglais "refrigerated ships".

CHAPITRE II :
LES CARACTERISTIQUES TECHNIQUES DES NAVIRES BANANIERS

Analysons maintenant les principales caractéristiques de ces cargos dits "bananiers". Spécialement conçus pour recevoir des fruits dont la température doit être régulée, ces navires se distinguent des navires conventionnels ou porte-conteneurs.

Premièrement on présentera les différents types de navires affectés au transport des bananes, ainsi que leur classification qui fait justement l'objet d'une réglementation spécifique et en second lieu on parlera du mécanisme de température dirigée.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci