Conclusion
Dans la littérature théorique, les
mécanismes de transmission des impulsions financières vers la
sphère réelle sont complexes du fait de la relation ambiguë
entre les taux d'intérêt et les taux d'épargne. Ainsi, pour
stimuler les investissements des entreprises, les partisans de
libéralisation financière insistaient sur le renforcement du
rôle de secteur financier en matière d'allocation et affectation
des ressources financières par la libéralisation et le maintien
des taux d'intérêt sur l'épargne à des niveaux
élevés.
Le volet de critiques adressées à la
libéralisation financière porte en particulier sur l'effet
supposé positif des taux d'intérêt sur l'épargne et
l'investissement ainsi que les effets des interventions de l'Etat dans
l'économie; les néostructuralistes fondent leurs critiques sur le
rôle concurrentiel que joue le secteur informel dans la formation des
mécanismes d'ajustement : la hausse des taux d'intérêt sur
le marché officiel rend le marché informel plus compétitif
et donc substituable. Dans l'optique post keynésienne, dans la mesure
où l'épargne est une fuite, la hausse des taux
d'intérêt est à l'origine de la dégradation de la
demande effective dans une situation de sous emploi, et la
libéralisation financière ralentira la croissance
économique à court et long terme.
Reste à savoir, comment et dans quel contexte unique,
la libéralisation financière doit-elle s'inscrire pour
développer la sphère financière ? Il est ainsi
nécessaire de tenir compte du contexte financier, légal,
politique et économique du pays dans lequel on se propose d'introduire
ce type de réforme, et les pouvoirs publics ont un rôle à
jouer dans le processus de libéralisation financière.
Chapitre 2 : Libéralisation financière et
investissement des entreprises marocaines
Au Maroc, les choix économiques retenus au
début des années soixante vont placer le secteur privé et
l'impératif de sa promotion au centre des préoccupations des
décideurs publics qui estiment que le développement dépend
de l'émergence d'une classe d'entrepreneurs et de gestionnaires
compétents et de l'édification d'institutions appropriées.
Ce choix ne se démentira pas tout au long des dernières
années, même si les politiques et les moyens mobilisés
à cette fin vont connaître des mutations majeures.
De ce point de vue, on peut distinguer deux grandes
périodes s'étalant pour la première de 1960-62 à
1982 et, pour la seconde à partir de la fin de la décennie 80.
L'élément de discrimination majeur entre ces deux périodes
réside dans le passage d'une politique interventionniste visant à
encourager des secteurs d'activités au détriment d'autres et le
traitement préférentiel du crédit, à une
démarche plus libérale ou l'objectif est le retrait de
l'État de la sphère financière, à travers la
déréglementation, la libéralisation des taux
d'intérêt et la privatisation au profit du secteur
privé.
Nous présenterons dans le premier point, les
caractéristiques du secteur financier marocain avant la
libéralisation financière. Le second point mettra l'accent sur la
période de libéralisation financière poursuivi d'une
brève présentation du climat d'investissement dans le
troisième point. Dans le quatrième point, on essaiera d'aborder
la question de nécessité d'adoption de la politique de
libéralisation financière avant de présenter les
principales incitations à la faveur de financement et
développement des investissements des entreprises marocaines.
2.1 Caractéristiques du secteur financier
marocain avant la libéralisation financière 2.1.1 Les instruments
du contrôle des crédits
Les principaux instruments utilisés par l'Etat pour
contrôler les crédits sont :
- la politique des réserves obligatoires ;
- la politique de l'escompte de BAM (Bank-Al Maghrib) ;
- l'administration des taux d'intérêt ;
· La politique des réserves
obligatoires
L'obligation faite aux banques de déposer
auprès de BAM des réserves obligatoires consiste à
contrôler le besoin de refinancement des banques. Lorsqu'on se situe dans
une situation économique caractérisée par une domination
étatique, généralement le taux des réserves
obligatoires est trop élevé.
Les taux élevés de ces réserves
entraînent une restriction des crédits alloués à
l'économie, à l'exception des crédits
préférentiels accordés aux secteurs prioritaires.
La pratique des taux élevés des réserves
légales influence les taux des dépôts à terme qui se
justifie par le fait que les dépôts à vue ne seront pas
onéreux que ceux à terme qui nécessitent le versement
d'une rémunération de la part des banques à leurs clients.
Ils peuvent donc jouer à la défaveur de financement des
entreprises.
Les réserves légales en pourcentage des
dépôts bancaires ont passé de 7,41% durant la
période 1970-1974 à moins de 3,30% pendant la période
1980-1984, les crédits au secteur privé ont passé
respectivement de 21,41% à 29,84%. L'effet de l'augmentation de ce taux
pendant 1985-1989 à 5,89% a provoqué une diminution des
crédits distribués à 16,88%.
Figure 4 : Evolution des réserves
légales et crédits alloués au secteur privé entre
1970 et 1989
1970-1974 1975-1979 1980-1984 198E-1989
q Réserves
q Crédits au secteur privé
· 13 25 20 15 10 5
Source statistiques : calculs effectués à
partir des statistiques internationales.
· La technique de
réescompte
Elle consiste pour BAM (Bank Al-Maghrib) à acheter des
effets qui lui sont présentés par des banques moyennant un prix
fixé unilatéralement. Elle engendre, contrairement aux
réserves obligatoires, une croissance de la masse monétaire et
peut aussi constituer un taux directeur pour les autres banques commerciales.
L'objectif étant de stimuler le financement des investissements
bénéficiant des encouragements de l'Etat.
Figure 5 : Evolution des taux annuels nominaux sur
les crédits à moven terme
1970 1972 1974 1978 1980 1980 1982 1984 1986 1988 1989
Source statistiques : calculs effectués à
partir des statistiques internationales.
La présence des taux élevés
créditeurs en présence de l'inflation était à
l'origine de ralentissement des niveaux d'investissements. Ainsi, durant la
période 1974-1982, les taux d'intérêt réel
étaient négatifs et devenaient positifs à partir de 1983
(figure 6). Face à cette politique des taux d'intérêt, les
PME-PMI auront plus de difficultés à se financer auprès
des banques, l'alternative est d'accéder à la Bourse des Valeurs
de Casablanca.
Figure 6 : Evolution des taux d'intérêt
(en %)
Années
Taux réel créditeur Taux réel
débiteur
15
|
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10
5
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I BI
1978 '1_79_ 9 ' 980 19
|
|
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|
975 '975
|
|
|
934 1985 1986 1987 1988 1989
|
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-10 -15
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Source : direction des études et des prévisions
financières.
Si on examine l'impact de l'évolution des taux
d'intérêt sur la demande intérieur on fait ressortir
l'importance des effets de substitution dans le comportement des ménages
et des entreprises. La baisse des taux d'intérêt a réduit
l'épargne des ménages à court terme et leur consommation
aura tendance à augmenter. Toutefois, le rythme de progression de la
consommation est de 3 à 4 fois supérieur au
taux de ralentissement de la progression de l'épargne et 3 à 2
fois supérieur au rythme de progression du revenu disponible.
La rigidité des taux d'intérêt permet
d'identifier l'une des caractéristiques de la répression
financière, à côté des taux de réserves
obligatoires et de la politique d'encadrement des crédits.
· La politique d'encadrement des
crédits
L'institution de la politique d'encadrement des
crédits en 1969, avait pour objectif de permettre aux autorités
publiques de contrôler quantitativement les crédits à
travers les taux d'intérêt. De ce fait, le volume des
crédits accordés par les banques demeurera faible et limite la
concurrence au niveau du secteur financier. Pour renforcer leurs positions,
elles devront penser aux nouveaux services en matière de création
de nouveaux moyens de paiement et choix des politiques de
rémunérations pour l'ensemble des agents économiques.
2.1.2 Indicateurs de répression contraignants
au fmancement des investissements des entreprises
Face à ces instruments de répression
financière (encadrement des crédits, réserves
obligatoires...) qui a marqué une certaine période dans
l'histoire économique du Maroc, les investisseurs marocains de secteur
privé en particulier, n'ont guère profité des
crédits alloués par le secteur bancaire. Ainsi, durant la
période 1975-1979, les crédits ont connu une progression de plus
de 6 points de pourcentage par rapport à la période 1970-1974.
Ils ont ensuite enregistré une tendance ascendante pour atteindre 29,84%
puis chutent durant 19851989 (figure 7). Ces évolutions volatiles des
crédits sont expliquées par les variations des taux
d'intérêts, des taux d'épargne et des taux de
réserves obligatoires.
Figure 7 : Evolution des crédits au secteur
privé en pourcentage de PIB entre 1970 et 1989
1985-1989 1980-1984 1975-1979 1970-1974
Source : BAM.
L'impact des variations des crédits alloués au
secteur privé a entraîné des tendances variées des
niveaux d'investissement brut. Sur toutes les périodes, les deux
observations ont des comportements identiques. Pendant la période
1980-1985, le taux d'investissement brut a enregistré une augmentation
de moins de 6 points de pourcentage.
Suite aux mesures politiques gouvernementales (imposition des
réserves obligatoires), les crédits au secteur privé
diminuent et influent négativement le taux d'investissement avec une
chute de plus de 2 points de pourcentage par rapport à l'année
1980, sachant qu'il était à 22% la même année.
Du côté épargne, entre 1980 et 1986 les
taux d'épargne ont enregistré des niveaux négatifs avec un
record de -1,7% du PM en 1983. Elle s'est redressée de façon
continue suite aux efforts fournis pour assainir les finances de l'Etat, en
particulier dans le cadre du plan d'ajustement structurel (PAS). Les
modifications apportées à la structure des recettes fiscales avec
l'introduction de la TVA, de l'Impôt sur les Sociétés et de
l'Impôt Général sur le Revenu respectivement en 1986, 1987
et 1989 ont, en partie, aidé à amorcer cette inflexion dans le
comportement de l'épargne publique.
Les taux d'investissements, malgré une croissance des
taux d'épargne entre 1977-1983 et 1984-1990, les investissements ont
connu une baisse entre les deux périodes. Passant de 2,98 de
l'épargne totale durant 1977-1983 à 5,03 durant 1984-1990,
l'investissement n'est que de 7,26 et 5,44 durant les mêmes
périodes. La stimulation de l'épargne publique par les
autorités nationales pour réduire le déficit public n'a pu
affecté positivement les investissements, notamment le secteur
privé, et a rendu le marché financier imparfait (ou encore la
présence
de la répression financière). L'équilibre
investissement-épargne n'est pas vérifié durant la
période 1970-1987 (figure 11).
2.1.3 Accès au crédit et environnements
législatif et comptable restrictifs
Sur le plan comptable, le plan comptable est
considéré par les professionnels comme un document très
complexe et inadapté pour les PME-PMI. Les déclarations fiscales
constituées d'un ensemble de documents et pièces jointes et qui
devront être signées par les chefs d'entreprises semblent pour
elles lourdes. Ces déclarations accompagnées d'autres mesures
fiscales peuvent ne pas refléter l'image réelle de l'entreprise.
Les investisseurs jugent que cet ensemble traduit une confusion et mène
à une multitude de problèmes d'information financière.
2.2 Période de libéralisation
fmancière
A la veille de la mise en oeuvre des réformes, le
système financier marocain présentait une structure
segmentée, avec une omniprésence de l'Etat, notamment à
travers les organismes financiers spécialisés, la
prévalence de fortes contraintes réglementaires et une politique
monétaire basée sur les techniques de régulation
quantitative, au moment où les marchés de capitaux
présentaient une taille marginale et un faible degré de
diversification des instruments, les rendant inaptes à assurer un
financement adéquat de l'économie.
Pour pallier ces insuffisances, d'importantes réformes
ont été menées à partir des années 1990, en
vue de doter le Maroc d'un système financier moderne et solide capable
d'assurer une mobilisation efficace de l'épargne et son allocation
efficiente dans le circuit économique. Ainsi, une approche
multidimensionnelle a été adoptée, allant de la
réforme du secteur bancaire et des marchés de capitaux à
celle de la politique monétaire et de changes, en vue d'assurer une plus
grande cohérence des interventions et une meilleure
compétitivité du système financier marocain.
Ces réformes ont permis le renforcement de la
stabilité macroéconomique d'ensemble, l'amélioration
continue de l'environnement des affaires et l'ouverture commerciale,
conjuguée à la libéralisation des secteurs productifs.
Le système financier a été placé
au centre de cette dynamique de réformes, compte tenu de son rôle
clef en matière de renforcement de la croissance et
d'accélération du processus de convergence.
Depuis la mise en place du Programme d'Ajustement Structurel,
la libéralisation financière suivie par le Maroc était
longue. L'ensemble des réformes entreprises n'a pas respecté
l'ordre
théorique de libéralisation des
opérations financières. Elle a durée plus de 20 ans. Le
désengagement de l'Etat et la déréglementation des taux
d'intérêt ont été progressifs et manifeste ainsi
d'une part la volonté des autorités de se désengager du
système financier et l'adoption de la réglementation prudentielle
d'autre part.
Le bilan de la réforme du secteur bancaire montre
l'impact positif des mesures prises par les autorités publiques. En
effet, sur la période 2000-2006, les dépôts auprès
du système bancaire ont enregistré une nette progression en
passant de 21,6 MM$ en 2000 à 51,4 MM$ en 2006 avec + 137%.
2.2.1 La politique de libéralisation des taux
d'intérêt
Historiquement, depuis l'indépendance de l'Etat, les
niveaux d'épargne intérieure demeureraient insuffisants pour
financer les investissements des entreprises. L'administration des taux a rendu
la politique de financement plus rigide car les taux débiteurs
étaient fixés sous forme de fourchette hormis les crédits
prioritaires ou spéciaux qui étaient fixes et les taux
d'intérêt pratiqués par les banques correspondaient
généralement à la limite de la fourchette. De plus, les
taux de commissions appliqués par ces dernières étaient
réglementés par l'Etat. Ces mesures, à un certain moment
ont rendu les taux d'intérêt réels négatifs.
· Les taux d'intérêt
créditeurs
La libéralisation progressive des taux
d'intérêt concernait au début les taux sur les
dépôts. Les institutions financières ont dû respecter
des taux planchers : les taux minimums de rémunération des
comptes à terme sont fixés à 8,5% pour les
dépôts de 3 mois et à 12% pour les dépôts de
12 mois.
Ce n'est qu'au début des années 90 que la
libéralisation des taux créditeurs était remarquable, car
les pouvoirs publics ont libéralisé totalement les taux relatifs
aux rémunérations des dépôts à terme
supérieurs à 3 mois, tandis que le taux minimum fixe s'est
appliqué sur les dépôts inférieurs à 3
mois.
La libéralisation de tous les taux applicables aux
différentes catégories de dépôts à
l'exception du taux sur carnet a été décidée en
1992.
· Les taux d'intérêt
débiteurs
La libéralisation des taux débiteurs s'est
effectuée dans un environnement de prudence, car les autorités
monétaires les avaient plafonné pour prévenir une
augmentation trop importante qui pourrait être dommageable aux
entreprises. Ainsi, entre 1991 et 1994, le taux de référence
débiteur était déterminé sur la base des taux
pondérés des dépôts à terme à 6 et 12
mois. En
1994, les autorités les ont remplacé par des taux
de base bancaire calculé par BAM. Les taux débiteurs moyens sont
passés de 15,8% au premier semestre 1993 à 11,5% en avril 1995.
Puisque la libéralisation n'a été achevée qu'en
1996, les institutions financières pouvaient déterminer librement
les taux d'intérêt (fixes ou variables) à l'exception de
ceux des crédits à très court terme, dont la durée
ne dépasse pas une année qui étaient
rémunérés à un taux fixe. Les taux de
référence ont augmenté de 8,5% à 9,75% et 10,5%
respectivement pour les crédits à court et moyen terme et
à 11,25% pour les crédits à long terme. Les taux
d'intérêt appliqués par les sociétés de
financement quant à eux ont excédé les 20% comme on peut
le voir au tableau 1. L'impact de ces baisses des taux débiteurs s'est
accompagné par une augmentation des investissements.
Tableaul : Evolution des taux d'intérêt
entre 1993 et 2005
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
Taux des comptes sur livrets de la
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
CEN
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Taux des comptes sur carnet
|
9
|
9
|
8
|
8
|
8
|
6.25
|
6
|
4,48
|
4,72
|
3,42
|
2,95
|
2,35
|
2,28
|
Taux des livrets
|
8,50
|
7
|
7
|
7
|
7
|
6
|
4,75
|
3,30
|
3,75
|
3,50
|
2,36
|
2,10
|
1,50
|
Taux créditeurs
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Taux de dépôts à 6 et 12 mois
|
11,49
|
8,80
|
8,30
|
8,29
|
7,62
|
6,52
|
5,42
|
4,95
|
4,69
|
3,88
|
3,58
|
3,38
|
3,48
|
Taux de dépôts à 6 mois
|
|
|
|
|
|
|
5,05
|
5,05
|
4,52
|
3,59
|
4,77
|
3,29
|
3,29
|
Taux de dépôts à 12 mois
|
|
|
|
|
|
|
5,74
|
5,10
|
4,84
|
4,11
|
5,19
|
3,48
|
3,61
|
Taux de base bancaires
|
|
|
|
|
|
|
7,50
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
Crédit à l'export
|
14
|
12
|
11,50
|
9,75
|
9,25
|
8
|
7,25
|
7,25
|
7,25
|
7,25
|
7,25
|
7
|
7
|
Court terme < 2 ans
|
14
|
12
|
11,50
|
10,50
|
9,50
|
8,25
|
7,75
|
7,75
|
7,75
|
7,25
|
7,25
|
7,25
|
7,25
|
Moyen terme > 2 ans et < 7 ans
|
14
|
13
|
12,50
|
11,25
|
10,25
|
9
|
8,50
|
8,50
|
8,50
|
8,25
|
8,25
|
7,50
|
7,50
|
Long terme > 7 ans
|
|
|
7,70
|
6,52
|
6,74
|
6,74
|
4,67
|
5,35
|
3,23
|
2,94
|
3,16
|
2,39
|
2,40
|
Taux interbancaire
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : BAM.
2.2.2 Des conditions d'octroi des crédits
contraignantes
Les autorités, grâce à la
libéralisation des taux d'intérêt et à la
réduction des emplois obligatoires entreprises dès 1991, ont mis
en place les conditions relativement favorables à une allocation des
ressources plus largement basée sur les mécanismes du
marché.
· Epargne insuffisante et peu
orientée vers les entreprises
Attesté par des statistiques financières, le
système bancaire marocain dans son contexte est en cours
d'évolution. En effet, tant du coté de la captation des
ressources, celui-ci devient concurrentiel que du côté de la
structure de leur actif marqué par une baisse du rendement des
crédits et un recours aux placements financiers progressivement plus
important. Les niveaux de l'épargne financière demeurent faibles
par rapport aux attentes des autorités monétaires. La structure
de l'épargne financière dépend de la gamme des prêts
que les banques proposent. Elle est constitué principalement des avoirs
liquides, des placements à court, moyen et long terme des agents, des
titres d'Organises de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières
(OPCVM). A cela s'ajoute l'épargne institutionnelle à long terme
constituée par les fonds des sociétés de prévoyance
et d'assurance et les titres de sociétés nouvellement
émis.
En effet, l'épargne financière a
enregistré, sur la période 1993-2000, une croissance moyenne de
4,2%, passant de 29 millions de dirhams en 1993 à 30 millions en 2000
avec des fluctuations importantes selon les années. La part de
l'épargne financière dans l'épargne intérieure a
baissé d'une manière sensible en liaison, en partie, avec les
contre-performances enregistrées par les marchés financiers. En
effet, ce ratio est passé de 86,6% en 1994 à 46,2% en 2000. Le
niveau relativement faible de l'année 2000 est imputable,
principalement, à la baisse des placements en avoirs liquides et en
titres d'OPCVM.
L'essentiel de l'épargne financière est
constitué d'avoirs liquides et de placements à court terme, les
placements à moyen terme ne représentent qu'une faible
proportion. Cette situation s'est confortée depuis la mise en place des
OPCVM en 1996. Ainsi, au terme de l'année 2000, près de 66% des
flux des actifs financiers détenus par les agents non financiers
étaient sous forme d'avoirs liquides ou de placement à court
terme contre 52% en 1999 et 40 % en 1998.
Quant à l'épargne de l'Etat, elle a
contribué à une appréciation dans l'épargne
nationale de - 0,8% durant la période 1980-1989 à 17,8% pendant
la période 1990-1995. Au cours de la période 1996-2005, cette
contribution est de moins en moins importante pour ne représenter que
2,2% de l'épargne nationale en 2005.
De 13,5% durant 1980-1989 à 19,1% pendant 1990-1995 et
à 26,4% durant 1996-2005 : ces statistiques nous montrent la part de
l'épargne extérieure dans l'épargne nationale qui s'est
appréciée de 18,5 points entre 1999 et 2005, passant de 16,9%
à 35,4%.
Les placements liquides représentent 80% de
l'épargne financière des agents non financiers marocains (dont
46% pour les seuls avoirs liquides). Du fait du ralentissement de
l'activité, de la réduction des opportunités de placement
et de la morosité de la bourse en 2001 et en 2002, les agents ont
continué à privilégier les placements relativement
liquides et ne comportent que peu de risques de perte en capital
(dépôts à vue et en compte à terme et surtout en
titres émis par les OPCVM obligataires). L'industrie de gestion de
portefeuille fonctionne avec peu de possibilités de diversification. En
effet, environ 90% des actifs gérés par les OPCVM sont investis
dans les bons du Trésor. La part des OPCVM à dominante actions
représente moins de 4% de l'actif net.
Tableau 2: Structure de l'épargne
financière des agents non financiers
Eléments
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
Avoirs liquides
|
43,5
|
42,7
|
43,4
|
44,4
|
45,5
|
46,0
|
Placements à CT
|
29,8
|
28,3
|
27,4
|
27,9
|
28,7
|
25.6
|
Placements à MT
|
3,5
|
3,1
|
2,2
|
1,9
|
1,1
|
1,3
|
Titres OPCVM
|
1,7
|
4,4
|
6,1
|
3,9
|
4,1
|
6,2
|
Epargne institutionnelle
|
21,5
|
21,5
|
20,9
|
21,9
|
20,8
|
21,0
|
Total
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
Total des actifs financiers des agents non financiers
(en milliards de DH)
|
330
|
360
|
397
|
411
|
464
|
502
|
Epargne institutionnelle/PIB
|
22,2
|
22,4
|
24,0
|
25,3
|
25,2
|
26,5
|
|
Source : direction des études et des
prévisions financières.
2.2.3 La politique de désencadrement de
crédit
La réussite de libéralisation financière
ne peut pas se concrétiser si les banques commerciales sont
laissées du côté. Leur participation réside dans le
financement de l'économie par l'adoption d'une série de mesures
incitatives.
Au Maroc, la politique de l'encadrement de crédit a
été mise en place en 1969.
Les mesures financières prises ont
entraîné une forte segmentation du système bancaire avec
une concurrence limitée entre les banques. Ce système
pratiqué par les autorités publiques pénalise les banques
les plus dynamiques et ôte toute initiative au banquier. C'est aussi une
politique qui permet de contrôler la masse monétaire en
circulation.
L'encadrement des crédits a eu des effets
négatifs sur les politiques de financement de l'économie et la
libéralisation des crédits a concerné les crédits
à court terme.
Le Centre Marocain de Conjoncture stipule qu'une grande
partie des crédits alloués par les banques commerciales sont
à court terme (77%). Les crédits à moyen terme sont
seulement de 17% alors que les crédits à long terme sont
estimés à moins de 5%. Cela pose ainsi la question sur le
degré d'implication des banques dans le financement des investissements
des entreprises. Cette faiblesse remarquable de distribution des crédits
est due essentiellement à l'adoption de la politique d'encadrement des
crédits et la faible prise de risque de la part des banques ainsi que la
réglementation imposée aux banques de ne pas fixer une prime de
risque élevée pour prêter à des durées plus
ou moins longue.
2.2.4 Les réserves obligatoires
L'imposition aux banques de détenir obligatoirement
des fonds auprès de BAM constitue l'un des instruments de contrôle
du système financier Les réserves obligatoires sont
constituées de bons du trésor ainsi que d'autres emplois
destinés aux institutions financières spécialisées.
Suite à la levée de l'encadrement du crédit en 1991, le
taux des réserves obligatoires est passé de 15% à 25% en
octobre 1992. L'expansion des concours bancaires en 1991 est de 34% et de 13%
en 1992.
Calendrier de suppression des emplois obligatoires
des banques
Emplois obligatoires
|
1990-1997 : phase de réduction
|
Actuellement
|
Plancher d'effet public (portefeuille minimum de bons du
trésor institué en 1967).
|
35% (1990)
33,5% (janvier 1991)
32% (juillet 1991) 25% (juin 1993) 20% (mai 1995)
10% (septembre 1996)
5% (décembre 1997)
|
Supprimé (juin 1998)
|
Portefeuille des bons de caisse CNCA à 1 an
(institué en 1981 pour stimuler le financement des projets
agricoles).
|
3,5% (avant)
3% 'juillet 1991)
2% (novembre 1991)
|
2%
|
Portefeuille d'effets représentatifs de crédits
à MT réescomptables (institué en 1972
pour encourager le financement de
l'investissement).
|
5,5 (avant)
5% (juillet 1991) 2,5% (juillet (1992)
|
Supprimé (avril 1994)
|
Coefficient d'emploi en crédit aux logements
(portefeuille d'effets représentatifs de crédit à
MT et LT destinés aux logements, institué en
1982).
|
6% (avant)
5% (juillet 1991)
3,75% (juillet 1992) 2,5% (janvier (1993)
|
Supprimé (avril 1994)
|
Coefficient de créances nées sur
l'étranger (institué en 1989).
|
5% (avant)
3% (mars 1992)
|
|
|
Source : Bank Al-Maghrib.
2.2.5 La réglementation prudentielle31
et la supervision bancaire
Les autorités monétaires ont mis en application
depuis le mois de janvier 2000, un nouveau plan comptable pour les banques et
les sociétés de financement. Celui-ci introduit de nouvelles
modalités de publication et de transmission des états de
synthèse et des documents complémentaires à BAM. Les
autorités monétaires ont également procédé
en fin 2000, au
31 La réglementation prudentielle et le
renforcement de la protection des déposants par
l'élévation du montant minimum de capital et la modification du
mode de calcul du ratio de solvabilité des banques.
réaménagement du mode de calcul de certains
ratios prudentiels pour les aligner sur les normes internationales.
Le capital minimum des banques a été
fixé à 100 millions de Dhs, depuis janvier 1989, comparativement
à 15 millions auparavant. L'obligation relative à la
détention de 50% au moins du capital par des personnes physiques ou
morales de nationalité marocaine a été abolie en janvier
1990.
Les banques ont été soumises depuis janvier
1993 aux nouvelles règles du coefficient minimum de solvabilité.
Le plancher à respecter par les banques a été porté
de 5,5% à 8%. Le mode de calcul du coefficient a été
modifié en vue de l'aligner sur le ratio de Cooke. Les fonds propres
nets ne sont plus rapportés aux dépôts mais à
l'ensemble des actifs et des engagements par signature, pondérés
respectivement par leur degré de risque.
Les banques marocaines sont également soumises au
coefficient minimum de liquidité fixé à 60%, et
relevé à 100% depuis l'année 2000.
Afin de limiter les risques encourus par un
établissement de crédit sur un seul ou un groupe restreint de
clients, les autorités monétaires marocaines ont institué
depuis 1977 un coefficient de division des risques32. Ce coefficient qui
était de 10% a été porté à 20% en 2000.
2.2.6 Dynamisation du marché boursier
L'étude des conséquences de
libéralisation financière nous donne à penser d'abord
à la dynamisation de l'intermédiation financière dans le
financement de l'économie. Les contraintes que rencontrent les PME-PMI
en matière de financement de leurs investissements peuvent être
surmontées par les grandes entreprises qui font recours au marché
boursier : la Bourse des Valeurs de Casablanca (BVC). On a souligné
l'importance d'asymétrie d'information et ses effets sur les
décisions d'investissement même si le secteur bancaire s'est
élargi sous ses différents aspects.
Pour mettre l'accent sur l'état d'avancement du
marché boursier marocain, nous avons retenu la capitalisation
boursière et l'évolution du chiffre d'affaires.
32 Ce coefficient est défini comme
étant le rapport maximum que les établissements bancaires sont
tenus de respecter entre le total des crédits accordés à
un même bénéficiaire et leurs fonds propres.
· Capitalisation
boursière
La capitalisation boursière a atteint 35,9% par
rapport au PIB pendant 1996-2005 contre 10% durant la période 1990-1995
et 2 % durant 1985-1989. Entre 1999 et 2002, elle a chuté de 18 point du
PIB. Avec l'introduction de Maroc Telecom et la Banque Populaire, la
capitalisation boursière s'est améliorée pour atteindre
55,1% du P113 en 2005.
La principale caractéristique de la BVC est la forte
concentration par secteur et par importance des sociétés
cotées. Plus de 77% de la capitalisation boursière totale est
détenue par les 10 plus grandes entreprises, et plus de 70% des secteurs
sont dominés par la place de grand Casablanca
(télécommunications avec 35,5%, les banques avec 21%, le
Bâtiment et les matériaux de Construction avec 13% et les
sociétés de portefeuilles holdings avec 12%).
La domination des grandes entreprises (notamment les banques
et les sociétés d'assurance) et la présence très
faible, sinon l'absence totale des PME-PMI est expliquées par les
politiques gouvernementales en vigueur et les procédure
compliquées appliquées par les autorités. L'environnement
juridique et réglementaire est à l'origine de ce problème
(notamment les lois et les conditions d'introduction des sociétés
en bourse).
Figure 8 : Evolution de la capitalisation
boursière entre 1993 et 2003
1 1 1 I 1 1 0 1 1
1993 1994 1995 1 996 1 997 1996 1999 2000 2001 2002 2003 2004
2005
60 50 40 30 20 10 0
Source statistiques : Bourse des Valeurs de
Casablanca.
· Chiffre d'affaires
Il nous semblerait à partir de l'analyse de
l'évolution du chiffre d'affaires (figure 9) qu'au moyen le chiffre
d'affaires sur la période 1985-2002 n'a pu dépasser 10%. Mais si
on analyse la période de libéralisation financière nous
trouverons que 1995-1996, date pendant laquelle le Maroc à entamer son
programme de privatisation, le chiffre d'affaires à connu une nette
augmentation. Ceci est traduit par la forte capitalisation boursière
enregistrée durant cette période.
Figure 9 : Evolution du chiffre
d'affaires33 entre 1985 et 2002 (en %)
50 -
|
40
|
|
|
|
|
30
|
|
20
|
|
10
|
|
|
r
|
|
,
|
|
|
0
|
1985 1990 1995 1999 2000 2001 2002
|
|
Source : Banque mondiale.
Il ressort de cette analyse que la libéralisation
financière était favorable à la croissance de
l'épargne financière et au crédit privé, mais la
place financière nationale souffre de contraintes et des limites qui
affectent la croissance des investissements des entreprises.
En résumé, à la veille des réformes
financières, le système financier marocain présente les
caractéristiques suivantes :
· système soumis à de fortes contraintes
réglementaires ;
· une politique monétaire basée sur des
techniques du contrôle quantitatif ;
· un marché des capitaux marginal et des instruments
financiers peu diversifiés.
2.2.7 Asymétries d'information et rôle des
banques dans le financement de l'économie nationale
Le rationnement de crédit qui peut exister entre
prêteur et emprunteurs et qui est à l'origine de
l'asymétrie de l'information risque de créer des
inadéquations entre services bancaires et besoins des entreprises. La
conséquence, les banques développent des relations
étroites avec certains clients «privilégiés» qui
présentent des conditions qui les encouragent à les prêter
des fonds. Pourtant, les crédits accordés en 2002 est de 214,3
milliards de Dhs (contre 208 milliards de Dhs en 2001), en enregistrant ainsi
un équivalent de 53,9% du P113 (contre 54,3% en 2001). Le concours des
banques au financement de l'économie a connu un essor
considérable avec une progression moyenne annuelle de l'ordre de 10,4%
par an sur la période 1993-2000 et autour de 4% ces dernières
années. En conséquence, les crédits bancaires, qui
représentaient environ un tiers du P113 en 1990, ont atteint 46% en 1995
pour plafonner ensuite au niveau de 58% du P113 en 2000. La
décélération du rythme de croissance des crédits
à l'économie, observée depuis 2000, est due à la
conjoncture économique, mais
33 Le chiffre d'affaires est le rapport entre la valeur totale
des actions émises et la capitalisation boursière.
également à des éléments
réglementaires et structurels tels que la révision des
règles prudentielles visant à assainir le secteur et les
modifications des comportements des grandes entreprises qui, progressivement,
privilégient les marchés des capitaux.
En examinant la figure 10, nous observons une augmentation
légère durant la période 19902002 des crédits
accordés par les banques marocaines.
Figure 10 : Total des crédits
bancaires
7G 60 50 40 30 20 10
|
|
|
çs3
§ ' e
e e
Année
|
Sources statistiques : BAM.
L'examen de cette répartition des crédits
bancaires par maturité montre qu'en 2002, 43,2% des crédits ont
été accordés pour des durées inférieures
à une année, et 39,1% pour des échéances moyennes
voire longues. La part des crédits à court terme a accusé
un recul de 2,8 points depuis 1993 alors que celle des crédits à
moyen et long terme reste globalement stable. Le reste des crédits, soit
17,7% du total des crédits bancaires ce qui représente quelques
38 milliards de Dh, est classé comme créances en souffrance. La
part de ces dernières a fortement augmenté depuis 1993 où
elle n'était que de 10%. Cette hausse est due principalement aux
règles de classification et de provisionnement plus strictes des
créances imposées aux banques et surtout à la
restructuration des bilans des anciens organismes financiers
spécialisées (OFS), dans le cadre de la nouvelle
réglementation prudentielle34.
34 Rapport de BAM, (1994).
2.2.8 Brève Présentation du climat de
l'investissement au Maroc avant la libéralisation
financière
Au lendemain de l'indépendance, les autorités
publiques marocaines intervenaient massivement dans l'économie en
stimulant les investissements publics. En effet, l'évolution des
investissements a connu durant la période 1960-1980 une évolution
mitigée.
Durant le début la décennie 60, l'investissement
public a enregistré une progression légèrement positive
mais reste au dessous de l'investissement privé malgré la forte
présence de l'Etat dans les affaires économiques. Les
années 1967 et 1968 ont enregistré une nette performance par
rapport aux investissements privés due à l'importance que l'Etat
a accordé aux travaux d'hydraulique et d'irrigation. Mais à
partir de début de 1967, il a chuté contrairement à
l'investissement privé qui marque une tendance à la hausse. Cette
progression s'explique par la fuite des capitaux et l'incertitude relative au
climat d'investissement et des affaires.
De même pour les investissements industriels qui ont
été marqués par une évolution volatile sur la
période 1960-1980. Par rapport au P113, l'investissement global est
passé de 13,5% en 1973 à 27,3% à en 1982. Le taux
d'investissement a atteint 30% en 1976 et 32% en 1977 qui s'explique par la
hausse des niveaux des prix des phosphates en 1974.
L'agroalimentaire a enregistré une augmentation accrue
au niveau de l'évolution des investissements avec 59% durant la
décennie 60 et le début des années 70. Durant la
période s'étalant entre 1963 et 1972, le secteur a connu une
forte croissance avec plus de 59%. L'évolution des investissements
publics globaux en faveur de l'agriculture peut être
considérée comme résultant avant tout de fortes
contraintes financières pesant sur l'État. Cependant,
l'évolution de la structure de l'investissement public en faveur de
l'agriculture met en évidence un effort pour adapter la dépense
publique.
Entre 1973 et 1977, les chiffres traduisaient le
caractère temporaire de la bonne performance de l'investissement qui
n'est pas du aux niveaux d'épargne qui s'est situé à un
niveau moyen de 16,79% avec un record de 19,75% atteint en 1975 mais du
à l'augmentation brutale des prix des phosphates.
A partir de 1977, malgré la chute des prix des phosphates,
le taux d'investissement demeure élevé du au recours massif
à l'endettement extérieur.
Malgré une importance donnée au secteur
agricole, les investissements ont atteint des niveaux relativement importants
dans le secteur du textile. Plus de 67 millions de Dhs ont été
enregistrés en 1960 ce qui représente 40% du total des
investissements industriels. Néanmoins, la stratégie de l'Etat
est beaucoup centrée sur le secteur agricole et a adoptée une
politique de ne pas promouvoir les investissements de secteur du
textile nouvellement crées. Cette décision a engendré une
chute des investissements durant la période 1968-1972.
Tableau 3 : Evolution de l'investissement public en
faveur de l'agriculture
eil:,
|
1980- 1983
|
1984- 1986
|
1987- 1988
|
Investissement agricole/ investissement public total
|
11,8
|
13,4
|
10,5
|
Investissement agricole/PIB agricole
|
8,6
|
5,1
|
4,4
|
Investissement agricole/ dépense totale
|
3,7
|
3,1
|
2,7
|
Source : direction des études et des prévisions
financières.
Le rythme de progression des autres secteurs d'activité
est moins performant Ainsi, dans le secteur chimique et parachimique, les
investissements ont concerné seulement la SAMIR et la SCP
(Société Chérifienne de Pétrole).
La répartition des crédits cumulés par
secteur d'activité fait apparaître une dominance assez nette des
activités industrielles (y compris les mines) et des services,
lesquelles ont absorbé en moyenne 87% des crédits recensés
au terme des exercices 1978 et 1979 : pour l'industrie, il s'agit
principalement des matériaux de construction et de l'industrie
alimentaire ; pour les services, le commerce et les transports semblent avoir
été les plus favorisés.
En matière de corrélation entre l'épargne
privée et l'investissement, entre 1970 et 1987, les niveaux
d'épargne enregistrés restaient faibles par rapport au taux
d'investissement (figure 11). Ces insuffisances du volume d'épargne sont
à l'origine de la répression financière
entraînée par les taux d'intérêt réels
négatifs.
Figure 11 : Evolution des taux d'épargne et
d'investissement entre 1970 et 1987
II int
mi
40 35 30 25 20 15 10 5 0
Iffil
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c» c» c» c» c» c» c»
Taux d'épargne
Taux d'investissement
Source : Statistiques financières internationales :
Annuaire 1990.
2.3 Pourquoi la libéralisation financière
est-elle nécessaire ?
La justification théorique de la libéralisation
financière a tenu au départ tout entière dans l'argument
de McKinnon et Shaw (1973) : la hausse des taux d'intérêt
créditeurs permettra un accroissement des fonds disponibles pour
l'investissement.
Il est incontestable qu'au cours de la décennie 80, le
problème se pose de la façon dont l'ont décrit les
partisans de la libéralisation financière : les structures de la
répression financière ne permettent pas de mobiliser suffisamment
l'épargne pour assurer la poursuite du développement industriel.
De fait, le Maroc souffrent d'un besoin de financement interne pour
l'investissement industriel : la demande de crédit est en
général très excédentaire, malgré de forts
taux d'épargne et l'économie marocaine est dépendante de
financements extérieurs.
Pour remédier à cette situation, les
autorités devaient s'engager dans un processus de l'intensification des
investissements (notamment dans le secteur privé) pour relancer la
croissance économique, lesquels investissements nécessitent une
grande mobilisation de l'épargne. De ce fait, il semble indispensable de
moderniser et développer de nouveaux instruments financiers du
système bancaire pour établir une corrélation entre les
ressources financières et le financement de l'économie.
En effet, l'intervention des autorités dans les
opérations financières par le financement des projets
particuliers (prioritaires) au détriment d'autres, génère
d'une part, une situation d'endettement bancaire restrictive : seules les
entreprises publiques et/ou les entreprises de secteur d'agriculture
bénéficient des crédits bancaires, et d'autre part limite
la concurrence
entre les banques en matière de financement de
l'économie. Il apparaît donc que le retrait partiel des
autorités et le renforcement de la concurrence au niveau du secteur
bancaire est nécessaire pour favoriser le développement de
l'intermédiation bancaire au profit du financement des investissements
des entreprises et améliorer par conséquent l'accès des
PME-PMI aux crédits bancaires.
Le fait qu'à la veille de la réforme
financière, les forts taux d'épargne aient coexisté avec
des situations de répression financière est éloquent, la
libéralisation progressive des taux d'intérêt est un
élément central permettant d'établir la corrélation
entre les taux d'épargne et les taux d'investissements. Malgré
une amélioration des taux d'épargne enregistrée durant la
décennie 80 (période de répression financière), la
tendance du taux d'investissement global est décroissante qui s'explique
par le rôle faible joué par le secteur bancaire et l'adoption de
la politique de rationalisation des crédits. La hausse du taux
d'investissement enregistré pendant le début de la période
est du, non pas au progrès des investissements privés, mais
à la relance des investissements publics.
Cette politique de mobilisation de l'épargne
intérieure repose sur deux axes : le développement de
l'épargne institutionnelle et la réforme du marché des
capitaux. L'objectif est de porter le niveau de l'épargne nationale
à 27% du P113 et de gagner 4 points du P113 en 2004. Etant donné
que l'épargne intérieure représente près de 80% de
l'épargne nationale, l'effort à fournir doit se concentrer
essentiellement sur cette composante.
A partir de 1990 (période de libéralisation
financière), une dépendance positive entre les taux
d'épargne et le taux d'investissement est enregistrée suite
à l'adoption d'une politique consistant à libéraliser
progressivement les taux d'intérêt et à offrir des
conditions économiques meilleures au secteur privé. Les
investissements ont passé de 2 265 millions de Dhs en 1983 à 6
557 millions de Dhs en 1993 mais entre 1990 et 1993, le taux d'investissement a
enregistré une baisse de l'ordre de 30,12%.
Durant la période 1980-1989, l'épargne nationale
s'est améliorée de 19,4% à 19,9% en 19901995 et 23,3%
pendant 1996-2005. Cette amélioration des niveaux d'épargne est
due au fléchissement de la part du revenu national brut disponible
destiné à la consommation des ménages résidents de
64,8%, de 63,8% et de 58,3 % durant respectivement les mêmes
périodes.
Les investissements publics ont chutés contrairement
aux investissements privés durant la même période
enregistrant un écart de 9,3 points en 2005. Le volume des
investissements industriels agrées a progressé en moyenne de 3,8%
entre 1994 et 2005.
La libéralisation progressive a permis
l'amélioration des niveaux d'investissements entre 1990 et 2005 depuis
que les pouvoirs publics ont initié le programme de réforme en
1990. Entre 2000 et 2005, le taux d'épargne nationale brute
excédentaire n'a pas permis le financement des investissements : le taux
d'épargne est important que celui d'investissement. Mais le taux
intérieur brute demeure faible par rapport au taux d'investissement.
Figure 12 : Evolution du taux d'épargne et du
taux d'investissement entre 1980 et 2005
22
26
25
24
23
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I
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17 1.5
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|
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Taux d'investissement
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Epargne nationale ,
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brute en % du PIB # . · · ------ .
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|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
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|
|
|
|
Source : direction des études et des
prévisions financières.
Au cours du processus de libéralisation
financière, le secteur financier marocain enregistre des
améliorations continues en matière d'octroi des crédits,
du coût de financement, d'amélioration de la supervision
financière et du climat des affaires.
Au niveau du secteur financier, la progression a
touché le fonctionnement de la finance directe (augmentation des
introductions en bourse, augmentation de la capitalisation boursière et
du volume des transactions) ainsi que l'accroissement de l'efficience en
matière du financement des secteurs productifs.
Le bilan de la première phase de la réforme du
secteur financier fait ressortir de bonnes performances qui sont à la
faveur du climat d'investissement. Les dépôts bancaires ont
enregistré une performance entre 1991 et fm 2004: Le total
dépôts/PIB courant est passé de 43,0% en 1991 à
75,3% en 2004. Les crédits distribués ont à leur tour
connu une évolution positive durant la même période allant
de 39,1% à 62,7% (Crédits à l'économie/PIB
courant). Concernant les taux débiteurs, les taux enregistrés qui
atteignent plus de 14% (taux débiteurs à long terme) en 1991, ne
sont que de l'ordre de 6% en 2004. La libéralisation financière
progressive qu'a suivi le Maroc a permis de concrétiser un climat
propice des affaires.
2.4 Présentation des secteurs
d'activité
Le secteur agroalimentaire est l'un des secteurs moteurs de
l'économie marocaine. L'industrie agroalimentaire a connu une forte
progression ces dernières années : 15% en 1997
et 5% en 2000. Toutefois, largement dominé par des
entreprises familiales, le secteur reste peu compétitif. Ainsi, il
contribue à hauteur d'un tiers du P113 industriel et 8 % du P113
national pour une production de plus de 54 milliards de Dhs (plus de 2,4 % en
2005) et dégage 16 milliards de Dhs de valeur ajoutée. Il
représente ainsi le premier secteur manufacturier du pays, très
loin devant le textile ou la chimie 11 est en forte croissance grâce
à la très bonne tenue de la demande aussi bien intérieure
qu'à l'exportation. Ceci s'explique essentiellement par le changement
manifeste des habitudes culinaires, induisant une amélioration du niveau
de consommation nationale, mais qui demeure relativement bas par rapport aux
pays à niveau économique comparable. Le secteur n'exporte que 17
% de sa production en raison notamment des difficultés à
satisfaire les critères de qualité et des exigences sanitaires
des pays développés.
L'industrie chimique et parachimique est
intégrée en aval du secteur minier Sa production consiste
essentiellement à transformer le phosphate en engrais et acide
phosphorique à destination de l'exportation. L'acide phosphorique et les
engrais représentent à eux seuls 12% de la valeur totale des
exportations. La production du secteur a augmenté de 10 % depuis 1997 (3
% en 2000). Cette évolution témoigne la volonté des
autorités marocaines (l'Office Chérifien des Phosphates)
d'accroître la valeur ajoutée domestique de la branche en
développant la production de ses dérivés.
L'industrie de textile et de l'habillement est fortement
orientée vers les exportations dont elle représente 34% de la
valeur totale. Aussi, la production de ce secteur est fortement soumise aux
conditions de la concurrence internationale. Elle a été
handicapée par l'appréciation réelle du dirham, et doit
par ailleurs s'apprêter à faire face au
démantèlement des accords multi-fibres. Suite à des
conditions défavorables, le secteur a supprimé 44 000 emplois en
1999, soit 23% de l'emploi total de la branche et 3% de l'emploi industriel
total.
En matière
Le secteur Chimie et Parachimies enregistre des taux fortement
élevés par rapport au secteur Electriques et Electroniques
(tableau 4).
Entre 1996 et 2005, les taux d'investissement
enregistrés se sont caractérisés par une tendance à
la hausse, le taux d'investissement était de 23,1% contre 22,1% durant
la période 1990-1995 et 22,7% entre 1980 et 1989.
Entre 2000 et 2001, les investissements dans les industries
agroalimentaires ont enregistré une baisse de 7% pour marquer une
reprise en 2003 avec un taux de variation de 30%. Quant aux industries Textiles
& cuir et Chimiques et Parachimiques, elles ont une tendance à la
baisse entre 2000 et 2003 passant respectivement de 2 091 197 et 4 124 898
milliers de Dhs
en 2000 à 1 672 832 et 3 890 665 milliers de Dhs en
2003. Ces évolutions sont expliqués par les difficultés
rencontrées par les entreprises exportatrices (Textile & cuire), la
concurrence acharnée sur le marché international et le
détournement qui caractérisaient les entrepreneurs marocains de
se diriger vers les secteurs porteurs (immobilier et commerce). Cela s'ajoute
le climat propice pour le secteur agricole. Le tableau 4 résume
l'évolution des investissements durant la période 2000-2003.
Tableau 4 : Evolution des investissements par
secteur d'activité entre 2000 et 2003 (en milliers de
Dhs)
Grands secteurs
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
|
Var
|
Total
|
Var
|
Total
|
Var
|
Total
|
Var
|
Industries Agroalimentaires
|
3 004 689
|
27
|
2 798 931
|
-7
|
2 786 446
|
-1
|
3 624 605
|
30
|
Ind.Textiks & du Cuir
|
2 091 197
|
-14
|
2 099 466
|
|
1 668 331
|
-21
|
1 672 832
|
|
Ind.Chimiques & Parchimiques
|
4 124 898
|
2
|
3 732 922
|
-10
|
3 755 337
|
1
|
3 890 665
|
3
|
Total (Y compris autres secteurs
d'activité)
|
11 068
702
|
7
|
11 394
082
|
3
|
10 621 566
|
-7
|
11 171 623
|
5
|
|
Source statistiques : Enquête effectuée par le
ministère de l'industrie marocaine (2004).
2.5 Un système varié d'incitations
industrielles
Destiné à encourager le développement de
l'industrie nationale, un programme de promotion des investissements
privés nationaux et étrangers a été mis en oeuvre
depuis le milieu des années 90 qui était articulé
principalement autour des avantages accordés par le Code des
investissements et des mesures de protection douanière (taxation et
contrôle des importations).
Le 8 novembre 1995 le Maroc a promulgué la Loi 18-95
(Charte de l'Investissement) qui fixe les objectifs fondamentaux de l'action de
l'Etat pour les années à venir en vue du développer et
promouvoir les investissements par la révision du champ des
encouragements fiscaux.
Les textes prévoient une simplification des
procédures administratives pour la création d'entreprises avec
:
- l'instauration de guichets uniques pour les nouveaux
investisseurs ;
- la réduction de la charge fiscale afférente aux
opérations d'acquisition des matériaux, biens
d'équipements et terrains nécessaires à la
réalisation de l'investissement ;
la réduction des taux d'imposition sur les revenus et les
bénéfices ;
l'octroi d'un régime fiscal préférentiel en
faveur du développement régional ;
la promotion des places financières offshore et des zones
franches d'exportation;
Les opérations effectuées à
l'intérieur de la zone franche sont exonérées de tout
impôt. En cas d'implantation en zone franche d'exportation l'investisseur
bénéficie des avantages suivants : Exonération (droits de
douanes, TVA, impôts sur les sociétés pour les 5
premières années et 8,75% pour les 10 années suivantes,
impôts général sur les revenus pour les 5 premières
années, et abattement de 80% pour les 10 années suivantes, taxe
urbaine pour les 15 premières années et droit d'enregistrement et
de timbre).
En 1996, les autorités ont établi le code de
commerce qui contient une série de mesures, principalement d'ordre
fiscal destiné à agir sur les conditions de financement (primes
d'équipement, bonification des taux d'intérêt, couverture
du risque de change, garantie de transfert, etc.) et à réduire
les coûts d'intervention dans le secteur industriel tout en
élevant sa rentabilité comparativement à d'autres
activités (transactions foncières, immobilières et
commerciales).
Le programme vise aussi à mobiliser
l'accessibilité aux financements bancaires partant du constat que la
faiblesse des investissements des entreprises est liée à
l'imperfection du marché financier. Le programme mobilise
essentiellement des outils de financement ou de garantie par la mise en place
de fonds de garantie mais aussi l'incitation à l'initiative de jeunes
entreprises dynamiques. Il s'agit bien de corriger une imperfection de
marché.
Des lignes de crédit étrangères sont mises
à disposition des entreprises pour le financement de leurs
investissements.
Les fonds spécifiques de la mise à niveau sont
destinés à financer les programmes de mise à niveau des
entreprises. Ces fonds sont généralement des mécanismes de
co-fmancement entre l'Etat (éventuellement sur ressources de certains
bailleurs de fonds étrangers) et les banques. Créée en
2002 conformément à la loi n°53-00 formant Charte de la
petite et moyenne entreprise, l'agence nationale pour la promotion de la PME
s'est vu confier comme mission l'identification, l'élaboration, le
lancement et le suivi des actions d'assistance technique en faveur des
entreprises. L'objectif est de leur faciliter l'accès aux services d'une
expertise locale qualifiée à même de répondre
à leurs besoins spécifiques en matière de mise à
niveau. Dans cette démarche, l'ANPME s'appuie sur un réseau de
structures d'appui aux niveaux régional et sectoriel.
Un organe de pilotage, le comité national de mise
à niveau (CNMN), a été mis en place en décembre
2002. Il se compose de représentants des secteurs public et privé
et a pour responsabilité de tracer la stratégie ainsi que de
coordonner et de superviser toutes les actions visant la mise à niveau
du secteur industriel.
La mission du CNMN est de servir de lieu d'échange des
points de vue entre les différents intervenants (publics-privés),
de relais d'information vis-à-vis du Premier Ministre et
d'identification de mesures opérationnelles de mise à niveau
à mettre en oeuvre par les départements ministériels
concernés. Le Comité tient des réunions mensuelles qui
sont présidées par le ministre chargé de la mise à
niveau de l'économie.
Le programme marocain d'incitation a fait preuve, dans ses
premières années de fonctionnement, d'un faible dynamisme et n'a
pas su susciter un intérêt marqué chez les entreprises
marocaines. Cette conclusion mérite d'être formulée avec
prudence, les corrections des imperfections de marché pouvant engendrer
des effets à terme plus importants que des actions publiques
volontaristes.
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