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Problématique de la gestion foncière dans les centres urbains secondaires du Bénin

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par Dossou Edouard AKPINFA
Université d'Abomey-Calavi - Maîtrise de Géographie 2006
  

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I- Nature et sources des problèmes

Sans pouvoir énumérer ici de façon exhaustive tous les problèmes rencontrés en matière de gestion foncière à Glazoué et Dassa-Zoumé, nous essayerons d'identifier et de présenter par catégories, les principales difficultés rencontrées en la matière.

1.1 Les problèmes d'ordre administratif et juridique

Ils sont très pernicieux et relèvent pour l'essentiel de la caducité et de la non application des textes et lois en vigueur. La plupart des textes et lois datent de l'époque coloniale ou des années 1960. On est donc tenté de dire que leur abandon est le résultat de leur vétusté. Mais force est de constater que même les textes et lois pris récemment ne sont pas respectés.

Il paraît évident que, si les dispositions légales étaient respectées, on n'observerait pas aujourd'hui de friches urbaines ni à Glazoué, ni à Dassa-Zoumé.

Dans le même ordre d'idées, on peut évoquer l'absence de rigueur et de rationalité dans l'organisation et l'occupation de l'espace urbain. Car il n'est pas rare de noter que des domaines qui étaient réservés à une oeuvre d'utilité publique changent de statut sans que l'administration locale ait la force et le courage nécessaires pour faire respecter la loi. On peut citer comme exemple à Glazoué, l'espace du marché qui est occupé presque à moitié par les populations comme en témoigne la photo n°3.

Photo domaine marché Glazoué occupé par population

Face à ces différentes situations, il n'est pas exagéré d'affirmer qu'il existe un laisser-aller de la part des autorités administratives dans la gestion de l'accès à la terre dans les villes de Glazoué et Dassa-Zoumé. Or, la terre étant l'une des ressources de base nécessaire à l'extension et à la modernisation d'une ville, il est important voire indispensable que son acquisition et son utilisation soient codifiées et que les lois en la matière soient respectées. La question est d'autant plus importante qu'un nombre de plus en plus croissant de personnes souhaitent vivre en ville. Il faudra donc disposer d'espace non seulement pour loger les habitants actuels et leur permettre de vaquer aux activités de leur choix, mais aussi pour accueillir les futurs migrants. Pour y parvenir, il est nécessaire d'adopter une politique claire et cohérente en matière de gestion foncière et de rompre avec le sentimentalisme ou la politique de `' nous sommes les mêmes''.

On ne saurait terminer cette partie sans évoquer les cas d'expropriation sans dédommagement. En effet, l'expropriation est une arme juridique dont l'Etat se sert pour retirer des terrains à leurs propriétaires originels afin de réaliser des oeuvres d'utilité publique : construction d'écoles, de dispensaires, de centres de loisir,.... Cette mesure en elle-même n'est pas condamnable car elle permet aux localités concernées de disposer des infrastructures et équipements nécessaires à leur fonctionnement. Mais là où le bât blesse, c'est quand l'expropriation s'effectue sans dédommagement. Les propriétaires de ces terrains se retrouvent souvent sans terre ; et comme celle-ci est indispensable à leur épanouissement socio-économique, ils sont parfois contraints à migrer vers d'autres localités.

A Glazoué comme à Dassa-Zoumé, plusieurs cas d'expropriation sont demeurés sans dédommagement. On peut citer comme exemples :

A Glazoué : L'école primaire centre, le CEG, le marché, ...

A Dassa-Zoumé : L'hôpital de zone, le CEG 1, le CPS....

Toutes ces infrastructures sont construites sur des terrains expropriés sans que les propriétaires ne soient dédommagés. Or, la terre a acquis une valeur marchande considérable. On se demande donc si ces propriétaires expropriés ne reviendront pas à la charge pour réclamer leur dû, comme on le constate à Cotonou.

Une telle situation amène à penser, sans exagération, que ces expropriations sans dédommagement constituent des bombes à retardement.

Un autre problème tout aussi crucial est l'absence d'outils adéquats de gestion foncière.

1.2 Les problèmes techniques

Nous désignons sous ce vocable, les problèmes liés à l'absence de document d'urbanisme en particulier le Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme (SDAU). En effet, aucune des deux villes étudiées ne dispose jusqu'à ce jour d'un plan directeur. Les autorités naviguent à vue et font une gestion quotidienne du foncier. Les opérations de lotissement qui s'exécutent actuellement ne sont que le prolongement de celles qui ont été réalisées à l'époque coloniale (cas de Dassa-Zoumé) ou en 1982 (cas de Glazoué). Ceci à pour conséquence, le non respect des phases classiques du lotissement notamment celle de l'urbaniste. Il revient en fait à l'urbaniste d'élaborer le plan de lotissement après le levé topographique de l'espace à lotir. Le géomètre, en principe, ne fait qu'appliquer le plan qui lui a été soumis par l'urbaniste. Or, à Glazoué et Dassa-Zoumé, sous prétexte du coût élevé de cette procédure, les autorités administratives, à travers le comité de lotissement, confient tous les travaux à un géomètre. Ce dernier ne maîtrisant pas correctement les normes en matière d'urbanisation, se contente de prolonger seulement les voies des anciens lotissement et de prévoir quelques réserves administratives. Tout ce passe tout comme si les différents quartiers de ces villes doivent avoir le même plan.

A cela s'ajoutent les difficultés liées à l'identification des propriétaires réels de toutes les parcelles de la ville. Cette situation est due à la mauvaise tenue des livres cadastraux. En outre, des erreurs d'attribution peuvent conduire parfois deux (2) ou plusieurs personnes à se retrouvées sur la même parcelle. Cette situation se rencontre souvent lors des phases de recasement des présumés propriétaires dans les zones nouvellement loties.

Ces différentes difficultés qui sont dues à l'absence d'outils adéquats de gestion foncière compromettent, sans doute, le développement harmonieux des villes.

De plus, certaines pratiques des populations sont source de problèmes.

1.3 Les problèmes socio-économiques

Nous présenterons ici les problèmes liés aux modes d'acquisition des terrains d'une part, et d'autre part, les obstacles d'ordre économique qui bloquent parfois les investissements fonciers. Dans le premier cas, il s'agit soit d'héritiers qui ne parviennent pas à s'entendre sur le mode de partage des terres de leur parent, soit d'individus qui vendent des terrains qui ne leur appartiennent pas en réalité, soit encore des dons de terrains qui sont remis en cause par les descendants du donateur, soit enfin, des propriétaires qui ne s'entendent pas sur les limites de leurs parcelles respectives.

Ces divers problèmes sont dus pour l'essentiel au nombre de plus en plus croissant des demandeurs de terrains à bâtir, à la valeur marchande désormais acquise par la terre et surtout au manque de documents écrits pour attester les titres de propriétés. En effet, nombreuses sont les propriétés qui sont acquises sans preuves écrites comme en témoigne le tableau suivant.

Tableau n°9 : Nombre de propriétaires terriens détenteurs de documents écrits à

Glazoué

Quartiers

Possession

de documents écrits

AYEDERO

AFFECIA

ZONGO

OROKOTO

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Oui

30

39,47

54

73,97

29

52,73

8

47,06

Non

46

60,53

19

26,03

26

47,27

9

52,94

Total

76

100

73

100

55

100

17

100

Tableau n°10 : Nombre de propriétaires terriens détenteurs de documents écrits à

Dassa-Zoumé

Quartiers

Possession

de documents écrits

AYEDERO

ISSALOU

AGBEGBE

LATIN

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Oui

49

59,04

19

52,78

8

40,00

20

52,63

Non

34

40,96

17

47,22

12

60,00

18

47,37

Total

83

100

36

100

20

100

38

100

Ces tableaux mettent en exergue la relation entre le mode d'acquisition de la terre et la détention de documents écrits. En effet, dans la plupart des cas, l'héritage et la donation s'effectuent sans aucune preuve écrite. Celle-ci est jugée inutile puisque ces actes se posent entre « des gens qui se connaissent » ; ils n'ont donc pas besoin de « papiers » pour prouver leur bonne foi. En fait, cet état de choses résulte de notre tradition exclusivement orale.

Par contre, dans les nouveaux quartiers, c'est l'achat qui est le mode le plus important d'accès à la terre. Ce mode d'accès à la terre ne se fait pas toujours entre des « gens qui se connaissent ». Ceci justifie la pratique de plus en plus répandue de la délivrance de documents écrits.

Par ailleurs, les documents les plus délivrés sont les conventions de vente. Rares sont les propriétaires qui détiennent le permis d'habiter, encore moins le titre foncier. Or, ce n'est que le titre foncier qui peut garantir efficacement la validité d'une propriété. Son absence laisse penser à une situation de précarité dans l'acquisition de la propriété foncière.

Pour ce qui est des difficultés financières, elles se retrouvent principalement à deux (2) niveaux. D'abord au niveau des ménages où elles empêchent la mise en valeur des terrains acquis. Ceci a pour conséquence l'existence de friches urbaines dans les différentes villes. Au niveau des autorités locales, les difficultés financières retardent parfois les opérations de lotissement et celles de viabilisation des terrains lotis. En effet, le comité de lotissement et d'urbanisation auquel échoient ces opérations ne dispose d'aucune source de financement autre que les recettes issues de la cession des terrains lotis. Or, du fait du faible niveau des revenus, les acquéreurs ne se pressent pas pour régler leurs créances. Les recettes viennent donc au compte-gouttes dans la caisse du comité ; ce qui n'est pas de nature à favoriser le bon déroulement desdites opérations.

Au total, la gestion du foncier est aujourd'hui confrontée à un certain nombre de problèmes dont la résolution contribuerait pour beaucoup à la modernisation des villes de Glazoué et Dassa-Zoumé. Cette réalité est bien perçue par les autorités locales, car elles ont pris des mesures pour faire face audits problèmes.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery