Problématique de la gestion foncière dans les centres urbains secondaires du Bénin( Télécharger le fichier original )par Dossou Edouard AKPINFA Université d'Abomey-Calavi - Maîtrise de Géographie 2006 |
II- Les acteurs fonciersL'accès à la terre est une question qui préoccupe la plupart des acteurs du système urbain. En effet, le milieu urbain est caractérisé en premier lieu par la concentration des hommes et des activités. De ce fait, la terre y apparaît souvent comme le point de mire de toutes les convoitises. Ainsi, plusieurs questions se posent au nombre desquelles on peut retenir :
La recherche de réponses à ces différentes questions nous a conduit à distinguer dans les villes de Glazoué et Dassa-Zoumé, deux (2) catégories d'acteurs à savoir : les autorités administratives et les ménages. Chacune de ces catégories d'acteurs a sa logique, ses intérêts et développe ses propres stratégies pour les faire aboutir.
Nous classons dans cette catégorie, les autorités communales, préfectorales, ministérielles et plus généralement tous ceux qui représentent l'Etat, à divers niveaux, dans le domaine foncier. Cette catégorie d'acteurs est la plus en vue en matière de gestion foncière. Elle intervient dans ce domaine à plusieurs niveaux parmi lesquels, on peut citer fondamentalement : les opérations de lotissement, la délivrance des documents fonciers et la perception des taxes sur le foncier.
Le lotissement est une opération d'urbanisme qui consiste à diviser un terrain, une propriété foncière en plusieurs parcelles destinées à la construction de bâtiments à usage d'habitation, de bureau, commercial, artisanal ou industriel. Il vise à créer un tissu parcellaire, un morceau de ville. Au Bénin, le lotissement apparaît bien plus souvent comme une opération de régularisation de l'occupation anarchique par les populations des périphéries urbaines, une opération de remembrement et de restructuration du foncier en milieu urbain et périurbain. C'est l'arrêté N° 0023 MEHU/DC/DU du 22 Octobre 199611(*) qui défini les prescriptions minimales à observer en matière de lotissement en République du Bénin. Les opérations de lotissement sont coordonnées au niveau communal par un comité dont la dénomination et les attributions varient dans le temps et dans l'espace. Ainsi par exemple, le comité de lotissement et d'urbanisation de Dassa-Zoumé créé dans les années 1920 a connu plusieurs modifications tant dans sa dénomination que dans ses attributions. Les dernières modifications qu'il a connues datent de 2003 et sont consacrées par l'arrêté communal N°4F/545/SG/SA du 1er /10/200312(*). Désormais dénommé Comité de Lotissement et d'Urbanisation de la vile de Dassa-Zoumé, il est composé de quatorze (14) membres. Ce Comité est chargé de la gestion du domaine public et de l'installation des infrastructures de gestion urbaine. De façon schématique, on peut dire qu'il s'occupe des questions de lotissement. A ce titre, il détermine les zones à lotir, sollicite les services d'un cabinet de géomètre qui exécute les travaux de lotissement. Ensuite, il procède au recasement des présumés propriétaires et à la cession des terrains qui reviennent à l'administration. Le comité de lotissement et d'urbanisation de Glazoué a les mêmes attributions et les mêmes principes de fonctionnement que celui de Dassa-Zoumé. En dehors des opérations de lotissement, les autorités administratives interviennent également dans la gestion foncière par la délivrance des documents fonciers. 2.1.2 La délivrance des documents fonciers Elle concerne la convention de vente, le permis d'habiter et le titre foncier. 2.1.2.1 La convention de vente Elle réglemente la vente de parcelles entre particuliers. Les conditions de sa délivrance sont fixées par les Chefs Services ayant à charge les Affaires Domaniales Elles se résument comme suit :
ü Cinq (5) imprimés de convention de vente dont un brouillon à raison de 500F à acheter au service chargé des affaires domaniales ; ü Preuve de paiement au service des impôts de 4% de la valeur de la parcelle plus 9000 F de forfait ; ü Attestation de non litige signé par le chef de quartier et le chef d'arrondissement ü Division parcellaire ou levé topographique ü Dépôt de signature de tous les signataires (vendeur, acheteur et témoins) ü Quatre mille (4 000 F) de timbres pour la légalisation ü Frais d'identification de cinq mille (5 000 F) à verser dans le compte ADUG/CLCAM Glazoué ü Procès verbal légalisé du conseil de famille autorisant la vente de la parcelle. Le PV doit être signé par le chef de la collectivité et quelques membres de la famille.
ü Faire établir le croquis ou le levé du terrain ü Acheter au Service des Affaires Domaniales cinq (5) imprimés cachetés de convention de vente à raison de 500F ; ü Faire dactylographier correctement les informations nécessaires sur les cinq imprimés ; ü Le vendeur et l'acheteur organisent la visite du terrain par leurs témoins (06), le Chef d'arrondissement (3000 F), le Chef de Village ( 2000F) accompagné de deux personnes ressources (4 000F) ; ü Faire signer le Procs-verbal de non litige par le vendeur, l'acheteur, les six témoins, les deux personnes ressources, le Chef du quartier ou du village et le Chef d'arrondissement. ü Faire signer également les cinq conventions de vente par le vendeur, l'acheteur, les six témoins, le Chef de village ou quartier et le Chef d'arrondissement ü Faire le dépôt de signature du vendeur, de l'acheteur et de leurs témoins à la Mairie (350 F par personne et valable pour cinq ans) ; ü - Payer 4% du prix d'achat plus trois ans d'arriéré d'impôt sur bâti ou non bâti si le prix d'achat de la parcelle est supérieur à 400 000F - Payer 25 000F d'impôt si le prix d'achat de la parcelle est inférieur ou égal à 400 000F ; ü Payer 5 000F de taxe d'urbanisme à la recette perception ; ü Payer 10 000F de frais de timbre au Service des Affaires Domaniales ; ü Payer la totalité ou partie des frais de lotissement si la zone est en lotissement. L'institution de cette convention de vente permet d'éviter, un tant soit peu, les ventes illicites de parcelles 2.1.2.2 Le permis d'habiter Il est régi par la loi N° 60-20 du 13 Juillet 1960 et ses décrets d'application. Aux termes de l'article 1er de cette loi, on peut lire : « Dans les centres urbains du Dahomey dotés d'un plan de lotissement ou d'un plan d'aménagement régulièrement approuvé des commandants de cercle et chefs de subdivisions..., peuvent être délivrés sur les terrains immatriculés au nom de l'Etat, des permis dans les conditions fixées par la présente loi ». En fait, c'est un acte par lequel, l'Etat autorise un particulier à aller construire son logement sur son domaine privé. A Glazoué comme à Dassa-Zoumé, le permis d'habiter est délivré sur les domaines lotis. Les pièces à fournir pour l'obtenir sont : ü Une demande ü Une attestation de recasement (5000F) ü Un timbre fiscal (1000F) ü La convention de vente ou le reçu d'achat ü La preuve du paiement de l'impôt sur foncier bâti ou non bâti des trois (3) dernières années ü La preuve du paiement des frais d'ouverture de voies fixés à 12000F à verser à la CLCAM ü La preuve de paiement des vrais de délivrance du permis fixés à 10 000F à verser à la recette des finances ü La preuve de paiement des frais de sortie reconnaissance fixés à 2 000F en zone urbaine et 5 000F en zone rurale ü Une copie légalisée de la carte d'identité nationale ü La preuve de paiement des frais de consultation du dossier de lotissement fixés à 500F Comme on peut le constater, l'obtention du permis d`habiter nécessite beaucoup de dépenses auxquelles les ménages font difficilement face. Par ailleurs, aucune obligation n'est faite à l'individu pour obtenir ce document. La conséquence de cet état de choses est que les populations ne se pressent guère pour l'obtenir. Une telle situation est à l'origine d'un certain nombre de problèmes que nous présenterons dans le prochain chapitre. 2.1.2.3 Le titre foncier C'est le statut juridique dans lequel un domaine est placé après son inscription dans un livre foncier par un numéro d'identification, complété par des mentions faisant état de ses caractéristiques. Il est institué par la loi N°65-25 du 15 Août 1965. Les phases de cette procédure sont : ü Le levé du domaine ü La réquisition de l'immatriculation ü La procédure d'enquête et de bornage ü Les incidents (frais) de la procédures ü L'établissement du titre foncier Cette procédure n'a pas reçu un écho favorable chez les populations car elle est non seulement longue mais aussi complexe et coûteuse. Par ailleurs, les services de la conservations foncière sont installés à cotonou. Ceci ne favorise guère l'accès des populations à l'immatriculation foncière. Le troisième niveau d'intervention des autorités administratives est la perception des taxes foncières. 2.1.3 La perception des taxes sur le foncier Elle s'effectue par la recette des impôts de la ville. Cette institution, créée en 1982 et installée à Dassa-Zoumé avec comme zone d'intervention tout le département des collines, ne couvre aujourd'hui que les communes de Glazoué et Dassa-Zoumé. En 1990, celles de Savalou et Savè ont été créée avec pour zone de couverture respectivement les communes de Bantè-Savalou et Ouessè-Savè. En vue de maximiser le rendement du recouvrement des taxes, une antenne de la recette des impôts a été installée à Glazoué en 2004. Toutefois, elle dépend encore de la recette des impôts de Dassa-Zoumé. Que ce soit à Glazoué ou à Dassa-Zoumé, deux (2) types de taxes sont perçues sur le foncier. Il s'agit de la taxe sur le foncier bâti et de celle sur le foncier non bâti. Elles sont respectivement désignées par : Contribution Foncière des Propriétés Bâties (CFPB) et Contribution Foncière des Propriétés Non Bâties (CFPNB). La taxe sur le foncier non bâti varie entre 2 000F et 4 000F CFA en fonction de l'emplacement du terrain et de sa valeur vénale. Par contre, celle sur le foncier bâti dépend des éléments de confort et de la valeur locative. Les recettes issues du recouvrement de ces taxes sont versées à la recette-perception de la ville et destinée aux dépenses de la ville concernée (Glazoué ou Dassa-Zoumé). Les tableaux suivants mettent en exergue l'importance des recettes issues de la perception de ces taxes. Tableau 6 : Taxes sur le foncier de 2002 à 2005 (Glazoué-Dassa-Zoumé)
Source : Comptes Administratifs de Glazoué et Dassa-Zoumé de 2002 à 2005 Tableau 7 : Contribution des taxes foncière aux recettes fiscales
Source : Comptes Administratifs de Glazoué et Dassa-Zoumé de 2002 à 2005 Tableau 8 : Contribution des taxes sur le foncier aux recettes de fonctionnement
Source : Comptes Administratifs de Glazoué et Dassa-Zoumé de 2002 à 2005 Outre les autorités administratives, on peut citer au nombre des acteurs fonciers, les populations des villes. 2.2 Les habitants de la ville Il paraît commode de distinguer ici, deux (2) sous groupes d'acteurs que sont les chefs quartiers et chefs traditionnels ou coutumiers d'une part et d'autre part les ménages. 2.2.1 Les chefs quartiers et les chefs traditionnels ou coutumiers Ce sous groupe d'acteurs sert d'intermédiaire entre les autorités administratives et les ménages. En matière foncière, ils constitue des sources de renseignements importants pour la validité d'une propriété. En cas de vente de terrains entre particuliers, ils constituent le premier niveau d'officialisation de la procédure de vente. En effet, c'est au chef quartier qu'il revient en premier lieu de signer les conventions de vente après avoir constaté que le terrain en question n'est pas litigieux. En outre, en cas de conflits, les chefs traditionnels ou coutumiers sont les premiers sollicités en vue d'un règlement. 2.2.2 Les ménages On peut distinguer les ménages propriétaires de terrains et ceux qui ne disposent d'aucune parcelle. Le premier cas concerne les individus qui ont hérité de la terre ou qui l'ont acheté ou encore qui l'ont acquise à titre gratuit (donation). Cette catégorie d'individus est constituée en majorité des descendants des premiers habitants de la ville concernée. En effet, d'après les résultats de nos enquêtes, presque tous les descendants des premiers habitants de Glazoué et Dassa-Zoumé sont propriétaires d'une ou de plusieurs parcelles. Par contre, les ménages ne disposant d'aucune parcelle sont souvent représentés par les nouveaux résidents. Signalons que contrairement à ce qui se passe dans les grandes villes du Bénin telles que Cotonou, Porto-Novo, Parakou, Abomey-Calavi, ..., on ne remarque pas de `' démarcheurs professionnels'' ni à Dassa-Zoumé, encore moins à Glazoué. Cela peut traduire le faible niveau des transactions foncières dans ces deux (2) villes. Tous ces acteurs ont des intérêts et développent des stratégies spécifiques pour les satisfaire. Ces stratégies ne restent pas sans avoir des conséquences sur la modernisation des villes étudiées. * 11 Le texte intégral de cet arrêté est annexé au présent document * 12 Le texte intégral de cet arrêté est annexé au présent mémoire |
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