B - La période coloniale
Le mouvement amorcé depuis la fin du XIX
siècle s'est poursuivi au début du XX siècle . C'est dans
des écoles dispensant un enseignement moderne en langue française
que les enfants juifs ont été scolarisés . Les
publications statistiques donnent les effectifs de la population scolaire et sa
répartition par sexe . Il est aisé d'en tirer les effectifs des
juifs tunisiens scolarisés dans les établissements d'enseignement
primaire et secondaire
Tunisiens juifs
scolarisés ( 1921 - 1939 ) ( 2 )
Année Garçons
Filles Ensemble
1921 4 960
4 690 9 650
1926 5 663
5 434 11 097
1932 5 929
6 021 11 950
1936 6 475
6 193 12 668
1939 6 343
6 313 12 656
Il en ressort de ces chiffres une augmentation
continue du nombre d'élèves scolarisés qui est due
à l'accroissement de la population et de l'élévation du
taux de scolarisation . Par ailleurs, on assiste dans la même
période à une progression du nombre de bacheliers juifs
tunisiens
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(1) Les propos de Garsin V , Président du Comité
local de l'A.I.U. à Tunis , cité par Weil G. op cit , p.175
(2) Sebag P., op cit , p.191
Tunisiens juifs bacheliers
( 1916 - 1939 )
Année Garçons
Filles
Total
1916
|
15
|
1
|
16
|
1921
|
35
|
4
|
39
|
1926
|
43
|
7
|
50
|
1931
|
58
|
18
|
76
|
1936
|
64
|
24
|
88
|
1939
|
93
|
32
|
125
|
De ce fait, le nombre de jeunes qui ont pu
entreprendre des études supérieures dans les universités
françaises d'Alger ou en Métropole s'est accru . Dans l'ensemble
des écoles, assurant la scolarisation de la jeunesse juive tunisienne,
une place importante continue à être occupée par les
écoles de l'A.I.U. qui sont au nombre de cinq dans les grandes villes (
Tunis, Sousse , Sfax ) . Dans ces écoles, l'enseignement est conforme
aux programmes en vigueur dans les écoles publiques françaises .
Mais on y enseigne aussi l'hébreu, l'histoire juive et les principes de
la religion juive .
Les progrès de la scolarisation ont
entraîné de nouveaux progrès de la francisation . La
connaissance du français a continué à se répandre
au sein de la population juive. Ainsi, pour de nombreux juifs tunisiens , le
français devient l'une des langues maternelles , voire la langue
maternelle . Du même coup , ils parlent de moins en moins l'arabe , et
à la limite ne savent même plus le parler . Seuls leur demeurent
familières certaines expressions rituelles ( bénédictions
, malédictions, formules conjuratoires ) qui échappent à
leurs parents sous le coup d'une émotion (joie ou colère ) ( 1
)
Le progrès de la francisation se traduit par
un déclin du judéo-arabe qui demeurait , pour des îlots de
juifs épars de la vieille génération, la langue la plus
accessible pour la lecture et la culture .
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(1) Sebag P., op cit , p.192
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