La problématique de la communication dans la gouvernance locale au Bénin: le cas de la commune de Savè( Télécharger le fichier original )par Moukaïla AMADOU Université d'Abomey-Calavi (UAC) Bénin INJEPS, Département des Sciences et Techniques de l'Action Sociale et Culturelle - Master en Développement Communautaire 2008 |
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHECe chapitre comporte quatre parties. Afin de dégager la problématique et l'hypothèse de l'étude, il est fait un état des lieux des travaux existant sur la question de la gouvernance locale et la clarification de certains concepts. La dernière partie concerne le modèle d'analyse du problème que pose la recherche.
? En préparation du rapport sur le développement dans le monde 2000-2001 et dans le cadre du projet `'la parole est aux pauvres'', Deepa Narayan et all ont effectué des travaux qui consistent à recenser et à analyser les besoins ou aspirations des `'pauvres''. Ce projet vise à faciliter la participation des populations aux décisions. Il s'agit pour les auteurs d'analyser la manière dont le pouvoir est géré au niveau local, les rapports entre les citoyens et les structures officielles de leur localité, les marchés et la société civile. Ainsi, à partir d'une enquête, Narayan et all ont recueilli les points de vue, les confidences et les aspirations de plus de 60.000 hommes et femmes démunis de 60 pays. Fondée sur des méthodes de recherches participatives et qualitatives, l'étude présente de manière directe, par la voix même des populations, la réalité de leur vécu. De cette étude, il ressort que la corruption, la fertilité et la brutalité ternissent souvent le prestige des institutions officielles de l'Etat. Les ONG elles- mêmes n'en sortent pas sans égratignures. Les populations voudraient qu'elles leur rendent compte de leurs actions. Beaucoup pensent que les responsables locaux sont en grande partie responsables du problème. Le pouvoir dont disposent les élites locales est souvent inversement proportionnel à la mesure dans laquelle elles sont comptables de leurs actes et de leurs décisions. Ainsi les populations ont une mauvaise perception de leurs responsables locaux. Ils sont considérés comme des entités qui détournent les ressources de l'Etat à leurs propres fins. Dans la mesure où les fonctionnaires locaux limitent l'accès des particuliers à l'information et aux ressources, les populations ont du mal à échapper à la pauvreté. L'une des grandes conclusions de cette enquête est que les programmes publics ont bien de meilleures chances d'être couronnés de succès si les leaders communautaires y participent. ? En 1998 et plus précisément du 26 au 30 janvier, la première édition des journées de la Commune Africaine dénommée `'Africité 98''a eu lieu à Abidjan (Côte d'Ivoire). Cette manifestation qui a réuni plus d'un millier de participants venant de quarante pays dont trente pays africains, a permis de discuter de la plupart des problèmes que rencontrent les municipalités africaines et de faire le point sur les situations rencontrées dans différents domaines essentiels de l'action municipale. Des débats informés par des avis d'experts et d'acteurs et nourris des leçons de l'expérience régionale et internationale, ont été menés, entre autres sur les sujets suivants et ce par ateliers : - les enjeux de la communication locale ; - les villes solidaires dans un monde solidaire : forum de la coopération décentralisée ; - l'entretien, une priorité ; - la ville africaine, un marché émergeant. L'atelier sur `'Les enjeux de la communication locale'' a fait une large place aux échanges entre acteurs locaux et professionnels des médias sur les enjeux de la communication locale et les expériences des municipalités dans le domaine de la communication. L'atelier a discuté de la communication locale au service des citoyens, du rôle de la communication civique dans la responsabilisation et la compréhension des solidarités, dans l'amélioration de la vie quotidienne et dans le fonctionnement des services publics. L'atelier a discuté aussi de la communication locale au service de l'image de la cité, de la place de la communication économique au service de toutes les composantes d'une ville et de son territoire. L'atelier s'est attaché ensuite à définir les grandes lignes des politiques de communication locale. Les débats ont été centrés sur les deux impératifs des collectivités locales en matière de communication : le développement de la citoyenneté et d'un sentiment d'appartenance à la cité, d'une part ; la promotion d'une image positive de la ville dans un environnement fortement compétitif, d'autre part. L'atelier a été l'occasion d'une discussion très animée entre les élus d'un côté, les journalistes et les professionnels des médias de l'autre, sur la distinction à établir entre communication et propagande, écoute et dialogue avec la population et actions de mobilisation des électeurs. Il a reconnu que la communication est un échange réciproque destiné à élucider les enjeux de la gestion municipale et à éclairer le choix de tous les acteurs concernés. Elle ne doit donc pas être à sens unique. Pour être un outil de développement, la communication doit véhiculer une information claire et transparente. Pour plus d'efficacité la priorité doit être accordée à la communication de proximité, en ayant recours à tous les moyens de communication, allant des canaux informels aux moyens les plus modernes. Au terme des débats, les participants à l'atelier `'Les enjeux de la communication locale'' ont préconisé que :
? En complément aux travaux de l'atelier « les enjeux de la communication locale », lors des premières journées de la commune africaine, NUTSUGAN Kodjo Mawusi Augustin a étudié « la communication locale comme moteur de développement de la future commune de Comé' dans le cadre de son mémoire de fin de premier cycle en STID à l'ENA. En effet, nous sommes en 1998 donc quatre ans avant la reforme de l'administration territoriale qui a consacré la naissance des communes au Bénin. Il s'agit pour l'auteur de permettre aux populations de la commune de Comé d'être des citoyens capables d'amorcer le développement endogène de leur localité. Et ceci, selon lui, n'est possible que si entre élus et citoyens, il y a un flux permanent et constamment actualisé d'informations, d'échanges et de communications sur des sujets relatifs aux habitants de ladite localité et à leur mieux être. Il s'agit donc pour NUTSUGAN de doter la commune de Comé de structures viables et pérennes de communication qui devront intégrer les besoins des citoyens et les médias traditionnels populaires pour amorcer le développement consensuel, communautaire et durable de la localité. ? Dans son ouvrage `'La décentralisation entre risques et espoirs'' publié en 2006, Paul S. DEHOUMON a fait une analyse du processus de décentralisation déclenché au Bénin depuis janvier 2003. Parti de la définition de la décentralisation qui conçoit les collectivités locales comme des espaces d'un développement économique et social devant nécessairement passer par l'esprit d'initiatives, la responsabilité et la maximisation de l'utilisation des potentialités locales, l'auteur a débouché sur un des principes chers de la décentralisation qu'est la participation citoyenne. Pour lui, la participation du citoyen est le garant d'une démocratie et d'un développement politique et économique ; développement politique dans le sens de l'approfondissement de la démocratie à la base et développement économique dans le sens du renforcement de la capacité des communautés pour faire face aux problèmes de développement de manière responsable. Il n'y a donc pas de démocratie locale si le citoyen à la base ne peut jouir de sa liberté de pensée et de participation, car le processus de la décentralisation implique directement le citoyen dans la prise de décisions et dans les mécanismes de contrôle de ceux qui ont en charge la gestion des affaires de la cité. Et la non implication des citoyens de la commune entraînerait la fuite des responsabilités qui s'inscrivent en ligne droite dans la décentralisation. Parlant de la relation très froide entre populations et administration communale de la première mandature, DEHOUMON a mis en exergue les causes de cette insuffisance inhérente à la fois aux élus locaux et aux populations elles-mêmes. Il a fait remarquer que ni les responsables locaux, ni les populations n'ont été formés pour la décentralisation avant de suggérer cependant une permanente sensibilisation du citoyen apparaissant comme un monde à part, très exigeant qui réclame tant de droits, mais se souciant très peu de ses devoirs. Il faudra donc le sensibiliser, l'éduquer, le former pour qu'il ait la « conscience civique » nécessaire à l'oeuvre de reconstruction des communes. Tout ceci ne se peut, selon l'auteur, sans résorber le déficit de communication noté de la part des administrations locales. En effet, la communication, dans un système de démocratie locale, est une réorganisation des échanges au sein de la société dans le sens d'une reconnaissance de l'individu, considéré non plus comme un spectateur passif au développement, mais plutôt comme un acteur impliqué et responsabilisé. Car « lorsque le citoyen n'est pas impliqué dans la gestion municipale, il vivra deux choses : les réalisations et des rumeurs et toute initiative qui lui est étrangère provoque de sa part un rejet, ou, pour le moins, son indifférence ».C'est pourquoi il faut communiquer le pourquoi, le comment des choses avant et une décision importante, avoir des échanges privilégiés avec les groupes socio professionnels intéressés à l'exécution d'une mesure ceci par des moyens spécifiques à chaque commune. ? Michel OLOU, dans son mémoire de fin de quatrième année de Jeunesse Animation en 2001 intitulé « Contribution à la mise en oeuvre de la décentralisation pour un développement humain durable au Bénin: cas de la commune de Savè », a évalué le niveau de sensibilisation des populations sur la décentralisation dans cette commune. Il a contribué à la détermination des tendances lourdes susceptibles de bloquer la mise en oeuvre de la décentralisation dans la commune de Savè. Les résultats de ses travaux ont permis de constater que les difficultés à la mise en oeuvre de la décentralisation sont de deux ordres. Il s'agit d'abord d'une `'fausse adhésion'' des populations locales. Ces populations manifestent en effet des aspirations qui ne sont pas toujours compatibles avec la volonté des dirigeants. Tout se passe comme si la décentralisation n'est que l'affaire des cadres, des intellectuels et des partis politiques. L'adhésion des populations est à la fois `'fausse et paradoxale''. Ainsi, 58,94% des populations ne comprennent pas ce que signifie la décentralisation. Le taux et les raisons d'adhésion varient suivant des catégories socio professionnelles. Ce taux est plus élevé chez les personnes lettrées que chez les personnes analphabètes. L'auteur souligne que cela témoigne de l'inadéquation des moyens de communication et des canaux de sensibilisation utilisés. La seconde insuffisance révélée par l'auteur est le refus d'acceptation des taxes qui n'est qu'une conséquence directe de la première. En effet, les populations refusent d'accepter les taxes en raison de leur mentalité, la mentalité d'être assistées héritée de la colonisation. Elles attendent tout, soit de l'extérieur, soit de l'Etat. Pour elles, c'est l'Etat qui doit tout faire. Ceci relève de l'insuffisance de sensibilisation ou du fait que cette sensibilisation est mal effectuée . Pour accepter de payer les taxes, les populations ont besoin de comprendre et de raisonner en termes de contributions au développement. Cela suppose un contrôle sur la destination desdites taxes. Au total, selon OLOU, les problèmes qui risquent de compromettre la mise en oeuvre de la décentralisation ont pour noms : analphabétisme, sensibilisation insuffisante, non adhésion des populations, refus de paiement des impôts. C'est pourquoi l'auteur suggère une sensibilisation catégorielle en langue nationale et tout ceci implique une alphabétisation en français et en langues nationales, l'instruction, l'éducation pour une prise de conscience civique. Les institutions internationales ne se sont pas aussi désintéressées des concepts de communication et de gouvernance locale. Tel est le cas de la FAO et du PNUD qui ont oeuvré pour l'appropriation de ces concepts dans le cadre de leurs activités pour le développement. ? Dans un document intitulé « la communication pour un développement à dimension humaine », la FAO (1994) se propose de développer le concept de communication pour le développement en l'illustrant par des exemples concrets, et surtout de montrer comment les méthodes et techniques de communication peuvent servir les objectifs du développement et quelles dispositions doivent être adoptées par les décideurs et les planificateurs pour que la communication joue pleinement son rôle. Ceci permettrait aux populations d'être suffisamment sûres d'elles-mêmes pour mener à terme de nouveaux projets, d'avoir accès aux nouveaux savoirs et connaissances que requièrent ces projets et de surmonter l'obstacle de l'analphabétisme. La FAO a montré que le rôle de la communication est décisif pour promouvoir un développement qui prenne en compte la dimension humaine dans le climat de changement social qui caractérise la période actuelle. Pour elle, l'évolution du monde vers plus de démocratie, de décentralisation et l'introduction de l'économie de marché créent des conditions favorables pour que les populations deviennent les principaux acteurs du changement. Pour y parvenir, il est essentiel de susciter leur participation et leur capacité d'initiative. Elle fait remarquer que la communication a un rôle central à jouer dans ce domaine, mais que son potentiel est encore souvent sous-utilisé malgré les dénominateurs communs importants qui existent entre populations et communication. Elle suggère donc la planification et la mise en oeuvre de véritables programmes de communication au service du développement. C'est pourquoi cette institution a initié nombre d'ateliers pour promouvoir, à travers la définition de politique et stratégies, la communication pour le développement ceci, dans différents pays africains. Tel est le cas, par exemple du Burkina Faso en 2000 et du Niger en 2002.
? Le Cinquième Forum sur la Gouvernance en Afrique organisé par le PNUD en 2002 a été essentiellement consacré à l'analyse de la gouvernance locale dans la perspective de la réduction de la pauvreté dans le continent. Ce forum a réuni des dirigeants africains, des donateurs, des représentants de la société civile africaine et du secteur privé pour examiner ce sujet considéré comme de grande importance pour l'avènement d'une bonne gouvernance. En effet, selon le PNUD, plusieurs programmes de réduction de la pauvreté sont mis en oeuvre dans les pays africains, mais leur effet semble limité en raison de la participation très limitée des collectivités locales aux divers processus qui devraient permettre d'améliorer leur sort. C'est pourquoi les auteurs définissent la gouvernance locale comme étant un processus graduel qui devrait élargir les possibilités de participation en conférant un pouvoir plus grand, les ressources plus abondantes au niveau d'administration le plus proche, le plus familier et le plus facilement influencé. Ils montrent que dans un climat où existe une tradition fragile de participation des citoyens, la gouvernance locale est une première étape importante si l'on veut créer des possibilités d'interaction entre les citoyens et l'Etat. Le forum a aussi remarqué que la décentralisation s'est le plus souvent arrêtée au niveau des autorités sous-nationales ou municipales et la notion même est rarement étendue jusqu'aux institutions locales, celles de la société civile qui sont pourtant les acteurs réels de la gouvernance locale. Selon les auteurs, la décentralisation améliore la gouvernance locale mais les résultats sont encore mitigés. Ils montrent en outre qu'un système décentralisé fonctionnel, de gouvernement local revêt une importance particulière pour un bon épanouissement d'une société civile rigoureuse et de même, qu'une société civile puissante est une condition préalable de tout système de gouvernement authentique, démocratique, dynamique et décentralisé. Ils concluent que les pays représentés devraient rechercher un cadre d'action pour édifier, dans un esprit de participation, sans exclusion, l'indispensable consensus au sujet des institutions durables à mettre en place. Ces institutions devront être responsables, transparentes et attentives aux besoins des citoyens. ? Le rapport national sur le développement humain (PNUD, 2001) montre que le système politique et administratif au Bénin se caractérise par une centralisation extrême. Les différentes expériences de transfert de pouvoir à la base qui ont été initiées ont échoué pour des raisons diverses. La Conférence Nationale des Forces Vives a tracé le cadre d'une réforme profonde de l'administration territoriale incluant la décentralisation et la déconcentration. La mise en oeuvre d'une telle réforme devrait favoriser le développement régional dans le pays. Par ailleurs, ce rapport stipule que « la décentralisation est une politique et un mode de gestion qui permet de faire participer les citoyens à la base à la gestion des affaires locales. Elle est la nécessaire résultante de la démocratie et de la bonne gouvernance. La décentralisation est une réponse institutionnelle à une demande de démocratie de proximité ». Dans ce cadre, elle a pour enjeux principaux la promotion de la démocratie à la base et le développement local. Pour qu'il puisse y avoir effectivement un développement local, le rapport recommande les mesures ci-après apparaissent indispensables : - la conception et l'élaboration de programmes de développement tenant compte des besoins et des préoccupations réels des populations concernées ; - la recherche en synergie avec les populations des meilleures solutions et les moyens appropriés pour promouvoir le développement local ; - l'appropriation par les citoyens à la base des moyens légaux de contrôle de l'action des décideurs politiques. ? Dans le mémoire du séminaire de Bamako N°43 sur les relations micro-macro décentralisation, organisations locales et ONG au Mali, la FONDATION POUR LE PROGRES DE L'HOMME (1993) précise que la crise que connaît la plupart des pays africains, sous ses aspects politique, économique ou socio-culturel, s'explique essentiellement par la rupture entre l'Etat et la société civile. Les raisons de cette situation sont à rechercher dans la centralisation et la concentration du pouvoir de décision ; l'absence de volonté et de structures efficaces de communication, de concertation et d'information entre le pouvoir et la société civile. Au regard de cette situation, la décentralisation du pouvoir et la redéfinition du rôle de l'Etat et de son appareil administratif demeurent de nos jours, plus que jamais, les facteurs déterminants pour la sortie de l'impasse. Il est essentiel de détruire le mythe de l'Etat-providence « qui peut tout régler » mais aussi celui du citoyen sujet assisté qui attend tout de l'Etat et à qui on ne demande que l'obéissance. ? TONOUKOUIN, S.C. (2000), dans son mémoire de fin de cycle ENAM, UAC. , intitulé : « le rôle de la société civile dans le processus de décentralisation au Bénin : cas des ONG et des Associations Locales de Développement », a étudié dans quelle mesure la société civile à travers les associations locales de développement peut contribuer à la réussite du processus de décentralisation. Parti d'abord de l'analyse de l'administration territoriale au Bénin, il aboutit à une première conclusion selon laquelle le mode de gestion administrative en cours au Bénin depuis les indépendances n'a pas toujours conduit à la réussite des politiques de développement. La raison principale de cet échec est la centralisation des pouvoirs de décisions administratives et financières. A cela s'ajoute la non participation des populations dans la conception des plans de développement. Il a ensuite mis en exergue le processus de décentralisation engagé au Bénin depuis la Conférence des Forces Vives de la Nation. Il pense que « la décentralisation est le gage d'une authentique démocratie à la base et d'un développement endogène. En effet, elle permet la participation des populations à la gestion de leurs propres affaires et mieux, les responsabilise. C'est un processus en cours et sa réussite nécessite le concours des acteurs de la société civile notamment les confessions religieuses, les chefferies traditionnelles, les ONG et les Associations Locales de Développement ». Ces différents travaux ont eu le mérite d'avoir abordé la question de la participation communautaire aux actions du développement local et celle de la communication. Cependant, aucun d'eux n'a mis, de façon spécifique, un accent sur la communication comme étant un facteur de motivation et de participation pour prévenir ou gérer les conflits locaux. C'est cette étude que se propose ce présent travail de recherche. Mais avant, il faudrait avoir une vue claire sur certains concepts. 1.2- CLARIFICATION ET GENERALITES SUR LES CONCEPTS 1.2.1-Gouvernance locale 1.2.1.1- Définition et différents types En réalité, il n'existe pas une définition unique et standard du concept de gouvernance. Ce concept de gouvernance a été inventé par les institutions de Bretton Woods dans les années 80 et est aujourd'hui adopté par la quasi-totalité des milieux institutionnels nationaux et internationaux, gouvernementaux et non gouvernementaux. C'est une notion controversée. Le thème de gouvernance est en effet défini et entendu aujourd'hui de manière très diverse et parfois contradictoire. Cependant et malgré la multiplicité des applications du mot, il existe une dynamique commune dans l'usage de ce thème. Chez la plupart de ceux qui, au sein du secteur public comme au sein du secteur privé, emploient le thème de gouvernance, celui-ci désigne avant tout un mouvement de `'décentrement'' de la prise de décisions, avec une multiplication des lieux et des acteurs impliqués dans cette décision. Il renvoie à la mise en place de nouveaux modes de régulation plus souples, fondés sur le partenariat entre acteurs. Pour la Banque Mondiale (1999), la gouvernance recouvre les normes, traditions et institutions à travers lesquelles un pays exerce son autorité sur le bien commun. La gouvernance recouvre aussi bien la capacité du gouvernement à gérer efficacement ses ressources, à mettre en oeuvre des politiques pertinentes, que le respect des citoyens et de l'Etat pour les institutions, ainsi que l'existence d'un contrôle démocratique sur les agents chargés de l'autorité. La gouvernance telle que définie dans un manuel publié par Africare (cité par CIRD 2004), est l'exercice des pouvoirs économique, politique et administratif dans le but de gérer les affaires publiques du pays à tous les niveaux. En d'autres termes, elle est la manière dont la société s'organise pour prendre des décisions engageant toute la collectivité, résoudre les problèmes communs, mobiliser, allouer et gérer les ressources communes, trancher les différends qui surgissent. Selon le CIRD , la gouvernance est un ensemble de valeurs, d'orientations et d'institutions qui permettent à une société de gérer ses processus économiques, politiques et sociaux à tous les niveaux grâce à l'interaction entre le gouvernement, la société civile et le secteur privé. C'est un moyen qui permet à la société d'aboutir à une entente, à un accord et à une action mutuels. La gouvernance regroupe les mécanismes et processus qui font que les citoyens et les groupes comprennent leurs intérêts, oublient leurs différences et peuvent exercer leurs droits et obligations légaux. De manière constante, trois éléments sont à retrouver dans la définition du mot gouvernance: - la gouvernance est définie comme l'exercice du pouvoir ou de l'autorité dans un pays ; - l'exercice du pouvoir ou de l'autorité sous entend l'ensemble des règles, procédures, institutions et mécanismes mis en place pour règlementer la manière dont ce pouvoir ou cette autorité est exercée ; - et enfin la possibilité offerte ou non par l'ensemble de ces règles, procédures, institutions et mécanismes aux citoyens d'exprimer leurs intérêts, d'exercer leurs droits et de participer au processus de prise de décisions et à l'exercice du pouvoir. On distingue, selon Wikipédia (2007), deux grands types de gouvernance : la gouvernance d'entreprise pour le secteur privé et la gouvernance politique pour la pensée politique et administrative. En gouvernance politique on parle de gouvernance mondiale ou globale, de gouvernance locale ou gouvernance régionale en fonction des échelles de gouvernance abordées. La gouvernance concerne en particulier les sociétés par actions où les actionnaires ne doivent pas être simplement des pompes à apporter de l'agent, les institutions publiques telles que l'Etat, les collectivités locales, pour le respect des citoyens. Elle concerne également les organismes sociaux pour le respect des cotisants et bénéficiaires et les associations pour le respect des membres. Dans le cadre de l'administration territoriale, la gouvernance appelle la `'décentralisation qui est le processus par lequel l'Etat transfère certains de ses pouvoirs et de ses prérogatives à des collectivités territoriales autonomes''. La gouvernance locale apparaît donc comme « un sous produit de la gouvernance politique et de la gouvernance administrative. Elle indique la manière dont la politique est menée et dont le pouvoir est exercé au niveau local. Elle prend en compte plusieurs aspects de la vie politique et administrative tels que les institutions à la base et leur fonctionnement, les autorités locales, leurs modes d'acquisition du pouvoir (nomination ou élection), les relations entre les autorités locales et les différents acteurs locaux et nationaux » (RNDH Bénin 2000). Selon le PNUD (2007), elle est généralement comprise comme la démocratisation des processus de décisions pour la gestion d'un territoire. Elle implique l'exercice de leurs responsabilités par l'Etat et les collectivités territoriales quand elles existent, et la participation des populations, des ONG et des organisations de base au processus de prise de décisions. Elle doit contribuer de façon significative à la décentralisation démocratique, à la réduction de la pauvreté et à la gestion durable des ressources naturelles locales. Au total, la gouvernance locale doit être perçue, selon le PNUD (2007), comme « un processus permettant aux élus locaux de bien gérer les affaires publiques suivant les dispositions juridiques en vigueur et avec une certaine transparence et visibilité. De plus cette gouvernance suppose que les élus responsables de la commune doivent tout mettre en oeuvre pour la promotion de l'économie locale et un épanouissement de la vie communale ». Au niveau local tout comme au niveau national, on distingue plusieurs types de gouvernance. Pour le CIRD, il existe quatre niveaux de gouvernance à l'échelle locale : politique, administratif, économique budgétaire et financier. La gouvernance politique locale explique le processus de prise de décisions dans l'exercice d'une gestion démocratique locale ; quant à la gouvernance administrative locale, elle explique la communication locale, la gestion des services publics locaux, la gestion de l'état civil, la gestion des ressources humaines et la tutelle administrative alors que la gouvernance économique locale apporte un éclairage sur quelques démarches en matière de mobilisation des ressources internes et externes au niveau local, en matière de gestion du patrimoine foncier communal. Enfin la gouvernance budgétaire et financière locale explique les procédures de présentation du budget de la commune, l'exécution et le contrôle du budget communal. Dans le langage courant, on parle de bonne gouvernance, de mal ou mauvaise gouvernance selon que l'institution concernée est gérée suivant les règles de l'art ou non. Certains indicateurs permettent d'évaluer cette gouvernance locale. 1.2.1.2- Indicateurs de bonne gouvernance locale La bonne gouvernance locale est l'ensemble des bonnes pratiques de gestion des affaires publiques locales s'inscrivant dans le strict respect des règles et procédures en vigueur et dans l'intérêt supérieur des usagers des services publics locaux. La concrétisation d'une telle gouvernance démocratique au niveau local implique l'adoption et la mise en oeuvre de règles, procédures, institutions et mécanismes permettant aux citoyens d'exprimer leurs intérêts, d'exercer leurs droits et de participer au développement de leur localité (CIRD, 2004). Pour la Banque Mondiale, la notion de bonne gouvernance est « caractérisée par un processus de formulation de politiques organisé, ouvert et éclairé ; une administration imprégnée d'éthique professionnelle agissant pour le bien public ; la règle du droit, des processus transparents et une Société Civile participant aux affaires publiques ». Bien qu'il y ait plusieurs définitions, certaines dimensions essentielles de la bonne gouvernance sont l'objet d'un consensus généralisé : *la participation d'individus, organisés ou non (ou d'acteurs locaux disposant des moyens d'actions) dans le processus décisionnel local concernant le secteur public (cela inclut le partenariat avec tous les acteurs locaux) ; *la transparence ou partage de l'information, impliquant un comportement ouvert des procédures de décisions prises ; *l'efficacité des autorités locales dans la réalisation des objectifs de développement en faveur des pauvres ou la gestion des ressources publiques ; *l'équité ou le traitement égal et impartial de cas similaires de la part des autorités locales ; *l'obligation redditionnelle des élus et des fonctionnaires : elle est « verticale » lorsque les élus font entendre les intérêts et les priorités de leurs électeurs et tiennent informés ces derniers des affaires concernant les collectivités territoriales ; elle est «horizontale » lorsque les fonctionnaires locaux s'efforcent d'appliquer les priorités et les plans préparés par les élus locaux, qu'ils maintiendront informés ( les fonctionnaires pouvant être sanctionnés par les élus, s'ils n'exercent pas correctement leurs responsabilités) ; *la sensibilité à la dimension `genre' dans la gouvernance a pour objectif d'accroître la participation des femmes en politique. Cela signifie également renforcer la prise de conscience de la dimension `genre' et les capacités des décideurs politiques et des fonctionnaires, hommes et femmes ; fournir des services répondant aux besoins spécifiques et aux intérêts des femmes et des hommes des communautés qui nécessitent plus particulièrement un développement économique, une planification du développement et une affectation des ressources intégrant la dimension `' genre'' et susciter une prise de conscience de l'importance des droits des femmes. Une « mauvaise gouvernance », selon la Banque Mondiale (2001), est quant à elle, caractérisée par des décisions arbitraires, des administrations qui ne répondent de rien, un système judiciaire inexistant ou injuste, l'abus du pouvoir exécutif, une Société Civile désengagée de la vie publique et une corruption généralisée. Elle est de façon générale caractérisée, d'après le CIRD (2004), par : - les attitudes des fonctionnaires municipaux souvent caractérisées par l'arbitraire ; -le manque de transparence dans la gestion de l'information relative à la collectivité locale ; -l' absence d'un système de promotion des ressources humaines basées sur le mérite ; -la non participation des usagers au contrôle de la qualité des services municipaux ; - les procédures administratives bureaucratiques ; - la non participation des fonctionnaires aux décisions qui concernent la collectivité locale ; - le manque ou l'insuffisance de procédures de reddition de comptes. (CIRD, 2004). La bonne gouvernance est la condition sine qua non à un développement économique durable, caractérisé par l'équité et la justice sociale. Atteindre les objectifs de la bonne gouvernance requiert la participation active et l'engagement de toutes les sphères de la société, un plus grand partage de l'information, la responsabilisation des personnes, la transparence, l'égalité, l'intégrité et l'état de droit. 1.2.2- La participation On entend par participation, la capacité d'une personne à prendre part à une décision, à son exécution et à la jouissance de ses résultats. La participation fait donc partie des mécanismes de partage du pouvoir, compris comme la capacité de divers intérêts à atteindre ce qu'ils veulent. Pour DOSSOU (2000), elle est l'intervention du citoyen dans la prise des décisions communales et aussi son apport au processus de développement de sa commune. Or le pouvoir dépend essentiellement du contrôle de l'information et des moyens, ainsi que la confiance en soi et le savoir-faire individuel. Cela signifie que pour promouvoir la participation, il faut surtout ouvrir l'accès et le contrôle de l'information et des ressources, notamment financières, tout en renforçant, là où cela parait nécessaire, les capacités et la confiance en soi. La participation peut connaître divers degrés : * La transparence Les instances qui détiennent le pouvoir se limitent à informer et rendre compte des décisions prises, de leur processus et de leurs résultats. C'est le degré le plus faible de la participation. Les populations ne peuvent guère influencer les décisions, contribuer à l'exécution et ou profiter des résultats. *La consultation L'instance de pouvoir demande l'avis des personnes concernées et tient compte de leur réaction. La participation reste faible surtout pour ce qui est de l'exécution et des résultats. *La concertation Diverses instances de pouvoir échangent leurs avis (sur un pied d'égalité et prennent ensemble des décisions). La participation est plus importante, mais ne dépasse guère le domaine de la prise de décision. *L'implication Instauration d'une dynamique participative généralisée, au quotidien, pilotée par la collectivité locale, plus qu'une offre de participation ponctuelle proposée par une institution autour d'une problématique précise. *La collaboration En plus de la concertation au niveau de la décision, les instances se partagent également le travail. Une conception collective du projet s'établit dès le départ entre divers acteurs du territoire. Les pouvoirs publics acceptent d'entrer dans une dynamique commune de réflexion et de choix d'orientations partagées avec d'autres acteurs. Il ne s'agit plus de participer à la conception de projets ou à la décision à leur propos, mais bien de participer à leur mise en oeuvre concrète. C'est un niveau de participation plus élevé. *Le soutien L'intervention ne se fait plus que sous la forme d'un appui (contributions, conseils, aides, etc.) à une initiative qui appartient à d'autres. La participation des personnes concernées est maximale. 1.2.3- Développement local Selon le guide pour la planification du développement local élaboré par le MISD en 2003, le développement local se rapporte à un espace géographique plus élargi que l'approche communautaire de développement. C'est un processus concerté et planifié d'enrichissement économique, social et culturel d'une localité donnée. Cet enrichissement est directement lié à la création de richesse dans ladite localité, à la gestion de cette richesse et à sa répartition entre tous les acteurs de cette localité. Il s'agira aussi bien de richesse financière et économique que de richesse sociale et culturelle. Cette vision du développement local signifie d'une part que les besoins fondamentaux des habitants de la localité soient satisfaits, d'autre part que ce bien-être puisse s'améliorer et préparer un environnement de plus en plus propice à l'épanouissement des habitants et de leur descendance. Le développement local « est une démarche solidaire basée sur la complémentarité et les synergies entre les zones géographiques d'un même Etat. Il s'inscrit dans un cadre de développement global. C'est un processus dynamique qui mobilise les acteurs d'une localité autour d'un projet commun de valorisation des ressources du territoire en vue de la satisfaction des besoins des populations concernées ». Le développement local est donc une forme alternative de développement qui consiste à rechercher localement et avec le concours des populations, l'amélioration significative de leur situation. Cette démarche passe par un sentiment d'appartenance au territoire et l'émergence d'une dynamique collective démontrant la capacité d'un groupe à identifier ses ressources et à prendre en main son destin. C'est le résultat des initiatives d'une communauté qui cherche ainsi à développer de nouvelles pratiques pour améliorer son quotidien et ses perspectives d'avenir. (RNDH, Bénin 2000). 1.2.4 CommunicationCommuniquer, c'est faire savoir quelque chose à quelqu'un, faire passer quelque chose à quelqu'un, pour qu'il en prenne connaissance. C'est aussi faire partager à quelqu'un, un sentiment, un état, un savoir, une qualité. La communication est donc l'action d'établir une relation avec quelqu'un ; échange verbal, gestuel ou écrit entre deux personnes. La communication, selon Van den Ban et all (1994) est la possibilité pour un indi- vidu ou un groupe d'émettre ou de recevoir des informations d'un autre individu ou d'un groupe. C'est la relation inter humaine par laquelle des interlocuteurs peuvent se comprendre et se faire comprendre, ou s'influencer l'un l'autre. La communication est un processus dynamique au cours duquel un émetteur et un récepteur échangent et partagent des informations, des idées, des opinions, des sentiments ou des réactions. Elle peut se faire au niveau de l'une des sphères suivantes : · personne à personne (deux personnes en interaction) ou groupe (une ou plusieurs personnes s'adressent à un groupe) :c'est la communication interpersonnelle ; · organisation (dans un cadre institutionnel) : l'émetteur peut représenter l'institution du fait de sa fonction : c'est la communication institutionnelle ; · masse (les récepteurs constituent un ensemble disparate et dispersé) :C'est la communication de masse. Le processus de communication implique :
Le terme communication est couramment utilisé pour désigner les activités de presse ou de relation publique d'une société ou d'un établissement. Dans le domaine du développement, on parle de communication pour le développement de la communication participative, de communication locale résumée selon la FAO (2002) comme « l'utilisation du processus de communication, des techniques et des médias pour aider les gens à prendre conscience de leur situation et des options à leur disposition pour toute action de changement, à résoudre le conflit social et à travailler vers un consensus, à aider des gens à planifier l'action de changement et du développement durable, à aider les populations à saisir les connaissances et les qualifications en vue d'améliorer leurs conditions et celles de leur communauté et améliorer l'efficacité des établissements publics. Elle consiste en « l'utilisation de façon planifiée et organisée des techniques et des moyens de communication (médiatiques ou non médiatiques) pour promouvoir le développement, à travers un changement d'attitudes et ou de comportements, en diffusant l'information nécessaire et en suscitant la participation active et consciente de tous les acteurs y compris des bénéficiaires au processus ». Le concept de communication locale pose la question de la mise en scène des actions de l'équipe communale ou municipale. La communication locale n'est pas l'ensemble des techniques et des procédés dont disposent les acteurs politiques, le plus souvent les gouvernants pour séduire, gérer, abuser ou duper l'opinion. Elle est pour le CIRD (2004) « l'ensemble des décisions et des actions des élus locaux qui vivent et ou circulent dans un espace de proximité ». (CIRD ; 2004). La communication locale a ses caractéristiques propres et met en présence des acteurs précis. 1.2.4.1- Caractéristiques et niveaux de la communication locale 1.2.4.1.1- Caractéristiques de la communication locale Particulière par sa spécificité, puisque la citoyenneté et l'intérêt général occupent une place centrale, la communication des collectivités locales est fortement attachée à des territoires et à des institutions. Toute politique de communication dans les collectivités territoriales intègre trois paramètres qui en déterminent les cibles et en commandent les types de message : - d'abord un territoire : région, département, communauté, communes sont d'abord des aires géographiques ; - une institution représentative : conseil régional, conseil général, municipalité ; - une administration enfin composée de services conséquents. La communication locale est caractérisée donc par sa dimension spatio-temporelle (NUTSUGAN; 1998). Son champ d'action est un territoire communal clairement défini dans le temps et dans l'espace .Aussi ne peut- elle prétende élargir sa zone d'influence, eu égard à la détermination précise et concise du public touché. C'est une communication de proximité. La seconde caractéristique a trait a son style. Il s'agit : -d'une communication concrète : étant une communication de service, elle ne peut occulter les réalités locales. Il lui faut répondre aux interrogations et préoccupations des citoyens relatives à tous les secteurs de la vie communale ; - d'une communication quotidienne : l'action municipale se juge de façon journalière. Les citoyens n'y sont pas indifférents dans la mesure où elle se traduit par des modifications visibles du cadre de vie. La communication locale respecte donc le rythme d'action de la municipalité. Elle livre quotidiennement la santé morale, matérielle, financière, physique et culturelle de la municipalité ; - d'une information de proximité : ne pouvant se contenter d'expliquer l'action des élus, la communication locale doit aussi prendre en compte les aspirations des citoyens. Il lui faut donc parvenir à créer l'équilibre du dialogue entre les différents acteurs de la municipalité, c'est-à-dire la population et les élus. Et cela suppose la mise en place des moyens d'expression des citoyens et surtout de techniques fiables de dialogue. La communication locale devient alors, selon Claude NEUSCHWANDER4(*) , « l'art de diffuser une information dans des conditions telles que ceux auxquels elle s'adresse puissent y réagir ». La communication locale se caractérise aussi par la spécificité de ses « cibles ». Nous pouvons distinguer, de façon générale, deux niveaux de communication.
1.2.4.1.2- Les différents niveaux de communication 1.2.4.1.2.1- La communication interne La communication interne est celle qui concerne l'institution elle-même, ses agents et ses services (personnels) ainsi que les élus. La logique de la communication interne est de motiver les agents, par l'information, l'écoute, le travail en commun, l'esprit d'équipe ... Elle est devenue une discipline managériale entière qui implique la nécessaire mise en place d'une stratégie avec des objectifs, des cibles, des moyens et un contrôle. Elle a besoin d'être pensée et organisée. 1.2.4.1.2.2- La communication externe En dehors de sa sphère de compétence interne, le maire doit développer une politique de communication avec l'ensemble de ses partenaires tant au niveau national qu'international. La communication externe est la plus complexe, l'habitant étant tout à la fois usager, électeur, contribuable, « être social », acteur local, citoyen. La communication externe s'occupe également de la « promotion » ou « marketing territorial » qui intéresse investisseurs et touristes. Elle concerne l'attractivité et l'image du territoire et vend la collectivité à l'extérieur. Il est important de rappeler ici que, même si elle rend compte de l'activité d'une administration, et que les communes sont des relais d'informations de l'Etat, la communication locale n'est ni une communication gouvernementale, ni un système de propagande électorale dans la mesure où le contrôle du réel est en permanence exercé par les citoyens. 1.2.4.2- Types de communication et outils ou canaux Plusieurs types de communication sont développés en appui à l'approche participative. Parmi ceux-ci on peut citer la communication de masse, la communication de proximité la communication traditionnelle ou communautaire et la communication institutionnelle. 1.2.4.2.1- La communication de masse La communication de masse s'adresse à un public vaste et indifférencié. Destinée à informer, sensibiliser ou développer la communication interactive, elle fait appel aux moyens de communication de masse à l'échelle nationale, régionale et locale : radio, télévision, presse écrite, etc. Ce type de communication est surtout utilisé pour répondre à des objectifs d'information générale destinée au grand public pour véhiculer des idées, techniques ou services nouveaux. Elle permet entre autres de valoriser les expériences réussies en matière de développement local. La communication de masse n'entre à proprement parler dans le cycle de l'approche participative en tant que telle, mais elle peut y contribuer indirectement en encourageant par exemple la mobilisation des populations sur des thèmes majeurs de la gestion des communes. Elle facilite l'échange des informations et le partage des expériences entre villages et régions et offre une possibilité d'expression et de débat à l'ensemble des protagonistes concernés. On peut dire que les moyens de communication de masse accompagnent le cycle de l'approche participative. Ils permettent un effet d'accélération et de tâche d'huile grâce à leur capacité de diffusion rapide d'information et de mobilisation effective de la population sur les principaux enjeux de la décentralisation.
1.2.4.2.2- Communication de proximité La communication de proximité encore appelée communication de groupe ou communication interpersonnelle répond bien aux besoins des diverses phases et étapes du cycle de l'approche participative en ce sens qu'elle est utilisée à l'échelle des villages ou au niveau du terroir. Elle a pour objet d'accompagner et de renforcer chacune des étapes et des phases de la démarche, à travers un certain nombre d'outils d'information, d'analyse, de dialogue, de formation, de gestion ou de suivi. Ces outils et méthodes sont généralement utilisés par des agents ayant une fonction d'appui, d'animation ou d'encadrement des communautés villageoises : agents vulgarisateurs, enseignants, animateurs d'ONG ou de projets, responsables de groupements ou d'associations. Il s'agit essentiellement de supports audio-scripto-visuels : diapo langage, boites à images, album de photo villageois, vidéo, carte de village...Chacun de ces outils a une fonction précise dans la mise en oeuvre des différentes étapes de l'approche participative, selon qu'il s'agit de promouvoir un dialogue, de faciliter une analyse, de permettre l'acquisition d'un savoir ou d'une technique, d'évaluer les actions entreprises. Leur choix et leur efficacité dépendent de l'environnement économique, technique et socioculturel dans lequel ils sont employés, ainsi que des aptitudes et des qualités d'animation des encadreurs et des animateurs qui les utilisent. L'exploitation de ces outils sera d'autant plus efficace qu'ils auront été produits localement, en interaction avec les communautés villageoises, les associations et ONG et que les techniciens, vulgarisateurs et animateurs auront été formés à leur utilisation sur le terrain. 1.2.4.2.3- Communication traditionnelle ou communautaire Le plus souvent, les communautés villageoises disposent de systèmes d'outils et de réseaux traditionnels de communication. Ceux-ci sont issus de la tradition villageoise, conçus et gérés directement par les communautés pour répondre à leur besoin d'information, d'éducation, de divertissement, de débat, de gestion des conflits locaux. Les règles de la communication traditionnelle ou communautaire varient beaucoup selon le contexte historique et culturel dans lequel se situent ces communautés. Les manifestations les plus courantes de cette forme de communication sont : les assemblées villageoises, le théâtre, les chansons, les proverbes, les devinettes, les récits, les contes, les visites inter villageoises, les crieurs publics. Généralement, ce type de communication est très vivant en milieu rural et joue un rôle important dans les dynamiques villageoises. Dans une démarche participative, les communautés villageoises doivent pouvoir mobiliser leurs propres outils de communication, tout en conservant leur contrôle sur la conception et la diffusion des messages véhiculés. Elles se présentent dès lors comme des partenaires à part entière dans les processus de négociation. 1.2.4.2.4-La communication institutionnelle La communication institutionnelle joue un rôle essentiel pour assurer une action cohérente et harmoniser les différentes approches en matière de développement local. Elle favorise la régulation des flux d'informations entre les différents acteurs en présence et une meilleure coordination des approches et programmes d'activités. La communication institutionnelle s'appuie principalement sur : · des supports imprimés, avec production de rapports, notes d'information, brochures, plaquettes d'information, bulletins de liaison ; · des supports audiovisuels, notamment la vidéo institutionnelle qui permet de montrer concrètement les activités d'un projet ou de servir d'argumentation visuelle pour accompagner une requête d'assistance auprès de partenaires au développement ; · les Technologies de l'Information et de la Communication telles que l'Internet et intranet · l'organisation de réunions : réunions d'information, ateliers d'échanges, journées de réflexion, séminaires de formation. Le point sur les travaux existants sur la gouvernance locale et la compréhension uniforme des concepts définis nous permettent de dégager la problématique et de formuler l'hypothèse du travail. 1.3-Problématique et hypothèse 1.3.1- Problématique Depuis le temps colonial, le Bénin connaît une tendance fortement marquée par la centralisation des pouvoirs de décisions administratives et financières entre les mains des autorités de l'Etat central. La période d'exercice de la souveraineté nationale et plus particulièrement celle des années 60, malgré le souhait des gouvernants de rompre avec la centralisation excessive de l'ancienne administration coloniale n'ont pas connu l'application effective des lois de la décentralisation de cette époque. Dans le guide du vulgarisateur de la Mission de Décentralisation (2002), on peut comprendre que cette centralisation à outrance constitue d'une part un frein au développement de la démocratie durable et de proximité, et d'autre part un handicap majeur à la responsabilisation des collectivités locales et la libération des énergies internes dans l'organisation de la conduite de développement de l'économie communale. D'où la nécessité d'opter pour le rapprochement de l'Administration des administrés. Il a fallut attendre une recommandation de la Conférence des Forces Vives de la Nation, tenue du 19 au 28 février 1990, pour que la nécessité et l'urgence de la création des collectivités territoriales réellement décentralisées soient inscrites dans la conscience des Béninois. On assiste ainsi à la réforme de l'administration territoriale qu'il faut voir sous deux principaux angles : la décentralisation et la déconcentration. La décentralisation est fondée sur deux éléments à savoir l'auto administration des collectivités locales et l'abandon au profit de ces dernières de certaines prérogatives par le pouvoir central. Dans le contexte béninois, la décentralisation implique la transformation des anciennes sous - préfectures en communes autonomes, c'est- à- dire dotées de personnalité juridique, de l'autonomie financière et gérées par des organes élus que sont les maires et les conseillers. La déconcentration, quant à elle, consiste en un découpage des anciens départements en deux et non dotés de personnalité juridique ni de l'autonomie financière. Les pouvoirs de coordination des services déconcentrés de l'Etat sont renforcés et le préfet devient dans le département, le responsable ou l'interlocuteur de chaque membre du Gouvernement. Mais quatre ans après sa mise en vigueur, on s'avise, à travers le rapport sur les quatre années de décentralisation que celle-ci n'a pas totalement comblé les espoirs placés en elle quant à ses enjeux que sont la participation des citoyens à la gestion des affaires de leur commune, l'indépendance des citoyens vis-à-vis de l'Etat, bref l'enracinement de la démocratie à la base et le développement local. Selon DEHOUMON (2006), les élus locaux en général, et le maire en particulier n'ont pas reçu une formation en gestion municipale avant de se faire élire. Il n'y a pas une école municipale par laquelle passent les responsables locaux avant leur élection. D'où le problème de compétence parfois noté des dirigeants et des difficultés relationnelles entre les élus locaux et la société civile. La dimension locale et la dimension nationale font l'objet d'une de confusion dans l'esprit des populations, le rôle et les compétences des communes mal appréhendées et l'idée selon laquelle l'Etat doit tout faire persiste, malgré la décentralisation. Ainsi, la rage populaire, les révoltes des citoyens contre les élus locaux, la non participation des citoyens aux affaires de leur commune, les querelles internes, le vote de déviance aux maires ou la dissolution du conseil communal ou municipal sont de façon générale autant de problèmes auxquels les communes font face. A cela s'ajoute la politisation de la vie locale liée à l'existence d'une opposition post-électorale. Du coté des élus c'est le manque de transparence dans la gestion, le manque de structure de relais entre les conseils et les populations. Et le citoyen ne connait pas ses devoirs. Il pense qu'il n'a pas de devoir à accomplir dans la commune. Ceci freine inévitablement le décollage socio-économique des communes et fait dire que « la décentralisation est en panne » parce que « les élus locaux, malgré les plans de développement adoptés, maîtrisent mal la gestion de leurs localités et naviguent à vue » ADJAHO (2005) et fait penser à Paul DEHOUMON que la décentralisation se trouve «entre risques et espoirs ». Au regard de ces problèmes, et en ce qui concerne les populations locales, on pourrait penser à une résistance au changement dans la mesure où cette dernière résulte soit d'une insuffisance d'information, soit de la difficulté à s'adapter aux nouvelles conditions. Cette problématique nous amène à formuler des questions suivantes : - Peut- il y avoir véritablement décentralisation sans la communication ? - Quelles sont, au Bénin, les dispositions législatives qui contraignent l'action des gouvernements locaux en matière de participation communautaire ? - Comment la communication locale peut-elle être facteur de motivation des populations à la base afin de susciter leur adhésion aux idéaux de la commune ? - Comment peut-on améliorer la gouvernance locale à partir de la communication et de l'information ? Pour mener à bien cette recherche et répondre à ces interrogations, il est utile de partir d'une hypothèse. 1.3.2-Hypothèse Si la communication est facteur ou une condition essentielle du développement local, les obstacles au décollage socio-économique de Savè, pour la première expérience de la gestion des communes au Bénin sont liés à un déficit de communication. 1.4- Modèle théorique des dynamiques de l'action organisée de Friedberg et de la motivation de Maslow La gouvernance locale est un sous-produit de la gouvernance politique et de la gouvernance administrative : elle indique la manière dont la politique est menée et dont le pouvoir est exercé à l'échelon local. La finalité de cette réforme réside essentiellement dans l'amélioration des conditions de vie des populations à la base, le développement local. Elle nécessite de ce fait la participation active de toutes les couches de la population à la vie publique de leur commune respective et implique, par voie de conséquence, que les gouvernants locaux observent un certain nombre de dispositions légales et réglementaires en la matière. Ces dispositions légales seront abordées par Erhard Friedberg (1993) en termes de « règle » et l'autorité exercée par l'élu local en termes de « pouvoir » pour répondre à la question de la participation des citoyens au processus du développement à la base. En effet, selon Friedberg (1993) dans son ouvrage Le pouvoir et la règle, dynamiques de l'action organisées, le pouvoir et la règle sont inséparables. La règle sans pouvoir devient très vite une forme vide. Le pouvoir sans règle n'existe pas, car l'exercice du pouvoir est générateur de règles. Pouvoir et règle constituent ainsi « les deux faces du phénomène « organisation » qui est omniprésent dans l'action collective, qu'elle prenne la forme d'un mouvement diffus et spontané ou d'une multinationale formalisée et rationalisée à l'extrême. En stabilisant l'univers toujours complexe, instable et potentiellement conflictuel de l'interaction sociale, il donne durée et épaisseur aux entreprises collectives des hommes ». Pour comprendre les dynamiques de l'action organisées, Friedberg privilégie la notion de contexte d'action « à l'intérieur duquel se déploient, s'entrechoquent et s'articulent les unes aux autres une multiciplité de rationalités et d'intérêts (...) non spontanément convergents ». Il analyse l' « organisation » dans sa généralité et dans sa dynamique même comme structuration et restructuration des contextes dans lesquels se déploie l'action collective des hommes. Les interactions se cristallisent en ordres locaux contingents, provisoires et aux limites incertaines. Ces ordres locaux sont relativement autonomes par rapport aux grandes régulations politiques et culturelles d'une société et mettent en question l'homogénéité et l'unité supposée du champ social dont ils soulignent au contraire le fractionnement irréductible. Friedberg fonde donc essentiellement sa théorie sur l'ordre local défini comme « construit politique autonome qui régule les conflits et ajuste les intérêts et buts individuels et collectifs ». De même, si la communication intéresse et s'intéresse à l'individu, cela suscite en lui un sentiment d'appartenance. Elle lui permet d'être compris et de faire parti d'un groupe. La communication dans ce sens, génère la motivation et de ce fait, fait référence à la théorie de motivation développée par MASLOW. Abraham MASLOW aborde la question de participation par une théorie de motivation. La motivation, c'est « une instance d'intégration et de régulation d'une multitude de paramètres relatifs aux opportunités d'un environnement et aux sollicitations d'une situation » (Wikipédia ; 2007). C'est le mobile d'attachement ou d'action d'un individu ou d'un groupe d'individus par rapport à une situation donnée. Elle explique le pourquoi des comportements individuels ou collectifs des personnes vivant au sein d'une société. MASLOW, psychologue américain, a pu grâce à ses études établir une sorte de règles de priorités des désirs et des comportements. Pour lui, toute personne cherche à satisfaire successivement cinq sortes de besoins et cette recherche influence son comportement au quotidien tant dans la vie professionnelle que privée. La représentation de ces besoins est communément appelée « pyramide des besoins de Maslow ». Ces besoins sont :
Ici, nous considérerons les besoins susceptibles d'être satisfaits par la communication. Il s'agit des besoins sociaux ou d'appartenance et des besoins de reconnaissance ou d'estime de soi. En effet, la participation citoyenne ne saurait être possible sans une motivation préalable. Or, le citoyen de façon générale, se nourrit d'orgueil en ce sens qu'il a besoin d'être écouté, d'être utile et d'avoir de la valeur dans son milieu social. C'est bien souvent de ces considérations que naissent les conflits sociaux. D'où il est important de communiquer avec le citoyen pour lui montrer qu'il est important et qu'il a un rôle à jouer dans la commune. Il apparaît, de ce fait que la communication est un véritable facteur de motivation, donc de participation citoyenne et de développement local. Tous ces postulats posent la question de comprendre comment les élus locaux motivent ou favorisent la participation citoyenne à l'action communale à travers la l'information et la communication en vue d'un développement local effectif. Il s'agit de mettre en évidence le rôle des dirigeants et les dispositions contraignant leurs actions pour l'implication des populations bénéficiaires dans la gouvernance locale. Avant d'aborder la démarche méthodologique qui a servi de base à cette recherche, il s'avère important de présenter le cadre général de l'étude. * 4 NEUCHWANDER a été cité par NUTSUGAN Kodjo Mawusi Augustin dans son mémoire de fin de premier cycle en STID à l'ENA intitulé « la communication locale comme moteur de développement de la future commune de Comé''. |
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